lundi 15 août 2016

(22) LES SERMONS DE WESLEY LES SIGNES DISTINCTIFS D'UN MÉTHODISTE

Numérisation Yves PETRAKIAN Copie autorisée pour diffusion gratuite uniquement Obligation d'indiquer la source http://456-bible.123-bible.com 

Sermon 55 :           LES SIGNES DISTINCTIFS D'UN MÉTHODISTE

(Mai 1738)

I

                   Ce qui distingue un méthodiste, ce ne sont pas des opinions, quelles qu’elles soient. Qu’il adhère à telle ou telle façon de croire, qu’il s’approprie certains points de vue ou qu’il défende la doctrine de tel ou tel homme, n’a pas d’importance. C’est pourquoi celui qui penserait qu’un méthodiste est un homme qui se distingue des autres chrétiens par des doctrines spéciales, démontrerait sa complète ignorance de cette question et passerait entièrement à côté de la vérité. Il est vrai que nous croyons que toutes les Saintes Écritures (Ancien et Nouveau Testament) sont inspirées par Dieu, et en cela nous nous distinguons des Juifs, des Turcs et des athées. Nous croyons que la Parole écrite de Dieu est le principe directeur, unique et suffisant de la foi et de la vie chrétienne, et en cela nous nous différencions fondamentalement de l’église catholique romaine. Mais dans toutes les questions qui ne touchent pas aux racines du christianisme, nous nous en tenons à la règle : « Penser et laisser penser ». C’est pourquoi des opinions, qu’elles soient justes ou erronées, ne sont pas des signes distinctifs pour un méthodiste.

II

                    Ce qui distingue un méthodiste, ce n’est pas non plus l’utilisation de certaines paroles ou façons de parler. Nous ne nous cramponnons pas à des mots et ne considérons pas l’emploi d’expressions singulières et inhabituelles comme le signe d’un christianisme authentique. Au contraire, lorsque nous parlons de choses divines, nous préférons, tout comme dans les conversations habituelles, utiliser les mots les plus connus, les plus compréhensibles et les plus usuels pour exprimer nos pensées. C’est pourquoi nous ne nous écartons jamais avec intention, de la façon de parler générale et courante, sauf s’il s’agit d’exprimer des vérités bibliques par des mots bibliques, ce qui ne suscitera certainement pas la critique d’un chrétien. Nous n’avons pas non plus de prédilection à nous servir de certaines expressions bibliques particulières, à l’exception de celles que les écrivains inspirés, ont eux- mêmes utilisées le plus fréquemment. Chercher à distinguer un méthodiste par sa façon de s’exprimer ou par ses opinions sont par conséquent deux erreurs aussi injustifiées l’une que l’autre.

III

                    Nous ne souhaitons pas davantage nous distinguer d’autres personnes par des pratiques, des coutumes et des habitudes dont l’importance est négligeable. Notre façon d’être chrétien ne consiste ni dans la pratique de ce que Dieu ne nous a pas commandé, ni dans l’abstention de ce qu’il ne nous a pas interdit. Elle ne consiste pas en une quelconque particularité dans la manière de se vêtir, de se tenir ou de se couvrir la tête ; il ne s’agit pas non plus de s’abstenir du mariage ou d’aliments et de boissons. Ce sont de bonnes choses si on en use avec reconnaissance. C’est pourquoi aucune personne avisée ne cherchera les caractéristiques d’un méthodiste dans des pratiques et habitudes, d’ailleurs d’importance négligeable sur le plan moral, au sujet desquelles la Parole de Dieu n’a pas donné d’ordres explicites.

IV

                    Enfin le méthodiste ne veut pas se distinguer des autres par le fait qu’il accentue de façon exclusive l’un ou l’autre aspect du christianisme. Si quelqu’un objecte : « Toutefois le méthodiste fait telle chose parce qu’il proclame que nous sommes sauvés par la foi seule » , je réponds : Vous ne comprenez pas le sens des mots : par « être sauvé » , le méthodiste comprend lui, qu’il s’agit de la sainteté du cœur et de la vie. Et il affirme que cette sainteté- là naît uniquement de la foi authentique. Est- il possible que quelqu’un, quand bien même il ne serait chrétien que de nom, puisse nier cela ? S’agit- il là vraiment d’une acceptation unilatérale du christianisme ? « Abolissons- nous la loi par la foi ? Loin de là ! Nous accomplissons la loi ». Nous ne partageons pas le point de vue (qui est malheureusement celui de trop de personnes) selon lequel le christianisme se résume à : - ne pas causer de dommages - faire du bien - faire usage des moyens de grâce de Dieu. Non, tout cela n’est pas encore suffisant ; nous savons en effet, par expérience, qu’un homme peut pratiquer tout cela pendant des années et rester toujours aussi peu chrétien qu’avant. Bien moins encore suffit- il d’avoir l’une de ces pièces d’étoffe, ou même seulement un lambeau de l’une d’elles. Ce serait comme une femme qui s’imaginerait être vertueuse uniquement parce qu’elle n’est pas une prostituée, ou comme un homme qui s’estimerait honnête parce qu’il n’a commis ni brigandage, ni vol. Que le Dieu de mes pères me préserve d’un si misérable et maigre christianisme ! Si cela devait être le signe distinctif d’un méthodiste, je préférerais être un honnête Juif, Turc ou païen !

V

                      Soit, me dira-t-on, mais quel est alors le vrai signe distinctif ? Qui, selon vous, est un vrai méthodiste ? Je réponds : Un méthodiste est un homme « dans le cœur duquel est répandu l’amour de Dieu par l’action du Saint- Esprit, qui lui est donné » , un homme qui « aime le Seigneur, son Dieu, de tout son cœur, de toute son âme, de toute sa pensée et de toutes ses forces ». Dieu est la joie de son cœur et le désir de son âme, qui s’écrie sans cesse : « Si.. ». , « Je suis en communion avec toi, Je n aspire à rien d’autre au ciel et sur la terre. Mon Dieu et mon tout ! En tout temps, tu es la consolation de mon cœur et tu es ma part ! »

VI

                    Un tel homme est toujours heureux dans la relation avec son Dieu par lequel lui est donnée « Une source d’eau vive qui jaillit jusque dans la vie éternelle » et qui inonde son âme de paix et de joie. Pour lui, l’ « amour total chasse la crainte » et il « se réjouit en toute circonstance dans le Seigneur » ; en « Dieu son Sauveur » et dans le Père, « par notre Seigneur Jésus- Christ grâce auquel il a obtenu la réconciliation, le salut par Son sang et le pardon des péchés ». Comment pourrait- il ne pas se réjouir, chaque fois qu’il se tourne vers le passé, vers la fosse cruelle hors de laquelle le Seigneur l’a tiré, et chaque fois qu’il se souvient que Dieu « enlève tous ses méfaits comme le soleil chasse un nuage et dissipe le brouillard » ? Il ne peut que se réjouir, chaque fois qu’il considère sa situation présente en pensant que c’est par grâce qu’il a été « rendu juste, et qu’il est en paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus-Christ ». Car « tout homme qui croit, possède en lui ce témoignage » parce qu’il est, par la foi, un fils de Dieu. Et parce qu’il est enfant de Dieu, « Dieu a envoyé dans son cœur l’Esprit de Son fils, cet esprit qui crie : Abba, Père ». Et c’est « ce même Esprit qui témoigne à son esprit qu’il est enfant de Dieu ». De même, il se réjouit pour l’avenir, dans l’espérance et la « gloire qui doit être révélée dans sa vie ». Oui, sa joie est parfaite et du plus profond de lui- même retentit ce chant de louanges : « Loué soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus- Christ, qui nous a permis de renaître par sa grande compassion, afin d’acquérir une espérance vivante... un héritage impérissable, sans tâche ni flétrissure, et conservé dans les cieux ».

VII

                Et celui qui possède cette espérance est revêtu d’immortalité « reconnaissant en toutes choses » parce qu’il sait que ces choses, quelles qu’elles soient, sont « la volonté de Dieu en Jésus-Christ pour lui ». C’est pourquoi il accepte tout de ses mains avec joie et dit : « Bonne est la volonté du Seigneur ». Que le Seigneur donne ou qu’il reprenne, il dit dans les deux cas : « Que le nom du Seigneur soit loué ! » Il a « appris à être satisfait en toute circonstance ». Il sait être abaissé ou élevé. Il est capable de tout supporter en tout temps et en tout lieu, d’être rassasié ou affamé, de vivre dans l’abondance ou dans la pénurie. Dans les bons et dans les mauvais jours, qu’il soit en bonne santé ou malade, dans la vie comme dans la mort, il remercie du fond de son cœur celui qui atout ordonné pour son bien. Il le fait dans l’entière conviction que « tout don parfait vient d’En- Haut » , que seul le bien peut venir du « Père de la Lumière » entre les mains duquel il confie entièrement son corps et son âme, ces mains étant celles d’un Créateur fidèle. C’est pourquoi il « ne se fait de souci pour rien » , « s’étant déchargé de tous ses soucis sur le Père, qui prend soin de lui » ; il se confie aussi en Lui « en toutes choses » après avoir « fait connaître à Dieu ses demandes dans la prière et la supplication, avec action de grâces ».

VIII

                      Car, en effet, il « prie sans cesse ». Il a reçu la possibilité « de prier en tout temps, sans se lasser ».


                      Cela ne veut pas dire qu’il passe tout son temps dans une maison de prière, bien qu’il ne manque aucune occasion d’y être présent. Il n’est pas d’avantage agenouillé en permanence, bien qu’il fléchisse souvent les genoux et se prosterne même devant le Seigneur son Dieu. Il ne crie pas non plus sans arrêt vers Dieu à haute voix, et ne l’invoque pas toujours avec des mots, car souvent l’ « Esprit intercède pour lui avec des soupirs inexprimables ». Mais toujours, son cœur s’exprime ainsi : « O toi, reflet de la gloire éternelle, c’est toi que mon cœur réclame, même si aucun son ne franchit mes lèvres et c’est dans le silence que je te parle ». C’est là une vraie prière, même si elle se limite à quelques mots ! Cependant son cœur est toujours élevé vers Dieu, en tout temps et en tous lieux. Personne ni rien ne peut l’en empêcher ou le déranger, pendant qu’il prie ainsi. Qu’il soit dans la solitude ou en société, pendant ses loisirs ou au travail, son cœur est toujours près du Seigneur. Qu’il se couche ou qu’il se lève, il pense à Dieu, il marche devant Lui, sur tous ses chemins. C’est dans l’amour qu’il tourne avec constance son œil intérieur vers Lui et s’attache à celui qu’il ne voit pas, comme s’il le voyait.

IX

                    Pendant qu’il exprime son amour pour Dieu en priant sans... cesse, en étant toujours joyeux et reconnaissant en toute chose, le commandement suivant est aussi écrit dans son cœur : « Que celui qui aime Dieu aime aussi son frère ». Selon ce commandement, il « aime son prochain comme soi- même » , il aime aussi chacun comme sa propre âme. Son cœur est rempli d’amour pour tous les hommes, pour chaque enfant « du Père des esprits de toute chair ».

                    Le fait de ne pas connaître personnellement quelqu’un, ne constitue pas un obstacle pour son amour. Il aime même celui dont il ne peut pas approuver la façon d’agir, et dont il sait que la haine répondra à sa bienveillance. Car il « aime ses ennemis » ; oui, il aime même les ennemis de Dieu, « les ingrats et les malveillants ». Même s’il n’était pas en mesure « de faire du bien à ceux qui le haïssent » , il n’arrête pas de prier pour eux, même lorsqu’ils persistent à fouler aux pieds son amour, à l’ « insulter et à le persécuter ».

X

                    Il peut persévérer dans la prière pour ceux qui s’acharnent contre lui, car il a « un cœur pur ».

                    L’amour de Dieu a purifié son cœur du désir de vengeance, de la jalousie, de la colère et de toute espèce de manque d’amour et d’agressivité maligne. Cet amour l’a libéré de la fierté vaniteuse et de l’orgueil spirituel dont le seul résultat est d’engendrer des conflits. Il s’est à présent revêtu « de compassion sincère, d’amabilité, d’humilité, de douceur, de patience » de sorte qu’il est capable de « supporter celui dont il sujet de se plaindre,. et de lui pardon comme Christ lui a pardonné ». En effet, pour autant que cela dépende de lui, toute occasion de conflit est ainsi supprimée jusqu’à sa racine, car personne ne peut lui ravir ce à quoi il aspire : « Son amour ne s’attache pas au monde ni à ses biens » , mais... il est mort « envers toutes ces passions du monde que sont les désirs du corps, les convoitises des yeux et la vanité ». Car la « joie de son cœur se trouve auprès du nom de Dieu et de la fidélité envers lui ».

XI

                    En accord avec cette « joie du cœur » sa seule raison de vivre est de ne pas agir selon sa propre volonté, mais selon la volonté de Celui qui l’a envoyé. Sa seule intention, en tous temps et en toutes choses c’est de ne pas vivre pour lui-même, mais pour celui que son âme aime. Il a un « œil clairvoyant » et c’est pourquoi « tout son corps est éclairé » ; car là où, avec amour l’œil de l’âme est dirigé sans cesse vers Dieu, « le corps ne connaîtra aucune parcelle d’obscurité ; mais sera entièrement éclairé, comme si la lueur d’un vif éclair l’illuminait ».

                    Toute la vie de l’âme est sainte devant le Seigneur. Il n’y a plus d’élans du cœur qui soient contraires à sa volonté. Chaque pensée qui naît, conduit vers Lui et obéit à la loi du Christ.

XII

                     On reconnaît l’arbre à ses fruits. Celui qui « aime Dieu, aime ses commandements » et non seulement quelques uns ou la plupart d’entre eux, mais tous, du moins important au plus noble. Il ne se contente pas de « respecter toute la loi et de pécher en transgressant l’un des commandements » , mais « il s’exerce afin d’avoir toujours une conscience intacte en toutes choses, envers Dieu et les hommes ». Il s’abstient de ce que Dieu a interdit, il fait ce que Dieu a ordonné, que ce soit une chose petite ou grande, difficile ou facile, agréable ou désagréable à la chair. Il « marche dans la voie des commandements de Dieu » depuis que Dieu a donné la liberté à son cœur. Il en fait un point d’honneur ! Le couronnement quotidien de sa joie est « de faire sur la terre la volonté de Dieu, comme elle est faite au ciel » , car il sait que le privilège suprême « des anges de Dieu, de ses héros puissants, c’est d’exécuter ses ordres pour que l’on écoute la voix de sa parole ».

XIII

                     Ainsi, il respecte tous les commandements de Dieu et cela de toutes ses forces. Son obéissance est en relation étroite avec son amour, qui est la source d’où elle a surgi. Et parce qu’il aime Dieu de tout son cœur, il le sert de toutes ses forces. Sans cesse « il offre son âme et son corps » en sacrifice vivant, saint et agréable à Dieu, consacrant entièrement, et sans arrière- pensée, sa propre personne, tout ce qu’il possède et tout ce qu’il est, à l’honneur de Dieu. Tous les dons qu’il a reçus, la puissance et la capacité de son âme, chaque membre de son corps, il les utilise toujours selon la volonté de son Maître. Auparavant il les « mettait à la disposition du péché » et du diable, « comme des armes au service de l’injustice ; mais maintenant, « en tant que vivant, réveillé du milieu des morts » , il les met à la disposition de « Dieu, comme des armes au service de la justice ».


XIV

                       Par conséquent, tout ce qu’il fait contribue à la gloire de Dieu. Dans toutes ses différentes occupations il ne vise pas seulement ce but (ce qui est contenu dans l’expression « être clairvoyant » ), mais il l’atteint aussi en fait. Son travail et ses loisirs conduisent, tout comme ses prières, vers ce but unique et élevé. Qu’il soit chez lui ou en chemin, qu’il se couche ou qu’il se lève, il œuvre par tout ce qu’il dit ou fait pour l’accomplissement de cette tâche principale de sa vie ; qu’il s’habille ou qu’il travaille, qu’il mange, boive ou se repose après un travail harassant, tout n’a qu’un seul but : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes qu’il agrée ». La seule et inaliénable devise de sa vie s’énonce ainsi : « Tout ce que vous faites, en paroles ou en actions, faites- le au nom du Seigneur Jésus et remercie Dieu le Père, par Lui ».

XV

                    Il ne se laisse empêcher en aucune façon, par les habitudes du monde, de « marcher au combat qui nous est ordonné ». Il sait bien qu’un vice ne perd rien de son abjection du fait que sa pratique soit devenue courante et commune ; il ne perd pas de vue que « chacun devra rendre compte à Dieu de ses propres actes ». Par conséquent, il ne peut pas « suivre la foule sur le chemin du mal ».

                    Il ne peut pas « vivre tous les jours dans les plaisirs et le luxe » ou « se soucier tellement de son corps, qu’il devient esclave ses désirs » ; il ne peut « rassembler des trésors sur la terre » , pas plus que de mettre du feu dans sa poitrine. Sous aucun prétexte il ne peut « se parer d’or ou d’habits pré cieux » , ni approuver ceux qui s’adonnent, même très,... peu, a un vice, ou encore y participer. De même il lui est impossible de médire de son prochain ou de mentir devant Dieu et les hommes. Il ne peut pas tenir des propos sans amour au sujet de qui que ce soit, car l’amour est bien le gardien de sa bouche. Il ne peut pas prononcer de parole vaine, « aucun bavardage oiseux ne sort de sa bouche » et il faut comprendre par là tout ce qui n’est pas utile à l’amélioration ou à l’encouragement de celui qui écoute. Mais « ce qui est pur, aimable et réjouissant » , il le pense, le dit et le fait et il « honore l’enseignement de Dieu, de notre Seigneur, dans tous les domaines ».

XVI

                    Enfin, pour autant que l’occasion se présente, « il fait du bien à tous » , aux voisins comme aux étrangers, aux amis comme aux ennemis et cela de toutes les manières possibles. Cela n’est pas vrai seulement en ce qui concerne les corps, dans la mesure où il « nourrit les affamés, donne des « ... vêtements à ceux qui sont nus, visite les malades et les prisonniers » , mais il se donne encore bien plus de peine « dans la force que Dieu donne » pour faire du bien aux âmes, c’est- à- dire : pour réveiller celles qui dorment dans la mort spirituelle - pour amener ceux qui ont été réveillés vers le sang de la réconciliation afin que « rendus justes par la foi, ils trouvent la paix avec Dieu » et - pour encourager ceux qui ont trouvé la paix avec Dieu « à l’amour et aux bonnes œuvres ». Il est prêt à « s’offrir et à être offert » même à « servir de libation pour le sacrifice et pour le service de leur foi » afin « qu’ils accèdent tous à la plénitude en Christ ».

XVII

                    Ce sont là les principes et usages de notre communauté, les signes par lesquels on reconnaît un vrai méthodiste. C’est par eux seulement que ceux que l’on appelle ainsi, par dérision, souhaitent se distinguer d’autres personnes. Si quelqu’un disait maintenant : « Mais il ne s’agit là que des vérités fondamentales du christianisme ! » , il aurait raison. Je partage son point de vue. C’est la pure vérité. Je sais que ces vérités ne sont rien d’autre, et je souhaite de tout cœur que toi et quiconque vous sachiez combien nous et tous ceux qui partagent nos pensées, nous nous défendons et nous nous gardons pour ne pas être distingués par quoi que ce soit d’autre que les principes fondamentaux et généraux du christianisme, de ce christianisme simple et premier que j’enseigne, tout en rejetant et en ayant en horreur tous les autres signes distinctifs. Celui qui vit selon les critères que je viens d’évoquer (et cela, quelle que soit sa dénomination, car les noms ne changent pas la nature des choses), est un chrétien non seulement d’après le nom, mais dans le cœur et dans sa vie. Intérieurement et extérieurement il est en accord avec la volonté de Dieu, comme elle nous est révélée dans la Parole écrite. Il pense, parle et vit selon la méthode qui est définie dans la révélation de Jésus- Christ. Son âme est renouvelée selon l’ « image de Dieu, en vue d’une justice véritable et de la sainteté ». Et comme il a les mêmes pensées que celles qui étaient en Jésus- Christ, il marche comme Jésus- Christ avait marché.

XVIII

                    C’est par ces signes, par ces fruits d’une foi vivante, que nous cherchons à nous différencier du monde non croyant et de tous ceux dont la mentalité et la vie s’opposent à l’Évangile de Jésus-Christ. Mais en ce qui concerne les vrais chrétiens, quelle que soit leur dénomination, nous ne souhaitons être distingués ni d’eux, ni de tout homme qui recherche sincèrement ce qu’il sait ne... pas encore avoir saisi. Oui, il s’agit de respecter la parole : « Celui qui fait la volonté de mon Père qui est aux cieux, celui- là est mon frère, ma sœur et ma mère » et « Je vous exhorte, chers frères, par la miséricorde de Dieu : ne laissez croître entre vous aucune sorte de division ! » « Ton cœur est-il sincère envers moi, comme mon cœur l’est envers le tien ? » Je ne pose pas d’autre question. S’il en est ainsi, donne moi ta main ! Ne détruisons pas l’œuvre de Dieu à cause de nos seules opinions ou paroles. Aimes- tu Dieu et le sers- tu ? Voilà qui est suffisant, je te tends la main en signe d’union. « Si donc il y a parmi vous, quelque consolation en Christ, s’il y a quelque soulagement dans la charité, s’il y a quelqu’union d’esprit, s’il y a quelque compassion et quelque miséricorde » , combattons d’une seule âme, « pour la foi en l’Évangile ». Menons notre vie conformément à notre vocation qui nous appelle à « conserver l’unité de l’esprit par le lien de la paix, en toute humilité et douceur, avec patience, nous supportant les uns les autres avec charité ».

                    Souvenez-vous toujours qu’ « il y a un seul corps et un seul esprit, comme aussi nous avons été appelés à une seule espérance par notre vocation ; il y a un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous qui est au dessus de tous, et parmi tous et en tous ”.

John Wesley (Mai 1738)


jeudi 11 août 2016

(21) LES SERMONS DE WESLEY DE LA LIBRE GRÂCE

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Sermon 54 :           DE LA LIBRE GRÂCE

Romains 8,32    (1739)

Lui qui n'a pas épargné son propre Fils, mais qui l'a livré pour nous tous, comment ne nous donnera-t-il pas toutes choses avec lui, par grâce ?  (Romains 8:32) 

                    Combien Dieu aime librement le monde ! Alors que nous étions encore des pécheurs, « Christ est mort pour des impies ». Alors que nous étions « morts par nos péché » , Dieu « n'a pas épargné son propre Fils, mais l'a livré pour nous tous ». Il nous « donne librement toutes choses » ! En vérité, LA LIBRE GRÂCE est tout en tous ! La grâce ou l'amour de Dieu, source de notre salut, est LIBRE EN TOUS et LIBRE POUR TOUS. LA GRÂCE, DON LIBRE DE DIEU Premièrement, elle est libre EN TOUS ceux à qui elle est donnée. Elle ne dépend pas de quelque pouvoir ou mérite inhérent à l'homme ; non, à aucun degré, grand ou petit. Elle ne dépend, en aucune manière, des bonnes œuvres ou de la justice du destinataire. Elle ne dépend pas de ses efforts. Elle ne dépend ni de son bon caractère, ni de ses bons désirs ou de ses bonnes intentions, car tout cela provient de la libre grâce de Dieu : comme un courant d'eau à partir de sa source ou comme des fruits par rapport aux racines de l'arbre qui les porte. Toutes ces bonnes dispositions sont, non pas la cause, mais les effets de la grâce. Dieu est l'auteur de tout bien qui se trouve en l'homme et que celui-ci peut accomplir. Ainsi la grâce est libre en tous ; elle ne dépend en aucune façon de quelque pouvoir ou de quelque mérite inhérent à l'homme, elle vient de Dieu seul, qui nous a donné son Fils et, avec lui, toutes choses librement. 

                   La grâce et le problème de la prédestination. Mais la grâce est-elle libre POUR TOUS aussi bien qu'EN TOUS ? A cela, certains ont répondu : « Non, elle n'est libre que pour ceux que Dieu a ordonnés à la vie, et ils ne constituent qu'un petit troupeau. La plus grande partie de l'humanité est destinée, par Dieu, à la mort, et la grâce n'est pas libre pour ceux qui la composent. Dieu les hait ; il a par conséquent décrété, dès avant leur naissance, qu'ils mourraient éternellement. Ce décret est absolu, parce que tel a été son bon plaisir, sa volonté souveraine. Il s'ensuit que ces personnes sont nées pour être détruites, corps et âme, en enfer. Elles grandissent sous l'irrévocable malédiction de Dieu, sans aucune possibilité de rédemption. La grâce que Dieu leur accorde sert, en effet, non pas à prévenir, mais uniquement à accroître leur condamnation ». Tel est le décret de la prédestination. 

                    Mais il me semble entendre quelqu'un répliquer : « Cela ne correspond pas à ma conception de la prédestination. Je ne crois qu'à l'élection de la grâce, à savoir qu'avant la fondation du monde, Dieu a élu un certain nombre d'hommes pour être justifiés, sanctifiés et glorifiés ; ceux-ci et personne d'autre seront sauvés. Dieu abandonne le reste des hommes à eux-mêmes. Ce reste suit les penchants de son propre cœur -continuellement mauvais- et n'arrête pas d'empirer ; il est en définitive justement condamné à la destruction éternelle ». Est-ce bien tout ce que vous mettez sous le terme de prédestination ? Réfléchissez bien, il y a peut-être encore autre chose. Ne croyez-vous pas que Dieu a destiné les non-élus à la condamnation ? Si oui, vous croyez au décret complet, à la prédestination telle qu'elle vient d'être décrite. Mais peut-être ne le pensez-vous pas. 

                    Croyez-vous alors que Dieu endurcisse le cœur de ceux qui périssent ? Croyez-vous qu'il a littéralement endurci le cœur de Pharaon et qu'il l'a élevé à son rang, ou même créé, dans le seul but de le condamner ? Si oui, alors vous croyez tout ce qui a été dit de la prédestination. Et il n'est pas nécessaire d'ajouter que Dieu renforce son décret, supposé immuable et inéluctable, en endurcissant les cœurs de ces « vases de colère » que son décret a voué auparavant à la destruction. La prédestination inconcevable sans la réprobation Mais vous ne croyez peut-être même pas cela et vous n'admettez pas qu'il y ait un décret de la réprobation. Vous ne pensez pas que Dieu a décrété la condamnation d'un homme en l'endurcissant et en le vouant irrésistiblement à une telle destinée. Vous vous contentez de dire : « Dieu a éternellement décrété que, tous les hommes étant morts par le péché, il ne dirait qu'à quelques ossements desséchés « vivez ! » et que, par conséquent, les uns seraient vivifiés et les autres resteraient en leur état, les uns glorifieraient Dieu par leur salut et les autres par leur destruction ».

                    N'est-ce pas ce que vous entendez par « l'élection de grâce » ? Si oui, laissez-moi vous poser quelques questions. Parmi ceux qui ne sont pas élus de cette manière, certains sont-ils néanmoins sauvés ? Ou bien cela a-t-il déjà été le cas depuis la fondation du monde ? Est-il possible qu'un homme soit sauvé sans être ainsi élu ? Si vous répondez « non » , vous en êtes au même point qu'auparavant, vous n'avez pas avancé d'un pas. Vous croyez toujours qu'en raison d'un décret immuable et inéluctable de Dieu, la plus grande partie de l'humanité demeure dans la mort sans aucune possibilité de rédemption ; seul, Dieu pourrait les sauver, mais il ne le veut pas. Vous croyez que Dieu a décrété de manière absolue qu'il ne les sauverait pas. Qu'est-ce que cela, sinon un décret de condamnation ? Dans les faits, ce n'est ni plus, ni moins cela. Car si vous êtes mort et totalement incapable de revenir à la vie par vous-même, et si Dieu a décrété de manière absolue de vivifier tout le monde sauf vous, il a donc décrété de manière absolue votre mort éternelle. Vous êtes absolument destiné à la damnation. 

                     Ainsi, tout en utilisant des termes plus doux que certaines personnes, vous exprimez exactement la même chose. Le décret divin d'élection de grâce, dont vous parlez, n'est rien d'autre que ce que certains appellent « le décret divin de la réprobation ». Utilisez le terme qui vous plaira -élection, prétérition, prédestination ou réprobation -, cela revient finalement au même. La signification de tous ces mots est clairement celle-ci : par la vertu d'un décret éternel, immuable, irrésistible de Dieu, une partie de l'humanité est infailliblement sauvée, et le reste infailliblement damné. Autrement dit, il est impossible que l'un des premiers soit damné ou que l'un des derniers soit sauvé. 

                     La grâce n'est plus exprimée dans la prédication S'il en est ainsi, toute prédication est vaine. Elle est sans utilité pour les élus, puisqu'ils seront infailliblement sauvés, avec ou sans elle. Par conséquent, le but de la prédication -sauver des âmes -ne leur sert de rien. Elle est également sans utilité pour ceux qui ne sont pas élus, puisqu'ils ne peuvent pas être sauvés ; avec ou sans elle, ils seront infailliblement damnés. Par conséquent, le but de la prédication ne leur sert de rien, non plus. Dans l'un et l'autre cas, notre prédication est vaine, comme l'est aussi votre écoute. Il y a là une preuve évidente que la doctrine de la prédestination n'est pas une doctrine de Dieu, puisqu'elle annule le commandement de Dieu, et que Dieu n'est pas divisé contre lui-même.

LA GRÂCE ET LA SAINTETÉ DE DIEU

                    La doctrine de la prédestination tend aussi à faire obstacle à la sainteté, qui est le but que visent toutes les ordonnances de Dieu. Je ne veux pas dire qu'aucun de ses partisans ne soit saint (car Dieu fait preuve d'une tendre compassion envers ceux qui sont inextricablement empêtrés dans toutes sortes d'erreurs), mais j'entends par là que la doctrine elle-même -à savoir que chaque homme est, de toute éternité, soit élu, soit non-élu, c'est-à-dire inévitablement sauvé ou inévitablement damné -a une tendance manifeste à s'opposer à la sainteté en général. Cette doctrine évacue, en effet, les principales motivations pour rechercher la sainteté -proposées si souvent dans les Écritures -, telles que l'espoir d'une récompense future et la crainte du châtiment, l'espoir d'aller au ciel et la crainte de l'enfer. Celui qui croit que son sort est déjà décidé -qu'il soit au nombre de ceux qui sont condamnés aux peines éternelles ou de ceux qui sont appelés à la vie éternelle -n'est pas motivé à combattre pour la vie ; il serait déraisonnable pour lui de le faire s'il pense qu'il est inéluctablement destiné à la vie ou à la mort.

                     Vous direz sans doute : « Mais il ne sait pas s'il est destiné à la vie ou à la mort ». Et alors ? Quelle importance cela a-t-il ? Si une personne malade sait qu'elle va, quoi qu'elle fasse, soit mourir, soit guérir, même si elle ignore laquelle de ces deux issues lui est réservée, elle renoncera à prendre des médicaments, car le faire serait déraisonnable. Elle pourra seulement dire (et j'ai déjà entendu des personnes atteintes dans leur santé physique, ou spirituellement, s'exprimer ainsi : « Si je suis destinée à vivre, je vivrai, sinon je mourrai ; je n'ai donc pas à m'en préoccuper ». C'est ainsi que cette doctrine donne tendance directe et générale à détourner les gens de la sainteté, et aussi à empêcher les hommes impies de la rechercher ou d'y atteindre.

                    La prédestination démobilise... Cette doctrine conduit aussi à détruire plusieurs aspects particuliers de la sainteté, tels que la douceur et l'amour -j'entends par là l'amour de nos ennemis- des méchants et des ingrats. Je ne veux pas dire qu'aucun de ses partisans n'a de la douceur et de l'amour (car la miséricorde de Dieu est aussi grande que sa puissance) ; mais cette doctrine tend naturellement à susciter, ou à accroître, l'aigreur et l'impatience du caractère, ce qui est tout à fait contraire à la bonté du Christ. Ces défauts sont spécialement visibles chez les partisans de cette doctrine quand on s'oppose à leurs principes. De plus, cette doctrine inspire naturellement du mépris ou de la froideur envers ceux que nous supposons être bannis par Dieu.... et n'encourage pas à aimer « Mais, direz-vous, je ne considère personne en particulier comme un réprouvé ». Vous voulez dire que vous ne le feriez pas si vous pouviez vous en empêcher ; mais vous ne pouvez pas vous empêcher parfois d'appliquer les principes généraux de votre doctrine à des individus en particulier, ou alors l'ennemi des âmes le fera pour vous. Vous savez bien qu'il l'a déjà fait souvent, mais vous avez rejeté cette pensée avec effroi. C'est vrai, vous avez fait aussi vite que possible ; mais cela n'a-t-il pas, en même temps, aigri et excité votre esprit ? Vous savez bien qu'alors ce n'était pas un esprit d'amour que vous manifestiez envers ce pauvre pécheur, que vous soupçonniez ou suspectiez d'être l'objet de la haine de Dieu.

LA PRÉDESTINATION DÉTRUIT LA PAIX

                    Cette doctrine contribue à détruire les consolations de la religion, le bonheur chrétien. Cela est évident pour tous ceux qui se croient réprouvés ou qui craignent simplement de l'être. Toutes les grandes et précieuses promesses sont perdues pour eux. Elles ne leur apportent aucune lueur de consolation, puisqu'ils ne sont pas les élus de Dieu ; elles ne les concernent donc pas le moins du monde. Ceci constitue un sérieux obstacle à leur découverte d'un peu de consolation ou de bonheur, même dans cette religion dont les chemins sont sensés être « des chemins agréables et des sentiers de paix ». L'assurance vient de l'Esprit Et vous qui vous croyez élus de Dieu, où est votre bonheur ? J'entends non une notion, une croyance spéculative ou une simple idée, mais le sentiment d'avoir Dieu présent dans votre cœur par le Saint-Esprit, l'Esprit de Dieu qui témoigne à votre esprit que vous êtes un enfant de Dieu. En d'autres termes, « la pleine assurance de la foi » est le véritable fondement de la joie chrétienne. Cela implique la pleine assurance que tous vos péchés passés sont pardonnés et que vous êtes maintenant un enfant de Dieu. 

                    Mais cela n'implique pas nécessairement la pleine assurance de notre persévérance future. Je ne dis pas qu'elle n'y est jamais jointe, mais cela n'est pas automatique. Bien des personnes ont une assurance présente, mais pas future. Il apparaît que la doctrine de la prédestination entrave le témoignage de l'Esprit. C'est le cas, non seulement pour ceux qui, se croyant réprouvés, repoussent ce témoignage, mais aussi pour ceux qui ont goûté au don parfait, l'ont ensuite perdu et sont retombés dans les doutes, la crainte et les ténèbres, des ténèbres horribles, quasiment palpables ! Je vous le demande, à vous les tenants de cette doctrine, dites-moi si, entre Dieu et votre propre cœur, vous n'êtes pas souvent assaillis par des doutes ou des craintes concernant votre élection ou votre persévérance ? Si vous me rétorquez : « Qui n'en a pas ? » , je répondrai que très peu de partisans de cette doctrine en ont, à la différence de beaucoup, de vraiment beaucoup de ceux qui n'y croient pas sur toute la surface de la terre. 

                    Beaucoup de ceux qui savent et ressentent qu'ils sont en Christ aujourd'hui et ne « se soucient pas du lendemain » , qui « se réfugient en lui » par la foi heure après heure, ou plutôt moment après moment, beaucoup de ceux-Ià jouissent du témoignage ininterrompu de l'Esprit, de la lumière permanente de sa face, depuis qu'ils ont cru pour la première fois -il y a de cela des mois ou des années jusqu'à ce jour. La foi ne s'enracine pas dans la connaissance de l'élection L'assurance de la foi de ces derniers exclut tout doute et toute crainte. Elle exclut toutes les sortes de doutes et de craintes concernant leur persévérance future, bien qu'il ne s 'agisse pas, à proprement parler, d'une assurance relative au futur, comme nous l'avons dit, mais seulement d'une assurance pour maintenant. Et cette assurance n'a pas besoin de se fonder sur une croyance spéculative, selon laquelle celui qui a été ordonné à la vie doit vivre, car elle se façonne d'heure en heure par la puissante main de Dieu, « par le Saint-Esprit qui leur est donné ». Par conséquent, la doctrine de la prédestination n'est pas de Dieu, car elle tend à entraver, voire à détruire, l'œuvre du Saint-Esprit, dont découlent les principales consolations de la religion, la joie chrétienne. Mais poursuivons : y a-t-il pensée plus inconfortable que de savoir que des milliers et des millions d'hommes ont été inéluctablement condamnés aux flammes éternelles, sans avoir commis aucune offense ou faute préalable ? Quelle pensée inconfortable pour ceux qui ont revêtu Christ et qui, ayant des entrailles de miséricorde, de bonté et de compassion, pourraient même « souhaiter être maudits à la place de leurs frères » !

LA PRÉDESTINATION DÉCOURAGE LES ŒUVRES

                    Cette détestable doctrine de la prédestination conduit à détruire notre zèle pour les bonnes œuvres.

                    Et ceci, premièrement, parce qu'elle aune tendance naturelle (selon ce que nous avons déjà fait remarquer) à détruire notre amour pour la plus grande partie de l'humanité, à savoir les méchants et les impies. Car tout ce qui réduit notre amour réduit aussi notre désir de leur faire du bien.

                    Deuxièmement, elle anéantit la plus forte raison qui soit d'accomplir des actes de charité, tels que nourrir les affamés, vêtir ceux qui sont nus..., à savoir l'espoir de sauver leur âme de la mort. Car à quoi sert-il de soulager les besoins temporels de ceux qui sont en train de tomber dans le feu éternel ? « Eh bien, courez, arrachez-Ies comme des tisons du feu ! » Mais vous supposez que c'est impossible. Vous dites qu'ils y ont été destinés de toute éternité, avant même d'avoir rien fait de bien ou de mal. Vous croyez que c'est la volonté de Dieu qu'ils meurent ; or « qui peut résister à sa volonté ? » Mais vous dites que vous ne savez pas s'ils sont élus ou pas. Et alors ? Si vous saviez qu'ils sont l'un ou l'autre -élus ou non-élus tout votre travail serait inutile et vain. Dans les deux cas, vos conseils, vos réprimandes ou vos exhortations seraient aussi inutiles que notre prédication. Tout cela sans aucune utilité pour les élus puisqu'ils sont infailliblement sauvés, et pour les non-élus puisqu'ils sont infailliblement damnés. Ainsi, si vous êtes conséquents avec vos principes, ne vous mettez pas en peine de leur salut. Ces principes tendent directement à détruire votre zèle pour les bonnes œuvres, pour toutes les bonnes œuvres, et particulièrement pour la plus grande de toutes : sauver les âmes de la mort.

LA PRÉDESTINATION EST CONTRE L'ENSEMBLE DE LA RÉVÉLATION

                   La doctrine de la prédestination ne tend pas seulement à détruire la sainteté et la joie chrétienne, ainsi que le désir d'accomplir des bonnes œuvres, elle pousse aussi, de façon directe et manifeste, à ruiner toute la révélation chrétienne. Le point que les plus avisés des incroyants modernes cherchent, avec le plus d'acharnement, à prouver est que la révélation chrétienne n'est pas nécessaire. Ils savent bien qu'une fois cela démontré, la conclusion évidente et indéniable sera : « Si elle n'est pas nécessaire, elle n'est pas vraie non plus ». Et vous, vous renoncez à ce point fondamental : le décret éternel et immuable de Dieu sous-entend, en effet, qu'une partie de l'humanité doit être sauvée, même sans l'existence de la révélation chrétienne, et que l'autre partie doit être condamnée en dépit de cette révélation ! Que pourrait désirer de plus un païen ? Vous lui fournissez tout ce qu'il demande. En rendant ainsi l’Évangile inutile pour toutes sortes de personnes, vous trahissez l'ensemble de la cause chrétienne. « Oh ! N'allez pas le dire à Gath et ne le publiez pas dans les places d'Askalon, de peur que les fils et les filles des Philistins ne s'en réjouissent et que les fils des incirconcis n'en triomphent ! »

                    Contradictions. Comme la doctrine de la prédestination tend directement et manifestement à ruiner toute la révélation chrétienne, elle aboutit à la faire se contredire elle-même. Elle est, en effet, basée sur une interprétation de certains textes (qu'il y en ait peu ou beaucoup, qu'importe !), qui contredit nettement tous les autres, et même tout le contenu et la portée des Écritures. En voici un exemple. Les tenants de cette doctrine interprètent le verset biblique « J'ai aimé Jacob et j'ai haï Ésaü » , comme impliquant que Dieu a littéralement haï Ésaü et tous les réprouvés de toute éternité. Est-il possible d'être plus nettement en contradiction avec, non seulement tout le contenu et la portée des Écritures, mais encore avec tous les textes particuliers qui déclarent expressément que « Dieu est amour » ? Autre exemple. Ils déduisent du texte « Je ferai miséricorde à qui je ferai miséricorde » (Romains 9 : 15) que Dieu n'est miséricordieux que pour quelques-uns seulement, les élus, et qu'il n'aura pitié que de ceux-ci, contrairement à ce qui est dit dans les Écritures, à savoir que « le Seigneur aime tous les hommes et sa miséricorde s'étend à toutes ses œuvres » (Psaume 145 : 9). Et encore, ils déduisent de textes tels que « cela ne dépend ni de celui qui veut, ni de celui qui court, mais de Dieu qui fait miséricorde » , que Dieu ne fait miséricorde qu'à ceux qu'il a en vue depuis l'éternité. Mais n'est-ce pas contester avec Dieu ? Ils contredisent tous les oracles de Dieu selon lesquels « Dieu ne fait point acception de personnes » (Actes 10 : 34), « il n'y a point d'acception de personnes devant lui » (Romains 2 : 2). Autre exemple. Ils déduisent du texte « quoique les enfants ne fussent pas encore nés et qu'ils n'eussent fait ni bien, ni mal — afin que le dessein d'élection subsistât, sans dépendre des œuvres, mais de celui qui appelle — il fut dit à Rebecca l'aîné sera assujetti au plus jeune » , que notre prédestination, ou notre élection, ne dépend en aucune manière de la prescience de Dieu. Or, toutes les Écritures contredisent nettement cette idée, particulièrement les passages suivants : « élus selon la prescience de Dieu » (1 Pierre : 2) et « ceux qu'il a connus d'avance, il les a aussi prédestinés » (Romains 8 : 29). Et encore « Le même Seigneur est riche en miséricorde pour tous ceux qui l'invoquent » (Romains 10 : 12). Mais vous, vous dites : « Non, il ne l'est que pour ceux pour qui le Christ est mort. Et cela ne concerne pas tous les gens, mais seulement un petit nombre que Dieu a choisi dans le monde ; il n'est pas mort pour tous, mais seulement pour ceux qui ont été « élus en lui avant la fondation du monde » (Éphésiens 1 : 4). Tout le contenu du Nouveau Testament contredit également votre interprétation de ces passages, en particulier les textes suivants : « Ne détruis pas avec un aliment celui pour qui Christ est mort » (Romains 14 : 15), preuve évidente que le Christ n'est pas mort uniquement pour ceux qui sont sauvés, mais qu'il l'est aussi pour ceux qui périssent. Il est « le Sauveur du monde » (Jean 4 : 42), « l'Agneau de Dieu qui ôte le péché du monde » (Jean 1 : 29), « Il est la propitiation non seulement de nos péchés, mais aussi de ceux du monde entier » (1 Jean 2 : 2). Lui, le Dieu vivant « est le Sauveur de tous les hommes » (1 Timothée 4 : 10),

                    « Il s'est donné en rançon pour tous » (1 Timothée 2 : 6), « Il a goûté la mort pour chaque homme » (Hébreux 2 : 19). Pourquoi tous ne sont pas sauvés ? Si vous demandez « pourquoi tous les hommes ne sont-ils pas sauvés ? » , toute la Loi et le témoignage répondent ainsi. Premièrement, ce n'est ni à cause de quelque décret de Dieu, ni à cause du plaisir que lui causerait leur mort : « Je suis vivant, dit le Seigneur, je ne prends pas plaisir à la mort de celui qui meurt » (Ézéchiel  3 : 32) ; quelle que soit la cause de leur perdition, ce ne peut être la volonté de Dieu, car les oracles de Dieu sont véridiques lorsqu'ils affirment : « Il ne veut pas qu'aucun périsse, mais il veut que tous parviennent à la repentance » (2 Pierre 3 : 9), « Il désire que tous les hommes soient sauvés ». Deuxièmement, la Bible explique pourquoi tous les hommes ne sont pas sauvés. Le Seigneur dit expressément : « Vous ne voulez pas venir à moi pour avoir la vie » (Jean 5 : 40). « La puissance du Seigneur est là pour les guérir » , mais ils ne veulent pas être guéris. Ils ne sont pas sauvés, parce qu' ils ne veulent pas être sauvés. « Ils rejettent le dessein qui est un dessein miséricordieux de Dieu » , comme l'avaient déjà fait leurs pères au cou roide. Ils sont par conséquent sans excuses, car Dieu aimerait qu'ils soient sauvés, mais eux ils ne le veulent pas. C'est leur condamnation : « Combien de fois ai-je voulu vous rassembler et vous ne l'avez pas voulu ! » (Matthieu 23 : 37).

LA PRÉDESTINATION EST CONTRE L'HONNEUR DE DIEU

                   Mais cela n'est pas tout. Cette doctrine de la prédestination comporte tant de blasphèmes que je répugne à en parler... mais I'honneur de notre Dieu de grâce et la cause de sa vérité ne doivent pas souffrir de mon silence. Aussi, pour la cause de Dieu et avec le désir sincère de glorifier son grand Nom, je vais mentionner quelques-uns des blasphèmes horribles contenus dans cette horrible doctrine. Tout d'abord, je dois avertir chacun de ceux qui m'écoutent, et qui devront en répondre au dernier jour, de ne pas m'accuser de blasphèmes (comme certains l'ont fait) parce que je mentionne ceux des autres. Plus vous êtes affligés par ceux qui blasphèment ainsi, plus vous devez veiller à « affermir votre amour à leur égard ». Que le souhait de votre cœur et votre prière continuelle à Dieu soit : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu'ils font ! » La sincérité divine est mise en question. Il faut, tout d'abord, noter que cette doctrine représente notre Seigneur béni, « Jésus-Christ le juste, le Fils unique du Père, plein de grâce et de vérité » , comme un hypocrite, un trompeur qui abuse les gens, un homme dépourvu de toute sincérité, car il est indéniable qu'il s'exprime toujours comme s'il voulait que tous les hommes soient sauvés. Aussi dire qu'il ne le voulait pas équivaut-il à faire de lui un hypocrite et un dissimulateur. Il est indéniable que les gracieuses paroles qui sont sorties de sa bouche sont remplies d'invitations à tous les pécheurs. C'est pourquoi affirmer qu'il n'avait pas l'intention de sauver tous les pécheurs revient à donner de lui l'image de quelqu'un qui a grossièrement trompé les gens. Impossible de nier qu'il dit : « Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés ». Ainsi, vous qui croyez à la prédestination, vous dites que Jésus appelle ceux qui ne peuvent pas venir, ceux dont il sait qu'ils sont incapables de venir à lui, ceux qu'il peut mais ne veut pas faire venir à lui. Est-il possible de décrire un manque de sincérité plus grand que celui-là ? Vous représentez Jésus comme se moquant de ses créatures impuissantes en leur offrant ce qu'il n'a pas l'intention de leur donner. Vous le décrivez comme disant une chose et en pensant une autre, comme éprouvant un amour qu'il n'a pas. Vous faites de « celui dans la bouche duquel il n'y avait pas de fraude » un être plein de tromperies et dépourvu de toute sincérité, spécialement quand s'approchant de la ville, il pleura sur elle en disant : « Jérusalem, Jérusalem, toi qui tues les prophètes et qui lapides ceux qui te sont envoyés, combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants... et tu ne l'as pas voulu ». Mais si vous dites qu'ils voulaient, mais que lui ne voulait pas, vous représentez Jésus pleurant des larmes de crocodile sur la proie qu'il a lui-même vouée à la destruction ! Dieu serait injuste Un tel blasphème devrait alerter les chrétiens ! Mais il y a plus : la doctrine de la prédestination, en effet, traite le Père de la même façon que le Fils. Elle détruit d'un coup tous ses attributs. Elle renverse, à la fois, sa justice, sa miséricorde et sa vérité. Oui ! Elle représente le Dieu très saint comme étant pire que le diable, tout à la fois plus cruel et plus injuste. Plus faux, parce que le diable, menteur comme il est, n'a jamais dit qu'il voulait sauver tous les hommes. Plus injuste, parce que le diable ne peut pas, même s'il le voulait, être coupable d'une injustice aussi grande que celle qui est attribuée à Dieu : condamner des millions d'âmes au feu éternel préparé pour le diable et ses anges -pour avoir persévéré dans le péché, alors qu'elles ne pouvaient pas faire autrement sans la grâce que Dieu ne voulait pas leur accorder. Et plus cruel : tout esprit malheureux qui « cherche le repos et ne le trouve pas est, à cause de sa propre misère, incité à induire les autres en tentation. Dieu demeure dans un lieu élevé et saint ; aussi supposer que, de sa propre initiative, volontairement et par pur plaisir, Dieu, dans sa béatitude, voue ses créatures, avec ou sans leur consentement, à un malheur sans fin, revient-il à lui imputer une cruauté dont il serait impossible de taxer le grand ennemi de Dieu et des hommes. C'est faire le Dieu très haut (que celui qui a des oreilles entende !) plus cruel, plus faux et plus injuste que le diable ! Transformation de la nature divine Tel est le problème clairement contenu dans l'horrible décret de la prédestination ! Je n'en démordrai pas. Je suis prêt à en discuter avec quiconque défend cette doctrine. Vous faites Dieu pire que le diable : plus faux plus cruel, plus injuste. Et vous dites pouvoir prouver cela par les Écritures. Chiche ! Que pouvez-vous prouver par les Écritures ! Que Dieu est pire que le diable ? lmpossible ! Quoi que puissent prouver les Écritures, elles ne prouveront jamais cela ; une telle chose ne peut pas être scripturairement vraie. Si vous me demandez « Que faut-il alors comprendre ? » et que je réponde que je ne sais pas, vous n'êtes pas plus avancés. Il y a, en effet, beaucoup de passages bibliques dont ni vous, ni moi, ne comprendrons le véritable sens avant que la mort ne soit engloutie dans la victoire. Je pense qu'il est préférable de dire que ces passages n'ont pas de sens, plutôt que de leur donner celui que vous leur donnez. Ils ne peuvent pas vouloir dire, quel que soit leur sens, que le Dieu de vérité est un menteur. Quelle que soit leur signification, ils ne peuvent pas vouloir dire que le Juge de toute la terre est injuste. Aucun texte ne peut signifier que Dieu n'est pas amour, que sa miséricorde ne s'étend pas à toutes ses œuvres. En d'autres termes, aucun passage biblique, quoi qu'il puisse prouver, ne peut prouver la prédestination. Tel est le blasphème qui fait que, tout en aimant ses partisans, je hais la doctrine de la prédestination, selon laquelle — à supposer qu'on s'y arrête un instant — on pourrait dire à notre adversaire le diable : « Espèce de fou, pourquoi t'épuises-tu à rugir çà et là ? Ta quête des âmes est aussi inutile et vaine que notre prédication. Ne vois-tu pas que Dieu t'a pris le travail des mains et qu'il l'accomplit avec beaucoup plus d'efficacité ? Toi, avec toutes tes principautés et tes pouvoirs, tu ne peux pas nous empêcher de résister à tes assauts ; mais, lui, il peut irrésistiblement détruire à la fois le corps et l'âme en enfer ! Toi, tu ne peux que séduire, alors que, lui, par son décret immuable d'abandonner des milliers d'âmes à la mort, il les contraint à persévérer dans le péché jusqu'à leur saut final dans les flammes éternelles. Toi, tu tentes les gens ; lui, il nous contraint à la damnation, car nous ne pouvons pas résister à sa volonté. Fou que tu es, pourquoi continues-tu à chercher qui tu pourras dévorer ? Ne vois-tu pas que Dieu est le lion dévorant, le destructeur des âmes, le meurtrier des hommes ? » Moloch a seulement fait passer des enfants par le feu, et ce feu a été vite éteint ; une fois le corps corruptible consumé, c'est la fin du tourment. Mais Dieu, dit-on, par son décret éternel fixé avant qu'ils n'aient agi en bien ou en mal, fait passer les petits enfants ainsi que les parents par le feu de l'enfer, « le feu qui ne s'éteindra jamais » ; et le corps qui y est jeté incorruptible et immortel se consumera sans fin, parce que c'est le bon plaisir de Dieu, « la fumée s'élevait continuellement ». (...)

LE VRAI DÉCRET

                   Oui, il y a un décret depuis la fondation du monde. Quel est ce décret ? « Je mettrai devant les fils des hommes la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction. Et l'âme qui choisit la vie vivra, de même que celle qui choisit la mort mourra ». Ce décret, selon lequel « Dieu a prédestiné ceux qu'il a connus d'avance » , existe effectivement de toute éternité. Ce décret, selon lequel tous ceux qui acceptent que Christ les vivifie sont « élus selon la prescience de Dieu » , tient bon maintenant, comme la lune et les fidèles témoins dans le ciel. Et quand le ciel et la terre passeront, il ne passera pas, car il est aussi immuable et éternel que l'être de Dieu qui l'a donné. Ce décret contient le plus fort encouragement à abonder en bonnes œuvres et en tout ce qui est saint ; il est un torrent de joie et de félicité pour notre consolation sans fin. Il est digne de Dieu et s'accorde en tous points avec les perfections de sa nature. Il nous donne la vision la plus noble de sa justice, de sa miséricorde et de sa vérité. Il est en accord avec tout le contenu, et toutes les parties, de la révélation chrétienne. Moïse et tous les prophètes lui rendent témoignage, de même que notre Seigneur béni et tous les apôtres. Ainsi Moïse dit, au nom du Seigneur : « J'appelle en ce jour les cieux et la terre à déposer contre vous que j'ai placé devant vous la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction ; choisis par conséquent la vie, pour que toi et ta semence viviez ». Et (pour citer au moins un des prophètes) Ézéchiel dit : « L'âme qui pèche mourra : le fils ne portera pas éternellement l'iniquité du père. La justice du juste sera sur lui, et la méchanceté du méchant sera sur lui » (Ézéchiel 18 : 20). Et notre Seigneur béni dit. « Si quelqu'un a soif, qu'il vienne et qu'il boive ! » (Jean 7 : 37). Et Paul, le grand apôtre, dit : « Dieu ordonne à tous les hommes en tous lieux de se repentir » (Actes 17 : 30) ; « tous les hommes en tous lieux » , cela signifie chaque homme à chaque endroit, sans exception de place ou de personne. Et saint Jacques dit : « Si quelqu'un de vous manque de sagesse, qu'il la demande à Dieu, qui donne à tous les hommes libéralement et sans reproches, et elle lui sera accordée » (Jacques 1 : 5). Et saint Pierre dit : « Le Seigneur ne veut pas qu'aucun périsse, mais que tous parviennent à la repentance » (2 Pierre 3 : 9). Et saint Jean dit : « Si un homme a péché, nous avons un avocat auprès du Père ; il est la propitiation de nos péchés, et non seulement des nôtres, mais de ceux du monde entier ». (1Jean 2 : 1-2).


CONCLUSION

                    Ecoutez, vous qui oubliez Dieu ! Vous ne pouvez pas lui faire porter la responsabilité de votre mort ! « Ai-je un quelconque plaisir à ce que le méchant meure ? » dit le Seigneur (Ezechiel 18 : 23 et suivants). Repentez-vous et détournez-vous de toutes vos transgressions ; ainsi l'iniquité ne sera pas votre ruine. Jetez loin de vous toutes vos transgressions, car pourquoi mourrais-tu, maison d'Israël ? Je ne prends pas plaisir à la mort de celui qui meurt, dit le Seigneur. Convertissez-vous donc et vivez ! » « Je suis vivant ! dit le Seigneur Dieu, je ne prends pas plaisir à la mort du méchant. Revenez, revenez de vos mauvaises voies. Pourquoi devriez-vous mourir, maison d'Israël ? » (Ézéchiel 33 : 11).


mardi 9 août 2016

(20) LES SERMONS DE WESLEY A L'OCCASION DE LA MORT DE GEORGE WHITEFIELD

Numérisation Yves PETRAKIAN Copie autorisée pour diffusion gratuite uniquement Obligation d'indiquer la source http://456-bible.123-bible.com 

Sermon 53 :        A L'OCCASION DE LA MORT DE GEORGE WHITEFIELD

Nombres 23,10   (1770)

Que je meure de la mort des hommes droits, et que ma fin soit semblable à la leur (Nombre 23:10) 

Sermon prêché par deux fois le dimanche 18 novembre 1770, dans deux chapelles de Londres, et une troisième fois, le 23, dans la ville de Greenwich. George Whitefield, né en 1714, fut un des premiers associés de J. Wesley à Oxford. Pour les détails, voir John Wesley, sa vie et son œuvre, par Matthieu. Lelièvre, 2° édit.

                    « Que ma fin soit semblable à la sienne ! » Tel est, à coup sûr, le vœu formé par beaucoup d'entre vous. Peut-être n'y en a-t-il guère, dans cette nombreuse assemblée, qui ne le fassent pas. Puisse ce désir s'entretenir en vous, et ne jamais cesser jusqu'à ce que vous soyez parvenus, vous aussi, « là où les méchants ne tourmentent plus personne, et où ceux qui sont fatigués se reposent ! (Job 3 : 17) »

                   Dans les circonstances spéciales qui nous réunissent, vous ne vous attendez pas à une étude complète de notre texte. Cela détournerait trop longtemps vos pensées de l'objet qui les remplit, objet triste et doux en même temps, le souvenir de celui en qui vous avez chéri un frère, un ami, un pasteur, je pourrais dire un père ; car combien n'y en a- t-il pas ici qu'il a « engendrés en Jésus-Christ (1 Corinthiens 4 : 15) ? » Ce discours sera sans doute plus en rapport avec vos préoccupations et avec la solennité de la circonstance, si nous nous entretenons immédiatement de l'homme de Dieu qui, si souvent, vous a adressé la parole dans ce lieu de culte, et dont la vie se résume, vous le savez, dans ces mots : « Jésus-Christ est le même hier, aujourd'hui et éternellement ! (Hébreux 13 : 8) »

                    Il convient donc que d'abord nous rappelions quelques-uns des traits de sa vie et de sa mort ; qu'ensuite nous disions quelque chose de ses qualités distinctives ; et enfin que nous cherchions à profiter de l'événement solennel qui vient de l'enlever soudainement du milieu de nous.

I

                    Rappelons d'abord quelques détails relatifs à sa vie et à sa mort. Il naquit à Gloucester, en décembre 1714, et, à l'âge de douze ans, il entra dans l'école secondaire de cette ville. Il avait dix-sept ans lorsqu'il commença à s'occuper sérieusement de religion et à servir Dieu du mieux qu'il savait. Vers l'âge de dix-huit ans, il se rendit à l'université d'Oxford, et fut admis dans le collège de Pembroque. Un an plus tard, il faisait connaissance avec ceux qu'on appelait les méthodistes et, à partir du premier jour, il les aima comme sa propre âme.

                    Ce fut par leur moyen qu'il arriva à la conviction qu'il nous faut naître de nouveau, ou bien notre religion n'étant qu'extérieure, ne nous servira de rien. Il s'associa avec eux pour jeûner, le mercredi et le vendredi, pour visiter les malades et les prisonniers, et pour « ramasser les miettes (Jean 6 : 12) » du temps, afin qu'aucun moment ne se perdit. Il modifia la direction de ses études et se mit à lire surtout des livres qui allaient droit au cœur de la religion, qui menaient directement à connaître par expérience Jésus-Christ et Jésus-Christ crucifié.

                    Bientôt il fut éprouvé comme par une fournaise. Non seulement il dut faire le sacrifice de sa réputation et voir quelques-uns de ses meilleurs amis lui tourner le clos, mais il passa par des épreuves intérieures, extrêmement pénibles. Il resta sans dormir pendant bien des nuits ; et, pendant bien des jours, il demeura prosterné sur le sol. Mais, après avoir gémi plusieurs mois sous le joug de « l'esprit de servitude » ; il sentit que Dieu enlevait son fardeau écrasant et lui donnait « l'Esprit d'adoption (Romains 8 : 15) », en lui faisant la grâce de s'attacher ; par une foi vivante, à « son Fils bien-aimé (Colossiens 1 : 13) »

                    On crut qu'un changement d'air était nécessaire pour le rétablissement de sa santé, qui avait beaucoup souffert, et il se rendit à Gloucester, où Dieu lui accorda de contribuer à réveiller plusieurs jeunes personnes. Celles-ci formèrent bientôt, en se groupant, une petite société ; ce furent là les prémices de son ministère. Peu de temps après, il commença à faire, deux ou trois fois par semaine, des lectures à quelques pauvres gens de la ville, et chaque jour il allait lire et prier avec ceux qui étaient détenus dans la prison du comté.

                    Il avait alors environ vingt et un ans, et on le pressait d'entrer dans les rangs du clergé. Mais il hésitait fort à le faire, se sentant insuffisant pour cette œuvre. L'évêque le fit appeler et lui dit : « J'avais résolu de ne consacrer personne avant l'âge de vingt-trois ans ; mais je vous consacrerai dès que vous voudrez ». Cela, joint à diverses autres circonstances providentielles, le décida à accepter, et il fut consacré le dimanche de la Trinité 1736 (Dimanche après celui de Pentecôte). Le dimanche suivant, il prêcha devant un auditoire très nombreux, dans l'église même où il avait été baptisé. Dans la semaine qui suivit, il retourna à Oxford et y prit son grade de bachelier. A partir de ce moment, il trouva là abondance d'occupations ; car c'était surtout à lui qu'on laissait le soin des pauvres et des prisonniers.

                     Mais, peu de temps après, il fut invité à aller remplacer à Londres un de ses amis qui se rendait, à la campagne. Il y passa deux mois, pendant lesquels il logeait à la Tour de Londres ; et, deux fois par semaine, il présidait un service liturgique dans la chapelle de la Tour ; il y faisait le catéchisme et y prêchait une fois, et de plus il visitait les soldats dans leurs casernes et à l'infirmerie. Outre cela, il tenait chaque soir un culte dans la chapelle de Wapping, et chaque mardi il prêchait, dans la prison de Ludgate. Tandis qu'il était à Londres, il reçut de ses amis qui étaient en Géorgie (Les deux frères Wesley étaient partis comme chapelains de la nouvelle colonie qui s'était formée en Géorgie, (Amérique du Nord) ) des lettres qui lui firent désirer d'y aller pour les aider ; mais, n'étant, pas bien convaincu que Dieu l'y appelât, il retourna, au bout de ces deux mois, à Oxford, pour y reprendre sa petite œuvre. Plusieurs jeunes gens s'y réunissaient tous les jours dans son appartement, pour s'affermir mutuellement dans leur très sainte foi.

                    Mais il dut bientôt tout quitter, étant appelé à desservir temporairement la paroisse de Dummer, dans le Hampshire. Dans cette Eglise, il présidait un culte deux fois par jour, le matin de bonne heure et le soir quand les gens étaient de retour de leurs travaux. Chaque jour aussi, il donnait une instruction religieuse aux enfants et visitait les familles « de maison en maison (Actes 20 : 20)  ». A. cette époque, il divisait sa journée en trois portions : huit heures pour le sommeil ou les repas, huit heures pour l'étude et le recueillement, huit heures pour le culte public, les catéchismes et les visites. Un serviteur fidèle de Jésus-Christ et de son Eglise pourrait-il mieux agir ? Si l'on admet que c'est impossible, alors nous dirons : « Va et fais de même ! (Luc 10 : 37) »

                     Mais la pensée qu'il devait aller à l'étranger le poursuivait. Etant à ce moment-là bien convaincu que Dieu l'y appelait, il lit tous ses préparatifs et se rendit à Gloucester, en janvier 1737, pour y prendre congé de ses amis. Ce fut au cours de ce voyage que Dieu commença a bénir extraordinairement son ministère. Partout où il prêcha, à Gloucester, à Stotnehouse, à Bath, à Bristol, des foules d'auditeurs accoururent, à tel point qu'on pouvait à peine endurer la chaleur dans les églises. Les impressions produites sur l'esprit de beaucoup de personnes furent très remarquables. Quand il fut de retour à Londres, où le général Oglethorpe le retint semaine après semaine et mois après mois, le Seigneur daigna bénir encore davantage sa prédication. Il se montrait infatigable ; le dimanche il prêchait en général quatre fois, sans parler des prières liturgiques qu'il lisait deux ou trois fois en public, et sans compter qu'il faisait souvent seize à dix-huit kilomètres.

                     Le 28 décembre, il quitta Londres. Ce fut le 29 que, pour la première fois, il prêcha sans le secours de notes écrites. Le 30 décembre, il s'embarqua ; mais un mois s'écoula avant que le bateau perdit de vue les côtes. Cette traversée si longue eut d'heureux effets, comme le montre ce qu'il écrivit au mois d'avril : « Béni soit Dieu ! nous sommes maintenant très heureux dans le grand salon du bateau. On n'y parle plus guère que de Dieu et de Jésus-Christ ; quand nous y sommes réunis, on s'entretient presque uniquement de choses qui se rattachent, soit à notre chute par le premier Adam, soit à notre nouvelle naissance par le second ». Ils s'arrêtèrent quelque temps à Gibraltar, et cela aussi paraît avoir été un arrangement providentiel ; car, dans cette ville, tant les civils que les militaires, riches et pauvres, jeunes et vieux, tous « reconnurent le temps où ils étaient visités (Luc 19 : 44)  ».

                     A partir du dimanche 7 mai 1738 et jusqu'à la fin d'août de la même année, il remplit les devoirs de son ministère dans la Géorgie, et en particulier à Savannah. Chaque jour, il présidait le culte par deux fois et y expliquait la parole de Dieu ; puis il visitait les malades. Le dimanche, il expliquait la parole de Dieu à cinq heures du matin ; à dix heures du matin et à trois heures de l'après-midi, il lisait les prières et prêchait ; dans la soirée, à sept heures, il expliquait le catéchisme de l'Eglise. Nos collègues dans le ministère en Angleterre en Ecosse, en Irlande trouveront sans doute qu'il est plus facile de critiquer un pareil ouvrier du Seigneur que d'imiter son exemple.

                     Il fut frappé de la triste situation où se trouvaient beaucoup d'enfants dans ce pays, et Dieu lui mit au cœur la pensée d'y fonder un orphelinat. Dans ce but, il songea à collecter des fonds en Angleterre, si le Seigneur lui accordait un heureux retour. Au mois de décembre, il se trouvait rentré à Londres, et le dimanche 14 janvier 1730, il reçut les ordres de la prêtrise (L'Eglise anglicane a retenu des expressions qui chez nous, appartiennent au catholicisme romain – Trad.) dans l'église du Christ à Oxford. Le jour suivant, il retourna à Londres, où il prêcha deux fois le dimanche 21. Bien que les églises fussent vastes et que les auditeurs fussent entassés, des centaines de gens restaient dehors dans les cimetières, autour des églises ; des centaines retournaient chez eux, sans avoir pu entrer. C'est ce qui lui donna la première idée de prêcher en plein air. Mais quand il en parla à quelques-uns de ses amis, cela leur parut une folie ; il n'exécuta donc point ce projet pendant son séjour à Londres. Ce fut un mercredi, le 21 février, à Bristol, que, trouvant fermées les portes de toutes les églises (sans compter qu'aucune n'eut pu contenir la moitié de l'auditoire), il se rendit à trois heures de l'après-midi à Kingswood, où il prêcha dans la campagne à environ deux mille personnes. Le vendredi, il y prêcha à quatre à cinq mille ; le dimanche suivant, à dix mille, autant qu'on en put juger. Le nombre de ses auditeurs alla en augmentant pendant tout le temps qu'il passa à Bristol, et, il s'est allumé là un foyer d'amour céleste qui ne s'éteindra pas de sitôt. Les mêmes effets se produisirent ensuite en diverses partie du pays de Galles et des comtés de Gloucester et de Worcester. De fait, Dieu confirma le témoignage rendu par son envoyé, partout où il passa.

                    Le dimanche 29 avril, il prêcha pour la première fois à Moorfields et sur le communal de Kennington (A Londres), et les milliers de gens qui l'écoutèrent là furent aussi tranquilles que si l'on avait été dans l'enceinte d'un temple. Se voyant de nouveau retenu en Angleterre, mois après mois, il fit de petits voyages dans différents comtés, et reçut les offrandes empressées de la multitude en faveur de son orphelinat de la Géorgie. A cette époque, le gouvernement mit l'embargo (Défense de sortir des ports ; on faisait cela en vue de réquisitionner les services des vaisseaux qui seraient jugés utiles – Trad.) sur les vaisseaux, ce qui empêcha notre frère de partir et lui donna l'occasion de faire, dans diverses portions de l'Angleterre, des tournées pour lesquelles beaucoup d'âmes rendront grâces à Dieu pendant toute l'éternité. Il s'embarqua finalement le 14 août ; mais il n'aborda en Pennsylvanie, que le 30 octobre. Il traversa les colonies de Pennsylvanie de New-Jersey, de New York, de Maryland, de Virginie et les Carolines du Nord et du Sud, prêchant partout, à des foules immenses, avec tout autant de bénédiction qu'en Angleterre. Le 10 janvier 1740, il parvint à Savannah.

                    Le 29 du même mois, il ajouta trois pauvres orphelins à une vingtaine d'autres qu'il avait déjà réunis. Le jour suivant, il traça le plan de son établissement, à environ 16 kilomètres de Savannah. Le 11 février, il admit quatre orphelins de plus ; puis il partit pour Frédérica, en vue d'y recueillir quelques orphelins venus des régions méridionales de la colonie. A son retour, il établit une école pour enfants et pour adultes à Darien, et là encore il trouva quatre orphelins. Le 25 mars, il posa les fondements de l'orphelinat, auquel il donna le nom bien approprié de Béthesda. Bien des enfants encore à naître béniront Dieu de ce que cette œuvre a été commencée. Il avait dès lors près de quarante orphelins, et en tout presque une centaine de bouches à nourrir tous les jours, Mais il ne s'inquiétait d'aucune chose, et se déchargeait de tout souci sur celui qui nourrit les petits du corbeau quand ils crient.

                    Au mois d'avril, il fit une nouvelle tournée en Pennsylvanie et dans les colonies de New Jersey et de New York. Des foules incroyables accouraient pour l'entendre, et, dans le nombre, des quantités de noirs. Partout la masse des auditeurs étaient touchés d'une façon merveilleuse. Beaucoup furent profondément convaincus de leur état de perdition ; beaucoup se convertirent sincèrement au Seigneur. Dans certaines localités, des milliers de personnes poussaient des cris d'angoisse, et nombre d'entre elles semblaient à l'agonie, la plupart versant des torrents de larmes, quelques-unes devenant, pâles comme la mort, d'autres se tordant les mains, d'autres gisant à terre, d'autres encore tombant, entre les bras de leurs amis, et presque tous levant les yeux au ciel et implorant la miséricorde

                    Le 5 juin, il était de retour à Savannah. Dans la soirée du lendemain, pendant. le culte public, tout l'auditoire, tant les vieux que les jeunes, fondit larmes, et, à l'issue du service ; plusieurs de ses paroissiens et aussi toute sa propre famille, surtout les petits enfants, rentrèrent chez eux en pleurant tout le long du chemin, et même quelques-uns ne pouvaient s'empêcher de prier à haute voix. Les sanglots et les pleurs des enfants continuèrent pendant toute la nuit, et pendant une bonne partie de la journée suivante.

                    Au mois d'août, il se remit, en route et, traversant diverses provinces, il parvint à Boston. Pendant le temps qu'il passa là ou dans des localités voisines, il eut à endurer une grande faiblesse physique, ce qui n'empêcha point les auditoires d'être si considérables et si extraordinairement affectés par la prédication que, de mémoire d'homme, on n'avait rien vu de pareil dans le pays. La même démonstration de puissance accompagna sa parole à New York, et tout particulièrement le dimanche 2 novembre. Il avait à peine commencé de parler que de tous côtés on entendit des cris, des pleurs, des sanglots. Beaucoup tombèrent à terre. Le cœur transpercé ; mais beaucoup aussi furent remplis des consolations divines. Vers la fin de ce voyage, il faisait les réflexions suivantes : « Il y a soixante-cinq jours que j'arrivai à Rhode Island, extrêmement affaibli dans mon corps. Cependant Dieu m'a donné la force de prêcher dans cet intervalle cent soixante et quinze fois en public, sans compter de nombreuses exhortations en particulier. Jamais Dieu ne m'avait accordé tant de bonheur ; jamais je n'ai éprouvé moins de fatigue en voyageant ; jamais je n'ai joui si constamment du sentiment de la présence de Dieu, au milieu des assemblées auxquelles je prêchais ». Au mois de décembre, il revint à Savannah, et, en mars de l'année suivante, il se trouvait de nouveau en Angleterre.

                    Vous aurez compris déjà que le récit que je viens de vous faire est tiré principalement du journal de sa vie, journal qui, par sa simplicité naïve et exempte de toute affectation, se place au premier rang parmi les écrits de ce genre. Et ce qui précède est un échantillon fidèle de ses travaux en Europe et en Amérique pendant les trente années qui ont suivi, comme aussi des pluies continuelles de bénédictions que le Seigneur a répandues comme récompense des efforts de son serviteur. N'est-il pas bien regrettable qu'il se soit laissé arrêter dans la rédaction de ce journal et ne l'ait reprise que vers l'époque où Dieu allait le rappeler à lui pour le faire jouir du fruit de ses travaux ? Mais s'il a laissé d'autres écrits de cette nature, et si ses amis me jugent digne de cet honneur, je me ferais un plaisir, et ce serait pour moi une gloire, de les mettre en ordre, de les transcrire et de les préparer en vue de leur publication.

                    Un monsieur qui habite Boston nous fournit les détails qui suivent sur les derniers moments de White-field :

                    « Après avoir passé environ un mois avec nous, à Boston ou dans le voisinage, prêchant tous les jours pendant ce temps, il se rendit à Old-York et y prêcha le jeudi 27 septembre. De là il alla à Portsmouth et y prêcha le vendredi. Il se mit en chemin pour Boston le samedi matin ; mais avant qu'il fût arrivé à Newbury, où il avait promis de prêcher dans la matinée du lendemain, on insista pour qu'il donnât une prédication en route ; et, la maison où il était ne pouvant contenir la foule, ce fut dans un champ, en plein air, qu'il prêcha. Mais il était indisposé depuis plusieurs semaines, et cet effort l'épuisa tellement qu'en arrivant à Newbury, il fallut que deux hommes l'aidassent à sortir du bac. Cependant il se remit dans la soirée et retrouva son entrain habituel. Il se retira dans sa chambre à neuf heures, selon son usage, auquel il ne dérogeait pour personne, et il reposa mieux qu'il n'avait fait depuis plusieurs semaines. Le 30 septembre, il se leva à quatre heures du matin, et entra dans son cabinet pour prier ; son compagnon de voyage remarqua qu'il y était resté beaucoup plus longtemps que d'habitude, Quand il en sortit et vint retrouver son compagnon, il se jeta sur le lit et y demeura à peu près dix minutes. Puis il se mit à genoux et demanda au Seigneur avec beaucoup d'ardeur que, si c'était selon sa volonté, il lui permit d'achever ce jour-là son ministère. Il chargea ensuite son serviteur d'appeler M. Parsons, le pasteur chez qui il était logé ; mais une minute plus tard, avant l'arrivée de Parsons, il expirait, sans avoir poussé un gémissement ou un soupir. En apprenant la nouvelle de sa mort, six messieurs partirent pour Newbury afin de ramener ici sa dépouille mortelle ; mais il ne fut pas possible de la transporter, de telle sorte que ses cendres vénérées reposeront à Newbury. Le fait qu'on s'attendait à ce qu'il fût enterré ici, a empêché des centaines de personnes de Boston d'assister à son ensevelissement. Que cette dispensation de la Providence soit sanctifiée pour l'Eglise de Dieu tout entière, et en particulier pour cette province! 

II

                    Nous voudrions maintenant rappeler quelques traits de son caractère. La Gazette de Boston publia, à l'époque de sa mort, une courte notice à laquelle nous empruntons ce qui suit :

                     « Pendant bien des années qu il déployait dans son ministère public, ont été un sujet d'étonnement pour le monde entier. C'était du cœur que venaient ses discours, et pareille ferveur ne fut peut-être jamais vue depuis le temps des apôtres. Il n'avait point de rival comme prédicateur et pour l'influence qu'il exerçait sur d'immenses auditoires. Sa conversation particulière n'était pas moins agréable et instructive que ses prédications ; il avait une remarquable facilité d'expression, il aimait à s'entretenir, et il visait à l'édification. Puisse la génération naissante conserver quelques étincelles du feu sacré dont brûlait ce fidèle serviteur du Très-Haut et qui jetait un éclat si brillant et si pur sur son caractère et sur sa vie !

                    Un journal anglais a publié une appréciation plus détaillée et non moins exacte, que vous me permettrez de reproduire en substance :

                    « Le souvenir de cet éminent chrétien mérite d'être gravé dans le cœur de tous ceux qui aiment une religion vivante et efficace. En dépit d'une constitution qui était faible, Whitefield a continué jusqu'à son dernier jour à prêcher plus fréquemment et avec plus de chaleur qu'on ne serait en droit de l'attendre même des plus robustes. Appelé à remplir cette fonction à un âge où la plupart des jeunes gens commencent seulement à s'y préparer, il n'avait pas eu le temps d'étudier à fond les langues sacrées. Mais cette lacune fut comblée amplement par son talent plein de vie et de fécondité, par son zèle ardent, et par sa parole puissante et persuasive. Bien qu'en chaire il crût devoir souvent, « sachant quelle est la crainte qu'on doit avoir du Seigneur, tacher d'en persuader les hommes (1 Corinthiens5 : 11) », il n'avait cependant rien de triste dans le caractère ; il était au contraire d'une humeur gaie, et ses dispositions naturelles étaient douces, et même tendres. Ceux qui s'adressaient à lui le trouvaient tout aussi prêt à s'occuper de leurs nécessités matérielles que de leurs besoins spirituels. Il est bon aussi de constater qu'il insistait constamment auprès de ses auditeurs sur l'importance de tous les devoirs moraux, et en particulier sur la nécessité d'être diligent dans la vocation ou le métier qu'on exerce, et sur celle d'obéir à ceux qui sont nos supérieurs. Par son activité extraordinaire dans la prédication en divers lieux, et même en plein air, il s'efforçait d'atteindre les classes inférieures de la population qui étaient plongées dans l'indifférence et l'ignorance les plus profondes, et de réveiller chez elles le sentiment religieux ».

                    « A cause de ces efforts et des autres travaux auquel, il s'est consacré, George Whitefield vivra longtemps dans notre souvenir, entouré de notre estime et de notre vénération ».

                    On ne peut nier que ces appréciations ne soient exactes et impartiales, aussi loin qu'elles vont ; mais elles ne vont guère plus loin que la surface de son caractère ; elles vous montrent le prédicateur, mais non l'homme, le chrétien, le saint. Me sera-t-il permis de compléter son portrait de ce côté-là, en mettant à profit une connaissance personnelle de près de quarante ans ? Je sens bien qu'il est difficile de parler convenablement sur un point si délicat, et qu'on a besoin de beaucoup de prudence pour éviter les deux extrêmes et n'en dire ni trop ni trop peu. Il y a plus : je sais qu'il est impossible de parler dans un sens ou dans l'autre, sans s'exposer à être accusé, par les uns d'en avoir trop dit, par les autres de n'en avoir pas dit assez. Mais, sans m'arrêter à cela, je dirai ce que je sais et rien de plus, comme en la présence de celui auquel nous devons tous rendre compte,

                    Nous avons signalé son zèle incomparable, son infatigable activité, sa sympathie pour les affligés, sa charité envers les pauvres. Mais ne rappellerons-nous pas également sa reconnaissance profonde à l'égard de tons ceux dont Dieu s'était servi pour lui faire du bien, et comment il n'a jamais cessé jusqu'à son dernier jour d'en parler avec la plus grande considération ? Ne rappellerons-nous pas qu'il avait un cœur capable de l'amitié la plus généreuse et la plus tendre ? Il m'est souvent arrivé de penser que ce dernier trait était le trait caractéristique de son individualité. Chez combien d'hommes avons-nous rencontré autant de bienveillance, des affections aussi larges, aussi expansives ? N'est-ce pas surtout cela qui lui attirait et lui attachait les cœurs d'une façon si étonnante ? Autre chose que l'amour peut-il engendrer l'amour ? Cette bonté brillait sur son visage, s'exprimait par toutes ses paroles, soit en public, soit en particulier. N'est-ce pas elle qui, rapide et envahissante comme l'éclair, courait d'un cœur à l'autre, animant ses sermons, ses entretiens, ses lettres ? A vous de répondre ! »

                    Loin de nous les commentaires de ces esprits corrompus qui ne connaissent qu'un amour terrestre et sensuel ! Il ne faut point oublier de dire que, chez notre frère, on rencontrait la modestie la plus délicate, la plus parfaite. Son ministère l'appelait fréquemment à avoir de longues conversations, non seulement avec des hommes, mais aussi avec des femmes de tout âge et de tout rang. Ses rapports avec elles réalisaient pleinement les recommandations faites par saint Paul à Timothée :

                    « Exhorte les femmes âgées comme des mères, les jeunes comme des sœurs, avec une entière pureté (1 Timothée 5 : 2)  ».

               Et, d'un autre côté, à ces dispositions aimables s'alliaient harmonieusement la franchise et la sincérité de ses conversations ; mais il ne tombait pas davantage dans la brusquerie que dans la dissimulation. Cette franchise elle-même n'était-elle pas une preuve, en même temps qu'un fruit, de son courage, de son intrépidité ? C'est parce qu'il était revêtu de ces qualités qu'il n'avait peur de personne et parlait très simplement, très librement à tous, quel que fût leur rang ou leur position sociale, aux grands comme aux petits, aux riches comme aux pauvres ; sa seule préoccupation était de « se rendre recommandable à la conscience de tous les hommes devant Dieu, par la manifestation de la vérité (2 Corinthiens 4 : 2)  ».

                    Il ne redoutait pas davantage les travaux ou les souffrances qu'il ne craignait « ce que peut faire l'homme (Psaume 118 : 6), il se montrait. aussi patient pour endurer les maux que persévérant dans l'accomplissement des bonnes œuvres. De là cette constance qu'il a fait paraître dans tout ce qu'il avait entrepris au nom de son Maître. Je n'en citerai qu'un exemple, l'orphelinat de la Géorgie, qu'il fonda et acheva malgré toutes sortes de découragements. Pour ce qui ne touchait qu'à lui il se montrait souple et, accommodant, il se laissait facilement persuader et gagner. Mais dès qu'il s'agissait des intérêts du Seigneur, ou que sa conscience était en jeu, il était inébranlable. Personne n'eut pu l'entraîner, soit par des raisonnements, soit en l'intimidant, à s'écarter tant soi peu de cette intégrité qui était à la base de son caractère moral tout entier et qui déterminait toutes ses paroles et tous ses actes. Sur ce point-là il était, « ferme comme un pilier de fer, aussi résistant qu'une muraille d'airain ».

                      Si maintenant on se demande d'où venaient cette intégrité, cette sincérité, ce courage, cette patience, et tant d'autres qualités aimables et précieuses, la réponse est facile. Cela ne venait pas de ce qu'il possédait un excellent naturel ou une intelligence hors ligne ; ce n'était pas non plus le fruit de l'éducation ou de l'influence de ses amis ; non, cela provenait de sa foi à un Sauveur crucifié, d'une foi qui était l'œuvre de Dieu. Cela venait de ce qu'il avait « une espérance vive de posséder l'héritage qui ne se peut corrompre, ni souiller ; ni flétrir (1 Pierre 1 : 3,4)  ». de ce que « l'amour de Dieu avait été répandu dans son cœur par le Saint-Esprit qui lui avait été donné (Romains 5 : 5 » et remplissait son âme d'une affection tendre et généreuse pour tous ses semblables. C'est de là que, comme d'une source, jaillissait ce torrent d'éloquence qui souvent semblait tout entraîner ; de là aussi ce don merveilleux de persuasion qui triomphait de la résistance des pêcheurs les plus endurcis. Cela explique pourquoi si fréquemment « sa tête se fondait en eau et ses yeux étaient une vive fontaine de larmes (Jéremie 9 : 1) ; » et comment son âme pouvait s'épancher dans la prière d'une façon tout à fait unique, avec tant d'abondance et d'abandon, avec tant de force et de variété dans les expressions comme dans les pensées.

                    Pour terminer ce que je voulais dire sur ce point, laissez-moi vous faire remarquer quel honneur Dieu accorda à ce fidèle serviteur en l'appelant à proclamer son Évangile éternel en tant de pays divers, à de si grandes multitudes, avec des effets si puissants sur tant d'âmes précieuses ! Avons-nous appris, par l'histoire ou autrement, qu'il y ait eu quelqu'un, depuis le temps des apôtres, qui ait annoncé la bonne nouvelle de la grâce divine dans un rayon aussi étendu, sur une portion aussi considérable de la surface du globe ? quelqu'un à qui il ait été donné d'appeler à la repentante tant de milliers, tant de myriades de pécheurs ? Connaissez-vous un instrument béni davantage par le Seigneur pour, faire passer des âmes en grand nombre « des ténèbres à la lumière et de la puissance de Satan à Dieu (Actes 26 : 18) ? » Je n'oublie pas qu'en parlant ainsi nous ferions aux esprits frivoles du monde l'impression de gens sans culture, de vrais barbares. Mais vous, mes frères, vous comprenez ce langage ; car c'est celui de la patrie vers laquelle vous marchez et où notre ami bien-aimé nous a précédés de quelques pas seulement.

III

                    Que ferons-nous pour mettre à profit cet événement solennel ? Tel est le troisième point que nous sommes appelée à examiner ensemble. La réponse à une question si sérieuse est pourtant facile (et que Dieu veuille la graver dans tous nos cœurs !) : il faut demeurer attachés aux doctrines importantes que notre frère a prêchées, et être animés du même esprit que lui. Et d'abord, restons attachés aux importantes doctrines bibliques qu'il a partout enseignées. Certaines doctrines n'ont pas un caractère très essentiel, et relativement à elles, grâce à l'état d'infirmité où se trouve l'intelligence humaine, il y a, comme il y a eu depuis des siècles divergence d'opinion parmi les vrais enfants de Dieu eux-mêmes. Quant à ces doctrines, nous pouvons réserver notre manière de voir et nous devons respecter celle des autres ; qu'il soit entendu que sur ces points-là on peut n'être pas d'accord. Mais retenons d'autant plus fermement les éléments essentiels de « la foi qui a été donnée une fois aux saints (Jude 1 : 3) », ces choses sur lesquelles ce vaillant soldat de Jésus-Christ insistait partout et toujours !

L'article fondamental, c'était pour lui ceci : « Attribuer à Dieu toute la gloire de tout le bien qui peut se trouver en l'homme » ; ou encore : « Mettre, dans l'œuvre de notre salut, Jésus-Christ aussi haut que possible, l'homme aussi bas que possible ». Ce fut là son point de départ, et ce fut celui de ses amis d'Oxford, les premiers méthodistes, comme on les appela. Leur grand principe, c'était que l'homme n'a par lui-même ni force ni mérites. Ils soutenaient que c'est de l'Esprit de Christ seul que vient le pouvoir de penser, de parler, d'agir comme il faut, et qu'il n'y a des mérites que dans le sang de Jésus, et point en l'homme, quel que soit le degré de grâce qu'il ait atteint. Aussi notre frère enseignait avec ses amis que, s'il ne l'a reçue d'en haut, l'homme n'a pas la puissance de produire une seule bonne œuvre, de prononcer une seule bonne parole, de concevoir un seul bon désir. Il ne suffit pas, en effet, de dire que le péché a rendu tous les hommes malades ; le fait est que nous sommes tous « morts dans nos fautes et dans nos péchés (Éphésiens  2 : 1)  ». D'où il suit que tous les enfants des hommes sont « naturellement des enfants de colère (Éphésiens  2 : 3)  ». Nous sommes tous « coupables devant Dieu (Romains 3 : 19) », tous en danger de mort, temporelle et éternelle.

                    Nous sommes tous également incapables de nous soustraire, soit à notre culpabilité, soif à l'empire du péché. Car « qui est-ce qui tirera une chose nette de ce qui est souillé ? Personne (Job 14 : 4) » que le Tout-Puissant ! Qui pourrait ressusciter ceux qui sont morts, dont l'âme est morte par le péché ? Celui-là seul qui nous a tirés de la poussière de la terre. Mais en considération de quoi le fera-t-il ? Ce ne sera pas « à cause des œuvres de justice que nous aurions faites (Tite 3 : 5)  ». « Les morts ne loueront point l’Éternel (Psaume 115 : 17) ; » ils ne peuvent. rien faire qui leur obtienne la grâce d'une résurrection. Aussi, tout ce que Dieu fait à cet égard, il le fait uniquement. pour l'amour de son Fils bien-aimé, qui « a été navré pour nos forfaits et frappé pour nos iniquités (Esaïe 53 : 5) », qui « a porté nos péchés en son corps sur le bois (1 Pierre 2 : 24) », qui « a été livré pour nos offenses et qui est ressuscité pour notre justification (Romains 4 : 25)  ». Telle est la seule source de mérites et de grâces que nous possédions, la seule que nous puissions avoir ; telle est en particulier la source de notre pardon, de notre réconciliation avec Dieu, de notre justification pleine et entière. Mais par quel moyen arrivons-nous à avoir part à ce que Jésus-Christ a fait et a souffert ? « Ce n'est point par les œuvres, afin que personne ne se glorifie (Éphésiens 2 : 9) ; » c'est par la foi seule. « Nous concluons donc, dit l'Apôtre, que l'homme est justifié par la fois sans les œuvres de la loi (Romains 3 : 27)  ». Et « à tous ceux qui l'ont rem (de cette manière), il leur a donné le droit (la puissance) d'être faits enfants de Dieu, savoir à ceux qui croient en son nom, qui ne sont point nés... de la volonté de l'homme, mais de Dieu (Jean 1 : 12,13)  ».

                    « Si (de cette manière-là) un homme ne naît de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu (Jean 3 : 3)  ». Mais tous ceux qui sont ainsi « nés de l'Esprit (Jean 3 : 6) » ont « le royaume de Dieu au dedans d'eux (Lu 17 : 21 – d'après la version anglaise)  ». Jésus établit son règne dans leurs cœurs ; et ce règne « consiste dans la justice, dans la paix, et dans la joie par le Saint-Esprit (Romains 14 : 17)  ». Ils ont « les mêmes sentiments que Jésus-Christ a eus (Phi 2 : 5) ; » et cela les rend capables de « marcher comme il a marché lui-même (1Jean 2 : 6)  ». Son Esprit qui habite en eus les rend saints intérieurement, par le cœur, mais aussi « saints dans toute leur conduite (1Pierre 1 : 15)  ». Toutefois, puisque tout cela est le don gratuit de Dieu, procuré par la justice et le sang de Jésus-Christ, il y aura toujours également lieu de dire : « Que celui qui se glorifie, se glorifie dans le Seigneur (1Corinthiens 1 : 31)  ».

                    Vous n'ignorez pas que c'est sur ces doctrines fondamentales que notre frère insistait partout. Et ne peut-on pas les résumer en ces deux expressions, la nouvelle-naissance et la justification par la foi ? Insistons donc, nous aussi, sur ces choses avec une pleine hardiesse, en tout temps et en tout lieu, soit en public pour ceux d'entre nous qui sont appelés à le faire, soit en particuliers quand l'occasion s'en présente. Demeurez attachés à ces bonnes vieilles doctrines qui ne sont guère à la mode et ne vous inquiétez ni des contradictions ni des calomnies. Avancez donc, mes frères, avancez au nom du Seigneur et par sa force toute-puissante. Appliquez-vous diligemment à « gardez le bon dépôt (2 Timothée 1 : 14) », sachant que la terre et les cieux passeront, mais que cette vérité ne passera point.

                    Mais suffit-il de rester attachés aux doctrines qu'il prêchait, si pures qu'elles fussent ? N'est-il pas encore plus important d'être animés du même esprit que lui, d'être ses imitateurs en cela comme il le fut de Christ ? S'il n'en était ainsi, la pureté des doctrines professées par nous ne ferait qu'augmenter notre condamnation. Voilà donc ce qu'il y a de plus essentiel, être animés du même esprit que lui. Et s'il est vrai que, sur certains points, nous devrons nous contenter de l'admirer sans être en état de l'imiter, nous pourrons néanmoins en beaucoup d'autres participer aux mêmes grâces et aux mêmes bénédictions que lui. Si vous sentez vos besoins et croyez à l'amour généreux du Seigneur « qui donne à tous libéralement et sans rien reprocher (Jas 1 : 5) », implorez celui qui opère tout en tous afin d'obtenir une mesure de cette foi précieuse, de ce zèle et de cette activité, de cette tendresse de cœur, de cette charité, de ces « entrailles de miséricorde (Colossiens 3 : 12)  ». Luttez avec Dieu pour recevoir quelque chose de ces dispositions reconnaissantes, amicales, affectueuses, quelque chose de cette droiture, de cette simplicité, de cette sincérité chrétienne, de cet « amour sans hypocrisie ». (1 Pierre 1 : 22) Luttez jusqu'à ce que la puissance d'en haut ait produit en vous le même courage et la même patience, et, par-dessus tout, puisque c'est là comme le couronnement de tout, la même intégrité à toute épreuve !

                    N'y a-t-il pas encore quelque fruit de la grâce divine qui ornait spécialement l'âme de notre frère et dont il déplorait fréquemment et hautement l'absence chez les enfants de Dieu ? Oui, il y en avait un, L'amour fraternel pour tous, cette affection sincère et tendre que nous devrions éprouver pour tous ceux que nous croyons enfants du Seigneur par la foi, pour tous ceux qui, quelle que soit la dénomination qu'ils portent, « craignent Dieu et s'adonnent à la justice (Actes 10 : 35)  ». Il eût voulu voir tous ceux « qui ont goûté la borne parole de Dieu (Hébreux 6 : 5) » animés de cet esprit de largeur chrétienne qui est si mal compris et surtout si peu pratiqué, même parmi beaucoup de ceux qui en parlent constamment. Où sont-ils les hommes qui ont ces dispositions, qui montrent une vraie largeur chrétienne, qui aiment comme des amis, comme des frères dans le Seigneur, comme des copartageants du royaume des cieux sur la terre et des cohéritiers du royaume éternel, tous ceux qui, quelles que soient leurs opinions, les formes de leur culte ou la communion particulière à laquelle ils se rattachent, croient au Seigneur Jésus, aiment Dieu et leurs semblables, cherchent à plaire à l’Éternel et craignent de l'offenser, s'abstiennent soigneusement du mal et sont zélés pour les bonnes œuvres ? Pour être un chrétien vraiment large, il faut porter ainsi tous ses frères dans son cœur constamment, éprouver une affection indicible pour eux, être si désireux de contribuer à leur bien-être qu'on ne cesse point de les recommander au Seigneur par des prières et de témoigner en leur faveur devant les hommes ; il faut leur parler selon leur cœur et tâcher, par tout ce qu'on peut dire, de fortifier leurs mains dans l'œuvre de Dieu. Il faut aussi leur aider, autant qu'on le peut en tout, soit matériellement, soit spirituellement ; il faut être prêt à donner et à se donner pour eux, et même à « donner sa vie pour ses frères (1 Jean 3 : 16)  ».

                     Quel type aimable que celui que nous venons d'esquisser ! Combien chaque enfant de Dieu devrait chercher à le réaliser ! Pourquoi donc le rencontre-t-on si rarement ? Comment se fait-il que, lorsque nous avons goûté l'amour de Dieu, nous puissions nous donner quelque repos aussi longtemps que nous ne sommes pas tels ? Ah ! c'est que Satan a inventé un moyen bien subtil de prouver à des milliers de chrétiens qu'ils peuvent, sans être coupables, se dispenser de réaliser cet idéal. Je souhaite qu'il n'y en ait pas, parmi ceux qui sont ici présents, beaucoup qui aient été « pris dans ce piège du diable, pour faire sa volonté (2 Timothée 2 : 26). « Peut-être quelqu'un dit-il : « Pour moi, j'aime ainsi tous ceux que je crois enfants de Dieu. Mais jamais je ne croirai qu'on peut être enfant de Dieu quand on appartient à cette secte abominable ! Croyez-vous qu'on puisse avoir ces opinions détestables et être un enfant de Dieu ? qu'on puisse être enfant de Dieu et prendre part à un culte aussi absurde, aussi superstitieux et même idolâtre ? » C'est là essayer d'excuser un péché en y en ajoutant un nouveau. Pour nous justifier d'un manque de charité, nous en rejetons la faute sur les autres. Pour déguiser nos dispositions diaboliques, nous déclarons que nos frères sont enfants du diable. Oh ! fuyez ce piège, et si vous y avez déjà été pris, sortez-en au plus tôt. Tâchez donc d'apprendre à aimer de cet amour plein de largeur chrétienne, qui « n'est point emporté » , prompt à juger, de cet amour qui « ne soupçonne point le mal » , qui « croit tout, espère tout (1 Corinthiens 13 : 4,5,7) », qui tient compte de toutes les circonstances pour les autres comme nous désirons qu'on en tienne compte pour nous-mêmes. Alors nous reconnaîtrons la grâce de Dieu en tout : homme qui la possède, sans nous arrêter, à ses idées particulières ou aux formes de son culte. Alors tous ceux qui craignent le Seigneur nous seront chers comme nos plus proches « dans les entrailles de Jésus-Christ (Philippiens 1 : 8 – d'après le texte grec)  ».

                    N'est-ce pas là l'esprit qui animait notre cher ami ? Pourquoi ne serait-ce pas aussi le nôtre ? Ô Dieu d'amour, jusqu'à quand ton peuple sera-t-il un objet de risée pour les païens ? Jusqu'à quand se moquera-t-on de lui en disant : « Voyez comme ils s'entr'aiment, ces chrétiens-ci ? » Quand donc ôteras-tu de dessus nous cet opprobre ? L'épée ne cessera-t-elle point de dévorer ? Quand commanderas-tu aux tiens de ne plus poursuivre l'un l'autre ? Maintenant même, que tout le peuple s'arrête et ne poursuive plus ses frères ! Quoi que fassent les autres, nous tous du moins, ô mes frères, entendons la voix de ce serviteur de Dieu qui, quoique mort, parle encore. Ne vous semble-t-il pas l'entendre vous dire : « Soyez désormais mes imitateurs comme je l'ai été de Christ. Qu'aucun frère ne lève plus l'épée contre son frère, et qu'on ne s'adonne plus à la guerre ! Revêtez-vous plutôt, comme étant les élus de Dieu, d'entrailles, de miséricorde, d'un esprit d'humilité, de bonté fraternelle, de douceur, de patience, vous supportant mutuellement par amour. Que le temps passé ait plus que suffi pour s'être haïs, jalousés et querellés, pour s'être mordus et dévorés les uns les autres ! Bénissez Dieu de ce que vous ne vous êtes pas entre-détruits depuis longtemps, et dorénavant conservez l'unité de l'Esprit par le lien de la paix ! » 

                    Ô Dieu, rien n'est impossible pour toi : tu fais tout ce qu'il te plaît. Veuille donc faire tomber sur nous maintenant le manteau du prophète que tu viens d'enlever. « Où est l’Éternel, le Dieu d' Elie ? (2 Rois 2 : 14) » Que l'esprit de ton serviteur descende sur nous tes serviteurs ! Montre nous que tu es le Dieu qui répond par le feu ! Que le feu de ton amour vienne embraser tous nos cœurs. Et puisque nous t'aimons, fais que nous nous aimions les uns les autres d'un amour plus fort que la mort ! « Que toute aigreur, toute animosité, toute colère, toute crierie, toute médisance et toute malice soient bannies du milieu de nous ! (Éphésiens 4 : 31) » Que ton Esprit repose si puissamment sur nous, qu'à partir de ce moment nous soyons « bons les uns envers les autres, pleins de compassion, nous pardonnant mutuellement, comme Dieu nous a pardonnés par Christ ! (Éphésiens  4 : 32) »

CANTlQUE

Cela va bien, serviteur du saint Maître !
De tes travaux le cours est terminé.
Tu combattis ; ta vainquis ; tu vas être
Par le seigneur de gloire couronné.
Dès maintenant ton âme les possède,
Ces biens du ciel désirés ici-bas.
Celui qui fut ton refuge et ton aide
T'a recueilli sur son sein, dans ses bras.

Dans son amour ce Sauveur charitable
Exauce ainsi tous tes voeux de ton cœur.
Sans longs délais il t'admet à sa table ;
De son repos tu jouis en vainqueur.
O messager de la paix, de la grâce,
Que sur les monts ils étaient beaux tes pieds !
Mais Jésus vit que ton âme était lasse ;
Il te fit signe : à ses pieds tu t'assieds.

Là haut ta voix s'unit aux voix des anges
Pour entonner le cantique nouveau ;
Mieux que jamais tu chantes les louanges
De Jéhovah, le Sauveur et l'Agneau !
Amis, ton âme enfin nage et se plonge
Dans l'océan de l'amour infini.
Et ton bonheur, ce n'est pas un vain songe
Tes yeux ont vu Jésus, le Roi béni !

Oh ! quand là-haut irons-nous te rejoindre,
Loin des combats, dans le sein de Jésus ?
En y pensant notre exil semble moindre ;
Nos ennemis, nos dangers ne sont plus !
Viens donc, Seigneur, viens bientôt à notre âme
Ouvrir le ciel : « C'est assez ; monte ici ! »
Ton peuple élu t'adore et te proclame
Et nous voulons te louer aussi !