Numérisation
Yves PETRAKIAN
(tiré du livre LES SERMONS DE WESLEY -1- )
Ces vérités, une fois établies, il est facile de montrer, en second lieu, comme je me suis proposé de le faire, combien il serait insensé de se confier en la justice qui est de la loi, et quelle sagesse il y a à se soumettre à la justice qui est par la foi.
Qui que tu sois donc, ô toi qui désires le pardon de tes péchés et la réconciliation avec Dieu, ne dis pas en ton coeur : Il me faut d'abord faire ceci ; il me faut premièrement surmonter tout péché, renoncer à toute mauvaise parole et à toute mauvaise action, et faire toute sorte de bien à tous les hommes ; ou il me faut d'abord aller à l'église ; il me faut communier, entendre plus de sermons, dire un plus grand nombre de prières. Hélas ! mon frère, tu t'égares complètement. Tu ne connais pas encore la justice de Dieu ; tu cherches encore à établir ta propre justice comme base de ta réconciliation ; ne sais-tu pas que jusqu'à ce que tu sois réconcilié, avec Dieu, tu ne peux rien faire que pécher ? Pourquoi donc dis-tu, il faut premièrement que je fasse ceci ou cela, et ensuite je croirai ? Non, crois d'abord. Crois au Seigneur Jésus qui est la propitiation pour tes péchés. Pose d'abord ce bon fondement, tout ira bien ensuite.
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(tiré du livre LES SERMONS DE WESLEY -1- )
Romains
10,5-8 ()1746
«
Moïse décrit la justice qui est par la loi, en disant, que l'homme
qui fera ces choses vivra par elles; Mais la justice qui
est par la foi parle ainsi : Ne dis point en ton coeur : Qui montera
au ciel? C'est vouloir en faire descendre Christ. Ou : Qui
descendra dans l'abîme ? C'est rappeler Christ d'entre les
morts. Mais que dit-elle ? La parole est près de toi, dans ta bouche
et dans ton coeur. C'est la parole de la foi que nous prêchons
». (Romains 10 : 5-8)
Dans
ce texte, l'apôtre ne met pas en opposition l'alliance donnée par
Moïse, et l'alliance donnée par Christ. S'imaginer qu'il en
est ainsi, ce serait ne pas observer que la dernière partie de
ces paroles aussi bien que la première fut prononcée par Moïse
lui-même, et adressée au peuple d'Israël, touchant l'alliance
qui existait alors (De 30 : 11,12,14). Mais c'est l'alliance de grâce
que Dieu a établie, par Christ, avec les hommes de tous les
âges, aussi bien avant la dispensation juive, et sous cette
dispensation que depuis l'époque où Dieu fut manifesté en chair ;
c'est cette alliance, disons-nous, que saint Paul met ici en
opposition avec l'alliance des oeuvres faite avec Adam, encore dans
le paradis terrestre, et qui était ordinairement regardée, surtout
par les Juifs que mentionne l'apôtre, comme la seule que Dieu
eût traitée avec l'homme.
C'est
de ces Juifs que parle saint Paul avec tant d'amour lorsqu'il dit au
commencement de ce chapitre : «
Le souhait de mon coeur, et la prière que je fais à Dieu pour
Israël, c'est qu'ils soient sauvés. Car je leur rends ce
témoignage qu'ils ont du zèle pour Dieu, mais ce zèle est
sans connaissance, parce que ne connaissant point la justice de
Dieu », la
justification qui vient de sa pure grâce et de sa miséricorde
par lesquelles il nous pardonne gratuitement nos péchés, à cause
du Fils de son amour, en vertu de la rédemption qui est en
Jésus ; — ne connaissant point cette justice, «
et cherchant à établir leur propre justice »,
leur propre sainteté, antérieure à la foi en Celui qui justifie
le méchant, comme base de leur pardon et de leur réception en
grâce, «
ils ne se sont point soumis à la justice de Dieu »,
et en conséquence, ils ont suivi une voie d'erreur qui conduit à
la mort.
Ils
ne comprenaient point que «
Christ est la fin de la loi, pour justifier tous ceux qui croient »
; que
par l'oblation de lui-même qu'il a offerte une fois, il a mis fin à
la première loi ou alliance (donnée par Dieu, non pas à
Moïse, mais à Adam dans l'état d'innocence), loi dont la stricte
teneur était, et cela sans concession aucune «
Fais ceci, et tu vivras ». Ils
ne savaient pas qu'en annulant cette première alliance, Christ
nous en a acquis une meilleure, savoir : Crois et vis, «
crois et tu seras sauvé » ;
sauvé maintenant de la coulpe et l'empire du péché, et par
conséquent, aussi de la condamnation qui en est le salaire.
Et
encore aujourd'hui, combien d'hommes aussi ignorants que l'étaient
ces Juifs incrédules ! Combien même parmi ceux qui portent le
nom de Christ, qui « ont du zèle pour Dieu », mais un zèle sans
connaissance ! qui cherchent encore à établir leur propre justice
comme fondement de leur pardon et de la faveur divine, et en
conséquence, refusent résolument de se soumettre à la justice de
Dieu ! En vérité, mes frères, le souhait de mon coeur et la prière
que je fais à Dieu pour vous, c'est que vous soyez sauvés !
Afin
d'ôter de votre route cette dangereuse pierre d'achoppement, je vais
essayer de vous montrer, premièrement : quelle est la justice
qui vient de la loi, et quelle est la justice qui vient de la foi ;
— secondement : d'un côté la folie qu'il y a à se confier
en la justice de la loi, et de l'autre, la sagesse qui se trouve
dans une entière soumission à la justice de la foi.
I
Et
d'abord, la justice qui est de la loi parle ainsi «
L'homme qui fera ces choses vivra par elles ». Observe
toujours et parfaitement tous les commandements pour les pratiquer,
et alors tu vivras à jamais. — Cette loi ou alliance
(ordinairement appelée l'alliance des oeuvres), donnée par Dieu
à l'homme en Eden, exigeait de lui une obéissance parfaite en
tout point, une obéissance entière et sans aucun défaut ;
elle l'exigeait comme condition de la conservation éternelle de la
sainteté et du bonheur que possédait Adam à sa création.
Cette
loi demandait à l'homme l'accomplissement de toute justice,
intérieure et extérieure, négative et positive ; — elle lui
ordonnait, non seulement de s'abstenir de toute parole oiseuse
et d'éviter toute mauvaise oeuvre, mais encore de garder chaque
affection, chaque désir et chaque pensée dans l'obéissance à
la volonté de Dieu ; elle exigeait qu'il demeurât, dans son coeur
et dans toute sa conduite, saint comme Celui qui l'avait créé
est saint ; — qu'il fût pur de coeur comme Dieu est pur,
parfait comme son Père qui est aux cieux est parfait. — L'alliance
des oeuvres commandait à l'homme d'aimer le Seigneur son Dieu
de tout son coeur, de toute son âme, de toute sa force, de toute
sa pensée ; — d'aimer aussi comme Dieu l'avait aimé lui-même,
toute âme créée par Dieu ; elle voulait que, pratiquant cette
bonté universelle, l'homme demeurât en Dieu qui est amour et Dieu
en lui ; — qu'il servit le Seigneur son Dieu de toutes ses forces,
et qu'en toutes choses il se proposât uniquement sa gloire.
Voir
ce qu'exigeait la justice de la loi, voilà les choses que devait
pratiquer l'homme, afin de pouvoir vivre par elles. Mais la loi
requérait, de plus, que cette entière obéissance à Dieu, cette
sainteté intérieure et extérieure, cette conformité de coeur
et de vie à la volonté du Seigneur, fussent parfaites quant à
leur degré. L'alliance des oeuvres ne pouvait souffrir sur le
moindre point, ni violation, ni concession ; elle ne tolérait
ni faiblesse, ni imperfection, soit quant à la loi qui s'applique
à l'intérieur, soit quant à celle qui règle l'extérieur. Et en
supposant que chaque commandement relatif aux choses extérieures
fût gardé, cette obéissance ne suffisait pas, à moins qu'elle
ne fût rendue, par l'homme, de toute sa force ; dans la mesure la
plus élevée et de la manière la plus parfaite. Les exigences
de cette alliance n'étaient pas satisfaites, bien que l'homme aimât
Dieu de chacune de ses facultés, s'il ne l'aimait encore de la
pleine capacité de chaque faculté, de toute la puissance de
son âme.
La
justice de la loi réclamait encore une chose indispensable ; elle
voulait que cette obéissance universelle et cette parfaite
sainteté du coeur fussent aussi entièrement exemptes d'interruption
; qu'elles ne connussent aucune intermission, à dater du moment
où Dieu créa l'homme et lui donna le souffle, jusqu'au jour où
son état d'épreuve devait finir, et où il serait mis pleinement
en possession de la vie éternelle.
La
justice de la loi parle donc ainsi : Toi, ô Homme de Dieu !
persévère dans l'amour de Dieu, et conserve en toi son image
en laquelle tu as été formé. Si tu veux demeurer dans la vie,
garde les commandements qui sont maintenant écrits dans ton
coeur. Aime le Seigneur ton Dieu de tout ton coeur. Aime, à
l'égal de toi-même, toute âme qu'il a faite. Ne désire rien que
Dieu. Rapporte-Lui chacune de tes pensées, de tes paroles et de
tes oeuvres. Que pas un mouvement de ton âme ou de ton corps ne
t'éloigne de Lui, qui est le but et le prix de ta haute vocation, et
que tout ce qui est en toi, chaque puissance, chaque faculté de
ton âme bénisse son saint nom, en toute chose, au plus haut
degré, à chaque moment de ton existence. Fais cela et tu vivras. Ta
lumière brillera, ton amour s'enflammera de plus en plus,
jusqu'à ce que tu sois admis aux cieux, dans la maison de Dieu, pour
régner avec lui au siècle des siècles.
Mais
voici comment parle la justice qui est par la foi : «
Ne dis point en ton coeur : Qui montera au ciel ? C'est vouloir
en faire descendre Christ » (comme
si c'était quelque impossibilité que Dieu te demande
d'accomplir pour obtenir sa faveur) ; «
ou : Qui descendra dans l'abîme ? C'est rappeler Christ des
morts ». (Comme
si ce qui doit te procurer l'amour de Dieu n'était pas encore
accompli.) « Mais que dit-elle ? La parole », suivant la
teneur de laquelle tu peux être constitué héritier de la vie
éternelle, «
cette parole est près de toi, dans ta bouche et dans ton coeur.
C'est là la parole de la foi que nous prêchons » ;
la nouvelle alliance que Dieu, par Jésus-Christ, a maintenant
établie avec l'homme pécheur.
Par
la justice qui vient de la foi, il faut entendre la condition de
justification (et par conséquent, de salut présent et final,
si nous y persévérons jusqu'à la fin) que Dieu donna à l'homme
déchu, par les mérites et la médiation de son Fils unique.
Bientôt après la chute, elle fut en partie révélée à Adam dans
la promesse faite à lui et à sa postérité, que la semence de la
femme écraserait la tête du serpent (Genèse 3.15 Elle
fut un peu plus clairement révélée à Abraham par l'ange de Dieu,
qui du ciel lui parla et lui dit : «
J'ai juré par moi-même, dit l'Éternel, que toutes les nations de
la terre seront bénies en ta postérité (Genèse 22 : 15,18)
».
Cette révélation fut encore faite d'une manière plus complète
à Moïse, à David et aux prophètes qui suivirent, et par eux elle
se communiqua à une partie du peuple de Dieu, dans ses
générations successives. Mais la masse des fidèles
mêmes l'ignorait, et elle n'était clairement comprise que d'un
très petit nombre. Ajoutons que la vie et l'immortalité ne
furent jamais mises en évidence pour les anciens Juifs, comme elles
le sont maintenant pour nous par l’Évangile.
Ainsi
donc, cette alliance ne dit point à l'homme pécheur : Rends à Dieu
une obéissance sans péché, et tu vivras. Si telle était la
condition, l'homme ne recevrait pas plus d'avantage de tout ce
que Christ a fait et souffert pour lui, que si, pour avoir la
vie, il devait monter au ciel et en faire redescendre Christ, ou
descendre dans l'abîme, dans le monde invisible, et ramener Christ
des morts. Cette alliance ne demande point d'impossibilité, ce
serait se moquer de la faiblesse humaine. Ce qu'elle exige est à
la vérité impossible à l'homme abandonné à lui-même, mais non
plus à l'homme assisté de l'Esprit de Dieu. En effet, à
proprement parler, l'alliance de grâce ne nous oblige à faire
aucune chose, comme absolument et indispensablement nécessaire à
notre justification, si ce n'est de croire en Celui qui, pour
l'amour de son Fils, et à cause de la propitiation qu'il a
faite, justifie le pécheur qui n'a pas fait les oeuvres, et lui
impute sa foi à justice. C'est ainsi qu'Abraham crut
à l’Éternel, qui lui imputa cela, à justice (Genèse 15 :
6) ; « puis
il reçut le signe de la circoncision, comme sceau de la,
justice de la foi, — afin qu'il fût le père de tous ceux qui
croient, — et
que la justice leur fût aussi imputée (Romains 4 : 11). Or,
ce n'est pas seulement pour lui qu'il est écrit que cela (la
foi) lui fut imputé à justice, mais c'est encore pour nous, à qui
il sera aussi imputé »,
à qui la foi sera imputée à justice et tiendra lieu d'obéissance
parfaite, afin que nous soyons reçus en grâce par Dieu, si «
nous croyons en Celui qui a ressuscité des morts le Seigneur Jésus,
lequel a été livré (à la mort) pour nos offenses, et qui est
ressuscité pour notre justification. (Romains 4 : 23,25) » ;
pour donner l'assurance de la rémission des péchés et d'une
seconde vie à venir à ceux qui croient.
Que
dit donc l'alliance de pardon, d'amour et de miséricorde gratuite ?
— Crois au Seigneur Jésus et tu seras sauvé. Au jour que tu
croiras, tu vivras certainement ; tu seras rétabli dans la faveur
de Dieu ; et tu sauras que dans sa bienveillance il y a la vie.
Tu seras sauvé de la malédiction et de la colère de Dieu, tu
seras ressuscité de la mort du péché à la vie de la justice, et
si, jusqu'à la fin, tu persévères à croire en Jésus, tu ne
connaîtras jamais la seconde mort ; mais après avoir souffert avec
ton Sauveur, avec lui aussi tu vivras et tu régneras au siècle des
siècles.
Maintenant
cette parole est près de toi. Cette condition de vie est claire,
facile, toujours possible à remplir ; elle est dans ta bouche
et dans ton coeur, par l'action de l'Esprit de Dieu. Dès l'instant
où tu croiras dans ton coeur eu Celui que Dieu a ressuscité,
des morts, et où « tu confesseras de ta bouche le Seigneur
Jésus » comme ton Seigneur et ton Dieu, tu seras sauvé de la
condamnation, de la culpabilité, de ta peine de tes péchés
passés, et tu obtiendras le pouvoir de servir Dieu dans une sainteté
véritable tout le reste de ta vie.
Quelle
est donc la différence entre la justice de la loi et la justice de
la foi ? Entre la première alliance, ou alliance des oeuvres,
et la seconde, ou alliance de grâce ? La différence
essentielle, immuable, est celle-ci : la première suppose que
celui qui la reçoit est déjà saint et heureux, créé à l'image
de Dieu, et possédant sa faveur, et elle prescrit à quelle
condition il peut se maintenir dans cet état, dans l'amour et
dans la joie, dans la vie et dans l'immortalité. La seconde suppose
que celui qui la reçoit est actuellement corrompu et
malheureux, privé de l'image glorieuse de Dieu, sous le poids
de la colère divine, et se précipitant par le péché qui a déjà
fait mourir son âme, vers la mort du corps et la mort éternelle
; — à l'homme, dans cette situation, elle présente la condition à
laquelle il peut retrouver la perle qu'il a perdue, savoir : la
faveur de Dieu et la grâce d'être formé de nouveau à son
image. Elle lui dit à quelle condition il peut recouvrer la vie de
Dieu dans son âme et être rendu à la connaissance et à
l'amour de son Créateur, ce qui est le commencement de la
vie éternelle.
Sous
l'alliance des oeuvres, afin que l'homme pût conserver la faveur de
Dieu, sa connaissance et son amour, et qu'il demeurât dans la
sainteté et dans le bonheur, il était encore exigé de
l'homme parfait une obéissance parfaite et constante à chaque
point de la loi, taudis que sous l'alliance de grâce, pour
recouvrer la faveur et la vie de Dieu, il n'est imposé à l'homme
d'autre condition que la foi, une foi vivante en Celui qui, par
Christ, justifie celui qui n'a pas obéi.
Encore
une fois, l'alliance des oeuvres exigeait d'Adam et de tous ses
enfants qu'ils payassent eux-mêmes le prix qui devait leur
assurer toutes les bénédictions futures de Dieu. Mais, sous
l'alliance de grâce, puisque nous n'avons rien pour payer, Dieu
nous quitte gratuitement toute notre dette, pourvu seulement que
nous croyions en Celui qui a payé le prix pour nous, et qui s'est
donné lui-même en «
propitiation pour nos péchés et pour ceux du monde entier ».
Ainsi
donc, la première alliance demandait ce qui est maintenant bien loin
de tous les enfants des hommes, savoir, une obéissance sans
péché, qui ne se trouve certes pas chez ceux qui sont conçus et
nés dans le péché. Au lieu que la seconde alliance exige ce qui
est près de nous ; voici son langage : Tu es péché ; Dieu est
amour ! Par le péché, tu t'es privé de la gloire de Dieu, mais il
y a miséricorde auprès de Lui. Apporte donc tous tes péchés
à ce Dieu qui pardonne, et ils s'évanouiront comme un nuage.
Si tu n'étais pas méchant, il ne pourrait te justifier comme
méchant ; mais maintenant, approche-toi de lui dans la pleine
assurance de la foi. Dieu parle, et tout est fait ! Ne crains
point, crois seulement ; car même le Dieu juste justifie tous ceux
qui croient en Jésus.
II
Ces vérités, une fois établies, il est facile de montrer, en second lieu, comme je me suis proposé de le faire, combien il serait insensé de se confier en la justice qui est de la loi, et quelle sagesse il y a à se soumettre à la justice qui est par la foi.
Nous
pouvons déjà clairement voir la folie de ceux qui se confient
encore en la justice qui vient de la loi, dont les termes sont :
Fais cela et tu vivras. Ils commencent mal; leur premier pas est
une erreur fondamentale, car, avant de réclamer une seule
bénédiction d'après les termes de cette alliance, ils doivent
se supposer dans l'état de celui avec qui elle fut contractée. Mais
que cette supposition est vaine, puisque cette alliance fut
faite avec Adam dans l'état d'innocence ! Quel défaut de
solidité dans tout l'édifice qui repose sur un pareil fondement !
Combien sont insensés ceux qui bâtissent ainsi sur le sable,
et paraissent n'avoir jamais considéré que l'alliance des
oeuvres ne fût point donnée à l'homme mort dans ses fautes et
ses péchés, mais à l'homme vivant à Dieu, ne connaissant
point le péché, et étant saint comme Dieu est saint ! — Ils
oublient que cette alliance n'eut jamais pour but de rendre la
faveur et la vie de Dieu une fois perdues, mais seulement de
les conserver et de les augmenter jusqu'à ce qu'elles fussent
complètes dans la vie éternelle.
Ceux
qui cherchent ainsi à établir leur propre justice qui vient de la
loi, n'examinent pas non plus quelle est l'espèce d'obéissance
on de justice que la loi exige indispensablement. Cette
obéissance doit être parfaite et entière en tout point ;
sinon, la loi n'est pas satisfaite. Mais qui de vous pourra rendre
à Dieu une telle obéissance et par conséquent, avoir la vie par ce
moyen ? Qui de vous accomplit, ne fût-ce que les commandements
extérieurs de Dieu, jusqu'à un iota ? ne faisant aucune chose,
petite ou grande, que Dieu ait défendue ? ne négligeant rien de ce
qu'il ordonne ? ne disant pas une parole oiseuse ? ayant
toujours une conversation propre à «
communiquer la grâce à ceux qui vous entendent ? » Et
soit que vous mangiez ou que vous buviez, ou quelque chose que
vous fassiez, faisant tout pour la gloire de Dieu ?
Combien
moins encore pouvez-vous garder tous les commandements intérieurs de
Dieu, ceux qui demandent que chaque émotion, chaque sentiment
de votre âme, soit la sainteté à l'Éternel !
Pouvez-vous
aimer Dieu de tout votre coeur ? Pouvez-vous aimer tous les hommes
comme vous aimez votre propre âme ? Pouvez-vous prier sans
cesse, et en toutes choses rendre grâce ? Pouvez-vous avoir
Dieu continuellement devant les yeux, et tenir dans l'obéissance à
sa loi, toutes vos pensées, tous vos désirs et toutes vos
affections?
Vous
devriez considérer, en outre, que la justice de la loi veut, non
seulement l'observation de tout commandement de Dieu, qu'il soit
négatif ou positif, qu'il se rapporte au coeur ou à la
conduite extérieure, mais aussi qu'elle réclame la perfection
quant au degré de cette obéissance. Dans tous les cas
possibles la voix de la loi est : Tu serviras le Seigneur ton Dieu de
toutes tes forces. — Elle n'admet aucune espèce
d'affaiblissement des obligations qu'elle impose ; elle n'excuse
aucun défaut ; elle condamne tout acte qui n'atteint pas la
pleine mesure de l'obéissance, et prononce aussitôt une
malédiction contre le coupable ; en un mot, elle n'a égard qu'aux
règles invariables de la justice ; elle dit : Je ne sais ce que
c'est que la miséricorde.
Qui
donc pourra comparaître devant un juge si prompt à remarquer le mal
? Que ceux-là sont faibles, qui désirent être cités devant
le tribunal où nul homme vivant, aucun descendant d'Adam, ne
sera justifié ! Car en supposant que nous observions maintenant
chaque commandement de toutes nos forces, une seule faute que
nous ayons jamais commise suffit pour détruire complètement
tout notre droit à la vie. Si nous avons jamais péché dans un seul
point, c'en est fait de cette justice ; car la loi condamne tous
ceux dont l'obéissance n'est pas sans interruption, aussi bien
que parfaite. De sorte que, suivant la sentence que prononce cette
loi, celui qui a une fois péché n'a plus rien à attendre
qu'un jugement terrible et un feu ardent qui doit dévorer
les adversaires de Dieu.
N'est-ce
donc pas le comble de la folie pour l'homme déchu que de chercher la
vie par cette justice ? l'homme qui a été formé dans
l'iniquité, et que sa mère à conçu dans le péché ? ; qui
est, par nature, terrestre, sensuel, diabolique, tout-à-fait
corrompu et abominable ; l'homme en qui, jusqu'à ce qu'il ait
trouvé grâce, n'habite aucun bien ; l'homme qui, de lui-même, ne
peut avoir une bonne pensée ; qui n'est que péché, qu'une
masse impure, et dont chaque souffle est un péché ; l'homme,
dont les transgressions de parole ou d'action surpassent en nombre
les cheveux de sa tête ! Quelle stupidité, quelle absurdité,
chez un ver de terre si impur, si coupable, si impuissant, que
de rêver à obtenir la faveur de Dieu par sa propre justice, et de
prétendre à la vie par la justice qui est de la loi !
Et
maintenant ; les considérations qui montrent la folie qu'il y a à
se confier dans la justice de la loi, prouvent aussi combien il
est sage de se soumettre à la justice qui est de Dieu par la foi.
Il serait facile de le montrer par rapport à chacune des
considérations qui précèdent. Mais laissant cela de côté,
nous voyons clairement quelle sagesse il y a dans le premier pas que
fait le pécheur dans cette voie ; nous voulons dire dans le
renoncement à notre propre justice, puisque ce renoncement est
un acte conforme à la vérité et à la nature même des choses.
Car, qu'est-ce autre chose sinon un aveu de notre véritable
état, et qui est fait du coeur aussi bien que des lèvres ?
Renoncer
à notre justice propre, n'est-ce pas reconnaître que nous apportons
avec nous dans le monde une nature pécheresse et corrompue,
plus corrompue même qu'il n'est aisé de le concevoir ou de
l'exprimer ? que cette nature nous porte à faire tout ce qui est
mal, et nous éloigne de tout ce qui est bien ? que nous sommes
remplis d'orgueil, de volonté propre, de passions désordonnées, de
désirs insensés, d'affections basses et déréglées ? que nous
sommes amateurs du monde et des plaisirs plus que de Dieu ?
Renoncer à notre propre justice, n'est-ce pas avouer que notre vie
n'a pas été meilleure que notre coeur, et que nos voies ont
été impies et injustes, de sorte que nos péchés, soit de
parole, soit d'action, ont égalé en nombre les étoiles des cieux ?
que pour toutes ces raisons nous sommes sous le déplaisir de
Celui dont les yeux sont trop purs pour voir le mal ? N'est-ce
pas confesser que nous ne méritons que l'indignation, la colère
et la mort, tristes gages du péché ? que ni par notre justice
(car en vérité nous n'en avons point), ni par nos oeuvres (fruits
mauvais d'un arbre mauvais), nous ne pouvons apaiser la colère
de Dieu, ni détourner la peine que nous avons justement
encourue ? Enfin, par le renoncement à notre propre justice, ne
reconnaissons-nous pas que, laissés à nous-mêmes, nous ne
ferons qu'empirer et nous plonger toujours plus avant dans le péché
? Offensant Dieu de plus en plus, tant par nos mauvaises oeuvres que
par les mauvaises dispositions de notre coeur charnel, jusqu'à
ce qu'ayant comblé la mesure de nos iniquités, nous attirions
sur nous une prompte destruction ? — Cette confession
n'exprime-t-elle pas le véritable état dans lequel nous sommes
naturellement ? S'il en est ainsi, reconnaître cet état, du coeur
et des lèvres, c'est-à-dire rejeter tout espoir eu notre
propre justice, en cette justice qui vient de la loi, c'est agir
conformément à la vraie nature des choses, et en conséquence,
c'est montrer une véritable sagesse.
La
sagesse de se soumettre à la justice de la foi ressort encore de la
considération que cette justice est celle de Dieu ; — je veux
dire que c'est le moyen de réconciliation avec Lui, que Dieu
lui-même a choisi et établi, non seulement comme Dieu de
justice, mais aussi comme Maître souverain du ciel, de la terre
et de toutes les créatures qu'il a, formées. Maintenant, comme il
ne convient à personne de dire à Dieu : Que fais-tu ? Et comme
aucun homme, à moins qu'il ne soit complètement privé
d'intelligence, ne songera à disputer avec Celui qui est plus
puissant que lui, et dont la domination s'étend sur toutes
choses, c'est donc faire preuve d'une vraie sagesse et d'une
saine intelligence, que d'acquiescer à ce que Dieu a choisi et
de dire en ceci comme nous devons le faire en toutes choses : «
C'est le Seigneur, qu'il fasse ce qui lui semblera bon ».
On
peut remarquer en outre que c'est par pure grâce, par amour gratuit,
par une miséricorde dont l'homme pécheur était indigne, que
Dieu lui a accordé nu moyen de réconciliation avec Lui-même, afin
que nous ne fussions pas entièrement rejetés et effacés de son
souvenir. Par conséquent, quel que soit le moyen qu'il plaît à
Dieu d'adopter dans sa tendre miséricorde et dans sa bonté
toute gratuite, pour réintégrer dans sa faveur des ennemis qui
se sont si ouvertement et si obstinément rebellés contre lui,
il y a assurément sagesse de notre part à accepter ce moyen avec
une vive reconnaissance.
Ajoutons
une dernière considération. — La sagesse consiste dans l'emploi
des meilleurs moyens pour arriver au meilleur but. Or, le plus
excellent but que puisse se proposer la créature, c'est de
trouver le bonheur en Dieu ; le meilleur but que puisse
poursuivre une créature déchue, c'est le recouvrement de la
faveur de Dieu et de la sainteté qui est son image. Et le meilleur,
ou plutôt le seul moyen, sous le ciel, donné à l'homme pour
retrouver cette faveur de Dieu qui est préférable à la vie,
et cette ressemblance à Dieu qui est la vraie vie de l'âme ; ce
moyen, dis-je, c'est de se soumettre à la justice qui est par
la foi, c'est de croire au Fils unique de Dieu.
III
Qui que tu sois donc, ô toi qui désires le pardon de tes péchés et la réconciliation avec Dieu, ne dis pas en ton coeur : Il me faut d'abord faire ceci ; il me faut premièrement surmonter tout péché, renoncer à toute mauvaise parole et à toute mauvaise action, et faire toute sorte de bien à tous les hommes ; ou il me faut d'abord aller à l'église ; il me faut communier, entendre plus de sermons, dire un plus grand nombre de prières. Hélas ! mon frère, tu t'égares complètement. Tu ne connais pas encore la justice de Dieu ; tu cherches encore à établir ta propre justice comme base de ta réconciliation ; ne sais-tu pas que jusqu'à ce que tu sois réconcilié, avec Dieu, tu ne peux rien faire que pécher ? Pourquoi donc dis-tu, il faut premièrement que je fasse ceci ou cela, et ensuite je croirai ? Non, crois d'abord. Crois au Seigneur Jésus qui est la propitiation pour tes péchés. Pose d'abord ce bon fondement, tout ira bien ensuite.
Ne
dis pas non plus en ton coeur : Je ne puis encore être reçu en
grâce, car je ne suis pas assez bon.
Qui
est assez bon, qui fut jamais assez bon pour mériter la faveur de
Dieu ? Entre les fils d'Adam s'en trouva-t-il jamais un qui fût
assez bon pour cela ? Et jusqu'à la fin de toutes choses, y en
aura-t-il jamais un qui le soit ? Quant à toi, tu n'es
nullement bon ; en toi n'habite aucun bien, et tu ne seras jamais
bon jusqu'à ce que tu croies en Jésus. Au contraire, tu te
reconnaîtras de plus en plus mauvais. Mais est-il nécessaire
de devenir plus mauvais pour être pardonné de Dieu ? N'es-tu
pas déjà assez mauvais ? Oui, certes, tu es assez mauvais ;
Dieu le sait, et tu ne peux le nier toi-même.
Tout
est prêt maintenant ; ne diffère donc plus de croire au Sauveur.
Lève-toi, et sois lavé de tes péchés. La source est ouverte
; c'est maintenant le temps de te blanchir dans le sang de
l'Agneau. Christ te purifiera maintenant comme avec l'hysope, et
tu seras net : il te lavera et tu seras plus blanc que la neige.
Ne
dis pas : Mais je ne suis pas assez repentant, je ne sens pas assez
de douleur à cause de mes péchés. Je le sais ; plût à Dieu
que tu sentisses tes péchés et que tu en fusses mille fois plus
affligé que tu ne l'es ! Mais n'attends pas pour cela. Il se
peut que Dieu brise ton coeur, non avant que tu croies, mais
lorsque tu croiras, et par le moyen de la foi. Il peut arriver que tu
ne verses pas beaucoup de larmes jusqu'à ce que tu aimes
beaucoup, parce qu'il t'aura été beaucoup pardonné.
Dès
maintenant regarde à Jésus, vois combien il t'aime ! Que pouvait-il
faire pour toi qu'il ne l'ait fait ? Ô Agneau de Dieu, fût-il
jamais douleur comme ta douleur ! fût-il jamais amour semblable
à ton amour ! — Pécheur, tiens les yeux constamment fixés
sur lui jusqu'à ce qu'il te regarde et qu'il brise la dureté
de ton coeur ; alors ta tête se fondra en eaux et tes yeux seront
comme des fontaines de larmes.
Garde-toi
encore de dire : Il faut que je fasse quelque chose de plus, avant
d'aller à Christ. Si ton Seigneur tardait à venir, j'admets
qu'il serait bon et juste d'attendre son apparition en faisant
selon ton pouvoir tout ce qu'il t'a commandé. Mais une telle
supposition n'est pas nécessaire. Comment sais-tu qu'il doit
tarder ? Il apparaîtra peut-être comme l'aurore avant la lumière
du matin. Ne lui prescris pas le moment où il doit venir ; mais
attends-le à toute heure. Maintenant, il est proche et à la
porte.
Et
dans quel but voudrais-tu attendre d'avoir plus de sincérité avant
que tes péchés fussent effacés ? Serait-ce pour te rendre
plus digne de la grâce de Dieu ? Hélas ! tu cherches encore à
établir ta propre justice. Il te fera miséricorde, non parce
que tu en es digne, mais parce que ses compassions sont infinies
; non parce que tu es juste, mais parce que Jésus-Christ a expié
tes péchés.
Mais
encore si la sincérité est une bonne chose, pourquoi espères-tu la
trouver en toi avant d'avoir la foi, puisque la foi seule
est la source de tout ce qui est véritablement saint et bon
? Jusques à quand donc oublieras-tu, que quoi que tu fasses,
quoi que tu possèdes, avant d'avoir reçu le pardon de tes
péchés, rien de tout cela n'a ta moindre valeur devant Dieu pour te
procurer ce pardon ? Il y a plus : il faut que tu jettes tout
cela derrière toi, que tu le foules aux pieds, que tu n'en
fasses aucun cas ; autrement jamais tu ne trouveras grâce devant
Dieu. Car jusqu'à ce que tu en sois venu à ce complet
renoncement à tes oeuvres, tu ne peux demander grâce comme un
pauvre pécheur coupable, perdu, ruiné, n'ayant rien à faire
valoir auprès de Dieu, rien à lui offrir, sinon les seuls
mérites de son Fils bien-aimé, qui t'a aimé et qui s'est, donné
lui-même pour toi.
Enfin,
qui que tu sois, ô homme qui es sous la sentence de mort, qui sens
que tu es un pécheur condamné, et que la colère de Dieu pèse
sur toi, le Seigneur ne te dit pas : Fais cela ; —
garde parfaitement tous mes commandements et tu vivras ; —
mais crois au Seigneur Jésus, et tu seras sauvé. La parole de
la foi est près de toi ; maintenant, à l'instant même, et dans ton
état actuel, tel que tu es, tout pécheur que tu es ; crois
à l’Évangile, et cette promesse
de l’Éternel s'accomplira : « Je te pardonnerai
tes péchés, et je ne me souviendrai plus de tes iniquités ».
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