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Yves PETRAKIAN
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(tiré
du livre LES SERMONS DE WESLEY -1- )
Marc
1,15 (1767)
«
Repentez-vous et croyez à l'Evangile ». (Matthieu 1 : 15)
On suppose généralement que la repentance et la foi ne sont que la porte de la religion ; qu'elles ne sont nécessaires qu'à l'entrée de la carrière chrétienne, quand on se met en route vers le royaume de Dieu. Et cette idée peut paraître confirmée par le grand Apôtre, lorsqu'il presse les chrétiens Hébreux de « tendre à la perfection », et leur dit de « laisser les premiers principes de la doctrine de Christ », « ne posant pas de nouveau le fondement, savoir : la repentance des oeuvres mortes et la foi en Dieu » ; — ce qui signifie tout au moins qu'ils devaient laisser comparativement de côté cette repentance et cette foi qui au commencement occupaient toutes leurs pensées, — pour courir vers le prix de la vocation céleste de Dieu en Jésus-Christ ».
Et,
sans doute, il y a une repentance et une foi qui sont plus
spécialement nécessaires au commencement : une
repentance qui est la conviction d'être entièrement pécheur,
condamné et sans force, et qui précède la réception de ce
royaume de Dieu qui, comme l'enseigne le Seigneur, est au dedans
de nous » ; et une foi par laquelle nous recevons ce royaume, savoir
: « la justice, la paix et la joie par le Saint-Esprit ».
Mais
néanmoins, il y a aussi une repentance et une foi (à, prendre les
mots dans un sens un peu différent) qui sont
indispensables, lorsque nous avons déjà cru à l'Évangile et même
à tous les degrés de la vie chrétienne, pour que nous
puissions « poursuivre la course qui nous est proposée ».
Et
cette repentance et cette foi nous sont tout aussi nécessaires pour
persévérer et croître dans la grâce, que la première
foi et la première repentance l'étaient pour entrer dans le royaume
de Dieu.
Mais
dans quel sens devons-nous nous repentir et croire, étant déjà
justifiés ? C'est une question importante et digne
d'être examinée avec la plus grande attention.
I
Et, d'abord, dans quel sens devons-nous nous repentir ?
Le mot repentance désigne fréquemment un changement intérieur, le changement de disposition du péché à la sainteté. Mais ici nous le prenons dans un sens tout différent, comme désignant une sorte de connaissance de nous-mêmes, par laquelle nous nous voyons pécheurs, pécheurs coupables et sans capacité par nous-mêmes pour faire le bien, quoique nous sachions bien que nous sommes enfants de Dieu.
Il
est vrai qu'aux premiers moments de notre adoption, quand nous venons
de trouver la rédemption par le sang de Jésus, quand
L'amour de Dieu vient d'être pour la première fois répandu dans
nos cœurs, et que son royaume est établi en nous, il nous est
naturel de penser que nous ne sommes plus pécheurs, que non
seulement tous nos péchés sont couverts, mais qu'ils sont détruits.
Comme nous ne sentons alors aucun mal dans nos cœurs, nous
nous imaginons volontiers qu'il n'y en a plus.
Il
y a eu même des gens bien intentionnés qui se le sont imaginé, non
seulement alors, mais toujours depuis ce moment ; s'étant
persuadés que lorsqu'ils furent justifiés ils furent
entièrement sanctifiés. Que dis-je ? ils ont maintenu comme
règle générale qu'il en est ainsi, en dépit de l'Écriture,
de la raison et de l'expérience. Ils croient sincèrement et
soutiennent avec ardeur que par la justification tout péché
est anéanti, et que, dès ce moment, il n'y en a plus dans le coeur
du croyant, mais qu'il est entièrement pur. Mais quoique nous
reconnaissions volontiers que « celui qui croit est né de Dieu
» et que « celui qui est né de Dieu ne commet point le péché »,
nous ne pouvons pourtant accorder qu'il ne sente plus le péché
au dedans : le péché ne règne plus, mais il demeure. Et la
conviction de ce péché qui demeure dans le coeur est une des
parties principales de cette repentance dont nous parlons
maintenant.
Il
est rare, en effet, qu'il s'écoule beaucoup de temps avant que celui
qui croyait tout péché disparu ne sente qu'il reste
toujours de l'orgueil dans son coeur. Il est convaincu d'avoir eu de
lui-même, sous plusieurs rapports, une plus haute opinion qu'il
ne devait, et de s'être attribué l'honneur d'une chose reçue
et de s'en être glorifié comme s'il ne l'avait pas reçue ; et
pourtant il sait qu'il jouit de la faveur de Dieu. Il ne peut ni
ne doit abandonner sa confiance ; et toujours le Saint-Esprit
rend témoignage avec son esprit qu'il est enfant de Dieu.
Il
ne tarde pas non plus à sentir dans son coeur la propre volonté,
une volonté contraire à celle de Dieu. Il faut bien que
tout homme ait une volonté, aussi longtemps qu'il a une
intelligence. C'est une partie essentielle de la nature humaine,
comme au reste de tout être intelligent. Notre Seigneur
lui-même avait une volonté humaine, car sans cela il n'aurait pas
été homme. Mais sa volonté humaine était invariablement
soumise à la volonté, de son Père. En tout temps, en
toute occasion, et même dans l'affliction la plus profonde, il
put dire : « Non ce que je veux, mais ce que tu veux ». Mais
tel n'est pas toujours le cas, même pour un vrai croyant. Il sent
fréquemment sa volonté s'élever plus ou moins contre celle de
Dieu. Il veut, parce qu'elle plait à la nature, telle chose
qui déplaît à Dieu, et il repousse, au contraire,
parce que c'est pénible à la nature, ce qui est la volonté de
Dieu à son égard. Il est vrai que, s'il persévère dans la foi, il
combat de toutes ses forces cette disposition ; mais cela même
suppose qu'elle existe et qu'il en a conscience.
Mais
la volonté propre est, aussi bien que l'orgueil, une sorte
d'idolâtrie, et ces deux dispositions sont directement
contraires à l'amour de Dieu. La même observation s'applique à
l'amour du monde, que les vrais croyants sont également sujets
à éprouver, et que chacun d'eux ressent plus on moins, tôt ou
tard, sous une forme ou sous une autre. Lorsqu'on vient de « passer
de la mort à la vie », alors, sans doute, on ne désire que
Dieu. On peut dire en sincérité : « C'est vers ton nom et
vers ton souvenir que tend le désir de mon âme » ; — « quel
autre que toi ai-je au ciel ? voici, je n'ai pris plaisir sur la
terre qu'en toi ». Mais il n'en est pas toujours ainsi. Avec le
temps le croyant retrouvera, ne serait-ce que pour quelques moments,
« la convoitise de la chair », on « la convoitise des yeux »,
ou « l'orgueil de la vie ». Et pour peu qu'il néglige de veiller
et de prier, il peut même sentir des désirs impurs se ranimer
; il peut en être assailli avec violence jusqu'à ce qu'il ne
lui reste presque aucune force. Il peut sentir les attraits des
affections déréglées et éprouver même une forte inclination
à aimer la créature plus que le Créateur, que ce soit un enfant,
un père, un époux, une épouse, on l'ami « qu'il aime comme sa
propre âme ». Il peut éprouver, sous mille formes, le désir
des biens ou des plaisirs terrestres. Et dans la même proportion
il oubliera Dieu, ne cherchant pas en Lui son bonheur et étant par
conséquent « amateur des plaisirs plutôt que de Dieu ».
S'il
ne veille pas continuellement sur lui-même, il sentira renaître la
« convoitise des yeux » ; la convoitise de satisfaire
son imagination par quelque chose de grand, de beau ou de rare. Et
de combien de manières ce désir vient assaillir notre âme !
Peut-être par de misérables riens, tels qu'un meuble, un objet
de toilette, choses qui ne furent jamais destinées à satisfaire un
esprit immortel. Et cependant combien ne nous est-il pas
naturel, même après que nous avons « goûté les puissances
du siècle à venir », de redescendre à ces désirs insensés et
grossiers de choses « qui doivent périr par l'usage ! » Qu'il
est difficile, même à ceux qui « savent en qui ils ont cru »,
de vaincre cette convoitise des yeux, en une seule de ses
branches : la curiosité ; de la fouler constamment sous leurs
pieds ; de ne désirer aucune chose, par le seul motif qu'elle est
nouvelle !
Et
l'orgueil de la vie, que les enfants de Dieu trouvent difficile de le
vaincre entièrement ! Saint Jean parait entendre par là
à peu près ce que le monde appelle le « sentiment de l'honneur
qui vient des hommes », le désir et l'amour de la louange, et
ce qui en est inséparable, une crainte proportionnée du blâme.
Celle-ci tient de près à la fausse honte, par laquelle nous
rougissons de ce dont nous devrions nous glorifier. Et la fausse
honte marche rarement sans la crainte des hommes qui enveloppe
l'âme de mille pièges. Mais où sont les croyants, même
parmi ceux qui paraissent forts dans la foi, qui ne trouvent en
eux quelque chose de ces mauvais penchants ? Ils ne sont donc, eux
aussi, qu'imparfaitement crucifiés au monde, car la mauvaise racine
demeure encore dans leur coeur.
Ne
sentons-nous pas également d'autres dispositions aussi contraires à
l'amour du prochain que celles-là le sont à l'amour de
Dieu ? La charité « ne soupçonne point le mal ». Que nous dit à
cet égard notre conscience ? N'y-a-t-il jamais en nous ni
jalousies, ni conjectures malignes, ni soupçons déraisonnables
ou sans fondement ? Que celui qui est net à ces divers égards,
jette la première pierre contre son prochain. Qui ne sent
quelquefois d'autres dispositions ou mouvements intérieurs qu'il
sait être contraires à l'amour fraternel ? Pas de malice,
peut-être, ni de haine, nid'amertume, — mais d'envie !
surtout envers ceux qui possèdent quelque avantage réel ou supposé,
que nous désirons sans pouvoir en jouir !
N'éprouvons-nous
jamais aucun ressentiment, quand nous sommes lésés ou injuriés,
surtout par ceux que nous aimions particulièrement et
que nous nous étions le plus empressés à aider on à obliger ?
L'injustice
ou l'ingratitude n'excitent-elles jamais en nous le moindre désir de
vengeance ? le moindre désir de rendre mal pour mal, au
lieu de « surmonter le mal par le bien ? » Ici également ne
pouvons-nous pas voir tout ce qu'il y a encore en nous de contraire à
l'amour du prochain ?
La
cupidité, dans tous les genres et à tous les degrés, est sans
doute aussi contraire à cet amour qu'à l'amour de Dieu
; soit que nous désignions par là cet « amour de l'argent » qui
n'est que trop souvent « la racine de tous les maux », ou, en
général, le désir d'avoir plus, de posséder des biens plus
considérables. Et qu'il y a peu d'enfants de Dieu qui en soient
entièrement exempts ! Il est vrai qu'un grand homme, Martin
Luther, avait coutume de dire qu'il « n'avait jamais eu d'avarice »,
— non seulement depuis sa conversion, mais même « depuis sa
naissance ». Mais en ce cas je ne craindrais pas de dire qu'il
serait le seul homme né de femme, (à part Celui qui était à la
fois Dieu et homme) qui fût né sans cette passion. Je ne crois
pas même qu'il y ait une seule âme régénérée, ayant vécu assez
longtemps après sa conversion, qui ne l'ait sentie plus ou moins et
plus d'une fois, surtout dans le second sens indiqué. Nous
pouvons donc tenir pour vérité indubitable que la cupidité, et
l'orgueil, et la propre volonté, et la colère, demeurent dans
les cœurs même de ceux qui sont justifiés.
C'est
pour en avoir fait l'expérience que tant de personnes sérieuses ont
cru devoir entendre la fin du septième chapitre de
l'Épître aux Romains, non de ceux qui sont « sous la loi », qui
sont convaincus de péché, ce qui est indubitablement la pensée
de l'Apôtre, mais de ceux qui sont « sous la grâce », qui
sont « justifiés gratuitement par la rédemption qui est en Christ
». Et en un sens il est certain qu'elles ont raison il reste
encore, même chez ceux qui sont justifiés, un esprit en quelque
mesure charnel (ainsi l'apôtre dit, même aux fidèles de Corinthe :
« Vous êtes charnels » ),il reste un coeur enclin au relâchement
spirituel et toujours prêt à abandonner le Dieu vivant ;
un penchant à l'orgueil, à la propre volonté, à la colère,
à la vengeance, à l'amour du monde, en un mot
à tout mal ; une racine d'amertume qui, si elle cessait un moment
d'être comprimée, bourgeonnerait aussitôt ; et même
un tel abîme de corruption que nous ne pouvons le mesurer sans la
vive lumière d'en haut. Et la conviction de tout le péché qui
demeure ainsi dans le coeur, est la repentance qui convient à
ceux qui sont justifiés.
Mais
il nous faut être de plus convaincus que ce péché, qui demeure
dans nos cœurs, s'attache à toutes nos
paroles et à toutes nos actions. Et même il est à craindre que
beaucoup de nos paroles ne soient pas seulement mêlées de
péché, mais bien tout à fait mauvaises, car telle est, sans
doute, toute conversation contraire à la charité, tout ce qui
ne découle pas de l'amour fraternel, tout ce qui est en
désaccord avec le grand précepte : « Ce que vous voulez que les
autres vous fassent, faites-le leur aussi de même ». Tels sont
les rapports, les insinuations, les médisances, les censures de
personnes absentes ; car nul ne voudrait qu'on fit sur lui des
rapports par derrière lorsqu'il est absent. Mais combien sont
peu nombreux, même parmi les croyants, ceux qui n'ont rien à
se reprocher à cet égard ; ceux qui sont fermes à observer la
bonne vieille règle « de ne dire que du bien des morts et des
absents ! » Et, s'ils le font, s'abstiennent-ils de même de toute
vaine conversation ? Tout cela est pourtant péché est «
contriste le Saint-Esprit de Dieu », et même les hommes
rendront compte au jour du jugement de toute parole oiseuse qu'ils
auront prononcée ».
Mais
admettons que continuellement ils « veillent et prient », en sorte
qu'ils ne «tombent » pas dans cette « tentation » ;
que sans cesse ils gardent leur bouche et la porte de leurs
lèvres, s'étudiant à ce que tous leurs discours soient
accompagnés de grâce et assaisonnés de sel, et propres à
communiquer la grâce à ceux qui les entendent ; cependant, malgré
toutes leurs précautions, ne se laissent-ils pas chaque jour
glisser dans des conversations inutiles ? Et même,quand ils
s'efforcent de parler pour Dieu, leurs discours sont-ils purs et
exempts d'un mélange de
péché
? Ne trouvent-ils rien à reprendre dans leurs intentions ? Parlant
pour plaire à Dieu, ne le font-ils pas en partie pour se
plaire à eux-mêmes ? Parlent-ils uniquement pour obéir à Dieu, et
non pour faire aussi leur propre volonté ? Ou s'ils commencent
avec un « oeil simple », poursuivent-ils en regardant à
Jésus, et s'entretenant avec Lui pendant tout le temps qu'ils
s'entretiennent avec leur prochain ? Lorsqu'ils reprennent le
péché, ne sentent-ils ni colère ni malveillance envers le pécheur
? Quand ils instruisent les ignorants, n'éprouvent-ils ni orgueil,
ni préférence pour eux-mêmes ? Lorsqu'ils consolent les
affligés ou qu'ils s'excitent les uns les autres à la charité et
aux bonnes oeuvres, ne se louent-ils jamais intérieurement
eux-mêmes en se disant : « Voilà, tu as bien parlé », ou ne
découvrent-ils en eux aucun mouvement de vanité, aucun désir que
les autres pensent ainsi et en prennent sujet de les avoir en
plus grande estime ? En tout ceci, ou tout au moins à plusieurs
de ces égards, que le péché s'attache encore aux meilleurs
discours même des croyants ! En avoir la conviction, c'est
encore une face de cette repentance qui convient, même à ceux
qui sont justifiés.
Et
quant à leurs actions, combien de pêchés n'y voient-ils pas
attachés, si leur conscience est tout à faite veillée
? Dans leur nombre, combien n'y a-t-il pas d'oeuvres qu'on ne peut ni
approuver, ni même excuser, si on en juge par la parole de
Dieu, bien qu'elles semblent innocentes aux yeux du monde ? N'y
en a-t-il pas qu'ils savent eux-mêmes ne pas être pour la gloire de
Dieu ? ou même qu'ils ont faites, sans se proposer cette gloire
et sans avoir égard à Dieu ? Et parmi celles qu'ils ont
faites comme devant Dieu, n'en est-il pas plusieurs dans
lesquelles ils n'avaient pas en vue Dieu seul, faisant leur
propre volonté au moins autant que la sienne, et cherchant ce qui
leur plaît, autant et même plus que ce qui plaît à Dieu ? Et
quand ils s'efforcent de faire du bien à leur prochain,
ne sentent-ils pas en eux-mêmes plusieurs mauvaises
dispositions ? Leurs bonnes oeuvres, comme on les appelle, ne
méritent donc pas rigoureusement ce nom, puisqu'elles sont souillées
d'un tel mélange de mal : telles sont leurs oeuvres de charité.
Et dans leurs oeuvres de piété, n'y a-t-il pas le même mélange
? Lorsqu'ils écoutent la parole qui peut sauver leurs âmes,
n'ont-ils pas souvent de ces pensées qui leur donnent lieu de
craindre qu'elle ne serve à leur condamnation plutôt qu'à
leur salut ? Et n'en est-il pas souvent de même lorsqu'ils
s'efforcent, soit en public, soit en particulier ; d'offrir
leurs prières à Dieu ? Même dans ce que le culte présente de plus
solennel, dans la célébration de la Cène du Seigneur, quelles
sont leurs pensées ? Leur coeurs n'errent-ils pas souvent çà
et là, et ne sont-ils pas souvent remplis de telles imaginations que
leur sacrifice leur paraît devoir être en abomination au
Seigneur ? En sorte qu'ils ont plus de honte maintenant de
leurs meilleures oeuvres qu'ils n'en avaient auparavant de leurs
plus grands péchés.
D'autre
part, combien de péchés d'omission peuvent être mis à leur charge
! Nous savons ce que dit l'apôtre : « Celui-là donc
pèche qui sait faire le bien et qui ne le fait pas ». Mais n'y
a-t-il pas à leur connaissance des milliers d'occasions où ils
auraient pu, soit pour le corps, soit pour l'âme, faire du bien
à leurs ennemis, à des étrangers, à leurs frères, et où ils ne
l'ont pas fait ? De combien d'omissions n'ont-ils pas été
coupables dans leurs devoirs en Dieu ? Que de fois ils ont négligé
la communion, l'ouïe de la parole, la prière publique ou
secrète ! Tant il est vrai que les hommes les plus saints ont
lieu de s'écrier comme le faisait le pieux archevêque Usher, après
tant de travaux pour Dieu, et presque à son dernier soupir «
Seigneur ! pardonne-moi mes péchés d'omission ».
Mais,
outre ces omissions au dehors, ne peuvent-ils trouver au dedans
d'eux-mêmes des défectuosités sans nombre ? des
défectuosités de tout genre : envers Dieu ils n'ont ni l'amour, ni
la crainte ; ni la confiance qu'ils devraient avoir envers le
prochain ils n'ont ni l'amour qui est dû à tout enfant des
hommes, ni même celui qui est dû à tout enfant de Dieu, soit à
ceux qui sont éloignés, soit même à ceux avec qui ils sont
immédiatement en relation. Aucune disposition sainte n'atteint chez
eux le degré qu'il faudrait ; ils sont imparfaits en tout, et c'est
dans le sentiment profond qu'ils ont de cette imperfection
qu'ils sont prêts à s'écrier avec M. de Renty : « Je suis un
champ tout couvert de ronces » ; ou avec Job : «Je suis un
homme vil : je me condamne et me repens sur la poudre et la
cendre
La repentance qui convient aux enfants de Dieu renferme de plus
une conviction de culpabilité. Mais ceci doit être entendu
avec réserve et dans un sens particulier. Car il est certain qu'il «
n'y a plus de condamnation pour ceux qui sont en Jésus-Christ
», qui croient en lui, et qui, par la puissance de la foi,
marchent, non selon la chair, mais selon l'Esprit ». Et pourtant ils
ne peuvent pas plus maintenant qu'avant d'avoir cru soutenir la
stricte justice de Dieu. Celle-ci, sur tous les points que nous
venons d'indiquer, les déclare encore dignes de mort, et n'était le
sang expiatoire, elle prononcerait infailliblement leur
sentence. Ils ont donc la conviction entière qu'ils méritent encore
le châtiment, quoiqu'il soit détourné d'eux par ce moyen. Mais ici
il y a, de part et d'autre, des écueils que peu de gens savent
éviter. Ce sont les extrêmes opposés où se jettent la plupart
des hommes, les uns se croyant condamnés quand ils ne le sont
point, les autres croyant mériter d'être absous. Non, la
vérité est entre deux : ils ne méritent encore, à proprement
parler, que la damnation de l'enfer. Mais ce qu'ils méritent ne
vient point sur eux, parce qu'ils ont un avocat auprès du Père.
Sa vie, sa mort et son intercession s'interposent encore entre eux et
la condamnation.
Mais
cette repentance des croyants comprend encore la conviction de leur
entière impuissance. J'entends par là deux choses :
1°
Que maintenant pas plus qu'avant d'être justifiés ils ne sont
capables par eux-mêmes d'avoir une bonne pensée, de
former un bon désir, de prononcer une bonne parole, de faire une
bonne oeuvre ; qu'ils n'ont encore aucune sorte ni degré de
force propre, aucun pouvoir de faire le bien, ni de résister au
mal ; aucune capacité de vaincre le monde, le diable ou leur
mauvaise nature, ni même d'y résister. Ils peuvent, sans
doute, faire tout cela ; mais ce n'est point par leur propre force.
Ils ont le pouvoir de surmonter ces divers ennemis, car « le
péché n'a plus domination sur eux » ; mais cela ne vient pas
même en partie de leur nature; c'est un pur don de Dieu et qui leur
est donné, non pas tout à la fois, comme une provision
suffisante pour beaucoup d'années, mais de moment en moment.
2°
Par cette impuissance, j'entends aussi une incapacité absolue de
nous délivrer de cette culpabilité dont nous avons
encore conscience, et qui fait que nous mettons encore le châtiment
du péché ; j'entends aussi l'incapacité de faire disparaître,
je ne dirai plus par nous-mêmes, mais par ce degré même de
grâce que nous avons, soit la volonté propre, l'amour du monde, la
colère, et, en général, le penchant à abandonner Dieu, que
nous savons par expérience demeurer encore même chez les
régénérés ; soit le mal qui, malgré tous nos efforts, s'attache
à toutes nos paroles et à toutes nos actions. Joigniez-y
l'entière incapacité d'éviter toujours des discours sans charité,
et surtout sans profit, de nous garder des péchés d'omission,
et de suppléer à ce qui nous manque en toutes choses, surtout
au défaut d'amour et à l'imperfection des autres dispositions
saintes et justes que nous devons avoir pour Dieu et pour les
hommes.
Si
quelqu'un hésite à admettre cela et croit que la justification
donne la capacité de faire disparaître ces péchés, et
du coeur et de la vie, qu'il en fasse l'expérience. Qu'il essaie si,
par la grâce qu'il a déjà reçue, il peut chasser l'orgueil,
la volonté propre, ou, en général, la corruption innée.
Qu'il essaie s'il peut rendre ses paroles et ses actions pures de
tout mélange de mal ; s'il peut éviter toute conversation sans
charité et sans profit, et tout péché d'omission, et s'il peut
enfin suppléer aux nombreuses défectuosités qu'il trouve
encore en lui-même. Que, sans se laisser décourager par un ou
deux essais infructueux, il répète et répète sans cesse l'épreuve
: plus il la répétera, plus profonde deviendra sa conviction,
qu'en toutes ces choses son impuissance est entière.
Cette
vérité est réellement si évidente qu'il s'en faut peu que tous
les enfants de Dieu, ça et là dispersés, quoiqu'ils
diffèrent sur d'autres points, ne s'accordent tous à reconnaître,
que, bien que nous puissions « par l'Esprit mortifier les
oeuvres du corps », combattre et vaincre le péché, tant intérieur
qu'extérieur ; bien que nous puissions affaiblir de jour en jour nos
ennemis, nous ne pouvons cependant les expulser. Quelle que soit
la grâce donnée dans la justification, nous ne pouvons par
elle les extirper. Pour tant que nous puissions veiller et prier,
nous ne pouvons purifier entièrement nos cœurs ni
nos mains. Non, sans doute, nous ne le pouvons, jusqu'à ce
qu'il plaise à Notre Seigneur de parler encore à notre coeur,
de lui dire pour la seconde fois : « Je le veux, sois nettoyé
» ; alors seulement la lèpre disparaît ; alors seulement la
mauvaise racine, le sens charnel est détruit, alors la
corruption innée n'existe plus. Mais s'il n'y a pas de second
changement, de délivrance instantanée après la justification,
s'il n'y a pas autre chose qu'une oeuvre graduelle de Dieu
(oeuvre que personne ne conteste), alors il faut, bon gré mal gré,
nous résigner à rester pleins de souillures jusqu'à la mort,
et, dès lors, à rester jusqu'à la mort coupables et dignes de
châtiment.
Car
il est impossible que cette culpabilité cesse de peser sur nous
aussi longtemps que le péché demeure ainsi dans notre
coeur et s'attache à nos paroles et à nos actions, mais plutôt,
selon la rigueur de la justice, chaque pensée, chaque parole,
chaque acte nouveau en augmente le poids.
II
Voilà
dans quel sens nous devons nous repentir, après que nous sommes
justifiés. Et sans cette repentance nous ne pouvons
avancer. Car notre mal n'est guérissable que si nous le sentons.
Mais si nous avons cette repentance, alors nous sommes appelés
à «croire à l'Évangile ».
Ce
commandement aussi doit être pris dans un sens particulier,
différent de celui dans lequel on croit pour la
justification. Croyez la bonne nouvelle de ce grand salut que Dieu a
préparé pour tous les peuples. Croyez que Celui qui est « la
splendeur de la gloire du Père, et l'image empreinte de sa personne,
« peut sauver parfaitement ceux qui s'approchent de Dieu par Lui ».
Il est capable de vous sauver de tout le péché qui demeure
encore dans votre coeur. Il est capable de vous sauver de tout
le péché qui s'attache à toutes vos paroles et actions. Il est
capable de vous sauver des péchés d'omission et de
perfectionner en vous ce qui est défectueux. Il est vrai que quant à
l'homme c'est impossible ; mais quant à l'Homme-Dieu toutes
choses sont possibles. Car qu'y a-t-il de trop difficile pour
Celui à qui « toute puissance est donnée dans le ciel et sur la
terre ? » Il est vrai qu'il ne nous suffit pas de savoir qu'il
le peut faire : pour croire qu'il veut le faire, qu'il veut
manifester ainsi son pouvoir, il faut qu'il l'ait promis. Mais
il l'a promis ; il l'a promis surabondamment et dans les termes les
plus forts. Il nous a donné ces « grandes et précieuses promesses
» , soit dans l'Ancien, soit dans le Nouveau Testament. Ainsi
dans la Loi, la partie la plus ancienne. des oracles de Dieu,
nous lisons : « Le Seigneur ton Dieu circoncira ton coeur et le
coeur de ta postérité, afin que tu aimes l'Éternel ton Dieu
de tout ton coeur et de toute ton âme (Deutéronome 30 : 6) ».
Ainsi
dans les Psaumes : « Il rachètera Israël » — l'Israël de Dieu
— « de toutes ses iniquités ». Ainsi dans le
Prophète : « Je répandrai sur vous des eaux pures et vous serez
nettoyés ; je vous nettoierai de toutes vos souillures et de
tous vos dieux infâmes. — Je mettrai mon Esprit au dedans de vous
et je ferai que vous marcherez dans mes statuts et les
pratiquerez. Je vous délivrerai de toutes vos souillures
(Ézéchiel 36 : 25-29) ». Ainsi, enfin, dans le Nouveau
Testament : « Béni Soit le Seigneur, le Dieu d'Israël, de ce
qu'il a visité et racheté son peuple, et de ce qu'il nous a suscité
un puissant Sauveur — selon le serment qu'il avait fait à
Abraham notre père, de nous accorder qu'après avoir été
délivrés de la main de nos ennemis, nous le servirions sans
crainte, en sainteté et en justice, devant Lui, tous les jours
de notre vie (Lu 1 : 68 et suivants.) ».
Vous
êtes donc bien fondés à croire, non seulement qu'il peut, mais
encore qu'il veut faire ces choses ; qu'il veut vous
nettoyer de toute souillure, de la chair et de l'esprit, qu'il veut «
vous délivrer de toutes vos souillures ». C'est après cette
grâce que vous soupirez maintenant ; c'est de cette foi que
vous avez maintenant besoin. J'ai besoin de croire, que le grand
médecin, l'ami de mon âme, a bien la volonté de me rendre
net. Mais quand veut-il le faire ? Aujourd'hui ou demain
? Laissons-le répondre lui-même : «Aujourd'hui ; si vous
entendez » ma « voix n'endurcissez pas votre coeur ». Si vous
renvoyez à demain, vous endurcissez vos cœurs, vous refusez
d'entendre sa voix.
Croyez
donc qu'il a la volonté de vous délivrer aujourd'hui. Il veut vous
délivrer maintenant. « C'est maintenant le temps
favorable », c'est maintenant, qu'il dit : « Sois nettoyé ! »
Croyez seulement et vous ne manquerez pas d'éprouver aussitôt
que « toutes choses sont possibles pour celui qui croit ».
Continue
à croire en Celui qui t'a aimé et s'est donné pour toi, en Celui
qui « porta tes péchés en son corps sur le bois » ;
et il continuera à te sauver de toute condamnation par l'application
non interrompue de son sang expiatoire. C'est ainsi que nous
nous maintenons justifiés. Et si marchant « de foi en foi »,
nous croyons pour être nettoyés de la corruption innée, pour être
délivrés de toutes nos souillures, nous sommes pareillement
délivrés de toute cette culpabilité que nous sentions
auparavant. En sorte que nous pouvons dire non seulement : Seigneur,
il me faut constamment la vertu de ton sang ; mais encore dans
la pleine assurance de la foi ; Seigneur, j'éprouve constamment
la vertu de ton sang ! Car, par cette foi sans cesse renouvelée en
sa vie, en sa mort, en son intercession, nous sommes, de tous
points, nettoyés, et non seulement nous ne sommes plus sous la
condamnation, mais nous ne la méritons plus comme auparavant, car
le Seigneur purifie et nos cœurs et nos actions.
Par
cette même foi nous sentons toujours reposer sur nous ce pouvoir de
Christ par lequel seul nous sommes ce que nous sommes,
qui nous rend capables de persévérer dans la vie spirituelle et
sans lequel, quelque saints que nous soyons dans un moment
donné, nous serions l'instant d'après, des démons. Mais aussi
longtemps que nous retenons notre foi en Lui, « nous puisons des
eaux, avec joie, aux sources de cette délivrance ». Appuyés
sur notre Bien-Aimé, sur Christ qui est en nous l'espérance de
la gloire, qui habite dans nos cœurs par la foi, et il qui
toujours intercède pour nous à la droite de Dieu, nous
recevons son secours pour penser, dire, faire les choses qui lui
sont agréables. C'est ainsi que dans toutes leurs oeuvres, il
vient au-devant de ceux qui croient en Lui, et les fait avancer
par son constant secours, en sorte que c'est en Lui qu'est le
commencement, la continuation et la fin de tous leurs desseins,
de tous leurs discours, de toutes leurs actions. C'est ainsi que
par la communication de son Esprit, il purifie les pensées de
leurs cœurs, afin qu'ils puissent l'aimer d'un amour
parfait et glorifier dignement son saint nom.
C'est
ainsi que, chez les enfants de Dieu, la repentance et la foi se
correspondent l'une à l'autre. Par la repentance nous
sentons que le péché demeure dans nos coeurs et s'attache à nos
paroles et à nos actions par la foi nous recevons le pouvoir de
Dieu en Christ qui purifie nos cœurs et nos mains. Par la
repentance, nous nous voyons encore dignes de châtiment pour toutes
nos dispositions, paroles et actions : par la foi, nous savons
que notre « avocat auprès du Père ne cesse de plaider pour nous,
et qu'il éloigne ainsi de nous, sans cesse, la condamnation et
le châtiment. Par la repentance, nous avons la conviction
permanente de notre incapacité pour le bien ; par la foi, nous
obtenons non seulement la miséricorde, mais la « grâce pour
être secourus dans le temps convenable ». La repentance
repousse jusqu'à la possibilité d'un autre secours ; la foi accepte
tout le secours nécessaire de Celui qui a « toute puissance
dans le ciel et sur la terre ! » La repentance dit : « Sans lui
je ne puis rien » ; la foi dit : « Je puis toutes choses par Christ
qui me fortifie ». Par lui je puis non seulement vaincre, mais
expulser tous les ennemis de mon âme.
Par
lui je puis « aimer le Seigneur mon Dieu, de tout mon coeur, de
toute mon âme, de toute ma pensée et de toutes mes
forces » ; Je puis marcher dans la sainteté et dans la justice
devant Lui tous les jours de ma vie.
III
De
ce qui précède, nous pouvons aisément conclure :
1.
Combien est pernicieuse l'opinion que dès que nous sommes justifiés
nous sommes entièrement saints et que nos cœurs sont
dès lors purifiés de tout péché. Nous sommes alors, il est
vrai, délivrés, ainsi qu'il a été dit, de la domination
extérieure du péché, et la puissance du péché intérieur
est même brisée de telle sorte que nous ne sommes plus du tout
obligés ni de le suivre, ni de lui obéir ; mais il n'est point
vrai que le péché intérieur soit dès lors totalement détruit,
que l'orgueil, la volonté propre, la colère, l'amour du monde
n'aient plus de racine dans le coeur, ou que l'affection charnelle
et le penchant du coeur à s'éloigner de Dieu soient extirpés.
Supposer le contraire n'est pas non plus, comme on pourrait
croire, une erreur innocente et inoffensive. Non, elle fait un
mal immense ; elle rend tout changement ultérieur impossible ;
car évidemment ceux qui sont en santé n'ont pas besoin de
médecin, mais ceux qui se portent mal. Si donc nous croyons être
déjà tout à fait guéris, il n'y a pas lieu de chercher une
plus complète guérison. Dans cette supposition il serait absurde
d'attendre aucune autre délivrance du péché, soit graduelle, soit
instantanée.
Au contraire, la conviction profonde que nous ne sommes pas encore entièrement guéris, que nos cœurs ne sont pas tout à fait purs, qu'il y a encore en nous des sentiments charnels qui, de leur nature, sont inimitié contre Dieu, et que le corps du péché est encore là, tout entier, affaibli mais non détruit, cette conviction ne permet aucun doute sur l'absolue nécessité d'un changement plus complet. J'accorde sans doute que, dès l'instant que nous sommes justifiés, nous sommes nés de nouveau : dès cet instant nous expérimentons au dedans ce que l'Écriture appelle « un passage des ténèbres à la lumière », — de l'image de la brute et du diable à l'image de Dieu, —des sentiments terrestres, sensuels et diaboliques aux sentiments qui étaient en Jésus-Christ. Mais sommes-nous dès lors entièrement changés ? Sommes-nous complètement transformés à l'image de Celui qui nous a créés ? Bien loin de là ! Il y a toujours en nous un abîme de péché, nous le sentons, et c'est ce qui nous presse de chercher avec larmes une entière délivrance auprès de Celui qui est puissant pour sauver. De là vient que ceux d'entre les croyants qui n'ont pas la conviction de leur profonde corruption ou qui n'en ont qu'une conviction légère et doctrinale ont peu de souci de leur entière sanctification. Il se peut qu'ils admettent un tel changement pour le moment de la mort ou pour une époque antérieure qu'ils ne sauraient fixer. Mais ils ne souffrent guère d'en être privés ; ils n'en sont ni affamés, ni altérés. Ils ne sauraient l'être, jusqu'à ce qu'ils se repentent dans le sens que j'ai indiqué, jusqu'à ce que Dieu leur dévoile la face du monstre qu'ils cachent en leur sein, et leur montre l'état réel de leur âme. Alors seulement, sentant leur fardeau, ils soupireront après la délivrance. Alors, et seulement alors, ils s'écrieront dans l'angoisse de leur âme :
Brise
les liens du péché
Et
mets mon âme en liberté !
Il
n'y a de vrai repos pour moi
Que
dans la pureté d'un esprit tout à toi !
2.
Une seconde conclusion à tirer de nos réflexions, c'est qu'une
profonde conviction de notre démérite et même, dans un
certain sens, de notre coulpe, dans l'état de justification,
est absolument nécessaire pour nous faire apprécier toute la
valeur du sang expiatoire, pour nous faire sentir qu'après,
comme avant la justification, nous en avons le plus grand besoin.
Sans cela nous ne pouvons regarder le sang de l'alliance que
comme une chose commune dont nous n'avons pas maintenant grand
besoin, tous nos péchés passés étant effacés. Oui, mais si notre
coeur est encore impur, aussi bien que notre vie, il en résulte
pour nous une espèce de culpabilité toujours nouvelle qui nous
exposerait à chaque instant à une nouvelle condamnation, si nous ne
pouvions dire de notre Rédempteur :
Il
vit toujours aux cieux
Pour
plaider notre cause,
Par
son sang précieux.
Il
y a dans les paroles qui suivent une forte expression de la
repentance des croyants et de la foi qui doit en être
inséparable : En moi chaque souffle est péché ; je ne fais
point ta volonté ici-bas comme les anges dans le ciel.
Mais
la source demeure toujours ouverte ; je m'y lave les pieds, le coeur,
les mains, jusqu'à ce que je sois rendu accompli dans
l'amour ».
3.
Enfin une dernière conclusion, c'est qu'une conviction profonde de
notre extrême impuissance, de notre extrême incapacité
pour retenir ce que nous avons reçu, et plus encore pour nous
délivrer nous-mêmes de ce monde d'iniquité qui demeure dans
nos cœurs et dans nos actions, peut seule nous
enseigner à vivre véritablement de la foi en Christ, non seulement
comme étant notre sacrificateur, mais aussi comme notre roi.
C'est ce qui nous dispose réellement à « l'exalter », à «
rendre toute gloire à sa grâce, à « le recevoir comme un vrai
Christ, un parfait Sauveur, et à poser en réalité la couronne
royale sur sa tête ».
Belles
paroles ! qui n'ont que peu ou point de sens dans bien des bouches,
mais qui s'accomplissent dans toute leur force et leur
profondeur, lorsqu'ainsi nous sortons, en quelque sorte, de
nous-mêmes, pour ne plus vivre que de sa vie ; lorsque nous
rentrons nous-mêmes dans le néant, pour qu'il soit « tout en
tout ». Sa grâce toute puissante ayant alors détruit « toute
hauteur qui s'élève contre lui, il s'ensuit que toute
disposition, toute pensée, toute parole, toute action est amenée «
captive » et soumise à « l'obéissance de Christ ».