Numérisation Yves PETRAKIAN Copie autorisée pour diffusion gratuite uniquement Obligation d'indiquer la source http://456-bible.123-bible.com
Sermon 42 : LES DESSEINS DE SATAN
2
Corinthiens 2,11 (1750)
Nous n'ignorons pas ses desseins (2 Corinthiens 2:11)
(Le
mot grec employé ici par saint Paul est rendu dans nos versions
françaises par desseins : il signifie pensées, intentions,
inventions. Ce dernier sens se rapproche beaucoup de la traduction
anglaise (devices) sur laquelle est fondé le sermon de J. Wesley.
Trad.)
Les
inventions que, dans son habileté, le dieu de ce monde emploie pour
essayer de faire périr les enfants de Dieu, ou tout au moins de
tourmenter ceux qu'il ne peut faire périr, de les embarrasser et de
les retarder dans la course qui leur a été proposée, ces
inventions sont aussi innombrables que les étoiles du ciel ou les
sables de la mer. Mais je ne me propose de parler ici que d'une seule
de ces inventions, laquelle, toutefois, revêt diverses formes dans
l'application, et qui tend à « diviser contre lui-même (Matthieu
12 : 25 : 26) » l’Évangile, à en démolir une
portion en se servant pour cela de l'autre.
Le
royaume intérieur des cieux, celui qui est établi dans le cœur de
tous ceux qui se repentent et croient à l’Évangile, « consiste
en justice, paix et joie par le Saint-Esprit (Romains 14 : 17) ».
Le plus petit « enfant en Christ (1Corinthiens 3 : 1) », sait
par expérience que nous jouissons de ces biens dès l'instant où
nous croyons en Jésus. Mais ce ne sont là que les prémices de son
Esprit ; ce n'est pas encore la moisson. Et, quoique ces
bénédictions soient plus grandes qu'on ne saurait le penser, nous
espérons voir de plus grandes choses encore. Nous comptons arriver à
aimer le Seigneur notre Dieu, non seulement comme nous le faisons
actuellement, d'une affection sincère, quoique faible, mais bien
« de tout notre cœur, de toute notre âme, de toute notre
pensée et de toute notre force (Marc 12 : 30) ». Nous
attendons de Dieu la grâce d' « être toujours joyeux, de
prier sans cesse, et de rendre grâces en toutes choses ; car
c'est la volonté de Dieu en Jésus-Christ à notre égard (1Thessaloniciens 5 :
16-18) »
Nous
comptons être rendus « parfaits dans l'amour (1Jean 4 :
18) » dans « l'amour qui bannit toute crainte accompagnée
de peine » et tout désir qui ne tend pas à glorifier celui
que nous aimons, qui ne tend pas à l'aimer et à le servir de plus
en plus. Nous nous attendons à éprouver un tel accroissement de la
connaissance et de l'amour de notre Dieu Sauveur que nous pourrons
« marcher dans la lumière comme il est lui-même dans la
lumière (1Jean 1 : 7) ». Nous croyons qu'il nous sera
donné d' « avoir les mêmes sentiments que Jésus-Christ a eus
(Philippiens 2 : 5) », d'aimer tous les hommes assez pour être
prêts à « donner notre vie (Jean 15 : 13 ; 1Jean 3 :
168) » pour eux, assez pour être par cet amour délivrés de
la colère et de l'orgueil, et de toute autre disposition
malveillante. Nous comptons être « purifiés de toutes nos
idoles (Ézéchiel 36 : 25) », et « de toute souillure de
la chair et de l'esprit (2Corinthiens 7 : 1) », être nettoyés de
toutes nos impuretés tant intérieures qu'extérieures, enfin être
« purifiés comme lui aussi est pur (1Jean 3 : 3) ».
Nous
comptons sur la promesse de celui qui ne peut mentir, qu'un jour
viendra certainement où, par toutes nos paroles comme par toutes nos
actions, nous ferons sa sainte volonté sur la terre comme elle est
faite dans le ciel ; où « nos discours seront toujours
accompagnés de grâce et assaisonnés de sel, de manière que nous
sachions répondre à chacun comme il faut (Colossiens 4 : 6) ; »
où, « soit que nous mangions, ou que nous buvions, on que nous
fassions quelque autre chose, nous ferons tout pour la gloire de Dieu
(1Cornthiens 10 : 31) ; » où, enfin, « soit par nos
paroles, soit par nos actions, nous ferons tout au nom du Seigneur
Jésus, rendant grâces par lui à Dieu notre Père (Colossiens 3 :
17).
Eh
bien, l'invention capitale de Satan consiste à détruire l'œuvre
que Dieu a déjà faite dans notre âme, ou du moins à en retarder
le développement, par l'attente même où nous sommes d'une œuvre
plus grande. Je me propose donc en ce moment, d'abord, de signaler
les divers moyens qu'il emploie pour atteindre ce but ; ensuite,
d'indiquer comment nous pouvons repousser ces traits enflammés du
Malin, et même nous élever plus haut à l'aide de ce qu'il avait
préparé pour nous faire tomber.
I
Je
dois donc, tout d'abord, signaler les divers moyens employés par
Satan pour essayer de ruiner l'œuvre que Dieu a déjà faite dans
notre âme, ou tout au moins d'en retarder le développement par le
fait même de notre attente d'une œuvre plus grande. En premier
lieu, il s'efforce de rabattre la joie que nous avons dans le
Seigneur en nous invitant à considérer combien nous sommes par
nous-mêmes vils, pécheurs et indignes, et qu'il faut que nous
soyons bien autrement changés que nous ne le sommes, sans quoi nous
ne saurions voir le Seigneur. Si nous étions assurés que, jusqu'à
l'heure de la mort, nous devons demeurer ce que nous sommes,
peut-être trouverions-nous dans cette nécessité une sorte de
consolation, si faible qu'elle fût. Mais nous savons que nous ne
sommes pas condamnés à rester dans cet état ; nous sommes
certains qu'un plus grand changement doit se produire et que, si le
péché n'est pas entièrement anéanti dès cette vie, nous ne
pourrons voir Dieu dans sa gloire. Notre adversaire rusé en profite
pour rabattre la joie que pourrait nous causer ce que nous avons déjà
obtenu, en nous rappelant dans un but pervers tout ce que nous ne
possédons pas et la nécessité absolue de le posséder. Il arrive
donc que nous ne pouvons pas être joyeux à cause de ce que nous
avons, parce qu'il y a bien davantage que nous n'avons pas. Nous ne
pouvons plus savourer comme il faut la bonté de Dieu qui a fait pour
nous de si grandes choses, parce qu'il en reste de beaucoup plus
grandes qu'il n'a pas encore faites. Il arrive même que plus Dieu
produit en nous une profonde conviction de notre manque de sainteté
actuel, plus nous avons dans le cœur un ardent désir de cette
sainteté complète qu'il a promise, et plus aussi nous sommes tentés
de faire peu de cas des dons accordés par le Seigneur, et de ne pas
apprécier à sa juste valeur ce que nous avons déjà reçu, à
cause de ce que nous n'avons pas reçu.
Mais
si Satan peut gagner ce point de rabattre notre joie, il s'attaquera
bientôt à notre paix. Il nous suggérera des pensées comme
celles-ci : « Es-tu en état de voir Dieu ? Il a les
yeux trop purs pour voir le mal (Habaquq 1 : 13). Comment donc
oserais-tu t'imaginer qu'il te contemple avec approbation ? Dieu
est saint : tu es impur. Quelle union y a-t-il entre la lumière
et les ténèbres ? (2Co 6 : 14) Comment serait-il possible
que, souillé comme tu l'es, tu possédasses la faveur de Dieu ?
Sans doute tu aperçois le but, le prix de ta céleste vocation ;
mais ne vois-tu pas qu'il est bien loin de toi ? Et comment
peux-tu croire que tous tes péchés sont effacés ? Ne faut-il
pas, avant cela, que tu sois plus prés de Dieu, que tu lui
ressembles davantage ? » C'est ainsi qu'il s'efforcera,
non seulement d'ébranler votre paix, mais d'en renverser même les
fondements, de vous ramener par degrés et insensiblement à votre
point de départ, c'est-à-dire à chercher la justification par vos
œuvres ou par votre propre justice, à chercher en vous-mêmes ce
qui vous fera agréer par Dieu ou tout au moins quelque chose
d'indispensable pour que vous soyez agréés.
Et
si nous tenons bon, si nous disons : « Personne ne peut
poser d'autre fondement que celui qui a été posé, qui est Jésus
Christ (1Corinthiens 2 : 11) ; » je suis « justifié
gratuitement par sa grâce, par la rédemption qui est en
Jésus-Christ (Romains 3 : 23) ; » Satan nous répliquera sans
se lasser : « Mais on connaît. l'arbre par ses fruits.
Portes-tu les fruits de la justification ? As-tu les mêmes
sentiments que Jésus-Christ a eus ? Es-tu mort au péché et,
vivant pour la justice ? As-tu été rendu conforme à Christ
dans sa mort et connais-tu le pouvoir de sa résurrection ? »
Alors, comparant en nous-mêmes les faibles résultats obtenus avec
l'ampleur des promesses, nous serons tout près d'arriver à ces
tristes conclusions : « Bien certainement Dieu ne m'a pas
dit que tous mes péchés m'étaient pardonnés ! Bien
certainement je n'ai pas obtenu la rémission de mes fautes. Car
quelle part ai-je dans l'héritage des saints ? »
Mais
c'est surtout au moment de la maladie et de la souffrance que Satan y
insistera de toutes ses forces : « Celui qui ne peut
mentir n'a-t-il pas dit : Sans la sanctification, personne ne
verra le Seigneur ? (Hébreux 12 : 14) Et toi, tu n'es pas
saint ! tu le sais bien, car tu n'ignores pas que la sainteté,
c'est une ressemblance parfaite avec Dieu. Et combien tu es
au-dessous de cela : à peine l'entrevois-tu ! Tune peux
pas y arriver. Ainsi tous tes efforts ont été vains. Tout ce que tu
as enduré, tu l'as enduré pour néant. Tu as dépensé tes forces
inutilement. Tu es encore dans tes péchés, et tu y périras
finalement ! » Et c'est de cette façon que, si vous ne
tenez pas vos regards invariablement fixés sur celui qui a porté
vos péchés, Satan vous ramènera sous le joug de cette « crainte
de la mort », par laquelle si longtemps vous fûtes
« assujettis à la servitude (Hébreux 2 : 15) ». C'est
ainsi qu'il diminuera, s'il ne les détruit pas entièrement, la paix
aussi bien que la joie que vous aviez dans le Seigneur.
Mais
le chef-d'œuvre de sa ruse est encore à venir. Non content de
battre en brèche votre paix et votre joie, il portera ses efforts
encore plus loin, jusqu'à assaillir votre justice elle-même. Il
tâchera d'ébranler et, s'il le peut, de ruiner la sainteté que
vous avez déjà obtenue, et cela en profitant de cette espérance
même que vous avez de recevoir davantage, de posséder un jour
l'image parfaite du Seigneur.
Le
procédé qu'il emploie pour atteindre son but a été partiellement
indiqué dans les remarques qui précèdent. Car, tout d'abord ;
lorsqu'il s'attaque à votre joie dans le Seigneur, il s'attaque du
même coup à votre sainteté, attendu que la joie du Saint-Esprit
contribue admirablement à entretenir toutes les dispositions
saintes ; attendu qu'elle est un instrument précieux entre les
mains de Dieu pour avancer son œuvre dans l'âme croyante. Celle
joie aide puissamment à pratiquer la sanctification tant extérieure
qu'intérieure. Elle affermit nos mains pour que nous poursuivions
« les œuvres de notre foi et les travaux de notre charité
(1Thessaloniciens 1 : 3) », pour que nous combattions courageusement.
« dans le bon combat de la foi, remportant la vie éternelle
(1Timothée 6 : 12) ». Dieu a expressément voulu que celle joie
fit contrepoids à nos souffrances du dedans et du dehors, et que,
par son moyen ; fussent « fortifiés, les mains qui sont
affaiblies et les genoux qui sont relâchés (Hébreux 12 : 12) ».
Conséquemment tout ce qui tend à diminuer notre joie dans le
Seigneur, met obstacle dans la même mesure à notre sanctification.
Et c'est de cette manière que Satan, en ébranlant notre joie,
entrave aussi notre sanctification.
Les
mêmes effets se produiront s'il réussit, de quelque façon que ce
soit, à détruire ou à ébranler notre paix. Car la paix de Dieu
est, elle aussi, un moyen précieux d'imprimer plus parfaitement
l'image de Dieu en nous. Rien peut-être ne contribue plus au
développement de la sainteté que cette tranquillité d'esprit
permanente, cette sérénité d'une âme qui s'appuie sur Dieu, ce
repos si calme qu'on trouve dans le sang de Jésus. Privés de cela,
nous ne pouvons guère croître en grâce et dans la connaissance
vitale de notre Seigneur Jésus-Christ. Car toute crainte, sauf
pourtant la crainte filiale et pleine de tendresse, glace et
engourdit l'âme. Elle arrête le jeu de tous les ressorts de la vie
spirituelle ; elle suspend les battements du cœur dans son élan
vers Dieu. Le doute embourbe l'âme en quelque sorte, et elle reste
là attachée à l'ornière. Nos progrès dans la sainteté sont donc
entravés dans la mesure où nous sommes sous l'empire de l'un ou
l'autre de ces sentiments.
En
même temps qu'il s'efforce de trouver, dans notre conviction de la
nécessité de l'amour parfait, un moyen d'ébranler notre paix par
des doutes et des craintes, notre habile adversaire tache d'affaiblir
ou même de détruire notre foi. C'est qu'en effet notre foi et notre
paix sont étroitement liées, si étroitement qu'elles doivent
subsister ou périr ensemble. Tant que la foi persiste, nous
conservons la paix : notre cœur demeure ferme aussi longtemps
qu'il croit au Seigneur. Mais si nous lâchons notre foi, notre
confiance filiale en ce Dieu qui aime et qui pardonne, c'en est fait
de notre paix ; car le fondement même en est renversé. Ce
fondement est celui de notre sainteté aussi bien que celui de notre
paix. Aussi tout ce qui l'ébranle ébranle en nous la base de notre
sainteté. Sans cette foi, en effet, sans le sentiment constant que
« Christ m'a aimé et s'est donné pour moi (Galates 2 :
20) », sans cette conviction permanente que Dieu, pour l'amour
de Christ, est apaisé envers moi pécheur, il est impossible que
j'aime Dieu. « Nous l'aimons parce qu'il nous a aimés le
premier (1Jean 4 : 19) », et nous l'aimons d'autant plus que
nous avons une conviction plus forte et plus nette du fait qu'il nous
a aimés et nous a reçus en son Fils. Mais si nous n'aimons pas
Dieu, nous ne pouvons aimer notre prochain comme nous-mêmes, et nous
ne pouvons, conséquemment, posséder les dispositions convenables
soit vis-à-vis de Dieu, soit vis-à-vis des hommes. Donc, tout ce
qui affaiblit notre foi doit nécessairement au même degré entraver
notre sanctification. Et c'est là le moyen le plus sûr et aussi le
plus prompt de ruiner toute sainteté ; car cela n'agit pas
seulement sur quelque trait du caractère chrétien, cela n'affecte
pas seulement quelque grâce ou quelque fruit de l'Esprit :
c'est un procédé qui, s'il peut réussir, déracinera en nous
l'œuvre divine tout entière.
Il
n'est donc pas étonnant que ce soit sur ce point que le prince des
ténèbres de ce monde déploie toute sa puissance. C'est ce que
notre expérience nous confirme. Il est, en effet, plus facile
d'imaginer que de décrire la violence incroyable des tentations qui
assaillent à cet égard ceux qui ont faim et soif de justice. Quand
une clarté vive et puissante vient leur montrer, d'un côté,
combien leur cœur est désespérément mauvais, et, de l'autre ;
à quelle sainteté sans tache ils sont appelés en Jésus-Christ ;
d'un côté, la profondeur de leur dépravation et leur éloignement
absolu de Dieu, de l'autre, la hauteur de la gloire du Seigneur, de
cette image du Saint des saints selon laquelle ils doivent être
renouvelés : alors il arrive bien souvent que tout courage les
abandonne et qu'ils seraient prêts à s'écrier : « C'est
impossible pour Dieu lui-même !» Ils semblent alors sur
le point de renoncer à leur foi et à leur espérance, d'abandonner
cette confiance à l'aide de laquelle ils pourront tout surmonter et
tout faire par Christ qui les fortifie, cette confiance par laquelle,
« après avoir fait la volonté de Dieu, ils remporteront
l'effet de sa promesse (Hébreux 10 : 35,36) ».
S'ils
« conservent jusqu'à la fin ce qui les soutient dès le
commencement (Hébreux 3 : 14) », ils remporteront certainement
l'effet de la promesse de Dieu qui embrasse et le Temps et
l'Éternité. Mais voici un autre piège tendu devant nos pas. Tandis
que nous soupirons ardemment après la réalisation de cette promesse
en ce qui touche à la vie présente, après « la liberté
glorieuse des enfants de Dieu (Romains 8 : 21) », il peut se
faire que, sans nous en apercevoir, nous arrivions à négliger de
penser à « la gloire à venir qui doit être manifestée (Romains
8 : 18) ». Il se peut que nos regards se détournent
insensiblement de cette couronne que le juste Juge a promis de donner
au grand jour « à tous ceux qui auront aimé son avènement
(2Timothée 4 : 8) ; » et que nous cessions de contempler
l'héritage incorruptible qui nous est réservé dans les cieux. Cela
aussi serait au détriment de nos âmes et mettrait obstacle à notre
sanctification. Car nous avons besoin, pour être soutenus en courant
la course qui nous est proposée, de ne jamais perdre de vue le but.
Ce fut ainsi encouragé et « parce qu'il avait en vue la
rémunération » que Moïse autrefois « choisit, d'être
affligé avec le peuple de Dieu plutôt que de jouir pour un peu de
temps des délices du péché, regardant l'opprobre de Christ comme
des richesses plus grandes que les trésors de l'Égypte.
Il est même dit de celui qui fut plus grand que Moïse, que, « à cause de la joie qui lui était proposée, il a souffert la croix, méprisant l'ignominie, et s'est assis à la droite du trône de Dieu (Hébreux 12 : 2) » Nous pouvons apprendre par cela qu'à plus forte raison nous avons besoin de regarder à la joie qui nous est proposée, afin que nous puissions porter la croix, quelle qu'elle soit, que nous imposera la sagesse divine, et marcher à la gloire par la sainteté.
Tout
en tendant à cette gloire aussi bien qu'à la glorieuse liberté qui
y conduit, nous pouvons être exposés à tomber dans un autre piège
du Diable, piège au moyen duquel il tâche d'enlacer les enfants de
Dieu. C'est de prendre trop « souci du lendemain (Matthieu 6 :
34) » et d'oublier de mettre à profit « aujourd'hui (Hébreux
3 : 13) ». Nous pourrions vivre dans l'attente de l'amour
parfait et ne pas mettre en œuvre l'amour déjà répandu dans nos
cœurs. Il ne manque pas d'exemples de personnes qui ont de cette
façon reçu un grand dommage. Elles étaient tellement préoccupées
de ce qu'elles devaient recevoir plus tard, qu'elles en négligeaient
absolument ce qu'elles avaient déjà reçu. Dans leur attente de
recevoir cinq talents de plus, elles ont enterré leur unique talent,
ou du moins elles ne l'ont pas fait valoir, comme elles auraient pu
le faire, à la gloire de Dieu et pour le bien de leurs propres âmes.
C'est
ainsi que l'ennemi rusé de Dieu et des hommes s'efforce de rendre
inutile le conseil de Dieu, en divisant l’Évangile contre
lui-même, de façon à ce qu'une portion en renverse l'autre, le
commencement de l'œuvre du Seigneur dans l'âme étant ruiné par
l'attente même d'une œuvre plus parfaite. Nous venons de voir
quelques-uns des moyens par lesquels il cherche à atteindre ce
résultat : il tâche de tarir pour nous les sources de la
sainteté. Mais il y arrive aussi par une méthode plus directe,
c'est-à-dire en nous faisant trouver dans cette espérance bénie
une occasion de nous laisser aller à des sentiments contraires à la
sainteté.
Par
exemple, lorsque notre cœur a faim et soif de l'accomplissement de
toutes « les grandes et précieuses promesses (2Pierre 1 :
4) » quand nous soupirons après la plénitude de Dieu comme le
cerf après les eaux courantes, quand notre âme, pleine
d'ardents désirs, s'écrie « Pourquoi son char tarde-t-il à
venir ? (Juges 5 : 28) » Satan ne laisse pas échapper
cette occasion de nous provoquer au murmure contre Dieu. En pareil
cas, il déploie toute son habileté, toutes ses ressources, pour
nous amener, si possible, dans un moment de surprise, à nous
plaindre de ce que le Seigneur diffère ainsi sa venue ; il
tâchera de produire chez nous tout au moins un peu de mécontentement
et d'impatience, peut-être de l'envie à l'égard de ceux que nous
croyons avoir déjà obtenu le prix de leur céleste vocation. Il
sait parfaitement qu'en donnant lieu à quelqu'un de ces mauvais
sentiments, nous démolissons l'édifice que nous voudrions bâtir.
Une telle manière de rechercher la sainteté parfaite fait que nous
en sommes plus loin qu'auparavant. Il y a même grand danger que
notre « dernière condition ne devienne pire que la première
(2Pierre 2 : 29) », comme pour ceux au sujet desquels l'apôtre
écrivait ces paroles terribles : « Il leur eût mieux
valu de n'avoir point connu la voie de la justice que de se
détourner, après l'avoir connue, du saint commandement qui leur
avait été donné (2Pierre 2 : 21).
Satan
compte aussi obtenir de cette façon un autre avantage, qui est de
mettre le bon chemin en mauvais renom. Il sait bien que fort peu de
personnes peuvent (sans parler d'un trop grand nombre qui pourraient,
mais ne veulent pas) distinguer entre l'abus éventuel d'une doctrine
et sa tendance naturelle. Il profite de cela pour confondre
perpétuellement les deux choses à propos de la doctrine de la
perfection chrétienne, afin d'inspirer aux hommes qui ne se tiennent
pas en garde, des préventions contre les précieuses promesses du
Seigneur. Et combien souvent, combien généralement, j'allais dire
combien invariablement il y réussit ! Car, où sont ceux qui,
après avoir constaté quelques conséquences fâcheuses résultant
accidentellement de cette doctrine, ne vont pas tout droit à cette
conclusion que c'est là sa tendance naturelle, et ne s'empressent
pas de dire « Voyez quels fruits cette doctrine porte ! »
entendant par là que tels sont ses fruits naturels et nécessaires.
Mais ce n'est pas cela : ce sont des fruits qui peuvent provenir
accidentellement de l'abus d'une vérité importante et précieuse.
Or, l'abus d'une doctrine biblique quelconque n'entraîne pas la
suppression de son usage. L'infidélité de l'homme qui corrompt son
droit chemin, n'anéantit pas non plus la promesse de Dieu. Oh non !
que Dieu soit reconnu véritable et tout homme menteur. La
parole de l’Éternel subsistera. « Celui qui a fait les
promesses est fidèle (Hébreux 10 : 23) », « et il le
fera aussi (1Thessaloniciens 5 : 24) ». Ne nous laissons pas entraîner
à « abandonner jamais les espérances de l’Évangile (Colossiens 1 :
23) » Tâchons plutôt de découvrir comment on peut repousser
ces traits enflammés du Malin et même faire de plus grands progrès
au moyen des choses sur lesquelles Satan comptait pour nous faire
tomber. Tel est le.second point que nous voulons examiner.
lI
Et
d'abord, Satan vient-il essayer de rabattre votre joie qui est dans
le Seigneur, en vous rappelant votre état de péché et en y
ajoutant ceci que, sans une sainteté complète et parfaite, personne
ne verra le Seigneur ! Vous pouvez lui renvoyer son projectile
aussi longtemps que, par la grâce de Dieu, tout en sentant
profondément votre indignité, vous vous réjouirez d'autant plus
dans l'espérance ferme que vous serez délivrés de tout cela. Tant
que vous retiendrez cette espérance, tout mauvais sentiment que vous
éprouvez peut servir non à diminuer, mais à augmenter votre joie
pleine d'humilité. Car vous pouvez dire : « Ceci, et cela
encore, doit être anéanti par la présence du Seigneur. Comme la
cire fond au feu, ainsi tout ce mal fondra devant sa face ». De
cette façon, plus est grand le changement qui doit s'accomplir
encore dans votre âme, et plus vous devez triompher en l’Éternel et
vous réjouir dans le Dieu de votre salut, en celui qui a déjà fait
pour vous de si grandes choses et qui en fera d'encore plus grandes.
En
second lieu, si Satan cherche à ébranler violemment votre paix par
des insinuations comme celle-ci : « Dieu est saint ;
toi tu ne l'es pas. Tu es à une distance infinie de cette
sanctification sans laquelle tu ne peux voir Dieu. Comment donc
pourrais-tu jouir de sa faveur ? Comment peux-tu te figurer que
tu es justifié ? » prenez d'autant plus garde de vous
tenir fermement attachés à ceci : « Ce n'est pas par des
œuvres de justice que j'ai pu faire que je puis être trouvé en lui
(Philippiens 3 : 9), être « reçu en son bien-aimé (Éphésiens 1 :
6 — d'après la version anglaise.) », ayant, non ma propre
justice pour cause absolue ou partielle de ma justification devant
Dieu, mais la justice « qui vient de la foi en Christ, savoir
la justice qui vient de Dieu par la foi (Philippiens 3 : 9) ».
Oh ! que cette vérité soit comme un collier à votre cou ;
écrivez-la sur les tables de vos cœurs ; portez-la comme un
bracelet autour de votre bras, comme un fronteau entre vos yeux :
« Je suis justifié gratuitement par sa grâce, par la
rédemption qui est en Jésus-Christ (Romains 3 : 23) »
Appréciez et chérissez toujours plus cette précieuse vérité :
« Vous êtes sauvés par grâce par la foi (Éphésiens 2 : 8) ».
Admirez de plus en plus la libéralité de la grâce de Dieu, en ce
qu'il « a tellement aimé le monde qu'il a donné son Fils
unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point mais qu'il
ait la vie éternelle (Jean 3 : 16) ». C'est ainsi que le
sentiment, de votre misère d'un côté et d'un autre votre attente
de la sainteté contribueront l'un et l'autre à affermir votre paix
et à la rendre « comme un fleuve (Esaïe 48 : 18) ».
Alors cette paix coulera avec un cours tranquille, malgré les
montagnes de l'impiété, qui seront aplanies au jour où le Seigneur
viendra prendre entière possession de votre cœur. Ni la maladie, ni
la souffrance, ni l'approche de la mort ne pourront vous
causer des doutes ou de la crainte. Vous savez que, pour Dieu, un
jour, une heure, un instant sont comme mille ans. Il ne saurait être
arrêté par des limites de temps dans l'œuvre qu'il lui reste à
accomplir dans votre âme. Le moment voulu par Dieu est, toujours le
meilleur moment. Ne te mets donc en peine, de rien. Expose-lui
seulement tes besoins, sans te laisser aller au doute ou à la
crainte, avec des actions de grâces, puisque tu sais d'avance
qu'il ne t'épargnera aucun bien.
En
troisième lieu, plus vous vous verrez tentés de jeter votre
bouclier, d'abandonner votre foi, votre confiance en l'amour de Dieu,
plus il vous faudra prendre garde de bien conserver « les
choses auxquelles vous êtes parvenus (Philippiens 3 : 16 – d'après
la version anglaise) », et plus vous devrez vous efforcer de
« rallumer le don de Dieu qui est en vous (2Timothée 1 : 6) ».
Ne lâchez jamais cette foi qui peut dire : « J'ai un
avocat auprès du Père, Jésus-Christ le juste (1Jean 2 : 1) ; »
« si je vis encore dans ce corps, je vis dans la foi au Fils de
Dieu qui m'a aimé et qui s'est donné soi-même pour moi (Galates 2 :
20) ». Que ce soit là ta gloire et ta couronne de joie. Et
prends garde « que personne ne prenne ta couronne (Apocalypse 3 :
11) ». Retiens bien ceci : « Pour moi, je sais que
mon Rédempteur est vivant, et qu'il demeurera le dernier sur la
terre (Job 19 : 25) » et ceci : « J'ai
maintenant la rédemption par son sang la rémission des péchés
(Éphésiens 1 : 7) ». Alors, rempli de toute sorte de paix et de
joie en croyant, cours, dans cette paix et cette joie de la foi,
cours vers le renouvellement de ton âme tout entière à l'image de
celui qui te créa. Et, en attendant cela, crie continuellement à
Dieu pour qu'il te fasse voir le prix de ta vocation céleste, non
pas tel que Satan te le montre, sous une forme terrible et
épouvantable, mais dans la beauté si réelle qui lui appartient ;
non pas comme quelque chose qu'il te faut posséder sous peine
d'aller en enfer, mais comme une grâce que tu peux recevoir et qui
te conduira au Ciel. Considère-le comme le don le plus digne d'envie
que Dieu ait en réserve dans les trésors de ses grandes
miséricordes. Car si tu l'aperçois ainsi sous son vrai jour, tu
auras toujours plus faim et soif de le posséder ; ton âme
entière soupirera après Dieu et après cette glorieuse conformité
à son image. Et, ayant obtenu par la grâce de Dieu une espérance
ferme de ces bénédictions et une puissante consolation, ton cœur
ne sera plus lassé ni languissant ; tu marcheras en avant
jusqu'à ce que tu atteignes le but.
Soutenu
par cette force que donne la foi, cours aussi vers la gloire. A vrai
dire, ces deux buts n'en font qu'un ; Dieu a, dès le
commencement, uni ces trois choses pardon, sainteté, ciel. Et
pourquoi l'homme les séparerait-il ? Gardons-nous en bien !
Ne brisons pas un seul anneau de cette chaîne d'or : « Dieu
m'a pardonné pour l'amour de Christ ; il me transforme
maintenant à son image ; bientôt il me rendra digne de lui et
m'admettra en sa présence. Il m'a justifié par le sang de son Fils,
et quand je serai pleinement sanctifié par son Esprit, je ne
tarderai pas à monter à la nouvelle Jérusalem, à « la cité
du Dieu vivant (Hébreux 12 : 22) ». Oui, dans peu de temps je
parviendrai « à l'assemblée et à l’Église des
premiers-nés..., à Dieu le juge de tous et à Jésus le
médiateur de la nouvelle alliance (Hébreux 12 : 23) ».
Bientôt les ombres vont
se dissiper ; bientôt luira sur moi le jour l'Eternité !
Bientôt je boirai à ce « fleuve d'eau vive qui sort du trône
de Dieu et de l'Agneau (Apocalypse 22 : 1) ». Là tous « ses
serviteurs le serviront ; ils verront sa face, et son nom sera
écrit sur leurs fronts. Il n'y aura plus là de nuit, et ils
n'auront point besoin de lampe ni de la lumière du soleil parce que
le Seigneur Dieu les éclairera ; et ils règneront aux siècles
des siècles (Apocalypse 22 : 3,5) ».
Quand
vous aurez ainsi « goûté la bonne parole de Dieu, et les
puissances du monde à venir (Hébreux 6 : 5) », vous ne
pourrez plus murmurer contre le Seigneur de ce que vous n'êtes pas
encore en état de participer à l'héritage des saints dans la
lumière. Au lieu de vous plaindre de ce que vous n'êtes point
encore pleinement délivrés, vous louerez Dieu de ce qu'il vous a
délivrés au point où vous l'êtes. Vous bénirez le Seigneur pour
ce qu'il a fait, et vous regarderez cela comme les arrhes de ce qu'il
va faire. Vous ne vous impatienterez pas contre lui de ce que vous
n'êtes pas encore transformés : vous le bénirez de ce que
vous devez l'être, de ce que le salut, la délivrance de tout péché,
est maintenant plus près de vous que lorsque vous avez cru (Romains 13 :
11). Au lieu de vous tourmenter inutilement de ce que le moment n'est
pas encore tout à fait arrivé, vous l'attendrez paisiblement,
calmement, sachant qu'il viendra et ne tardera point (Hébreux 10 :
37). Vous pouvez donc endurer bravement le présent, le fardeau du
péché qui reste encore en vous, d'autant plus qu'il n'y doit pas
toujours rester. Encore un peu de temps, et il disparaîtra
entièrement. Sachez seulement attendre le moment du Seigneur ;
fortifiez-vous et il consolera votre cœur ; mettez votre
confiance en l'Éternel.
Et
si vous en rencontrez qui vous paraissent, autant que vous pouvez en
juger (car Dieu seul sonde les cœurs), déjà en possession de ce
qu'ils avaient espéré, déjà perfectionnés dans l'amour, loin
d'être jaloux de la grâce que Dieu leur a accordée,
réjouissez-vous-en et que votre cœur y trouve de la consolation.
Glorifiez Dieu à leur sujet. « Quand un membre est honoré,
tous les autres membres n'en ont-ils pas la joie ? (1Corinthiens 12 :
26) » Au lieu d'éprouver de l'envie ou de vous laisser aller à
des pensées de méfiance à leur égard, bénissez Dieu pour cet
encouragement. Réjouissez-vous de ce que Dieu vous donne là une
nouvelle preuve de la fidélité avec laquelle il accomplit toutes
ses promesses. Et faites d'autant plus d'efforts « pour
parvenir à ce pourquoi Jésus Christ vous a pris à lui (Philippiens 3 :
12 – d'après la version anglaise »
Pour
qu'il en soit ainsi, rachetez le temps. Profitez du moment présent.
Saisissez toutes les occasions d'avancer dans la grâce et de faire
du bien. Que la pensée que vous pourrez recevoir plus de grâces
demain, ne vous fasse pas négliger celles d'aujourd'hui. Vous avez
actuellement un talent ; si vous espérez en obtenir cinq,
raison de plus pour que vous fassiez valoir celui que vous avez. Plus
vous comptez recevoir du Seigneur plus vous devez travailler pour lui
dès maintenant. A chaque jour suffit sa grâce. Dieu répand sur
vous ses bienfaits en ce moment ; en ce moment donc montrez-vous
économe fidèle des grâces accordées par le Seigneur
aujourd'hui. Quel que puisse être demain, il faut qu'aujourd'hui
vous « apportiez tous vos soins à ajouter à votre foi le
courage, la tempérance, la patience, l'amour fraternel (2Pierre 1 :
5-7) », et la crainte de Dieu, jusqu'au jour où vous arriverez
à l'amour pur et parfait. « Que ces choses soient en vous et
qu'elles y abondent (2Pierre 1 : 8) » dés aujourd'hui. Ne
soyez aujourd'hui ni paresseux ni stérile. « Et, par ce moyen,
l'entrée au royaume éternel de notre Seigneur et Sauveur
Jésus-Christ vous sera pleinement accordée ( (2Pierre 1 : 11) ».
En
dernier lieu, si par le passé vous avez abusé de cette glorieuse
espérance d'être un jour saint comme lui est saint, n'allez pas la
rejeter loin de vous pour cela. Que l'abus cesse, et que
l'usage soit maintenu. Oui, usez-en aujourd'hui pour la plus grande
gloire de Dieu, et pour le bien de votre propre âme. Dans une
foi inébranlable, dans une parfaite sérénité d'âme, dans la
pleine assurance que donne l'espérance, étant toujours joyeux à
cause de ce que Dieu a déjà fait, marchez vers la perfection. Et ;
croissant de jour en jour dans la connaissance de notre Seigneur
Jésus-Christ, allant de force en force, dans la résignation, dans
la patience, dans une humble reconnaissance pour ce que vous avez
obtenu et pour ce que vous obtiendrez encore, courez. « la
course qui vous est proposée, regardant à Jésus (Hébreux 12 :
1,2) », jusqu'à ce qu'enfin, par l'amour parfait, vous entriez
dans sa gloire !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire