dimanche 22 mars 2015

(7) SERMONS CHOISIS Charles Spurgeon

LA RESPONSABILITÉ DE L'HOMME

Si je n'étais pas venu, et que je ne leur eusse pas parlé, ils n'auraient point de péché ; mais, maintenant, ils n'ont point d'excuse de leur péché (Jean 15:22).

        Le péché par excellence de la nation juive, celui qui mit le comble à la mesure de ses iniquités, ce fut, sans contredit, la réjection de Jésus-Christ comme Messie. La venue du Sauveur avait été clairement annoncée par les prophètes aussi les vrais Israélites qui attendaient l'accomplissement des oracles divins, comme Siméon et Anne la prophétesse, n'eurent pas plus tôt contemplé le petit enfant Jésus, qu'ils reconnurent en lui la consolation d'Israël et se réjouirent d'avoir vu le salut de Dieu.
        Mais parce que Jésus-Christ ne répondit point à l'attente de la génération perverse à laquelle il fut envoyé, parce qu'il ne vint point environné de pompe et revêtu de magnificence, parce qu'il ne fut entouré ni du prestige d'un prince ni des honneurs d'un roi de la terre, les Juifs refusèrent de le recevoir. Il monta comme un rejeton devant lui, et comme une racine qui sort d'une terre sèche ; il fut méprisé et on n'en fit aucun cas (Esaïe 53:2,3).
     Mais là ne s'arrêta point le péché des Juifs. Non contents de nier le caractère messianique de Jésus, ils lui vouèrent une haine implacable ; altérés de son sang, ils le pourchassèrent pendant toute sa vie ; et leur malice diabolique ne fut pleinement assouvie que lorsque, assis au pied de la croix, ils purent suivre du regard, avec une joie féroce, les dernières convulsions et la lente agonie de leur Messie crucifié. Et bien qu'au-dessus de la croix on lût ces mots remarquables : « Jésus de Nazareth, le Roi des Juifs », ils ne voulurent jamais reconnaître comme leur roi le Fils éternel de Dieu ; c'est pourquoi aussi ils le crucifièrent, car s'ils l'eussent connu, dit saint Paul, ils n'auraient jamais crucifié le Seigneur de gloire (1Co 2:8).
      Peut-être vais-je vous surprendre, mes chers auditeurs, en vous disant que le péché des Juifs est journellement répété par les Gentils. Ce que les premiers ont fait une fois, un très grand nombre des seconds le font chaque jour. N'y a-t-il pas, en effet, dans le monde ; n'y a-t-il pas, même parmi ceux qui écoutent en cet instant ma voix, une foule d'âmes immortelles qui oublient, qui méconnaissent le Messie ?
       Peut-être ne prenez-vous pas la peine de le rejeter ouvertement ; puisque vous vivez dans ce que l'on appelle un pays chrétien, vous croiriez-vous déshonorer en blasphémant son nom. Peut-être même êtes-vous attachés à la saine doctrine, et admettez-vous que Jésus est à la fois Fils de Dieu et fils de Marie ; mais c'est là tout. Vous ne tenez aucun compte de ses droits ; vous lui refusez l'honneur qui lui est dû ; vous semblez le juger indigne de votre confiance. Il n'est point votre Rédempteur ; vous ne soupirez point après son second avènement, et vous n'espérez point être sauvés par son sang.
        Bien plus, comme les Juifs, vous êtes les meurtriers de Christ ; car ne savez-vous pas qu'en tant que vous méprisez son Evangile, vous crucifiez de nouveau le Fils de Dieu et le livrez à l'ignominie ? Oui, chaque fois que vous entendez la prédication de la Parole et que vous la laissez écouler ; chaque fois que votre conscience est atteinte et que vous étouffez sa voix ; chaque fois que vous tremblez à l'ouïe des menaces de Dieu, mais que vous vous empressez de dire avec Félix : Va-t-en pour cette fois ; et quand j'en aurai le loisir, je te rappellerai ; - chaque fois, dis-je, que vous agissez ainsi, souvenez-vous, ô pécheurs, que vous prenez en quelque sorte le marteau et le clou pour déchirer de nouveau la main meurtrie de mon Sauveur et que vous rouvrez ses plaies sanglantes !
      Ou bien encore, chaque fois que vous outragez Christ dans la personne d'un de ses membres ; chaque fois que vous insultez ses ministres ; que vous entravez l'oeuvre de ses serviteurs ; que vous faites tort à l’Évangile par votre mauvais exemple, ou que, par vos railleries, vous détournez une âme de la recherche de la vérité ; - chaque fois, dis-je, que vous commettez de telles choses, vous trempez, autant qu'il dépend de vous, dans cette grande iniquité, dans ce forfait sans égal qui a attiré sur Israël la malédiction divine, et en punition duquel il a été condamné, lui, le peuple élu, à errer sur la surface de la terre, jusqu'au jour de la glorieuse réapparition du Messie : de ce Messie qui a paru une première fois pour souffrir, mais qui reviendra pour régner ; de ce Prince de gloire que dans ce moment même Juifs et Gentils attendent avec une égale anxiété, et qu'Israël doit reconnaître enfin comme son Roi.
         Je me propose aujourd'hui, mes chers auditeurs, d'établir un parallèle entre vous et la nation juive ; ou plutôt, je voudrais, avec l'aide de Dieu, vous faire sentir, en appliquant mon texte à vos consciences, que si vous rejetez Christ, vous commettez le même péché et vous encourez la même malédiction que le peuple déicide (?). Si je n'étais pas venu et que je ne lui eusse pas parlé, dit Jésus- Christ, ils n'auraient point de péché ; mais maintenant, ils n'ont point d'excuse de leur péché.
       Et d'abord nous observerons que CHRIST VIENT A VOUS ET VOUS PARLE, tout aussi réellement qu'aux anciens Juifs PAR L'ORGANE DE SES MINISTRES. Nous établirons, en second lieu, que LA RÉJECTION DU MESSAGE DE CHRIST AGGRAVE LA CULPABILITÉ DE L'HOMME, et ensuite que LA PRÉDICATION DE L’EVANGILE LAISSE ABSOLUMENT SANS EXCUSE. Enfin, nous avertirons brièvement, mais solennellement, tous ceux qui méprisent le Sauveur, DE LA CONDAMNATION EFFROYABLE QUI LES ATTEND.


I 
       CHRIST VIENT A VOUS ET PARLE A VOS CONSCIENCES PAR L'ORGANE DE SES MINISTRES : tel est, ai-je dit, le premier point sur lequel je désire appeler votre attention.
    Lorsque, dans le désert, le peuple d'Israël méprisa Moïse et murmura contre lui, le serviteur de Dieu répondit avec douceur : Vos murmures ne sont pas contre nous, mais ils sont contre l’Éternel (Exode 16:8). Ce langage, mes frères, tout véritable ministre de Christ est en droit de le tenir. Oui, nous appuyant sur l'Ecriture, nous pouvons dire en toute vérité : « Qui nous rejette, ne nous rejette pas nous mêmes, mais il rejette Celui qui nous a envoyés ; et qui méprise notre parole, méprise non point, la parole d'un homme, mais celle du Dieu tout-puissant. » Sans doute le ministre de l’Évangile n'est qu'un homme, qu'un homme faible et pécheur ; il n'est investi d'aucun pouvoir sacerdotal ; mais Dieu l'a choisi et l'a revêtu des dons du Saint-Esprit, afin qu'il annonce le salut à ses frères ; et lorsqu'il prêche la vérité avec la vertu qui lui vient d'en haut, le Seigneur ne dédaigne pas de l'appeler son ambassadeur ; il le place comme une sentinelle, sur les murs de Sion ; il lui donne charge d'âmes, et il déclare que celui-là se rend coupable de rébellion contre le Très-Haut qui foule aux pieds le fidèle message de son fidèle serviteur.
        Si je parle de mon propre chef, peu importe assurément que je sois écouté ou non ; mais si je parle en ma qualité d'ambassadeur de Christ, prenez garde de ne pas mépriser ma voix. Si je viens à vous avec les raisonnements de la sagesse humaine, libre à chacun d'accepter ou de rejeter mes enseignements ; mais si par la puissance de l'Esprit, je vous annonce la Parole qui est descendue du ciel, vous suppliant instamment de la recevoir, souvenez-vous que si vous la rejetez, c'est aux risques et périls de vos âmes, car, encore une fois, ce n'est pas nous qui parlons, mais c'est l'Esprit de l'Eternel notre Dieu qui parle par nous.
         Oh ! qu'il est sacré, qu'il est solennel le ministère évangélique, considéré ce point de vue ! Fils des hommes, mettez-vous bien dans l'esprit que nous ne sommes autre chose que l'écho de la voix de Dieu. Tout ministre de l'Evangile qui a véritablement reçu vocation d'en haut ne fait que transmettre à ses frères le message qu'il a reçu de son Maître ; et n'a garde de rien changer à ce message, car il a constamment sous les yeux cette grave exhortation de l'Apôtre : Prends garde à toi et à l'instruction ; persévère dans ces choses car en faisant cela, tu te sauveras toi-même et ceux qui t'écoutent (1Ti 4:16), tandis que derrière lui une voix menaçante murmure à son oreille : Si tu n'avertis pas le méchant, il mourra dans son iniquité, mais je redemanderai son sang de ta main (Ez 33:8) ! Oh ! que ne puis-je, en ce moment, tracer devant vous en caractères de feu, ce cri d'un ancien prophète : Terre, terre, terre écoute la parole de l’Éternel ! car en vérité je vous le dis, aussi longtemps que nous annonçons l’Évangile, pur de tout alliage, c'est comme si Dieu vous exhortait par notre ministère, et la Parole que nous prêchons; a autant de droits votre respect, que si l’Éternel lui-même vous parlait du sommet de Sinaï, au lieu de vous parler par l'humble intermédiaire de ses indignes serviteurs.
      Et maintenant recueillons-nous devant cette sérieuse vérité, et que chacun de nous se pose cette question : « N'ai-je pas offensé Dieu de la manière la plus criante en négligeant les moyens de grâce qu'il a mis à ma portée ? » J'en appelle à votre conscience : que de fois ne vous êtes-vous pas tenus éloignés de la maison de Dieu, quand Dieu lui-même y faisait entendre sa voix ! Qu'eussiez-vous pensé, je vous le demande, des enfants d'Israël, si, méprisant la convocation de Jéhovah, ils eussent erré dans le désert le jour du sabbat, au lieu d'aller au pied de la sainte montagne écouter les ordres de l’Éternel ! Et pourtant c'est là ce que vous avez fait. Vous avez recherché vos aises et vos plaisirs, et négligé la maison de prières ; vous avez écouté le chant de sirène de la tentation, et fermé l'oreille à la voix du Très-Haut ; vous avez erré dans les sentiers tortueux du monde, au lieu de vous rendre à l'invitation de l'Éternel votre Dieu qui vous appelait dans son sanctuaire. Et alors même que vous y êtes venus, que de fois y avez-vous apporté un œil distrait, une oreille inattentive ! Vous avez entendu comme si vous n'entendiez point. L'oreille de votre corps a bien saisi quelques sons ; mais l'homme intérieur qui est en vous, a été sourd.
         Semblables à l'aspic qui bouche son oreille et qui n'écoute point la voix du charmeur le plus expert en charmes (Ps 58:5,6), vous n'avez tenu compte ni nos prières ni de nos menaces. Bien plus : l'Esprit de Dieu, j'ose l'affirmer, a parlé une fois ou l'autre à vos consciences. N'est-il pas vrai qu'il y a eu un jour au moins dans votre vie où, assis peut-être à cette même place sur ce même banc, vous tremblâtes en écoutant l'Évangile ? Vos genoux s'entre-choquaient vous étiez éperdus, et tandis qu'un puissant Boanerges tonnait contre le pécheur, lui criant de la part du Maître : Prépare-toi à la rencontre de ton Dieu, - considère tes voies, mets ordre à ta maison, car tu t'en vas mourir, - il vous semblait entendre la voix, non d'un homme, mais d'un ange. Et pourtant (ô inconcevable folie !) à peine eûtes-vous franchi seuil de la maison de Dieu, que déjà vous aviez tout oublié. Vous avez éteint l'Esprit, et contrit l'Esprit de grâce ; vous avez imposé silence aux murmures de votre conscience ; vous avez étouffé dès le berceau ces prières naissantes qui commençaient à se former dans vos coeurs, et noyé impitoyablement dans les distractions du monde ces jeunes et saintes aspirations qui venaient d'éclore dans vos âmes.
       Vous avez repoussé loin de vous tout ce qui est bon, tout ce qui est sacré. Vous êtes retournés à vos mauvaises voies; vous avez de nouveau erré sur les montagnes du péché et dans les vallées die l'iniquité. Et en agissant ainsi, savez-vous ce que vous avez fait ? VOUS AVEZ MÉPRISÉ DIEU !..... Mépriser Dieu ! Oh ! si le Saint-Esprit daignait faire sentir à chacun de vous tout ce qu'il y a de terrible dans ces deux mots, du sein de cette grande assemblée s'élèverait en ce moment une voix de deuil et de lamentation, et ce lieu de culte serait changé en un lieu de pleurs et de grands gémissements !
      Oh ! mes frères, - avoir méprisé Dieu, - foulé aux pieds le Fils de l'homme, - traité légèrement sa croix, - rejeté les tendres invitations de son amour et les avertissements de sa grâce : quelle énormité ! quel crime !... Avez-vous jamais réfléchi sérieusement à ces choses ? Vous avez cru peut- être qu'en rejetant la prédication de l'Evangile vous ne méprisiez qu'un homme : pensez désormais, je vous en conjure, que c'est Christ que vous méprisez. Car Christ vous a parlé ; il vous a parlé, j'ose le dire, par la bouche même de son faible serviteur qui est maintenant devant vous. Ah ! oui, Dieu m'est témoin que souvent Christ à pleuré avec ces yeux et parlé avec ces lèvres !
       Dieu m'est témoin que je n'ai recherché qu'une seule chose parmi vous : le salut de vos âmes. Tantôt, par des paroles rudes et sévères, j'ai voulu vous contraindre à chercher un refuge au pied de la croix ; tantôt, par des accents émouvants et tendres, j'ai essayé de vous gagner à mon Rédempteur. Etait-ce moi qui vous parlais alors ? Non ! C'était Jésus qui vous parlait par moi. C'était lui qui vous criait : « Regardez à moi, vous tous les bouts de la terre, et soyez sauvés. » C'était lui qui vous disait : « Venez à moi, vous tous qui êtes travaillés et chargés, et je vous soulagerai ! C'était lui qui vous avertissait que vous péririez si vous négligiez un si grand salut.
        Si donc vous avez ouï ces appels, et que vous les ayez oubliés si vous avez reçu ces invitations, et que vous les ayez refusées, souvenez-vous que vous avez méprisé, non pas nous, mais notre Maître ; malheur à vous, oui, vous dis-je, malheur à vous à moins que vous ne vous repentiez, car c'est une chose terrible que de mépriser la voix d celui qui nous parle des cieux (Heb 12:25) !

II
     Mais passons au second point de notre sujet qui est celui-ci : LA RÉJECTION DE L'EVANGILE AGGRAVE LA CULPABILITÉ DE L'HOMME.
      Et d'abord, un mot d'explication est nécessaire, sans quoi ma pensée pourrait être mal comprise.
      Il est des personnes qui, étant allées dans la maison de Dieu, ont été tellement saisies par le sentiment de leurs péchés, qu'elles n'osent y retourner ; et Satan a même fini par leur persuader qu'il est de leur devoir de fuir toute occasion d'entendre l'Evangile, « car, leur dit-il, plus vous l'entendrez, plus sévère sera votre condamnation ». C'est une erreur, mes amis. Non, vous ne risquez pas d'aggraver votre condamnation par le fait seul que vous allez dans la maison de Dieu; vous l'aggraveriez bien plutôt en n'y allant pas, car en vous tenant éloignés, vous rejetez deux fois le Seigneur : vous le rejetez matériellement aussi bien que spirituellement.
     Non seulement, comme le paralytique qui était couché auprès du réservoir de Béthesda, vous n'entrez point dans les eaux de la grâce, mais encore vous ne voulez point, comme lui, vous tenir auprès du réservoir ; en d'autres termes, vous refusez de vous placer sous l'influence de la Parole de Dieu ; c'est pourquoi, vous amassez sur votre tête une double mesure de responsabilité. Je le répète : la simple audition de l'Evangile n'aggrave pas le péché de l'homme ; ce qui l'aggrave, c'est la réjection consciente et volontaire de cet Évangile.
      Ainsi, tout homme qui, après avoir écouté la bonne nouvelle du salut, s'en va pour rire et se moquer de ce qu'il vient d'entendre, oui bien qui, après avoir reçu de sérieuses impressions, permet aux inquiétudes et aux plaisirs de lia vie d'étouffer la bonne semence dans son coeur, un tel homme accroît sa culpabilité de la manière la plus effrayante.
        Mais comment le fait-il ? De deux manières. D'abord, il se rend coupable d'un nouveau péché, d'un péché qu'il n'avait jamais, commis auparavant. Qu'on m'amène un Hottentot, un habitant de Kamschatka, un sauvage enfant des désert auquel n'est jamais parvenu l’Évangile de Jésus Il se peut que cet homme ait commis tous les forfaits qui figurent dans le catalogue du crime ; toutefois je connais un péché dont il est innocent: il n'a jamais rejeté la Parole de Christ puisqu'il n'a jamais eu l'occasion de la connaître. Mais quant à vous, mes amis, qui êtes placés sous l'influence directe de l'Evangile, vous avez par cela même une nouvelle occasion d'offenser Dieu, et chaque fois que vous avez repoussé ses appels, sachez-le bien, vous avez ajouté un péché de plus à la liste déjà si longue de vos transgressions.
        - Je le sais, de telle paroles sonnent mal aux oreilles de bien des gens. Souvent, j'ai été repris par certains hommes qui se sont détournés de la vérité, parce que j'enseigne que la simple réjection de Christ constitue un péché. Mais que m'importent les attaques des ennemis de l’Évangile ? Que m'importent leurs injures ? J'ai pour moi la Parole de Dieu, et cela me suffit. Oui, la responsabilité de l'homme est clairement enseignée dans la Bible, et je ne pense pas qu'un ministre de Christ puisse être net du sang des âmes confiées à ses soins, s'il ne rend de fréquents et solennels témoignages à cette vérité capitale.
        Quand l'Esprit de vérité sera venu, il convaincra le monde de péché, de justice et de jugement : de péché, parce qu'ils n'ont pas cru en moi. -Or, voici la cause de la condamnation ; c'est que la lumière est venue dans le monde, et que les hommes ont mieux aimé les ténèbres que la lumière. - Celui qui ne croit point est déjà condamné, parce qu'il n'a pas cru au nom du Fils unique de Dieu. - Si je n'eusse pas fait parmi eux les œuvres qu'aucun autre n'a faites, ils n'auraient point de péché ; mais maintenant, ils les ont vues, et ils ont haï et moi et mon Père. - Malheur à toi, Chorazin ! malheur à toi, Bethsaïda ! Car si les miracles qui ont été faits au milieu de vous avaient été faits dans Tyr et dans Sidon, il y a longtemps qu'elles se seraient repenties en prenant le sac et la cendre ; c'est pourquoi Tyr et Sidon seront traitées moins rigoureusement au jour du jugement que vous.
-Il nous faut faire une plus grande attention aux choses que nous avons entendues, de peur que nous les laissions écouler ; car si la parole qui a été annoncée par les anges a eu son effet, et si toute transgression et toute désobéissance a reçu une juste punition, comment échapperons-nous si nous négligeons un si grand salut ?
         - Si quelqu'un avait violé la loi de Moïse, il mourait sans miséricorde sur le témoignage de deux ou de trois personnes ; combien plus grand croyez-vous que doive être le supplice dont sera jugé digne celui qui aura foulé aux pieds le Fils de Dieu, et tenu pour une chose profane le sang de l'alliance, par lequel il avait été sanctifié, et qui aura outragé l'Esprit de la grâce ? (1) Jean 16:8, 9 Jean 3:19,18. Jean 15:24 Luc 10:13,14 Heb 2:1,3 Heb 10:28, 29.
- Vous le voyez, mes frères, je cite textuellement l'Ecriture ; or, si ces divers passages ne signifient point que la réjection de Christ est un péché, et le péché qui, par-dessus tous les autres, rend l'âme humaine passible de la perdition éternelle ; si, dis-je, ils n'ont point ce sens, j'affirme qu'ils n'en ont absolument aucun, mais qu'ils sont des lettres mortes dans la Parole de Dieu. Assurément l'adultère, le meurtre, le larcin, le mensonge, tous ces péchés sont mortels et damnables ; néanmoins, la repentance peut les effacer tous par les mérites du sang de Jésus. Mais une âme qui rejette Christ est perdue sans espoir. Le meurtrier, le voyeur, l'intempérant peuvent entrer dans le royaume des cieux, si, haïssant sincèrement leurs iniquités, ils saisissent la croix de Christ; mais tout homme qui ferme son coeur au Seigneur Jésus, qu'il soit un grand pécheur ou un homme vertueux selon le monde; sera perdu sans ressource.
        Et considérez, je vous prie, mes chers auditeurs, combien est odieux le péché que vous commettez, en repoussant Christ. On peut dire avec vérité qu'il contient dans ses entrailles tous les autres péchés. Et d'abord, j'y vois le meurtre car si un criminel sur l'échafaud refuse, la grâce qui lui est offerte, ne devient-il pas son propre meurtrier ? J'y vois l'orgueil : car si vous vous détournez du Sauveur, c'est votre coeur orgueilleux qui en est cause. J'y vois la rébellion : car vous faites la guerre à Dieu en méprisant son Fils. J'y vois le crime de haute trahison : car vous vous insurgez contre votre Souverain légitime, vous prenez les armes contre Celui qui a été sacré Roi de toute la terre.
        Oh ! je vous en supplie, réfléchissez à votre, conduite. Quoi ! le Seigneur Jésus est descendu du ciel ; il a été cloué sur un bois infâme ; là, il est mort au milieu d'indicibles angoisses, et du haut de cette croix maudite, il abaisse sur vous un regard d'amour, en vous disant : « Venez à moi vous tous qui êtes travaillés et chargés ! » Et vous osez de mépriser encore, ! et vous refusez d'écouter ses appels ! et vous passez à côté de lui avec indifférence !... Ah ! n'infligez-vous pas ainsi à mon Sauveur la plus cruelle des blessures ? et ne faites-vous pas preuve de l'ingratitude la plus insigne, la plus révoltante, la plus diabolique en vous détournant de Celui qui a donné sa vie pour vous?.....
        Oh ! si vous vouliez être sage ! si vous vouliez comprendre ceci ! si vous considériez votre dernière fin.
         Mais il y a plus. En rejetant Christ, non seulement vous ajoutez un nouveau péché à tous ceux que vous avez déjà commis, mais encore vous rendez ceux-ci beaucoup plus graves. Il ne peut pas faire le mal à aussi bon marché qu'un autre, l'homme qui a été placé sous l'influence de l’Évangile. Lorsque des personnes sans lumière et sans intelligence spirituelle offensent Dieu, leur conscience, ne les reprend pas toujours ; aussi leur culpabilité n'est-elle pas aussi grande que celle de l'âme qui pèche étant éclairée.
As-tu volé avant d'entendre la Parole de Dieu ? tu as mal fait ; mais vole après avoir entendu cette Parole, et tu seras dix fois plus coupable. As-tu menti avant de connaître l’Évangile ? tout menteur aura sa part dans l'étang de feu ; mais continue à mentir après l'avoir connu, et il semble en vérité que pour toi la fournaise de la géhenne doive être chauffée sept fois autant que de coutume. Celui! qui pèche étant dans l'ignorance est à quelque degré excusable ; mais relui qui pèche contre la lumière et la connaissance, pèche dans les circonstances les plus aggravantes.
          Rejetez Christ, et, du même coup, vous noircissez tous vos autres péchés. Le mépris de Christ est comme la lime à l'aide de laquelle pécheur révolté aiguise la hache, le couteau, l'épée dont il se sert pour combattre le Très-Haut. Mieux vous connaissez Christ, plus votre culpabilité grandit et augmente si vous le rejetez.
          Telle est, mes frères, la vérité de Dieu. Vérité solennelle, vérité saisissante, et que les ministres de l’Évangile ne devraient jamais annoncer sans être émus jusqu'au fond de l'âme. Oh ! qu'il est sérieux surtout d'avoir un tel message à vous faire entendre, à vous, mes chers auditeurs, qui de tous les hommes vivant sous le soleil, êtes peut-être ceux auxquels les paroles de mon texte s'appliquent avec le plus de force ! Oui, vous dis-je, s'il est des âmes dans le monde auxquelles il sera beaucoup redemandé, ce sont les vôtres.
Sans doute, vous n'êtes pas les seuls qui jouissiez de grands privilèges , vous n'êtes pas les seuls qui ayez entendu prêcher l’Évangile avec pureté et avec force ; mais, j'en atteste le Dieu vivant, ce Dieu qui au dernier jour jugera entre vous et moi, il n'est personne sur la terre qui ait plus reçu que vous.
            De toutes les puissances de mon être, je me suis efforcé d'être fidèle envers vos âmes. Jamais je n'ai cherché, en employant des mots sonores ou un langage technique, à rehausser ma propre sagesse. Je vous ai parlé clairement, nettement, familièrement ; et si parfois, il est échappé de mes lèvres un mot qui ne fût pas à la portée de tous, c'est à mon insu ou par mégarde. Je vous ai annoncé l'Évangile dans toute sa simplicité. Jamais, je puis le dire, je ne vous ai parlé avec froideur. Comme les anciens prophètes, chaque fois que j'ai monté les degrés de la chaire, j'aurais pu m'écrier : La charge de l'Éternel, la charge de l'Éternel est sur moi ! car mon coeur était gros de parler, mon âme bouillonnait au-dedans de moi, et alors même que j'ai prêché avec faiblesse, si mes paroles étaient rudes et mal choisies, du moins puis-je me rendre le témoignage qu'elle partaient de l'abondance de mon cœur. J'ai répandu devant vous mon âme tout entière. J'ai essayé de tous les moyens pour vous rendre attentifs aux choses de Dieu ; et si en bouleversant le ciel et la terre, j'avais cru trouver un mot qui pût vous gagner à mon Sauveur, Dieu sait que j'aurais tenté de le faire. Je vous ai annoncé tout le conseil de mon Maître ; je vous ai repris sans ménagements ; je n'ai point fait usage de mots couverts. J'ai déclaré à ce siècle ses forfaits, et à chacun de vous ses iniquités.
         Je n'ai eu garde de mitiger la Bible pour plaire au goûts charnels des hommes, Quand Dieu a dit : Damner, j'ai dit : Damner ; je n'ai point remplacé ce mot qui froisse les oreilles délicates de notre génération, par celui plus doux de condamner. J'ai appelé les choses par leur vrai nom ; je n'ai ni voilé ni déguisé la vérité, mai à toute conscience humaine, je me suis efforcé, comme en présence de Dieu, d'exposer le salut avec hardiesse, avec puissance, avec ferveur et avec zèle. Je n'ai eu honte, ni d'élever bien haut les glorieuses doctrines de la grâce (quoique en cela faisant je me sois attiré les injures des ennemis de la croix), ni de prêcher comme aujourd'hui la solennelle responsabilité de d'homme (quoiqu'une autre caste de gens m'ait mis à l'index pour cette raison). Et Dieu sait, mes chers auditeurs, que si je parle de cette manière, ce n'est point pour me glorifier ; c'est uniquement afin de vous faire rentrer en vous-mêmes, et afin de vous prouver que vous êtes les plus coupables des hommes si vous rejetez l’Évangile. Car, encore une fois, cet Evangile, vous le connaissez ; il vous est annoncé en cet instant même ; si donc vous persistez à mépriser Christ, souvenez-vous que vous amassez sur vos têtes une mesure toujours plus grande de la colère de Dieu.

III
Et maintenant développons notre troisième proposition.
       LA PRÉDICATION DE L'EVANGILE DE CHRIST, avons-nous dit, ENLÈVE TOUTE EXCUSE A CEUX QUI L'ONT ENTENDU ET REJETÉ. Hélas, combien toute excuse est vaine devant l’œil de Celui qui sonde toutes, choses !
         Dans le grand jour de la tempête de la colère de Dieu, malheur à l'âme qui n'aura pour se mettre à couvert que le chétif abri d'une excuse ! Néanmoins, je le reconnais, une excuse vaut mieux que rien. Et de même qu'un homme qui n'aurait ni asile ni refuge s'estimerait bien heureux; par la pluie et le froid, de pouvoir du moins s'envelopper dans un manteau, de même toute conscience qui se sent coupable est bien aise, à défaut de mieux de rassembler autour d'elle quelques misérable lambeaux d'excuses. Mais maintenant, dit Jésus Christ, - maintenant que je suis venu à vous et que je vous ai parlé, - maintenant vous n'avez plus d'excuse de vos péchés.
        Voyageur égaré, tu devras affronter la tempête sans le vêtement qui te protégeait. Ame coupable, tu devras paraître devant ton Juge sans le plus léger voile pour atténuer tes iniquités : dépouillée; découverte, démasquée, tu es laissée absolument sans excuse.
Pour mieux vous faire saisir cette importante vérité, je vais passer en revue quelques-unes des excuses derrière lesquelles d'homme se plaît à se retrancher, et nous verrons ce qu'elle deviennent en présence de la fidèle prédication de l’Évangile.
      Et d'abord, l'excuse qui se retrouve le plus souvent dans la bouche du pécheur, est celle-ci « Quand j'ai commis telle ou telle iniquité, j'ignorais que je faisais mal. » Il est possible que le païen ait quelque droit d'alléguer cette excuse, mais quant à vous, mes amis, je soutiens que vous n'en avez aucun. Par sa loi sainte, Dieu vous a fait solennellement connaître ce qui est anal. Vous savez les dix commandements ; vous avez lu aussi le commentaire qu'en a fait notre Maître ; vous n'ignorez pas qu'il a étendu et spiritualisé la loi morale, et qu'il nous a appris, par exemple, que le septième commandement : Tu ne commettras point adultère, défend non seulement tout acte impur, mais toute pensée ou tout regard de convoitise.
         Si le farouche Indien commet un meurtre, il est, jusqu'à un certain point, excusable. Je ne doute pas que sa conscience ne lui crie qu'il fait mal de répandre le sang de son frère, mais ses livres sacrés lui enseignent qu'il fait bien ; c'est pourquoi il a une ombre d'excuse. De même. lorsque le mahométan se livre sans contrainte à la volupté, je ne doute pas qu'une voix intérieure ne le condamne ; toutefois, puisque son Coran légitime l'impureté, on peut admettre en sa faveur quelques circonstances atténuantes. Mais vous qui faites profession de croire à la Bible, vous qui la possédez dans vos maisons et qui n'avez qu'à sortir dans vos rues pour entendre annoncer l’Évangile, quelle excuse semblable, je vous le demande, pourriez-vous faire valoir ? Ne péchez-vous pas avec la loi divine affichée, en quelque sorte, sur la muraille devant vos yeux ? Ne violez-vous pas volontairement les ordres bien connus de Celui qui a parlé des cieux et qui vous a parlé directement à vous-mêmes ?
       « Mais, dira un autre, lorsque j'ai péché je ne savais pas à quel sévère châtiment je m'exposais. » Vous ne le saviez pas, mon cher auditeur ! Et à qui la faute, je vous prie ? L’Évangile ne vous a-t-il pas averti ? Jésus-Christ ne vous a-t-il pas dit et redit que ceux qui ne veulent pas le recevoir seront jetés dans les ténèbres de dehors, dans le lieu des pleurs et de grincements de dents ? Ne vous a-t-il pas déclaré expressément que les méchants s'en iront aux peines éternelles, et les justes à la vie éternelle ? Ne vous a-t-il point parlé lui-même et du ver qui ne meurt point et du feu qui ne s'éteint point ? Et vos pasteurs (si du moins ils sont fidèles), ne vous ont-ils pas fait entendre à leur tour ces redoutables vérités ?
Ah c'est en vain que vous essaieriez de le nier vous avez péché, sachant très bien que vous perdiez votre âme. Vous avez bu la coupe empoisonnée, sachant très bien que la mort éternelle était au fond ; vous l'avez vidée jusqu'à la lie, sachant très bien que dans chaque goutte de cette coupe brûlait déjà le feu de l'enfer ! Vous avez détruit votre âme les yeux ouverts. Comme un boeuf qui s'en va à la boucherie, et comme un fou qui s'en va aux ceps pour être châtié (Pro 7:22) ; vous avez marché tout droit à votre ruine ; comme l'agneau qui lèche le couteau de l'égorgeur, vous avez caressé les instruments de votre perte ; et vous avez fait tout cela, je le répète, sciemment, volontairement, avec une pleine connaissance de cause : c'est pourquoi vous êtes sans excuse.
         « Il est vrai que je connais la loi de Dieu, dira-t-on encore ; il est vrai aussi qu'en faisant le mal je savais à quoi je m'exposais ; mais j'ignore ce que je dois faire pour être sauvé. »
         Y a-t-il ici quelqu'un qui ait l'audace de présenter une telle excuse ? En vérité, il faudrait qu'il eût un front d'airain ! Depuis dix, vingt, trente, quarante ou cinquante années, la plupart d'entre vous entendent la prédication de l’Évangile. Ces mots : « Crois et vis ! crois et vis ! » retentissent chaque jour à vos oreilles. Comment donc oseriez-vous dire : « Nous ne connaissons point le chemin du salut ? » Dès l'âge le plus tendre vous avez été placés sous l'influence de la vérité. Le doux nom de Jésus est un des premiers mots que votre langue enfantine ait appris à bégayer. Vous avez sucé pour ainsi dire le lait du saint Évangile avec le lait de votre mère. Et pourtant, malgré tous ces privilèges, malgré toutes ces faveurs, vous n'avez jamais cherché Christ.
      Oh ! prenez garde, je vous en conjure. « Connaissance est puissance », dit un proverbe humain, et, appliqué aux chose de la terre, cela peut être vrai ; mais pour ce qui est des choses de Dieu, connaissant est malheur, MALHEUR, MALHEUR, à moins que la foi ne vienne s'y joindre. Oui, vous dis-je malheur à l'homme qui connaît le bien et qui ne le fait pas, car la colère de Dieu tombera de tout son poids sur son âme !
Mais il me semble entendre une autre excuse « Je conviens, dit un de mes auditeurs, que l’Évangile m'a été annoncé ; mais ce qui m'a empêché de le prendre au sérieux, c'est que je n'ai jamais vu personne le mettre en pratique.
        Je conviens, à mon tour, que dans la bouche de quelques-uns cette excuse peut avoir une certaine valeur ; mais pour le plus grand nombre j'affirme qu'elle est fausse et sans fondement Ah ! homme du monde, tu prends plaisir à critiquer les misères des chrétiens. Tu dis : « Ils sont en contradiction avec leurs principes ; leur vie n'est pas telle qu'elle devait être » ; - et en ceci, hélas ! tu ne dis que trop vrai...
       Cependant, interrogé ton passé, cherche dans tes souvenirs et dis-moi si tu n'as jamais connu un seul chrétien dont tu aies été forcé d'admirer le caractère. C'était peut-être ta mère, la mère qui te donna le jour. Ah ! n'est-il pas vrai, qu'il y a toujours eu dans la douce figure, dans la sainte vie de celle qui t'enfanta, un problème que tu n'as jamais pu résoudre, un écueil devant lequel ton incrédulité a été contrainte à s'arrêter ? Peut-être, plus d'une fois dans ta vie, as-tu été sur le point de rejeter entièrement l'Evangile ; mais dans ces moments de tentation, l'image vénérée de ta mère s'est dressée devant toi, et tu as été vaincu ! Ne te rappelles-tu pas en remontant jusqu'à l'aube de tes souvenirs, ne te rappelles-tu pas que souvent en ouvrant tes yeux au matin, tu rencontrais le regard humide de ta mère attaché sur toi avec amour, et tu l'entendais murmurer tout bas : « Dieu te bénisse, mon enfant ! Puisses-tu vivre pour aimer ton Sauveur. » Ton père te reprenait souvent ; elle, presque jamais ; mais par des paroles pleines de tendresse, elle cherchait à toucher ton coeur.
          Souviens-toi de la petite chambre haute où elle se retirait avec toi, et entourant ton cou de ses bras, te consacrait à Dieu et priait le Seigneur Jésus de te sauver dès les jours de ta jeunesse. Souviens-toi de la lettre qu'elle glissa dans ta main, de la Bible dans laquelle elle écrivit ton nom, lorsque tu t'éloignas du toit paternel. Souviens-toi surtout de son affliction , lorsqu'elle apprit que tu commençais à te plonger dans les plaisirs du monde, et du douloureux regard qu'elle attacha sur toi la dernière fois que tu la quittas. « Mon fils », te dit-elle en étreignant ta main, « si tu marches dans les voies de l'iniquité, tu feras descendre mes cheveux blancs avec douleur au sépulcre. » Elle mourut sans que tu la revisses, mais sur son lit de mort elle pensa à toi, et au moment d'expirer, elle murmurait encore : « Oh ! si seulement je savais que mon fils se convertit à Dieu, je m'en irais parfaitement heureuse !.... »
          Eh bien, jeune homme ne sais-tu pas que ta mère, du moins, n'était pas une hypocrite ? Peux-tu douter que sa piété ne fût une chose réelle ? Tu pouvais, il est vrai, te moquer de ton pasteur, tu pouvais dire qu'il faisait son métier ; mais de ta mère, tu ne pouvais te moquer : elle était chrétienne, et ton esprit sceptique lui-même était forcé de l'avouer. Que de fois ne supporta-t-elle pas ton humeur irascible et ne répondit-elle que par la douceur à tes paroles brusques ! car c'était une créature angélique que ta mère ; elle semblait en vérité trop pure pour ce monde ; et quoi que tu puisses avoir oublié, sûrement tu te souviens de cela, jeune homme !
               Or, je te le demande, un exemple ne t'enlève-t-il pas toute excuse de ton péché ? Jésus-Christ t'a parlé par la vie de mère ; tu as eu sous les yeux une preuve vivante de la réalité du christianisme. Si donc après cela tu persistes à le rejeter, quelle ne sera pas rigueur de ta condamnation !
            Mais ici je prévois une objection. Plusieurs de ceux qui m'écoutent me répondront qu'ils n'ont pas eu une telle mère. « Notre première école, me diront-ils, a été la rue ; le premier exemple dont nous nous souvenions, celui d'un père blasphémateur. » Cela peut être, mes amis; mais souvenez-vous, je vous prie, qu'il est un exemple parfait, un exemple accompli, savoir, Christ ; et que ce modèle, si vous ne l'avez pas contemplé de vos yeux, vous avez pu le voir dans sa Parole. Oui, Jésus-Christ, l'Homme de Nazareth, a été un homme parfait ; il n'a point commis de péché, et dans sa bouche il ne s'est trouvé aucune fraude (1Pi 2:22).
         Si donc l'excellence chrétienne ne vous a jamais été démontrée par la vie des disciples, elle l'a été du moins par la vie du Maître ; par conséquent, en avançant cette excuse, vous avancez un mensonge ; car l'exemple de Christ, les oeuvres de Christ, aussi bien que les paroles de Christ, vous laissent sans excuse de votre péché.
           Enfin, quelques-uns de vous me diront peut-être : « Nous avons certainement entendu bien des appels, mais ces appels n'ont jamais trouvé le chemin de notre conscience ; nous avons souvent écouté les ministres de l’Évangile, mais ils n'ont jamais fait d'impression sur nous. » Ah ! mes amis, ou je me trompe singulièrement, ou il en est bien peu parmi vous qui puissent avec vérité tenir ce langage. Jeune homme et jeune fille ! je me lèverai en témoignage contre vous au jour du jugement, car je sais que vos consciences ont été atteintes.
          N'ai-je pas vu, il n'y a qu'un instant, des larmes silencieuses, les larmes, je l'espère, de la repentance, s'échapper de vos yeux ?
         Et quant à vous, vieillards, qui aujourd'hui êtes si difficiles à émouvoir, vous n'avez pas toujours été ainsi. Il fut un temps où votre âme était capable de recevoir des impressions. Oh ! souvenez-vous, vieillards, que les péchés de votre jeunesse consumeront vos os, si vous vous êtes obstinés à rejeter l'Evangile. Maintenant je le sais, votre vieux coeur est comme blasé ; mais vous n'en êtes que plus inexcusables, car il était sensible autrefois........... et même à présent, n'est-il pas vrai, pauvres vieillards, qu'il n'est pas complètement endurci ?
- Non, j'en suis convaincu, pas une des âmes qui m'écoutent ne peut dire qu'elle n'a jamais été émue par la prédication de l'Evangile. Dans ce moment même, j'ose affirmer que plusieurs d'entre vous soupirent après la solitude de leur chambre, car ils sont si troublés par le sentiment de leurs péchés, qu'ils brûlent de pouvoir, en toute liberté, répandre leurs coeurs devant Dieu. Mais, hélas ! que dureront ces émotions, ce repentir, ces larmes ?.....
        On faisait remarquer un jour à un prédicateur éminent quel étonnant spectacle présentait un auditoire tout en larmes. « Je connais une chose bien autrement étonnante, répondit celui-ci ; c'est la facilité avec laquelle les gens oublient ce qui les a fait pleurer, dès qu'ils ont franchi le seuil du temple. » Est-ce là ce que vous allez faire, mes amis ? Je ne sais ! Quoi qu'il en soit, souvenez-vous que l'Esprit de Dieu a contesté avec vos âmes. Souvenez-vous qu'aujourd'hui encore le Seigneur a comme placé une barrière sur vos pas ; il a creusé un fossé au travers de votre chemin ; il a élevé un signal d'alarme devant vos yeux et vous a crié : « Fils des hommes, prenez garde, prenez garde, prenez garde vous vous précipitez tête baissée dans les voies de la perdition ! » Et il m'a envoyé, moi son serviteur, pour vous avertir de votre danger. Et c'est en son nom que je vous dis à tous : « Arrêtez, arrêtez, arrêtez ! Ainsi a dit l'Eternel : Considérez vos voies ; retournez, retournez, convertissez-vous ; et pourquoi mourriez vous, ô maison d'Israël ? »
        Mais si vous repoussez ce nouvel appel de mon Maître, que vous dirai-je, ô pécheurs?... Qu'il en soit comme vous le voulez! Si vous étouffez volontairement ces étincelles de la grâce divine, si vous éteignez ces premières lueurs de l'Esprit saint, si vous êtes résolus à vous perdre pour l'éternité, qu'il en soit comme vous le voulez ! Seulement rappelez-vous que je suis net du sang de vous tous. C'est à vous-mêmes que vos âmes seront redemandées ; c'est vous seuls qui serez responsables devant Dieu de votre rébellion et de votre incrédulité.

IV
          Il ne me reste plus que quelques paroles à ajouter, mais ces paroles sont terribles au plus haut point ; car je dois, au nom de mon Maître, prononcer UN VERDICT DE CONDAMNATION. Je dois déclarer solennellement que le sort le plus effroyable attend tous ceux qui vivent et qui meurent en rejetant Christ. Oui, une complète, une irrémédiable destruction les enveloppera infailliblement. S'il y a des degrés dans les peines éternelles, sans contredit, le plus haut degré sera réservé à toute âme qui n'aura pas voulu profiter des invitations de Christ.
       N'avez-vous pas, mes frères, remarqué ce passage de l'Evangile, où il est dit que le serviteur infidèle, celui qui a passé son temps à battre ses compagnons de service, à manger, à boire et à s'enivrer aura sa portion..... (avec qui, pensez-vous ?) - avec les incrédules ! Comme si l'enfer était tout particulièrement l'héritage des incrédules ! Comme si l'abîme avait été creusé, non pas tant pour le fornicateur, pour le blasphémateur, pour l'intempérant, que pour celui qui méprise Christ! C'est qu'en effet, la réjection de Christ constitue le péché essentiel, le vice primordial. Lorsque les pécheurs comparaîtront en jugement, leurs autres iniquités les suivront, mais celle-là les précèdera.
      - Mes frères, transportez-vous par la pensée à cet instant suprême, à ce jour du jugement qui approche. Il n'y a plus de temps ; le son de la dernière, trompette a retenti dans J'espace. Nous sommes tous rassemblés, les vivants et les morts. Une foule consternée et anxieuse se presse dans les rues. Plus d'affaires de bourse maintenant, plus d'opérations commerciales ; le marchand abandonne sa boutique, le prince son palais. Chacun est dans l'attente chacun sent que le grand jour de l'échéance est enfin tenu, et qu'il va falloir régler ses comptes pour l'éternité. Un silence solennel règne de toutes parts. Pas un son, pas une voix ne se fait entendre. Toute langue est muette, tout coeur est défaillant..... Soudain, une grande nuée blanche descend majestueusement du ciel. Sur cette nuée est assis quelqu'un semblable au Fils de l'homme. Tout oeil le voit, - et alors, oh ! alors, de la terre qui tressaille jusqu'en ses fondements, s'élève une immense, une formidable clameur. « C'est lui ! c'est lui ! » répètent toutes les bouches. Mais à ce cri unanime succède bientôt un double choeur ; choeur des rachetés qui chantent avec ravissement : « Alléluia, alléluia, alléluia ! Gloire à toi, ô Fils de Dieu ! et choeur de ceux qui ont méprisé Jésus, dont les sanglots et les lamentations retentissent dans les airs en notes sourdes et lugubres.
        Ecoutez ! Que disent les malheureux ? Il me semble distinguer leurs paroles, à mesure qu'el-les tombent de leurs bouches, gravés et lentes comme les tintements d'un glas funèbre. Rochers, tombez sur nous, disent-ils ; montagnes, cachez-nous de devant la face de Celui qu est assis sur le trône !... »
       Mon auditeur inconverti, seras-tu de ceux qui pousseront ce cri de désespoir ? Question saisissante et sérieuse entre toutes ! Je suppose, pour un moment, que tu aies quitté la vie dans ton impénitence, et que, par conséquent, tu sois au nombre des, infortunés qui salueront la venue du Seigneur par des pleurs et des grincements de dents. Oh! quelle ne sera pas alors ta terreur, ton visage livide, tes genoux tremblants ne seront rien, comparés à l'effroi sans pareil qui remplira ton coeur, quand tu seras ivre, mais non pas de vin, quand tu chancelleras dans l'étourdissement de la peur, quand tu t'abattras dans la poussière pour cacher ton épouvante.
        Car le Juge est là, - il approche, - il avance - et maintenant l'heure du grand triage a sonné. « Rassemblez mon peuple des quatre vents des cieux, mes élus en qui mon âme prend plaisir », dit le Seigneur. Aussitôt cet ordre est exécuté. Puis on entend ces mots : « Ramasse l'ivraie, et la liez en faisceaux pour être brûlée. » Et on te ramasse, ô pécheur, et tu es lié dans le faisceau, et il ne reste plus qu'à te livrer au feu. Mais où est l'étincelle qui doit allume le bûcher ? L'ivraie doit être brûlée, mais d'où viendra la flamme qui l'embrasera ? La flamme ? elle jaillit de la bouche même du souverain Juge, et des mots tels que ceux-ci la composent: Retirez-vous de moi, maudits, et allez au feu éternel, préparé au diable et à ses anges (Mat 25) !
        Hésites-tu, ô pécheur ? « Allez l » répète ton Juge. - Implores-tu sa bénédiction ? « Tu es maudit ! » - Veux-tu fuir ? « Le feu éternel est devant toi ! » - Demandes-tu grâce: « Le temps de grâce est passé, répond Christ. Parce que j'ai crié et que vous avez refusé d'ouïr ; parce que j'ai étendu ma main, et qu'il n'y a eu personne qui y prît garde; aussi je me rirai de votre calamité, je me moquerai quand votre effroi surviendra (Pro 1:24,26) ! Allez, vous dis-je, au feu qui ne s'éteint point ! » - Et tu y vas l..... Et quelles sont les pensées qui assiègent ton cœur? « Oh ! plût à Dieu que je ne fusse jamais né ! t'écries-tu avec désespoir; plût à Dieu, que l'Evangile ne m'eût jamais été annoncé, car je n'aurais pas commis le crime de le rejeter ! »
         Ah ! c'est alors, pécheur, que tu sentiras au fond de ta conscience la morsure du vers qui ne meurt point. « Je connaissais le bien, diras-tu, mais j'ai fait le mal. J'ai semé le vent, il est juste que je moissonne la tempête. Dieu a mis des entraves sur ma route, mais j'ai passé outre ; il m'a appelé, mais j'ai fermé mon oreille ; il m'a supplié, mais j'ai repoussé ses avances miséricordieuses. Oh ! pensée de toutes les pensées la plus poignante et la plus amère ! j'ai été le meurtrier de mon âme! Je suis perdu, perdu, perdu ! et perdu par ma propre faute ! J'ai repoussé l'Evangile de Christ. je suis l'artisan de mon éternelle ruine !
En sera-t-il ainsi de toi, mon cher auditeur, en sera-t-il ainsi de toi ? A Dieu ne plaise ! Oh ! puisse le Saint-Esprit t'attirer irrésistiblement vers Jésus, car tu es trop vil pour céder, je le sais, à moins qu'une force divine ne t'y contraigne.
        Toutefois, j'espère pour toi, mon frère. N'entends-je pas ta voix murmurer en cet instant même : Que faut-il que je fasse pour être sauvé ? Je vais te le dire, pauvre âme : crois au Seigneur Jésus- Christ et tu seras sauvé. Il n'y a pas d'autre moyen de salut que la foi en Christ. Celui qui croira et qui sera baptisé sera sauvé ; mais celui qui ne croira point sera condamné, tel est l'enseignement de l'Ecriture.
          Oh ! pécheurs, regardez donc à Jésus ! voyez Il est là suspendu à la croix, il souffre et il meurt pour vous..... Regardez à lui et vous vivrez.

Nul ne peut rendre Dieu propice
Que Jésus-Christ le Rédempteur ;
Son sang offert en sacrifice,
Voilà la rançon du pécheur

       Fussiez-vous même les plus vils, les plus souillés, les plus dégradés des hommes, venez, venez à Christ. Fussiez-vous l'écume, le rebut, les balayures de la société, Jésus vous invite à venir à lui. Il n'est pas jusqu'aux âmes dont Satan ne veut plus, que mon Sauveur ne soit prêt à recevoir. Oh ! venez donc à lui, qui que vous soyez, tels que vous êtes, et vous obtiendrez miséricorde! Mais si vous endurcissez vos coeurs, tremblez ! oui, je vous le dis, tremblez !

Car Dieu, de sa gloire jaloux,
Dira, dans son juste courroux :
" J'ai cette parole jurée,
Que jamais ce peuple endurci,
Puisqu'il me résistait ainsi,


Dans mon repos n'aurait entrée ! (Ps 95)


vendredi 20 mars 2015

(6) SERMONS CHOSIS (Spurgeon Charles)

Numérisation Yves PETRAKIAN
Copie autorisée pour diffusion gratuite uniquement
Obligation d'indiquer la source http://456-bible.123-bible.com

CONSEILS AUX ÂMES ABATTUES

Oh ! qui me ferait être comme j'étais autrefois  (JOB, 29: 2).

        Le plus souvent le bon Berger conduit ses rachetés le long des eaux tranquilles, et les fait reposer dans les parcs herbeux ; cependant, il permet parfois qu'ils soient errants dans un désert où il n'y a point de chemin, et où ils ne trouvent aucune ville habitée. Ils sont affamés et altérés; leur âme défaille, et ils crient à l’Éternel dans leur détresse (Ps 107:4-6).
De même, il est beaucoup d'enfants de Dieu qui jouissent d'une joie à peu près constante ; pour eux véritablement les voies de la piété sont des voies agréables et ses sentiers ne sont que prospérité ; mais il en est d'autres, au contraire, qui ont à passer dans le feu et dans l'eau ; selon l'expression du Psalmiste, les hommes montent sur leurs têtes (Ps. 46: 12) ils sont en butte à toutes sortes d'épreuves.
      Le devoir de tout ministre de l’Évangile est de s'adresser tour à tour aux diverses classes de ses auditeurs. Il doit, tantôt avertir les forts, de peur qu'ils ne tombent dans la présomption ; et tantôt stimuler ceux qui dorment, de peur qu'ils ne dorment du sommeil de la mort. Il doit aussi consoler les âmes abattues, et c'est là, mes bien-aimés, ce que je désire faire en ce jour. Oui, je me sens pressé de consoler ceux d'entre vous qui passent par des temps de langueur et de découragement, ou, pour mieux dire, je voudrais leur adresser quelques exhortations, qui, moyennant la bénédiction de Dieu, pourront les aider, je l'espère, à sortir de la triste condition dans laquelle ils sont tombés, en sorte qu'ils ne seront plus réduits à s'écrier avec Job : Oh ! qui me ferait être comme j'étais autrefois ?
      Abordons de suite notre sujet. - En premier lieu, mes frères, nous étudierons LA MALADIE SPIRITUELLE dont mon texte me semble être l'expression ; nous rechercherons ensuite LA CAUSE ET LE REMÈDE de cette, maladie, et enfin, QUELQUES MOTS D'EXHORTATION adressés aux âmes qui se trouvent dans ce fâcheux état termineront ce discours.

I
        Et d'abord, fixons notre attention sur la MALADIE SPIRITUELLE que suppose la plainte amère contenue dans les paroles de mon texte. Combien de chrétiens qui regardent au passé avec regret, à l'avenir avec effroi, et au présent avec tristesse ! Il leur semble que le temps qui n'est plus a été le meilleur et le plus doux de leur carrière chrétienne, mais quant au moment actuel, il leur paraît enveloppé d'un voile sombre et mélancolique. Souvent, ils se prennent à souhaiter de pouvoir retourner de quelques mois, de quelques années en arrière, car alors ils vivaient près de Jésus, tandis que maintenant ils sentent qu'ils se sont éloignés de lui, ou qu'il leur a caché sa face ; en un mot, le langage de leur coeur revient à ceci : Oh ! qui nous ferait être comme nous étions autrefois ?
      De même que toute maladie, soit physique, soit morale, celle qui nous occupe ne présente pas toujours les mêmes caractères. Je vais essayer de décrire successivement quelques-unes de ses phases les plus ordinaires.
        Voici un homme qui a perdu l'assurance de son adoption. Entendez-le répétant dans l'amertume de son âme : Oh ! qui me ferait être comme j'étais autrefois ? Ecoutez son triste soliloque :
        « Ah ! pourquoi les jours passés ne peuvent-ils plus revenir ? s'écrie-t-il. Alors je n'avais aucun doute de mon salut. A celui qui m'aurait demandé raison de l'espérance qui était en moi, j'aurais répondu avec douceur et respect. Nulle crainte ne me troublait, nulle frayeur ne m'agitait. Je pouvais dire avec Paul : JE SAIS en qui j'ai cru, et avec Job : JE SAIS que mon Rédempteur est vivant. Je sentais que j'étais assis sur le rocher qui est Christ, et mon âme, pleine d'une joyeuse confiance, était toujours prête à chanter :

Si l’Éternel est ma retraite,
Qui pourrait me troubler encor ?
Pourquoi craindrais-je la tempête,
Quand je suis sûr d'entrer au port ?
Appuyé sur Emmanuel
Que me ferait l'homme mortel ?

        « Mais hélas ! que tout est changé ! autrefois mon ciel était sans ombres, aujourd'hui les nuages le couvrent ; autrefois, je voyais, en quelque sorte, mon nom écrit dans les cieux, aujourd'hui, je tremble d'y lire un jour ma condamnation,. Autrefois, je croyais me confier sincèrement en Christ, mais aujourd'hui je suis constamment assailli par l'affreuse pensée que j'étais un hypocrite qui trompait les autres et se séduisait lui-même. Il est vrai que j'essaie encore d'espérer au Seigneur, et si je ne puis plus me réjouir à la clarté de sa face, du moins je me réfugie à l'ombre de ses ailes. Je sens que hors de Christ il n'y point de salut, et que si je m'éloigne de lui c'en est fait de moi. Mais, ô misérable que je Suis ! qu'elles sont épaisses les ténèbres qui m'environnent ! Comme Paul au milieu de la tempête, que de jours sans soleil et de nuit, sans étoiles n'ai-je pas dû traverser ! J'ai perdu les arrhes de mon salut, le gage de mon adoption ; je ne possède plus le témoignage intérieur que je suis un enfant de Dieu en un mot, je crains de m'être fait illusion jusqu'à présent sur mon véritable état ; je crains d'avoir pris de simples impression charnelles pour l'oeuvre de la grâce, et attribué à Dieu le Saint-Esprit! ce qui n'était que le fruit de mon imagination. »
         Tel est, mes chers amis, un des cas les plus fréquents de la grande maladie spirituelle que nous étudions. En voici un second, également très ordinaire. Voyez ce chrétien qui demande à son tour : Oh ! qui me ferait être comme j'étais autrefois ? Il gémit, non pas comme l'autre parce qu'il a perdu le sentiment de son adoption, mais parce qu'il se laisse troubler par des soucis terrestres. « Où est- elle, se dit-il avec douleur, où est-elle cette paix délicieuse qui naguère encore remplissait mon âme ? Que sont-ils devenus ces jours bénis où peines et épreuves étaient pour moi moins que rien ? Je disais constamment en mon cœur :

J'accepte, ô Père, par avance,
Le lot que tu m'assigneras;
En toi, j'ai mis ma confiance ;
Fais de moi ce que tu voudras.

      Je sentais que sans murmures j'aurais pu faire au Seigneur le sacrifice de toutes choses, et que s'il m'eût enlevé ce que j'aimais le plus au monde, j'aurais dit avec Job : L'Éternel l'avait donné, l'Éternel l'a ôté ; que le nom de l'Éternel soit béni. L'avenir ne m'inspirait aucune inquiétude. Comme un enfant dans les bras de sa mère, je reposais tranquille sur le sein de mon Dieu. L’Éternel pourvoira, me disais-je. Je me déchargeais sur lui de tout ce qui me concernait ; j'allais chaque jour à mon travail, sans m'inquiéter du lendemain. J'étais semblable au passereau qui se réveille à l'aurore, ne sachant d'où lui viendra sa nourriture, mais qui n'en gazouille pas moins son hymne matinal à Celui qui nourrit les oiseaux de l'air. Sans crainte, je remettais entre les mains du Seigneur mes intérêts les plus chers: ma femme, mes enfants, ma vie même. Chaque matin, je priais ainsi : Seigneur, je ne crois point avoir de volonté propre ; toutefois, si j'en avais, je te dirais encore : Non point ce que je veux, mais ce que tu veux ! Ta volonté sera la mienne ; ton désir sera mon désir.
          - Mais, ô regret, ô douleur ! qui me fera être comme j'étais autrefois ? Qui me rendra ma confiance en Dieu, ma douce quiétude, ma sérénité d'esprit ? Maintenant, un rien me chagrine ; mes affaires temporelles, me troublent. La perte la plus minime suffit pour m'attrister, tandis qu'autrefois j'aurais supporté sans me plaindre, et même en bénissant Dieu, une perte a vingt fois plus considérable. Si le moindre nuage vient assombrir mon horizon, mon âme en est comme écrasée. Pareil à un enfant impatient et volontaire, je voudrais que tout marchât au gré de mes désirs. Je ne puis plus dire avec sincérité que je remets toutes choses à mon Père céleste : il y a un certain interdit que je me réserve.
           Enlacée autour de mon coeur, croît la plante vénéneuse appelée l'amour du moi; ses racines ont pénétré jusques aux muscles et aux nerfs de mon âme. Il y a quelque chose que je chéris plus que Dieu, quelque chose dont je refuserais de lui faire le sacrifice s'il me le demandait. Autrefois, quelque lourde qu'eût pu être ma croix, je n'aurais pas, comme aujourd'hui, plié sous le faix, car le Seigneur l'eût portée avec moi. Oh ! comment ai-je pu oublier la céleste science de se décharger de ses soucis sur l’Éternel; de déposer tout fardeau sur le rocher inébranlable des siècles ? Oh ! si je savais comme jadis répandre devant mon Dieu mes peines et mes tristesses ! Oh ! douce confiance en mon Sauveur qui me rendait si heureux, que ne donnerais-je pas pour te posséder encore !
        Tel autre chrétien déplore peut-être la tiédeur, qu'il apporte dans la maison de Dieu et le peu de jouissance que lui procurent les moyens d'édification. Ecoutez les plaintes qui s'exhalent de son coeur à ce sujet. « Autrefois, s'écrie-t-il, quand je montais dans la maison de Dieu, combien mon âme était joyeuse ! J'écoutais avec avidité le message du salut ; quand le serviteur de Christ parlait, je craignais de perdre une seule de ses paroles ; il me semblait qu'un ange s'adressait à moi du haut du ciel. Que de fois, en entendant parler de l'amour du Sauveur, des larmes brûlantes n'ont-elles pas sillonné mes joues ! Que de fois mes yeux n'ont-ils pas étincelé d'ardeur lorsqu'une parole de foi et d'espérance faisait vibrer mon âme tout entière ! Et les sabbats de mon Dieu, avec quel transport je saluais leur retour !

Jour du Seigneur,
J'ouvre mon coeur
A ta douce lumière !
m'écriais-je au matin du saint jour.

      Puis, lorsque de saints cantiques faisaient retentir les parvis du Seigneur, quelle voix était plus joyeuse que la mienne ? Le coeur content, l'âme restaurée, je quittais le sanctuaire pour aller raconter à mes amis, à mes voisins les glorieuses vérités que je venais d'entendre. Et dans la semaine également, combien j'aimais à m'occuper des choses de Dieu ! Pas une assemblée d'édification qui ne me trouvât à ma place. Je priais véritablement en esprit toutes les prières qui étaient prononcées ; j'écoutais avec bonheur tous les discours, pourvu qu'ils fussent selon l’Évangile ; et mon âme, assise pour ainsi dire à un banquet somptueux, était rassasiée. comme de moelle et de graisse. Si je lisais l'Ecriture, elle me semblait toujours brillante de clarté ; on eût dit qu'un rayon de la gloire divine illuminait pour moi ses pages sacrées. Si je ployais le genou devant Dieu, mon âme se répandait aussitôt en ardentes supplications ; je prenais plaisir à ce saint exercice, et les heures que je passais à genoux étaient les plus douces de mes journées : j'aimais mon Dieu et mon Dieu m'aimait.
       - Mais, hélas ! ce saint zèle, cette ferveur d'esprit, je ne les possède plus. Je vais toujours à la maison de Dieu; j'y entends la même voix; le même serviteur de Christ, que j'aime si cordialement, m'adresse encore les plus touchants appels ; mais je n'ai plus de larmes à verser ; mon cœur s'est endurci ; les douces émotions que je goûtais naguère deviennent de plus en plus rares. Je me rends au culte divin, à peu près comme un écolier se rend à son école : j'y vais sans plaisir, sans amour, parce qu'il faut y aller, et j'en sors l'âme aussi sèche qu'en entrant. Lorsque je cherche à m'entretenir en secret avec mon Père céleste, il semble en vérité que les roues de mon char aient été enlevées, tant il se meut pesamment ; et lorsque j'essaie de chanter les louanges de Dieu, je me trouve sans élan et sans ferveur. Oh ! qui me ferait être comme j'étais autrefois, comme j'étais en ces jours où Dieu faisait luire sa lampe sur ma tête ? »
         Je dois le dire, mes chers amis, je ne pense pas qu'il y en ait beaucoup parmi vous qui puissent s'associer pleinement à un tel langage. En général, je le sais, vous aimez à venir dans la maison de Dieu ; et, pour ma part, je rends grâces à mon Maître de ce qu'il me permet de prêcher l’Évangile à des auditeurs; qui paraissent le goûter et le sentir, à des chrétiens dont les yeux ne restent pas toujours secs en l'entendant annoncer, et dont le coeur sait parfois bouillonner d'un saint enthousiasme. Mais sans être parvenus au triste état que je viens de décrire, vous pouvez cependant en connaître quelque chose ; peut-être la Parole ne vous semble-t-elle plus aussi douce, aussi savoureuse qu'autrefois ; et alors, j'en suis assuré, les plaintes que je viens d'exprimer éveillent quelque écho dans votre coeur.
         Mais passons à un quatrième cas. Il est des chrétiens qui se lamentent amèrement parce que leur conscience n'est plus aussi délicate que par le passé. Ils disent avec tristesse : « Dans les premiers temps qui suivirent notre conversion, c'est à peine si nous osions faire un pas, tant nous craignions de nous fourvoyer. Nous éprouvions avec soin toutes choses ; nous évitions jusqu'à l'apparence du mal. Dès que nous apercevions sur notre route la moindre trace du Serpent ancien, nous nous détournions avec épouvante.
       Le monde se moquait de nous ; il nous appelait des puritains. Nous étions constamment sur nos gardes ; nous avions peur d'ouvrir la bouche, et nos scrupules allaient si loin que nous condamnions certaines choses qui, en réalité, étaient innocentes. Notre conscience ressemblait à la sensitive: si la main du péché s'en approchait, aussitôt elle se reployait sur elle même. Notre âme était comme couverte de meurtrissures, en sorte que le plus léger attouchement lui arrachait des cris. Offenser Dieu, nous paraissait être le malheur suprême ; si quelqu'un prononçait une imprécation en notre présence, nous tremblions d'effroi si nous voyions un homme violer le sabbat, nous étions éperdus.
        La moindre tentation nous indignait ; il nous semblait entendre la voix du démon lui-même, et pleins d'une sainte colère, nous nous écriions : Arrière, de moi, Satan ! » Le péché, sous toutes ses formes, nous faisait horreur : nous le fuyions comme un serpent ; nous le craignions comme du poison... Mais où est-elle maintenant cette conscience si sensible et si tendre ? Qu'est devenue sa délicatesse d'autrefois ? Nous n'avons pas, il est vrai, abandonne les sentiers du Seigneur ni oublié sa loi ; nous n'avons point extérieurement déshonoré notre sainte profession, et Dieu seul connaît nos iniquités; toutefois, nous l'avouons avec confusion, notre conscience n'est plus ce qu'elle a été. Hier encore elle tonnait contre le péché ; aujourd'hui elle garde le silence.
         O conscience, conscience ! nous t'avons abreuvée de soporifiques, et maintenant tu dors, tandis que tu devrais nous avertir. Sentinelle du Seigneur, ta voix pénétrante savait naguère se faire entendre jusqu'au plus profond de notre être ; mais maintenant tu es assoupie, et nous succombons à la tentation. Jusqu'à présent, nous n'avons péché que dans de petites choses mais de même que le balancement d'un brin d'herbe indique de quel côté souffle le vent, de même ces petites infidélités ne prouvent que trop dans quelle funeste voie notre âme est engagée. Oh ! qui nous délivrera de cette conscience si épaisse, si dure, si calleuse, de cette conscience que les flèches de la loi ne peuvent plus transpercer ? Oh ! qui nous fera être comme nous étions autrefois ? »
           Enfin, mes bien-aimés, il est peut-être quelques-uns, d'entre nous qui gémissent, et non sans raison, parce qu'ils n'ont pas autant de zèle pour la gloire de Dieu et pour le salut des âmes qu'ils en avaient jadis. Il y a quelque temps, si nous voyions une âme cheminer vers la perdition, nos yeux se remplissaient de larmes.
        Si nous voyions un de nos semblables prêt à commettre un péché, nous nous élancions vers lui, le suppliant de renoncer à son coupable dessein. Jamais nous ne sortions sans donner à l'un quelque traité religieux, à l'autre quelques bons avis ; il nous semblait que nous devions toujours parler du Seigneur Jésus.
            Si une occasion de faire du bien se présentait, nous étions toujours les premiers à la saisir. Notre vœu le plus cher était de sauver quelques âmes, et si profond, si ardent était notre amour pour les pécheurs que volontiers nous eussions consenti à être moqués, hués, abreuvés d'outrages, persécutés par le monde entier, exposés même à la mort cause de Christ, si à ce peu nous eussions pu arracher un seul de nos frères à la perdition éternelle. Notre âme brûlait d'un désir intense d'amener des âmes à Christ, et nous estimions que c'était là le seul but en vue duquel il valait la peine de vivre.
            - Mais, hélas ! quel souffle glacial est venu flétrir ce généreux élan ? Aujourd'hui, les âmes peuvent être damnées, et nous ne pleurons point ; les pécheurs peuvent être précipités dans l'étang ardent de feu et de soufre, et nous demeurons impassibles ; des milliers de créatures immortelles peuvent être moissonnées chaque jour et tomber dans l'abîme du tourment, et cela ne nous touche point ! Nous exhortons bien encore notre prochain à fuir la colère à venir, mais nos yeux restent secs ; nous prions pour lui, mais sans que nos cœurs prennent part à nos prières ; nous lui parlons de sondanger, mais sans avoir l'air de prendre ce danger au sérieux. Nous passons à côté des repaires du vice et de l'infamie : sans doute nous voudrions que ceux qui y habitent fussent meilleurs, mais c'est là tout. On dirait que la compassion même est éteinte dans nos coeurs.
         Il fut un temps où l'enfer était pour nous une réalité si vivante, qu'il nous semblait sans cesse entendre les hurlements et les lamentations des réprouvés, en sorte que le cri constant de notre âme était celui-ci : « O Dieu ; aide-moi à sauver mon prochain ! »
        Mais maintenant nous prenons les choses plus froidement : nous avons peu d'amour pour les hommes, peu de zèle pour la gloire de Dieu, peu d'énergie pour son service..... Oh ! mes bien- aimés, si tel est votre état spirituel ; si, comme votre indigne pasteur, vous pouvez vous associer dans une certaine mesure à ces tristes aveux, assurément, du fond de votre coeur humilié s'élève en cet instant même cette plainte amère : Qui nous fera être comme nous étions autrefois ?

II
      Mais nous nous sommes assez longtemps arrêtés à la maladie spirituelle si bien décrite par les paroles de notre texte ; recherchons-en maintenant LA CAUSE ET LE REMÈDE.
       Le plus souvent ce fâcheux état de choses est le résultat du relâchement dans la prière ; et quant au remède, il est facile de comprendre qu'il est l'inverse de la cause. - Voyons, mon frère, qui es toujours à te plaindre de l'alanguissement de ta piété, essayons de descendre à la racine du mal. Si tu n'es plus comme tu étais autrefois, ne serait-ce pas tout simplement parce que tu as négligé la prière ? Rien ne débilite l'âme comme le manque de prière.
        On l'a observé avec raison : « Un cabinet négligé est le berceau de toute sorte de mal.» On peut dire que le cabinet du chrétien est pour lui la source, soit de beaucoup de bien, soit de beaucoup de mal : de bien, s'il le fréquente assidûment ; de mal, s'il le néglige. Nul ne peut croître dans la grâce, s'il est paresseux à s'approcher de Dieu. Quelque avancé que soit un chrétien, s'il ne priait pas, il aurait bientôt cessé de vivre. L'enfant de Dieu a besoin d'être constamment sustenté ; si bien nourri qu'il puisse être aujourd'hui, il ne saurait subsister demain, si ses provisions ne sont renouvelées : or, ce renouvellement incessant de grâces, c'est par la prière seule qu'il peut l'obtenir. Quand même une âme posséderait la force spirituelle de cinquante chrétiens d'élite, si elle cessait de prier, elle ne pourrait que périr.
      - Mon frère, examine-toi donc à cet égard ; et si en regardant en arrière, tu étais contraint à te dire : « Il fut un temps où mes prières étaient plus régulières, plus senties, plus nombreuses qu'aujourd'hui ; maintenant elles sont faibles, languissantes, sans sincérité et sans onction » ; - si, dis-je, ta conscience t'obligeait à faire cet aveu, oh ! mon bien-aimé, ne t'étonne plus du malaise de ton âme ; ne cherche pas ailleurs l'explication de ce marasme spirituel dont tu te sens atteint.
         Le relâchement dans la prière : voilà la cause du mal. - « Mais où en est le remède ? » diras-tu. Eh ! c'est tout simple, chère âme : prie davantage. Si peu de prières t'ont réduite à l'état d'abaissement dans lequel tu te trouves, beaucoup de prières te relèveront. C'est le manque de prière qui t'a appauvrie ; c'est l'abondance de prière qui t'enrichira. Où il n'y a point boeuf, la grange est vide, a dit Salomon (Pro 14: 41) ; et même que sans labourage l'homme n'aurait point de pain, de même sans la prière l'âme croyant serait affamée: Voulons-nous donc prospérer sous le rapport spirituel ? soyons plus persévérants dans la prière. Oh ! mes chers amis la pierre de la muraille ne pourrait-elle pas crier contre nous, et la paroi nous condamner (Hab 2:11) ? La poussière de notre cabinet ne s'élève-t-elle pas en témoignage devant Dieu, nous accusant de négligence dans nos dévotions particulières?
         Voilà pourquoi nous ne sommes plus tels que nous étions autrefois. Ce qu'est pour une machine à vapeur le feu qui entretient son mouvement, la prière alimentée par le Saint-Esprit l'est pour le chrétien. La prière est le véhicule que Dieu a choisi pour faire part de ses grâces à ses enfants, et bien insensé est celui qui néglige. Mes frères, permettez-moi d'insister sur ce point, car il est de la plus haute importance. Si vous reconnaissez qu'en négligeant de vous approcher de Dieu vous placez votre âme dans la situation la plus périlleuse, votre devoir est tout tracé: vaquez à la prière avec plus de soin que jamais. Un commerçant gémit parce que son négoce n'est plus aussi florissant qu'autrefois ; or, il avait coutume d'envoyer au loin des navires qui lui revenaient chargés d'or ; mais depuis longtemps pas un seul n'a mis à la voile : a-t-il donc le droit de se plaindre de ce qu'il ne reçoit plus de précieux chargements.
          De même, lorsqu'un homme prie, il envoie vers le ciel un navire qui lui revient chargé des plus riches trésors, mais si, au lieu de cela, il laisse son navire amarré, dans le port, est-il étonnant qu'il s'appauvrisse de jour en jour ?
          Mais le fâcheux état spirituel qui nous occupe peut avoir d'autres causes. Si vous êtes réduits à vous écrier : Oh ! qui me ferait être comme j'étais autrefois ? peut-être est-ce moins votre faute que la faute de vos conducteurs spirituels. Oui, mes chers amis, il n'est pas impossible qu'une âme devienne très gravement malade, par suite de la mauvaise nourriture que lui donne son pasteur. Peut-on s'attendre, en effet, à ce qu'ils croissent dans la grâce ces chrétiens qui ne sont jamais arrosés par les ruisseaux qui réjouissent la cité de notre Dieu ? Comment pourraient-ils se fortifier dans le Seigneur Jésus, ceux qui ne sont pas nourris du lait spirituel et pur de la Parole ? Recherchez donc, avec le plus grand soin, les instructions d'un ministre fidèle. Je connais des chrétiens qui jamais ne sortent de leur lieu de culte sans se lamenter sur le peu d'édification qu'ils y trouvent ; et pourtant (étrange contradiction !) ils y retournent régulièrement dimanche après dimanche. En vérité, je ne sais comment qualifier une telle conduite, et bien loin d'exciter ma compassion ou ma sympathie, j'estime que ces chrétiens méritent qu'on aille à eux avec la verge. Lorsqu'il peut choisir, tout fidèle est tenu d'aller là où il trouve la nourriture qui correspond le mieux aux besoins de son âme. Sans doute, il ne doit pas changer de lieu de culte à la légère ; mais si une longue expérience l'a convaincu que la prédication qu'il entend habituellement ne lui tourne pas à profit, au lieu de perdre son temps en vaines doléances, il est de son devoir d'aller ailleurs. Souvent un pasteur infidèle affame, pour ainsi dire, son troupeau ; il réduit les brebis du Seigneur à l'état de squelettes ambulants, en sorte qu'on peut compter tous leurs os. C'est là, mes frères une seconde cause qui peut amener les âmes à s'écrier-: Oh ! qui nous ferait être comme nous étions autrefois
        Mais il y en a une troisième que j'ai hâte de vous signaler, car je crois qu'elle vous concerne plus que la précédente. Votre état de dépérissement spirituel peut provenir, non de la qualité de votre nourriture, mais de la quantité insuffisante que vous en prenez. Je m'explique.
         Voici un homme, un simple ouvrier, je suppose, qui autrefois se rendait régulièrement deux fois chaque dimanche à la maison de Dieu. Le lundi soir, quoique pressé de travail, il trouvait néanmoins le temps d'ôter à la hâte son tablier de cuir et de courir à la réunion de prière : peut-être y arrivait- il un peu tard, mais il y entendait toujours quelques bonnes paroles. Le jeudi soir encore, il s'efforçait de se rendre dans le sanctuaire pour écouter les exhortations d'un ministre de l’Évangile, et afin de regagner les heures passées à ces divers exercices religieux, il se couchait tard, se levait matin et travaillait avec une infatigable ardeur. Mais un jour, voilà que cet homme pense en lui- même : « Je suis surchargé d'ouvrage ; la vie que je mène est par trop fatigante ; je ne puis plus sortir aussi souvent ; d'ailleurs, les courses sont si longues ! » Alors il renonce d'abord à telle réunion, puis à telle autre, et ainsi de suite, jusqu'à ce qu'enfin s'apercevant que la vie de somme décline d'une manière sensible, il s'écrie tout éperdu :
            Oh ! qui me ferait être comme j'étais autrefois ? Eh ! ne devais-tu pas t'attendre à ce qui t'arrive, mon frère ? tu prends moins d'aliments que par le passé : n'est-il pas tout simple que tu t'affaiblisses ? Comme le petit enfant, le chrétien a besoin de manger souvent et peu à la fois. Pour ma part, je n'hésite pas à le dire, je crois que lorsqu'une âme abandonne les services religieux de la semaine: - (si ce n'est pour cause d'empêchement absolu), - c'en est fait pour cette âme de la vie religieuse. « Tant que l'on n'adore Dieu que le dimanche, disait Whitefield, une piété pratique ne saurait exister. » Les services de la semaine sont souvent les meilleurs. Si dans les jours de sabbat Dieu abreuve ses enfants à des ruisseaux de lait, on peut dire que souvent il semble réserver la crème pour les autres jours. Lors donc qu'un chrétien se tient volontairement éloigné des moyens de grâce les plus propres à fortifier son âme, n'est-ce pas à lui-même qu'il doit s'en prendre s'il est réduit à s'écrier : Oh ! qui me ferait être comme j'étais autrefois ?
        - Je ne vous blâme pas, mes bien-aimés, je désire seulement réveiller par mes avertissements les sentiments purs que vous avez (2Pi 3:2). Je vous parle en toute simplicité comme en toute franchise, et j'ai toujours l'intention d'en agir ainsi. Oh ! chrétiens, soyez fidèles à votre drapeau ! Ne le perdez pas un seul instant de vue, et vous remporterez la victoire. Mais si le plus léger indice de défection se manifeste dans vos rangs, n'est-il pas du devoir de votre pasteur de vous avertir, de peur que vous ne veniez à déchoir de vôtre fermeté ?
       L'idolâtrie : telle est une autre cause très ordinaire du déclin de la piété. Il est des chrétiens qui se laissent aller insensiblement à retirer leur coeur à Dieu pour le donner à quelque objet terrestre, et qui s'affectionnent aux choses qui sont d'ici-bas plus qu'à celles qui sont d'en haut. Ah ! mes amis, il est difficile d'aimer le monde et d'aimer Christ ; je dis plus : c'est impossible. Mais d'un autre côté, il est difficile, j'en conviens, de ne pas aimer la créature , il est difficile de ne pas s'attacher à la terre ; j'allais presque dire : c'est impossible. Et par le fait, c'est impossible pour l'homme laissé à ses propres forces ; Dieu seul peut nous apprendre à préférer l'invisible au visible, le spirituel au matériel ; Dieu seul peut nous rendre capables de lui donner noscœur sans réserve et sans partage. Mais notez bien ceci, mes frères : toutes les fois que cédant à notre penchant à l'idolâtrie nous nous ferons un veau d'or et nous nous prosternerons devant lui, tôt ou tard ce veau d'or sera réduit en poudre et mêlé, pour ainsi dire, à l'eau que mous boirons, en sorte que nous pourrons dire avec le Psalmiste : Tu m'as abreuvé d'absinthe. Jamais chrétien ne s'est façonné une idole sans qu'elle ne se soit écroulée sur lui et ne l'ait grièvement blessé dans sa chute ; jamais l'âme n'a essayé d'étancher sa soif aux citernes crevassées du monde sans qu'elle n'ait trouvé, au lieu des ondes pures qu'elle cherchait, des reptiles immondes, et des eaux croupissantes. Le Seigneur veut que ses enfants vivent de lui, et de lui seul : que s'ils cherchent ailleurs leur vie, il prend soin de leur faire boire des eaux de Mara, de verser de l'amertume dans leur âme, afin de les ramener vers le Rocher d'où jaillissent les seules eaux vivifiantes.
      Oh ! mes bien-aimés, prenons donc garde que nos coeurs soient tout à Christ, entièrement à Christ, uniquement à Christ. S'il en est ainsi, nous jouirons certainement d'une paix constante, et notre âme ne sera pas contrainte à s'écrier : Qui me ferait être comme j'étais autrefois ?
         Il semble presque superflu de vous indiquer, d'autres causes qui peuvent déterminer la maladie spirituelle dont nous parlons ; toutefois, nous vous en signalerons une dernière, qui est peut-être la plus commune de toutes.
        Souvent notre piété n'est plus ce qu'elle a été, parce que nous avons nourri au-dedans de nous des sentiments d'orgueil et de propre justice. Ah ! mes amis, sachez-le : aussi longtemps que vous serez sur la terre, vous ne parviendrez point à vous débarrasser complètement de ce vieux levain de propre justice. Le démon nous est représenté par l'Ecriture sous l'emblème d'un serpent, parce qu'un serpent se glisse partout, jusque dans le moindre interstice. De même, la propre justice peut être comparée à un serpent, car elle s'insinue jusque dans les moindres de nos actions. - Si vous vous efforcez de servir Dieu « Excellent chrétien ! vous dit le diable ; comme tu sers Dieu fidèlement ! tu dépenses ta vie à prêcher l’Évangile ; tu es un noble coeur. »
        - Si, dans une réunion de prières, le Seigneur ;vous donne de répandre votre âme devant lui avec liberté et avec quelque ferveur, aussitôt Satan vous caresse avec complaisance: : « Comme tu as bien prié ! s'écrie-t-il ; certainement les frères t'aimeront ; tes progrès dans la grâce sont vraiment remarquables, ! »
         - Si une tentation se présente et que vous soyez rendu capable d'y résister : « Ah ! s'écrie-t-il encore, tu es un vaillant soldat de la croix ! Regarde l'ennemi que tu as terrassé ; une brillante couronne t'attend au bout de la carrière ; tu te comportes en véritable héros. » - Vous vous confiez implicitement au Seigneur, vous acceptez toutes ses promesses ; Satan murmure alors à votre oreille : « Combien ta foi est ferme ! rien ne peut l'ébranler ; quelle différence entre toi et tel ou tel de tes frères ! Sa foi n'est pas la moitié aussi forte que la tienne. » Sur quoi vous allez, tout gonflé d'importance, tancer vertement votre frère qui est faible ; vous lui reprochez de n'être pas de votre taille ; et pendant ce temps, le démon continue ses perfides insinuations, ne se lassant pas d'admirer votre force, votre fidélité, votre confiance en Dieu, et vous affirmant que vous n'avez point la moindre parcelle de justice propre.
       Votre pasteur s'adresse aux Pharisiens de son troupeau ; mais qu'avez-vous de commun avec les Pharisiens ? Vous vous croyez complètement inaccessible à l'orgueil, tandis qu'en réalité il n'est pas d'être qui soit plus orgueilleux que vous. Ah ! mes bien-aimés ! c'est justement lorsque nous nous estimons humbles, que nous sommes enflés d'orgueil, et lorsque nous gémissons le plus sur notre orgueil, c'est alors que nous sommes le plus humbles. En général, notre appréciation de nous-mêmes est le contre-pied de la vérité.
         Quand le chrétien se croit le plus mauvais, il est souvent le meilleur, et quand il se croit le meilleur, il est souvent le plus mauvais. Si donc vous reconnaissez avec douleur que vous n'êtes plus tels que vous étiez autrefois, examinez si des sentiments de propre justice ne se sont point glissés dans votre âme. Peut-être le flambeau de votre vie spirituelle est-il obscurci par l'orgueil : débarrassez-le donc de cet orgueil, et il brillera comme auparavant. Tu volais trop haut, mon frère ; c'est pourquoi il convient que tu sois humilié pour un temps, afin que comme un pécheur coupable et perdu tu ailles de nouveau t'abattre aux pieds de ton Sauveur. Alors, n'en doute pas, tu n'auras plus à t'écrier : Oh ! qui me ferait être comme, j'étais autrefois ?

III
      Et maintenant, je termine par QUELQUES MOTS D'EXHORTATION. En premier lieu, mes chers amis, je me sens pressé de vous exhorter à prendre, courage. L'un de vous se dit peut-être en ce moment même : « Oh ! c'en est fait ; jamais je ne recouvrerai le bonheur que j'ai perdu ; le Seigneur m'a caché la clarté de sa face. J'ai contristé son Esprit, et il s'est éloigné ; je me suis joué de ses avertissements, et il m'a abandonné ; j'ai délaissé les sentiers de la justice, et maintenant je suis comme emprisonné dans une cage de fer dont il m'est impossible de sortir. » Il est vrai, pauvre âme, tu ne saurais par toi-même recouvrer la liberté ; tes faibles forces ne parviendront jamais à briser ou à limer les barreaux derrière lesquels tu languis. Toutefois, je le répète, prends courage. D'autres sont sortis avant toi de la sombre prison du découragement et du désespoir. Sais-tu ce que tu dois faire, mon bien-aimé ? Crie à ton bon Maître demande-lui de venir te délivrer ; et quand même il semblerait pendant longtemps fermer l'oreille à tes cris de détresse, il t'entendra à la fin, n'en doute pas; en sorte qu'avec Jonas tu pourras bientôt entonner ce chant de délivrance :
J'ai crié à l'Éternel à cause de ma détresse, et il m'a exaucé ;
je me suis écrié du ventre du sépulcre, et tu m'as entendu ! (Jonas 2:3)

Reviens, reviens, ô pécheur égaré !
Entends la voix du Seigneur qui t'appelle ;
Vers lui déjà n'es-tu pas attiré
Par les cordeaux de son amour fidèle ?

      En second lieu, mes amis, je désire vous exhorter à faire tous vos efforts pour progresser continuellement dans la vie spirituelle. O chrétiens, mes frères et mes sœurs en Jésus-Christ ! combien en est-il parmi vous dont toute l'ambition consiste à se soustraire à la colère à venir ! Combien en est-il qui disent : « Pourvu que je sois sauvé, peu m'importe que ce soit comme, au travers du feu ; pourvu que l'entrée du ciel ne me soit pas refusée, peu m'importe si je suis à la dernière place ! » Et ceux qui parlent ainsi se conduisent en conséquence, c'est-à-dire qu'ils sont aussi peu chrétiens que possible. De la piété, ils en veulent bien ; mais avec modération. Or, qu'est- ce que la modération en matière de piété ? C'est un mensonge, c'est une dérision, et rien de plus ! Une femme demande-t-elle à son mari de l'aimer avec modération ?
        Un père se contente-t-il que son fils soit modérément obéissant ? Une probité modérée vous satisferait-elle chez vos serviteurs ? Evidemment non. Que parlez-vous donc d'une piété modérée?
      Etre modérément religieux, ce n'est autre chose qu'être irréligieux. Posséder une religion qui ne pénètre pas jusqu'au fond du coeur et qui n'exerce point d'influence sur la vie, c'est, par le fait, n'avoir aucune religion.
        Ah! mes chers auditeurs, vous le dirai-je ? je tremble souvent à la pensée que parmi vous il en est un grand nombre qui n'ont que l'apparence de la piété. Malheur à vous, sépulcres blanchis, qui vous contentez de paraître beaux au dehors sans considérer qu'au dedans vous n'êtes que souillure et corruption ! Malheur à vous, Pharisiens formalistes, qui nettoyez le dehors de la coupe et du plat et qui vous persuadez avoir assez fait, parce que ni l'Eglise ni le monde ne peuvent élever contre vous aucune accusation grave ! Prenez garde ! prenez garde ! le jour viendra où le Juge suprême examinera l'intérieur du plat et de la coupe, et s'il les trouve pleins d'injustice et de méchanceté, il les mettra en pièces et en jettera les débris dans l'abîme du tourment.
      Pauvres formalistes ! votre prétendue piété ressemble aux ailes de cire d'un personnage de la fable : elle peut fort bien vous suffire pour voler ici-bas, mais lorsqu'il vous faudra prendre votre essor vers les régions supérieures, le puissant, soleil de Jésus la fondra en un instant, et vous tomberez pour jamais dans le gouffre de la perdition ! Oh ! soi-disant chrétiens, si habilement dorés, ornés et vernissés, que ferez-vous lorsque au dernier jour vous serez reconnus pour être du vil métal ? Quand la paille, le foin et le chaume auront été consumés, que deviendrez-vous, je vous le demande, si votre christianisme est de mauvais aloi, s'il n'a pas été frappé au coin du Très-Haut ? Comment pourrez-vous passer par le creuset au grand et illustre jour du Seigneur, si vous n'êtes pas de l'or fin ?.....          Mais, j'en ai la confiance, il est des âmes dans cet auditoire qui n'ont rien à craindre de cette solennelle épreuve ; elles sont nées de Dieu, par conséquent le feu ne saurait les consumer. Toutefois, mes bien-aimés - (et ici je ne parle qu'aux véritables croyants), - jugez vous-mêmes si je suis injuste à l'égard des chrétiens de nos jours, en disant qu'en général nous nous contentons trop aisément de savoir que nous sommes enfants de Dieu, et que nous n'aspirons point assez à croître en stature et en force. Nous ressemblons à des nains, à de pauvres enfants rachitiques et souffreteux. Au lieu de marcher courageusement en avant, nous sommes toujours à gémir et à répéter sur tous les tons : Qui nous ferait être comme nous étions autrefois ?
       C'est là un symptôme de rachitisme. Si nous voulons faire de grandes choses dans le monde, nous ne devons pas souvent pousser ce cri. Il faut bien plutôt que nous soyons toujours prêts à chanter:

Ma langue, égaie-toi ;
réjouis-toi, mon coeur ;
Entonne un chant d'amour,
Jésus est ton Sauveur

      et que, pleins de joie, nous puissions dire avec saint Paul : Je sais en qui j'ai cru. Chrétiens, voulez- vous être utiles ? voulez-vous honorer votre Maître ? Désirez-vous obtenir dans le ciel une brillante couronne, afin d'en faire hommage à votre Sauveur ? S'il en est ainsi (et peut-il ne pas en être ainsi ?) veillez avec le plus grand soin à la santé de votre âme ; ne la laissez pas végéter et languir. Que l'homme intérieur qui est en vous n'ait pas simplement le souffle de la vie, mais qu'il se développe de jour en jour et devienne semblable à un arbre planté prés des eaux courantes, qui porte son fruit en sa saison et dont le feuillage ne se flétrit point.
       Quoi ! mes bien-aimés, vous vous contenteriez d'une couronne sans ornement quand vous savez que si vous amenez des âmes à Christ vous luirez comme des étoiles dans la splendeur de l'étendue (Daniel 12:3) ? Vous voudriez vous asseoir au banquet des noces, revêtu, il est vrai, de la robe de Christ, mais sans que Dieu vous ait donné un seul joyau comme récompense de vos services ici-bas ? Ah ! non, j'en suis certain. Vous désirez, au contraire, n'est-il pas vrai ? que l'entrée du royaume éternel vous soit abondamment, accordée ; vous voulez jouir de la plénitude des grâces du Seigneur.
       A l'oeuvre donc, mes bien-aimés ; à l'œuvre avec ardeur et courage ! A celui qui aura fait valoir cinq talents, cinq villes seront données; et que personne ne se contente de posséder un seul talent, mais qu'il le place à intérêt ; car on donnera à quiconque a déjà, et il aura encore davantage ; mais pour celui qui n'a pas, on lui ôtera même ce qu'il a.
       Mais; je le sais, pour beaucoup de ceux qui m'écoutent en ce moment, ce que je viens de dire est dépourvu de tout intérêt. Peut-être pensent-ils eux aussi : « Qui nous ferait être comme. nous étions autrefois ? » mais dans leur bouche cette plainte a un sens tout autre que dans la bouche du chrétien. « Hélas ! dit le pécheur avec amertume, que ne suis-je encore ce que j'étais il y a quelques années ! car alors j'étais plein d'entrain et d'insouciance ; je menais joyeuse vie. Nul mieux que moi ne savait vider la coupe des festins ; nul ne se laissait emporter plus gaiement par le tourbillon des plaisirs et de la folie. Mais ce que je faisais alors; je ne puis plus le faire. J'ai usé ma santé, j'ai dépensé mon énergie, j'ai perdu ma fortune. Je suis malade de corps et faible d'esprit. Qui me ferait être comme j'étais autrefois ? »
       Ah ! pauvre pécheur, tu as lieu, en effet, de regretter le passé ; mais attends seulement quelques mois, et le présent, qui maintenant te semble si sombre, sera à son tour l'objet de tes amers regrets. Et plus tu avanceras dans la vie, sache-le, plus tu souhaiteras de retourner en arrière ; car le chemin de l'enfer descend, - descend, - descend toujours, - et le malheureux engagé sur cette pente, fatale se consume continuellement en impuissants désirs de revenir sur ses pas. Oh ! oui, tu auras encore à t'écrier : « Qui me ferait être comme j'étais autrefois ? »
         Tu penseras aux jours heureux où la prière de ta mère te bénissait, où la voix de ton père t'avertissait, où tu allais prendre place sur les bancs d'une école du dimanche, où, assis sur les genoux de ta mère, tu l'écoutais te parlant du Sauveur. Et ces réminiscences d'un heureux passé seront d'autant plus poignantes que ce passé sera plus éloigné de toi. –
Ah ! mes chers auditeurs, il y en a beaucoup parmi vous qui ont bien besoin de rebrousser chemin. Pensez au nombre de vos égarements ; voyez jusqu'où vous êtes tombés..... Mais qu'ai-je dit ? Non, pécheur, tu n'as que faire de rebrousser chemin ! Au lieu de regarder aux choses qui sont derrière toi, regarde à celles qui sont devant; et au lieu de t'écrier : Qui me ferait être comme j'étais autrefois ? dis en sincérité de coeur : « Que ne suis-je un nouvel homme en Jésus-Christ » Il ne te servirait de rien, crois-le, de recommencer la vie tel que tu es : tu serais bientôt aussi mauvais que tu l'es en ce moment. 
          Mais si Dieu daignait faire de toi un homme nouveau, oh ! alors; pauvre mortel, qui que tu sois, quelque bas que tu sois tombé, tu vivrais véritablement en nouveauté de vie. Un chrétien est tout aussi réellement un nouvel homme que s'il n'avait pas vécu avant sa conversion. La vieille créature est détrônée ; il est une nouvelle créature, née de nouveau et entrant dans une nouvelle existence. Pauvre âme ! Dieu peut accomplir en toi cette merveilleuse transformation. Dieu le Saint-Esprit peut faire de toi un nouvel édifice, et cela sans employer une seule des pierres qui entraient dans la structure de l'ancien. Il peut te donner un nouveau coeur, un nouvel esprit, de nouveaux plaisirs, un nouveau bonheur, de nouvelles perspectives, et enfin un ciel nouveau. « Ah ! me dis-tu peut-être; je sens que j'ai besoin de toutes ces choses, mais est-il bien vrai que je puisse les obtenir ? » Juge toi-même, mon frère, si tu le peux, par cette simple déclaration de l’Évangile : C'est une chose certaine et digne d'être reçue avec une entière confiance que Jésus-Christ est venu dans le monde pour sauver les pécheurs. Il n'est pas dit, remarque-le, que ce soit là une chose digne seulement de quelque confiance, mais d'une entière confiance, de toute la confiance dont tu es capable. Si donc tu dis en cet instant même : « Jésus est venu pour sauver les pécheurs; je le crois, je le sais ». tu n'as rien à craindre ; le salut est à toi.
        - Mais Jésus voudra-t-il bien me recevoir; moi, si vil et si indigne ? » demandes-tu peut-être. Je te répondrai par une parole de mon Sauveur lui-même : Je ne mettrai point dehors celui qui viendra à moi. - « Mais je n'ose aller à lui ! » objectes-tu encore. Si quelqu'un a soif, qu'il vienne à moi et qu'il boive, est-il écrit. As-tu soif ? soupires-tu après le pardon ? sens-tu le besoin que tu as d'un Sauveur ? as-tu soif, te dis-je ? S'il en est ainsi, ô mon frère, voici ce que te dit Dieu. le Saint-Esprit : Que celui qui voudras de l'eau vive en prenne gratuitement ! Ecoutez tous une bonne nouvelle ! C'est pour sauver que Jésus-Christ est mort ; Qui croit au Fils a la vie éternelle ; Notre salut est un don du Dieu fort ! Que Dieu vous accorde à tous la grâce d'accepter ce salut pour l'amour de son nom !