Sermon
54 :
DE LA LIBRE GRÂCE
Romains
8,32 (1739)
Lui qui n'a pas épargné son propre Fils, mais qui l'a livré pour nous tous, comment ne nous donnera-t-il pas toutes choses avec lui, par grâce ? (Romains 8:32)
Combien
Dieu aime librement le monde ! Alors que nous étions encore des
pécheurs, « Christ est mort pour des impies ». Alors que
nous étions « morts par nos péché » , Dieu « n'a pas
épargné son propre Fils, mais l'a livré pour nous tous ». Il
nous « donne librement toutes choses » ! En vérité, LA
LIBRE GRÂCE est tout en tous ! La grâce ou l'amour de Dieu,
source de notre salut, est LIBRE EN TOUS et LIBRE POUR TOUS. LA
GRÂCE, DON LIBRE DE DIEU Premièrement, elle est libre EN TOUS ceux
à qui elle est donnée. Elle ne dépend pas de quelque pouvoir ou
mérite inhérent à l'homme ; non, à aucun degré, grand ou
petit. Elle ne dépend, en aucune manière, des bonnes œuvres ou de
la justice du destinataire. Elle ne dépend pas de ses efforts. Elle
ne dépend ni de son bon caractère, ni de ses bons désirs ou de ses
bonnes intentions, car tout cela provient de la libre grâce de
Dieu : comme un courant d'eau à partir de sa source ou comme
des fruits par rapport aux racines de l'arbre qui les porte. Toutes
ces bonnes dispositions sont, non pas la cause, mais les effets de la
grâce. Dieu est l'auteur de tout bien qui se trouve en l'homme et
que celui-ci peut accomplir. Ainsi la grâce est libre en tous ;
elle ne dépend en aucune façon de quelque pouvoir ou de quelque
mérite inhérent à l'homme, elle vient de Dieu seul, qui nous a
donné son Fils et, avec lui, toutes choses librement.
La grâce et
le problème de la prédestination. Mais la grâce est-elle libre POUR
TOUS aussi bien qu'EN TOUS ? A cela, certains ont répondu :
« Non, elle n'est libre que pour ceux que Dieu a ordonnés à
la vie, et ils ne constituent qu'un petit troupeau. La plus grande
partie de l'humanité est destinée, par Dieu, à la mort, et la
grâce n'est pas libre pour ceux qui la composent. Dieu les hait ;
il a par conséquent décrété, dès avant leur naissance, qu'ils
mourraient éternellement. Ce décret est absolu, parce que tel a été
son bon plaisir, sa volonté souveraine. Il s'ensuit que ces
personnes sont nées pour être détruites, corps et âme, en enfer.
Elles grandissent sous l'irrévocable malédiction de Dieu, sans
aucune possibilité de rédemption. La grâce que Dieu leur accorde
sert, en effet, non pas à prévenir, mais uniquement à accroître
leur condamnation ». Tel est le décret de la prédestination.
Mais il me semble entendre quelqu'un répliquer : « Cela
ne correspond pas à ma conception de la prédestination. Je ne crois
qu'à l'élection de la grâce, à savoir qu'avant la fondation du
monde, Dieu a élu un certain nombre d'hommes pour être justifiés,
sanctifiés et glorifiés ; ceux-ci et personne d'autre seront
sauvés. Dieu abandonne le reste des hommes à eux-mêmes. Ce reste
suit les penchants de son propre cœur -continuellement mauvais- et
n'arrête pas d'empirer ; il est en définitive justement
condamné à la destruction éternelle ». Est-ce bien tout ce
que vous mettez sous le terme de prédestination ? Réfléchissez
bien, il y a peut-être encore autre chose. Ne croyez-vous pas que
Dieu a destiné les non-élus à la condamnation ? Si oui, vous
croyez au décret complet, à la prédestination telle qu'elle vient
d'être décrite. Mais peut-être ne le pensez-vous pas.
Croyez-vous
alors que Dieu endurcisse le cœur de ceux qui périssent ?
Croyez-vous qu'il a littéralement endurci le cœur de Pharaon et
qu'il l'a élevé à son rang, ou même créé, dans le seul but de
le condamner ? Si oui, alors vous croyez tout ce qui a été dit
de la prédestination. Et il n'est pas nécessaire d'ajouter que Dieu
renforce son décret, supposé immuable et inéluctable, en
endurcissant les cœurs de ces « vases de colère » que
son décret a voué auparavant à la destruction. La prédestination
inconcevable sans la réprobation Mais vous ne croyez peut-être même
pas cela et vous n'admettez pas qu'il y ait un décret de la
réprobation. Vous ne pensez pas que Dieu a décrété la
condamnation d'un homme en l'endurcissant et en le vouant
irrésistiblement à une telle destinée. Vous vous contentez de
dire : « Dieu a éternellement décrété que, tous les
hommes étant morts par le péché, il ne dirait qu'à quelques ossements
desséchés « vivez ! » et que, par conséquent, les
uns seraient vivifiés et les autres resteraient en leur état, les
uns glorifieraient Dieu par leur salut et les autres par leur
destruction ».
N'est-ce
pas ce que vous entendez par « l'élection de grâce » ?
Si oui, laissez-moi vous poser quelques questions. Parmi ceux qui ne
sont pas élus de cette manière, certains sont-ils néanmoins
sauvés ? Ou bien cela a-t-il déjà été le cas depuis la
fondation du monde ? Est-il possible qu'un homme soit sauvé
sans être ainsi élu ? Si vous répondez « non » ,
vous en êtes au même point qu'auparavant, vous n'avez pas avancé
d'un pas. Vous croyez toujours qu'en raison d'un décret immuable et
inéluctable de Dieu, la plus grande partie de l'humanité demeure
dans la mort sans aucune possibilité de rédemption ; seul,
Dieu pourrait les sauver, mais il ne le veut pas. Vous croyez que
Dieu a décrété de manière absolue qu'il ne les sauverait pas.
Qu'est-ce que cela, sinon un décret de condamnation ? Dans les
faits, ce n'est ni plus, ni moins cela. Car si vous êtes mort et
totalement incapable de revenir à la vie par vous-même, et si Dieu
a décrété de manière absolue de vivifier tout le monde sauf vous,
il a donc décrété de manière absolue votre mort éternelle. Vous
êtes absolument destiné à la damnation.
Ainsi, tout en utilisant
des termes plus doux que certaines personnes, vous exprimez
exactement la même chose. Le décret divin d'élection de grâce,
dont vous parlez, n'est rien d'autre que ce que certains appellent
« le décret divin de la réprobation ». Utilisez le
terme qui vous plaira -élection, prétérition, prédestination ou
réprobation -, cela revient finalement au même. La signification de
tous ces mots est clairement celle-ci : par la vertu d'un décret
éternel, immuable, irrésistible de Dieu, une partie de l'humanité
est infailliblement sauvée, et le reste infailliblement damné.
Autrement dit, il est impossible que l'un des premiers soit damné ou
que l'un des derniers soit sauvé.
La grâce n'est plus exprimée
dans la prédication S'il en est ainsi, toute prédication est vaine.
Elle est sans utilité pour les élus, puisqu'ils seront
infailliblement sauvés, avec ou sans elle. Par conséquent, le but
de la prédication -sauver des âmes -ne leur sert de rien. Elle est
également sans utilité pour ceux qui ne sont pas élus, puisqu'ils
ne peuvent pas être sauvés ; avec ou sans elle, ils seront
infailliblement damnés. Par conséquent, le but de la prédication
ne leur sert de rien, non plus. Dans l'un et l'autre cas, notre
prédication est vaine, comme l'est aussi votre écoute. Il y a là
une preuve évidente que la doctrine de la prédestination n'est pas
une doctrine de Dieu, puisqu'elle annule le commandement de Dieu, et
que Dieu n'est pas divisé contre lui-même.
LA
GRÂCE ET LA SAINTETÉ DE DIEU
La
doctrine de la prédestination tend aussi à faire obstacle à la
sainteté, qui est le but que visent toutes les ordonnances de Dieu.
Je ne veux pas dire qu'aucun de ses partisans ne soit saint (car Dieu
fait preuve d'une tendre compassion envers ceux qui sont
inextricablement empêtrés dans toutes sortes d'erreurs), mais
j'entends par là que la doctrine elle-même -à savoir que chaque
homme est, de toute éternité, soit élu, soit non-élu,
c'est-à-dire inévitablement sauvé ou inévitablement damné -a une
tendance manifeste à s'opposer à la sainteté en général. Cette
doctrine évacue, en effet, les principales motivations pour
rechercher la sainteté -proposées si souvent dans les Écritures -,
telles que l'espoir d'une récompense future et la crainte du
châtiment, l'espoir d'aller au ciel et la crainte de l'enfer. Celui
qui croit que son sort est déjà décidé -qu'il soit au nombre de
ceux qui sont condamnés aux peines éternelles ou de ceux qui sont
appelés à la vie éternelle -n'est pas motivé à combattre pour la
vie ; il serait déraisonnable pour lui de le faire s'il pense
qu'il est inéluctablement destiné à la vie ou à la mort.
Vous
direz sans doute : « Mais il ne sait pas s'il est destiné
à la vie ou à la mort ». Et alors ? Quelle importance
cela a-t-il ? Si une personne malade sait qu'elle va, quoi
qu'elle fasse, soit mourir, soit guérir, même si elle ignore
laquelle de ces deux issues lui est réservée, elle renoncera à
prendre des médicaments, car le faire serait déraisonnable. Elle
pourra seulement dire (et j'ai déjà entendu des personnes atteintes
dans leur santé physique, ou spirituellement, s'exprimer ainsi :
« Si je suis destinée à vivre, je vivrai, sinon je mourrai ;
je n'ai donc pas à m'en préoccuper ». C'est ainsi que cette
doctrine donne tendance directe et générale à détourner les gens
de la sainteté, et aussi à empêcher les hommes impies de la
rechercher ou d'y atteindre.
La
prédestination démobilise... Cette doctrine conduit aussi à
détruire plusieurs aspects particuliers de la sainteté, tels que la
douceur et l'amour -j'entends par là l'amour de nos ennemis- des
méchants et des ingrats. Je ne veux pas dire qu'aucun de ses
partisans n'a de la douceur et de l'amour (car la miséricorde de
Dieu est aussi grande que sa puissance) ; mais cette doctrine tend
naturellement à susciter, ou à accroître, l'aigreur et
l'impatience du caractère, ce qui est tout à fait contraire à la
bonté du Christ. Ces défauts sont spécialement visibles chez les
partisans de cette doctrine quand on s'oppose à leurs principes. De
plus, cette doctrine inspire naturellement du mépris ou de la
froideur envers ceux que nous supposons être bannis par Dieu.... et
n'encourage pas à aimer « Mais, direz-vous, je ne considère
personne en particulier comme un réprouvé ». Vous voulez dire
que vous ne le feriez pas si vous pouviez vous en empêcher ;
mais vous ne pouvez pas vous empêcher parfois d'appliquer les
principes généraux de votre doctrine à des individus en
particulier, ou alors l'ennemi des âmes le fera pour vous. Vous
savez bien qu'il l'a déjà fait souvent, mais vous avez rejeté
cette pensée avec effroi. C'est vrai, vous avez fait aussi vite que
possible ; mais cela n'a-t-il pas, en même temps, aigri et
excité votre esprit ? Vous savez bien qu'alors ce n'était pas
un esprit d'amour que vous manifestiez envers ce pauvre pécheur, que
vous soupçonniez ou suspectiez d'être l'objet de la haine de Dieu.
LA
PRÉDESTINATION DÉTRUIT LA PAIX
Cette
doctrine contribue à détruire les consolations de la religion, le
bonheur chrétien. Cela est évident pour tous ceux qui se croient
réprouvés ou qui craignent simplement de l'être. Toutes les
grandes et précieuses promesses sont perdues pour eux. Elles ne leur
apportent aucune lueur de consolation, puisqu'ils ne sont pas les
élus de Dieu ; elles ne les concernent donc pas le moins du
monde. Ceci constitue un sérieux obstacle à leur découverte d'un
peu de consolation ou de bonheur, même dans cette religion dont les
chemins sont sensés être « des chemins agréables et des
sentiers de paix ». L'assurance vient de l'Esprit Et vous qui
vous croyez élus de Dieu, où est votre bonheur ? J'entends non
une notion, une croyance spéculative ou une simple idée, mais le
sentiment d'avoir Dieu présent dans votre cœur par le Saint-Esprit,
l'Esprit de Dieu qui témoigne à votre esprit que vous êtes un
enfant de Dieu. En d'autres termes, « la pleine assurance de la
foi » est le véritable fondement de la joie chrétienne. Cela
implique la pleine assurance que tous vos péchés passés sont
pardonnés et que vous êtes maintenant un enfant de Dieu.
Mais cela
n'implique pas nécessairement la pleine assurance de notre
persévérance future. Je ne dis pas qu'elle n'y est jamais jointe,
mais cela n'est pas automatique. Bien des personnes ont une assurance
présente, mais pas future. Il apparaît que la doctrine de la
prédestination entrave le témoignage de l'Esprit. C'est le cas, non
seulement pour ceux qui, se croyant réprouvés, repoussent ce
témoignage, mais aussi pour ceux qui ont goûté au don parfait,
l'ont ensuite perdu et sont retombés dans les doutes, la crainte et
les ténèbres, des ténèbres horribles, quasiment palpables !
Je vous le demande, à vous les tenants de cette doctrine, dites-moi
si, entre Dieu et votre propre cœur, vous n'êtes pas souvent
assaillis par des doutes ou des craintes concernant votre élection
ou votre persévérance ? Si vous me rétorquez : « Qui
n'en a pas ? » , je répondrai que très peu de partisans
de cette doctrine en ont, à la différence de beaucoup, de vraiment
beaucoup de ceux qui n'y croient pas sur toute la surface de la
terre.
Beaucoup de ceux qui savent et ressentent qu'ils sont en
Christ aujourd'hui et ne « se soucient pas du lendemain »
, qui « se réfugient en lui » par la foi heure après
heure, ou plutôt moment après moment, beaucoup de ceux-Ià
jouissent du témoignage ininterrompu de l'Esprit, de la lumière
permanente de sa face, depuis qu'ils ont cru pour la première fois
-il y a de cela des mois ou des années jusqu'à ce jour. La foi ne
s'enracine pas dans la connaissance de l'élection L'assurance de la
foi de ces derniers exclut tout doute et toute crainte. Elle exclut
toutes les sortes de doutes et de craintes concernant leur
persévérance future, bien qu'il ne s 'agisse pas, à proprement
parler, d'une assurance relative au futur, comme nous l'avons dit,
mais seulement d'une assurance pour maintenant. Et cette assurance
n'a pas besoin de se fonder sur une croyance spéculative, selon
laquelle celui qui a été ordonné à la vie doit vivre, car elle se
façonne d'heure en heure par la puissante main de Dieu, « par
le Saint-Esprit qui leur est donné ». Par conséquent, la
doctrine de la prédestination n'est pas de Dieu, car elle tend à
entraver, voire à détruire, l'œuvre du Saint-Esprit, dont
découlent les principales consolations de la religion, la joie
chrétienne. Mais poursuivons : y a-t-il pensée plus
inconfortable que de savoir que des milliers et des millions d'hommes
ont été inéluctablement condamnés aux flammes éternelles, sans
avoir commis aucune offense ou faute préalable ? Quelle pensée
inconfortable pour ceux qui ont revêtu Christ et qui, ayant des
entrailles de miséricorde, de bonté et de compassion, pourraient
même « souhaiter être maudits à la place de leurs frères »
!
LA
PRÉDESTINATION DÉCOURAGE LES ŒUVRES
Cette
détestable doctrine de la prédestination conduit à détruire notre
zèle pour les bonnes œuvres.
Et
ceci, premièrement, parce qu'elle aune tendance naturelle (selon ce
que nous avons déjà fait remarquer) à détruire notre amour pour
la plus grande partie de l'humanité, à savoir les méchants et les
impies. Car tout ce qui réduit notre amour réduit aussi notre désir
de leur faire du bien.
Deuxièmement,
elle anéantit la plus forte raison qui soit d'accomplir des actes de
charité, tels que nourrir les affamés, vêtir ceux qui sont nus...,
à savoir l'espoir de sauver leur âme de la mort. Car à quoi
sert-il de soulager les besoins temporels de ceux qui sont en train
de tomber dans le feu éternel ? « Eh bien, courez,
arrachez-Ies comme des tisons du feu ! » Mais vous
supposez que c'est impossible. Vous dites qu'ils y ont été destinés
de toute éternité, avant même d'avoir rien fait de bien ou de mal.
Vous croyez que c'est la volonté de Dieu qu'ils meurent ; or
« qui peut résister à sa volonté ? » Mais vous
dites que vous ne savez pas s'ils sont élus ou pas. Et alors ?
Si vous saviez qu'ils sont l'un ou l'autre -élus ou non-élus tout
votre travail serait inutile et vain. Dans les deux cas, vos
conseils, vos réprimandes ou vos exhortations seraient aussi
inutiles que notre prédication. Tout cela sans aucune utilité pour
les élus puisqu'ils sont infailliblement sauvés, et pour les
non-élus puisqu'ils sont infailliblement damnés. Ainsi, si vous
êtes conséquents avec vos principes, ne vous mettez pas en peine de
leur salut. Ces principes tendent directement à détruire votre zèle
pour les bonnes œuvres, pour toutes les bonnes œuvres, et
particulièrement pour la plus grande de toutes : sauver les
âmes de la mort.
LA
PRÉDESTINATION EST CONTRE L'ENSEMBLE DE LA RÉVÉLATION
La
doctrine de la prédestination ne tend pas seulement à détruire la
sainteté et la joie chrétienne, ainsi que le désir d'accomplir des
bonnes œuvres, elle pousse aussi, de façon directe et manifeste, à
ruiner toute la révélation chrétienne. Le point que les plus
avisés des incroyants modernes cherchent, avec le plus
d'acharnement, à prouver est que la révélation chrétienne n'est
pas nécessaire. Ils savent bien qu'une fois cela démontré, la
conclusion évidente et indéniable sera : « Si elle n'est
pas nécessaire, elle n'est pas vraie non plus ». Et vous, vous
renoncez à ce point fondamental : le décret éternel et
immuable de Dieu sous-entend, en effet, qu'une partie de l'humanité
doit être sauvée, même sans l'existence de la révélation
chrétienne, et que l'autre partie doit être condamnée en dépit de
cette révélation ! Que pourrait désirer de plus un païen ?
Vous lui fournissez tout ce qu'il demande. En rendant ainsi
l’Évangile inutile pour toutes sortes de personnes, vous trahissez
l'ensemble de la cause chrétienne. « Oh ! N'allez pas le
dire à Gath et ne le publiez pas dans les places d'Askalon, de peur
que les fils et les filles des Philistins ne s'en réjouissent et que
les fils des incirconcis n'en triomphent ! »
Contradictions. Comme la doctrine de la prédestination tend directement et
manifestement à ruiner toute la révélation chrétienne, elle
aboutit à la faire se contredire elle-même. Elle est, en effet,
basée sur une interprétation de certains textes (qu'il y en ait peu
ou beaucoup, qu'importe !), qui contredit nettement tous les
autres, et même tout le contenu et la portée des Écritures. En
voici un exemple. Les tenants de cette doctrine interprètent le
verset biblique « J'ai aimé Jacob et j'ai haï Ésaü » ,
comme impliquant que Dieu a littéralement haï Ésaü et tous les
réprouvés de toute éternité. Est-il possible d'être plus
nettement en contradiction avec, non seulement tout le contenu et la
portée des Écritures, mais encore avec tous les textes particuliers
qui déclarent expressément que « Dieu est amour » ?
Autre exemple. Ils déduisent du texte « Je ferai miséricorde
à qui je ferai miséricorde » (Romains 9 : 15) que Dieu n'est
miséricordieux que pour quelques-uns seulement, les élus, et qu'il
n'aura pitié que de ceux-ci, contrairement à ce qui est dit dans
les Écritures, à savoir que « le Seigneur aime tous les hommes
et sa miséricorde s'étend à toutes ses œuvres » (Psaume 145 :
9). Et encore, ils déduisent de textes tels que « cela ne
dépend ni de celui qui veut, ni de celui qui court, mais de Dieu qui
fait miséricorde » , que Dieu ne fait miséricorde qu'à ceux
qu'il a en vue depuis l'éternité. Mais n'est-ce pas contester avec
Dieu ? Ils contredisent tous les oracles de Dieu selon lesquels
« Dieu ne fait point acception de personnes » (Actes 10 :
34), « il n'y a point d'acception de personnes devant lui »
(Romains 2 : 2). Autre exemple. Ils déduisent du texte « quoique
les enfants ne fussent pas encore nés et qu'ils n'eussent fait ni
bien, ni mal — afin que le dessein d'élection subsistât, sans
dépendre des œuvres, mais de celui qui appelle — il fut dit à
Rebecca l'aîné sera assujetti au plus jeune » , que notre
prédestination, ou notre élection, ne dépend en aucune manière de
la prescience de Dieu. Or, toutes les Écritures contredisent
nettement cette idée, particulièrement les passages suivants :
« élus selon la prescience de Dieu » (1 Pierre : 2) et
« ceux qu'il a connus d'avance, il les a aussi prédestinés »
(Romains 8 : 29). Et encore « Le même Seigneur est riche en
miséricorde pour tous ceux qui l'invoquent » (Romains 10 :
12). Mais vous, vous dites : « Non, il ne l'est que pour
ceux pour qui le Christ est mort. Et cela ne concerne pas tous les
gens, mais seulement un petit nombre que Dieu a choisi dans le
monde ; il n'est pas mort pour tous, mais seulement pour ceux
qui ont été « élus en lui avant la fondation du monde »
(Éphésiens 1 : 4). Tout le contenu du Nouveau Testament contredit
également votre interprétation de ces passages, en particulier les
textes suivants : « Ne détruis pas avec un aliment celui
pour qui Christ est mort » (Romains 14 : 15), preuve évidente
que le Christ n'est pas mort uniquement pour ceux qui sont sauvés,
mais qu'il l'est aussi pour ceux qui périssent. Il est « le
Sauveur du monde » (Jean 4 : 42), « l'Agneau de Dieu
qui ôte le péché du monde » (Jean 1 : 29), « Il
est la propitiation non seulement de nos péchés, mais aussi de ceux
du monde entier » (1 Jean 2 : 2). Lui, le Dieu vivant « est
le Sauveur de tous les hommes » (1 Timothée 4 : 10),
« Il
s'est donné en rançon pour tous » (1 Timothée 2 : 6), « Il
a goûté la mort pour chaque homme » (Hébreux 2 : 19).
Pourquoi tous ne sont pas sauvés ? Si vous demandez « pourquoi
tous les hommes ne sont-ils pas sauvés ? » , toute la Loi
et le témoignage répondent ainsi. Premièrement, ce n'est ni à
cause de quelque décret de Dieu, ni à cause du plaisir que lui
causerait leur mort : « Je suis vivant, dit le Seigneur,
je ne prends pas plaisir à la mort de celui qui meurt » (Ézéchiel 3 : 32) ; quelle que soit la cause de leur perdition, ce ne peut
être la volonté de Dieu, car les oracles de Dieu sont véridiques
lorsqu'ils affirment : « Il ne veut pas qu'aucun périsse,
mais il veut que tous parviennent à la repentance » (2 Pierre 3 :
9), « Il désire que tous les hommes soient sauvés ».
Deuxièmement, la Bible explique pourquoi tous les hommes ne sont pas
sauvés. Le Seigneur dit expressément : « Vous ne voulez
pas venir à moi pour avoir la vie » (Jean 5 : 40). « La
puissance du Seigneur est là pour les guérir » , mais ils ne
veulent pas être guéris. Ils ne sont pas sauvés, parce qu' ils ne
veulent pas être sauvés. « Ils rejettent le dessein qui est
un dessein miséricordieux de Dieu » , comme l'avaient déjà
fait leurs pères au cou roide. Ils sont par conséquent sans
excuses, car Dieu aimerait qu'ils soient sauvés, mais eux ils ne le
veulent pas. C'est leur condamnation : « Combien de fois
ai-je voulu vous rassembler et vous ne l'avez pas voulu ! »
(Matthieu 23 : 37).
LA
PRÉDESTINATION EST CONTRE L'HONNEUR DE DIEU
Mais
cela n'est pas tout. Cette doctrine de la prédestination comporte
tant de blasphèmes que je répugne à en parler... mais I'honneur de
notre Dieu de grâce et la cause de sa vérité ne doivent pas
souffrir de mon silence. Aussi, pour la cause de Dieu et avec le
désir sincère de glorifier son grand Nom, je vais mentionner
quelques-uns des blasphèmes horribles contenus dans cette horrible
doctrine. Tout d'abord, je dois avertir chacun de ceux qui
m'écoutent, et qui devront en répondre au dernier jour, de ne pas
m'accuser de blasphèmes (comme certains l'ont fait) parce que je
mentionne ceux des autres. Plus vous êtes affligés par ceux qui
blasphèment ainsi, plus vous devez veiller à « affermir votre
amour à leur égard ». Que le souhait de votre cœur et votre
prière continuelle à Dieu soit : « Père, pardonne-leur,
car ils ne savent pas ce qu'ils font ! » La sincérité
divine est mise en question. Il faut, tout d'abord, noter que cette
doctrine représente notre Seigneur béni, « Jésus-Christ le
juste, le Fils unique du Père, plein de grâce et de vérité »
, comme un hypocrite, un trompeur qui abuse les gens, un homme
dépourvu de toute sincérité, car il est indéniable qu'il
s'exprime toujours comme s'il voulait que tous les hommes soient
sauvés. Aussi dire qu'il ne le voulait pas équivaut-il à faire de
lui un hypocrite et un dissimulateur. Il est indéniable que les
gracieuses paroles qui sont sorties de sa bouche sont remplies
d'invitations à tous les pécheurs. C'est pourquoi affirmer qu'il
n'avait pas l'intention de sauver tous les pécheurs revient à
donner de lui l'image de quelqu'un qui a grossièrement trompé les
gens. Impossible de nier qu'il dit : « Venez à moi, vous
tous qui êtes fatigués et chargés ». Ainsi, vous qui croyez
à la prédestination, vous dites que Jésus appelle ceux qui ne
peuvent pas venir, ceux dont il sait qu'ils sont incapables de venir
à lui, ceux qu'il peut mais ne veut pas faire venir à lui. Est-il
possible de décrire un manque de sincérité plus grand que
celui-là ? Vous représentez Jésus comme se moquant de ses
créatures impuissantes en leur offrant ce qu'il n'a pas l'intention
de leur donner. Vous le décrivez comme disant une chose et en
pensant une autre, comme éprouvant un amour qu'il n'a pas. Vous
faites de « celui dans la bouche duquel il n'y avait pas de
fraude » un être plein de tromperies et dépourvu de toute
sincérité, spécialement quand s'approchant de la ville, il pleura
sur elle en disant : « Jérusalem, Jérusalem, toi qui
tues les prophètes et qui lapides ceux qui te sont envoyés, combien
de fois ai-je voulu rassembler tes enfants... et tu ne l'as pas
voulu ». Mais si vous dites qu'ils voulaient, mais que lui ne
voulait pas, vous représentez Jésus pleurant des larmes de
crocodile sur la proie qu'il a lui-même vouée à la destruction !
Dieu serait injuste Un tel blasphème devrait alerter les chrétiens !
Mais il y a plus : la doctrine de la prédestination, en effet,
traite le Père de la même façon que le Fils. Elle détruit d'un
coup tous ses attributs. Elle renverse, à la fois, sa justice, sa
miséricorde et sa vérité. Oui ! Elle représente le Dieu très
saint comme étant pire que le diable, tout à la fois plus cruel et
plus injuste. Plus faux, parce que le diable, menteur comme il est,
n'a jamais dit qu'il voulait sauver tous les hommes. Plus injuste,
parce que le diable ne peut pas, même s'il le voulait, être
coupable d'une injustice aussi grande que celle qui est attribuée à
Dieu : condamner des millions d'âmes au feu éternel préparé
pour le diable et ses anges -pour avoir persévéré dans le péché,
alors qu'elles ne pouvaient pas faire autrement sans la grâce que
Dieu ne voulait pas leur accorder. Et plus cruel : tout esprit
malheureux qui « cherche le repos et ne le trouve pas est, à
cause de sa propre misère, incité à induire les autres en
tentation. Dieu demeure dans un lieu élevé et saint ; aussi
supposer que, de sa propre initiative, volontairement et par pur
plaisir, Dieu, dans sa béatitude, voue ses créatures, avec ou sans
leur consentement, à un malheur sans fin, revient-il à lui imputer
une cruauté dont il serait impossible de taxer le grand ennemi de
Dieu et des hommes. C'est faire le Dieu très haut (que celui qui a
des oreilles entende !) plus cruel, plus faux et plus injuste
que le diable ! Transformation de la nature divine Tel est le
problème clairement contenu dans l'horrible décret de la
prédestination ! Je n'en démordrai pas. Je suis prêt à en
discuter avec quiconque défend cette doctrine. Vous faites Dieu pire
que le diable : plus faux plus cruel, plus injuste. Et vous
dites pouvoir prouver cela par les Écritures. Chiche ! Que
pouvez-vous prouver par les Écritures ! Que Dieu est pire que le
diable ? lmpossible ! Quoi que puissent prouver les
Écritures, elles ne prouveront jamais cela ; une telle chose ne
peut pas être scripturairement vraie. Si vous me demandez « Que
faut-il alors comprendre ? » et que je réponde que je ne
sais pas, vous n'êtes pas plus avancés. Il y a, en effet, beaucoup
de passages bibliques dont ni vous, ni moi, ne comprendrons le
véritable sens avant que la mort ne soit engloutie dans la victoire.
Je pense qu'il est préférable de dire que ces passages n'ont pas de
sens, plutôt que de leur donner celui que vous leur donnez. Ils ne
peuvent pas vouloir dire, quel que soit leur sens, que le Dieu de
vérité est un menteur. Quelle que soit leur signification, ils ne
peuvent pas vouloir dire que le Juge de toute la terre est injuste.
Aucun texte ne peut signifier que Dieu n'est pas amour, que sa
miséricorde ne s'étend pas à toutes ses œuvres. En d'autres
termes, aucun passage biblique, quoi qu'il puisse prouver, ne peut
prouver la prédestination. Tel est le blasphème qui fait que, tout
en aimant ses partisans, je hais la doctrine de la prédestination,
selon laquelle — à supposer qu'on s'y arrête un instant — on
pourrait dire à notre adversaire le diable : « Espèce de
fou, pourquoi t'épuises-tu à rugir çà et là ? Ta quête des
âmes est aussi inutile et vaine que notre prédication. Ne vois-tu
pas que Dieu t'a pris le travail des mains et qu'il l'accomplit avec
beaucoup plus d'efficacité ? Toi, avec toutes tes principautés
et tes pouvoirs, tu ne peux pas nous empêcher de résister à tes
assauts ; mais, lui, il peut irrésistiblement détruire à la
fois le corps et l'âme en enfer ! Toi, tu ne peux que séduire,
alors que, lui, par son décret immuable d'abandonner des milliers
d'âmes à la mort, il les contraint à persévérer dans le péché
jusqu'à leur saut final dans les flammes éternelles. Toi, tu tentes
les gens ; lui, il nous contraint à la damnation, car nous ne
pouvons pas résister à sa volonté. Fou que tu es, pourquoi
continues-tu à chercher qui tu pourras dévorer ? Ne vois-tu
pas que Dieu est le lion dévorant, le destructeur des âmes, le
meurtrier des hommes ? » Moloch a seulement fait passer
des enfants par le feu, et ce feu a été vite éteint ; une
fois le corps corruptible consumé, c'est la fin du tourment. Mais
Dieu, dit-on, par son décret éternel fixé avant qu'ils n'aient agi
en bien ou en mal, fait passer les petits enfants ainsi que les
parents par le feu de l'enfer, « le feu qui ne s'éteindra
jamais » ; et le corps qui y est jeté incorruptible et
immortel se consumera sans fin, parce que c'est le bon plaisir de
Dieu, « la fumée s'élevait continuellement ». (...)
Oui,
il y a un décret depuis la fondation du monde. Quel est ce décret ?
« Je mettrai devant les fils des hommes la vie et la mort, la
bénédiction et la malédiction. Et l'âme qui choisit la vie vivra,
de même que celle qui choisit la mort mourra ». Ce décret,
selon lequel « Dieu a prédestiné ceux qu'il a connus
d'avance » , existe effectivement de toute éternité. Ce
décret, selon lequel tous ceux qui acceptent que Christ les vivifie
sont « élus selon la prescience de Dieu » , tient bon
maintenant, comme la lune et les fidèles témoins dans le ciel. Et
quand le ciel et la terre passeront, il ne passera pas, car il est
aussi immuable et éternel que l'être de Dieu qui l'a donné. Ce
décret contient le plus fort encouragement à abonder en bonnes
œuvres et en tout ce qui est saint ; il est un torrent de joie
et de félicité pour notre consolation sans fin. Il est digne de
Dieu et s'accorde en tous points avec les perfections de sa nature.
Il nous donne la vision la plus noble de sa justice, de sa
miséricorde et de sa vérité. Il est en accord avec tout le
contenu, et toutes les parties, de la révélation chrétienne. Moïse
et tous les prophètes lui rendent témoignage, de même que notre
Seigneur béni et tous les apôtres. Ainsi Moïse dit, au nom du
Seigneur : « J'appelle en ce jour les cieux et la terre à
déposer contre vous que j'ai placé devant vous la vie et la mort,
la bénédiction et la malédiction ; choisis par conséquent la
vie, pour que toi et ta semence viviez ». Et (pour citer au
moins un des prophètes) Ézéchiel dit : « L'âme qui
pèche mourra : le fils ne portera pas éternellement l'iniquité
du père. La justice du juste sera sur lui, et la méchanceté du
méchant sera sur lui » (Ézéchiel 18 : 20). Et notre Seigneur
béni dit. « Si quelqu'un a soif, qu'il vienne et qu'il
boive ! » (Jean 7 : 37). Et Paul, le grand apôtre,
dit : « Dieu ordonne à tous les hommes en tous lieux de
se repentir » (Actes 17 : 30) ; « tous les hommes en
tous lieux » , cela signifie chaque homme à chaque endroit,
sans exception de place ou de personne. Et saint Jacques dit :
« Si quelqu'un de vous manque de sagesse, qu'il la demande à
Dieu, qui donne à tous les hommes libéralement et sans reproches,
et elle lui sera accordée » (Jacques 1 : 5). Et saint Pierre
dit : « Le Seigneur ne veut pas qu'aucun périsse, mais
que tous parviennent à la repentance » (2 Pierre 3 : 9). Et
saint Jean dit : « Si un homme a péché, nous avons un
avocat auprès du Père ; il est la propitiation de nos péchés,
et non seulement des nôtres, mais de ceux du monde entier ».
(1Jean 2 : 1-2).
Ecoutez,
vous qui oubliez Dieu ! Vous ne pouvez pas lui faire porter la
responsabilité de votre mort ! « Ai-je un quelconque
plaisir à ce que le méchant meure ? » dit le Seigneur
(Ezechiel 18 : 23 et suivants). Repentez-vous et détournez-vous de
toutes vos transgressions ; ainsi l'iniquité ne sera pas votre
ruine. Jetez loin de vous toutes vos transgressions, car pourquoi
mourrais-tu, maison d'Israël ? Je ne prends pas plaisir à la
mort de celui qui meurt, dit le Seigneur. Convertissez-vous donc et
vivez ! » « Je suis vivant ! dit le Seigneur
Dieu, je ne prends pas plaisir à la mort du méchant. Revenez,
revenez de vos mauvaises voies. Pourquoi devriez-vous mourir, maison
d'Israël ? » (Ézéchiel 33 : 11).