dimanche 1 juillet 2012

LA VIE DE RESURRECTION Par Jessie Penn-Lewis


TABLE DES MATIÈRES :
                                

                                 INTRODUCTION : La mort au péché.
                                 Chapitre I : Le parfait développement de la vie de résurrection.
                                 Chapitre II : De la continuité de la croix dans la vie du racheté.
                                 Chapitre III : Le sacrifice : "Il ne peut se sauver lui-même".  
                                 Chapitre IV : Fils de la croix.
                                 Chapitre V : Le cœur brisé de Jésus au Calvaire.
                                 Chapitre VI : L’unité que Christ a achetée de sa vie.

PRÉFACE

   C’est en novembre 1904 que se répandit la nouvelle d’un réveil au Pays de Galles, où Dieu agissait avec puissance dans les cœurs. A ce moment, j’étais dans le sud du pays, où je rencontrai en octobre un pasteur gallois, qui me dit ce dont il avait été le témoin à New-Quai (Cardiganshire). Je rédigeai alors un article que j’envoyai au journal "Life of Faith", article intitulé : "Un nuage grand comme la main". L’article parut le 9 septembre. Le 30, j’en envoyai un autre intitulé : "Le réveil au Pays de Galles". Par la suite, je rédigeai chaque semaine pour ce journal des nouvelles du réveil. Celles-ci éveillèrent un profond intérêt dans le monde entier ; ce dont les lettres reçues font foi. Des demandes nombreuses, pressantes, me parvenaient, demandant que je publie un recueil de ces articles.
    C’est pourquoi je publie une première série, sous le titre : "The Climax of the Risen Life", (Le point culminant de la vie de résurrection). Je ne crois pas utile de donner ici l’historique du réveil et des événements qui le signalèrent. Aujourd’hui, on trouve ces détails en d’autres publications. Mais vers la fin du réveil, Dieu donna des messages directs aux âmes réveillées, messages pour la croissance du Corps de Christ. Ce sont ces messages donnés par l’Esprit de Dieu pendant ces trois années, lesquels messages répondaient au besoin de l’Église, que je publie en ce recueil. Ils sont toujours nécessaires aux vainqueurs, à ceux qui vont de l’avant avec Dieu.
Leicester, mars 1909.  Jessie PENN-LEWIS.

INTRODUCTION

La mort au péché.

    Il est important de bien comprendre le degré de l’expérience chrétienne dont il est question dans ce livre. Car la vérité hors de la place qui lui convient peut être nuisible. Le titre du livre : "Le point culminant de la vie de résurrection", dit suffisamment d’ailleurs son contenu. C’est-à-dire que la conformité avec Christ en sa mort, est le degré ultime qui permet d’avoir part à la vie du Ressuscité.
    Effectivement, porter toujours en son corps la mort de Jésus, est un autre aspect de la Croix. Ce n’est plus celui que donne le sixième chapitre de l’épître aux Romains : Mourir au péché, parce qu’on a fait sienne la mort de Jésus, le Substitut pour le péché. Cela doit avoir été fait de façon définitive, décisive. Il faut se considérer comme mort, pas comme mourant, et compter sur l’Esprit de Dieu pour qu’Il rende inébranlable, active, cette décision. Ferme sur cette base de mort avec Christ, le croyant découvre alors que la domination du péché est brisée. Vivant pour Dieu, en Christ Jésus, il est une nouvelle création (1 Corinthiens 5 : 17). Uni au Seigneur, il est avec lui un même esprit. Sa vie est cachée avec Christ en Dieu.
    Bien fondé sur la base de la mort au péché, comme sur un roc (Romains 6 : 6-11), le croyant dont la vie est cachée avec Christ en Dieu entre dans la communion de ses souffrances. Rendu conforme au Seigneur en Sa mort, il participe à la vie de résurrection. La Vie du Ressuscité se manifeste en lui, et par lui, atteint les autres.
"La mort agit en nous, et la vie en vous", dit l’Apôtre (2 Corinthiens 4 : 12).
Il est essentiel que le croyant discerne ces divers aspects de la Croix :
  1. Mourir au péché, avec Jésus qui meurt pour le péché.
  2. Être rendu conforme à Jésus en Sa mort.
  3. Devenir participant de Sa Vie de résurrection.
    S’imaginer qu’on peut être rendu conforme au Seigneur en Sa mort, sans être vainqueur du péché, ne peut conduire à la victoire. D’autre part, si le racheté connaît la joie de l’affranchissement du péché, et qu’il y demeure, sans discerner qu’il doit maintenant être rendu conforme au Seigneur en Sa mort, il risque de s’endurcir, spirituellement parlant, et de ne jamais avoir cet esprit brisé, ce cœur contrit, qui sont d’un grand prix devant Dieu. De plus, c’est la conformité à Jésus dans Sa mort qui donne accès à Sa vie de résurrection, et conduit à un service pour Dieu qui Lui est agréable.
    Il est non moins important de comprendre que cette mort au péché (Romains 6), cette conformité au Seigneur en Sa mort (Philippiens 3 : 10), ne doivent pas être quelque chose de spasmodique, mais de vécu continuellement. "Reconnaissez-vous comme morts au péché", dit l’Apôtre. Cela seul permet à l’Esprit de Dieu de révéler au racheté toujours plus clairement ce qu’est en réalité le péché, au regard de Dieu. Sans cela, le péché essayera de reconquérir celui qui s’est affranchi de sa domination en l’enlaçant en des formes subtiles du mal, que généralement on ne nomme pas péché.
    Ces divers degrés de croissance spirituelle atteints, la vie de Jésus peut couler à flots dans le corps mortel du racheté.
    Nous qui vivons, nous sommes toujours livrés à la mort pour l’amour de Jésus, AFIN QUE LA VIE DE JÉSUS SOIT MANIFESTÉE DANS NOTRE CHAIR MORTELLE. Les deux vont ensemble.
La vie de Jésus en nous, pour un monde qui meurt.
    Puissent les lecteurs dire Amen ! aux messages publiés en ce petit livre, et suivre fidèlement l’Agneau du Calvaire, sur le chemin où Il les a précédés.

CHAPITRE PREMIER

Le parfait développement de la vie de résurrection.

    "Je désire ardemment connaître Christ et la puissance de sa résurrection, et la communion de ses souffrances, et même mourir comme il est mort" (Philippiens 3 : 10, traduction Weymouth). Ainsi s’exprime l’apôtre. Le but qu’il se propose, qu’il veut atteindre, c’est d’être conforme à Jésus en Sa mort. Et Charles Fox, un apôtre du 19e siècle, a écrit : "Lorsque nous sommes affranchis, c’est-à-dire libérés du joug du péché, c’est pour nous donner à Christ et nous placer sous son joug à Lui".
    C’est pour n’avoir pas compris dans l’expérience ce que dit l’apôtre dans ce passage de l’épître aux Philippiens, que des Chrétiens lui ont donné une importance hors de proportion. Or, dans Sa sagesse, Dieu a donné la Croix de Christ comme pivot, ou vérité centrale, pour maintenir les divers aspects de la Vérité dans l’équilibre, chacune avec sa va1eur propre. C’est là ce que souligna Fox lorsqu’il écrivit : "La Croix du Calvaire est le sommet des Saintes Écritures. Là convergent toutes vérités ; de là procèdent toute 1umière, et toute vie de puissance pour l’Église universelle". C’est pourquoi il est aisé de comprendre que la pensée humaine ne peut saisir immédiatement tous les aspects du Calvaire dans leur profondeur infinie, et toute la signification de la Croix. Avons-nous, par la grâce de Dieu et avec le secours du Saint-Esprit, assimilé ce que nous croyions être toute la vérité, que d’autres horizons se découvrent à nos yeux. Nous ne sommes que sur les rives d’un océan : celui des richesses insondables de Dieu. C’est pourquoi, en relation avec ce message de la Croix, l’apôtre écrit : "Dieu a déclaré : Je montrerai (j’exposerai) le néant de la sagesse des sages ; et je réduirai à rien l’intelligence des intelligents" (Traduction Weymouth, 1 Corinthiens 1 : 27. 28). Et nous pouvons certes confesser que l’intelligence est insuffisante pour saisir le message du Calvaire (1 Corinthiens 1 : 18 ; 2 : 4), où se trouvent les profondeurs de la sagesse de Dieu, et que l’Esprit divin seul peut révéler.
    Ce message est plein de paradoxes ; nous les comprenons progressivement, en avançant dans la vie chrétienne. Il a son côté objectif : l’œuvre accomplie par le Christ en Sa mort sur la croix ; œuvre complète, parfaite, en faveur de tous ceux qui croient ; et son côté subjectif ou expérimental, pour celui qui le vit. En parlant de la Croix, il est donc nécessaire de stipuler si nous nous plaçons au point de vue objectif ou subjectif, pour ne pas être incompris.
    Il faut que le Saint-Esprit Lui-même inspire ce message sacré : celui d’un Dieu qui s’est fait Homme. Car la Croix n’est pas un thème favori des sages de ce monde, ni même dans l’Église chrétienne. Les seuls mots de la Croix et du Sang semblent être des pierres d’achoppement pour l’intellectuel et le sage selon le monde, comme aux jours de l’apôtre Paul. Le Saint-Esprit veille aussi sur la réception et l’assimilation de ce message parmi les croyants. Il faut bien qu’il en soit ainsi pour que se réalise le désir de Christ, concernant Son Église. Puisque toutes les radiations de vie et de puissance pour l’Église viennent de la Croix du Calvaire, il est facile de comprendre la nécessité d’une connaissance croissante du Sacrifice du Seigneur, avec le secours du Saint-Esprit.
    Du côté objectif, nous voyons d’abord, en Jésus crucifié, celui qui meurt à notre place pour le péché. Et tous ceux qui sont nés de Dieu, qui ont accepté Christ comme Sauveur, peuvent dire le changement qui s’est opéré en leurs vies depuis leur conversion. C’est là le côté expérimental, subjectif, du Calvaire. Puis, vient la révélation que moi, pécheur, j’ai été cloué avec mon Sauveur sur le bois de la Croix.

CHAPITRE II

De la continuité de la croix dans la vie du racheté.

"Portant toujours en ce corps la mort de Jésus, afin que la vie de Jésus soit aussi manifestée dans notre corps. Car nous qui vivons, nous sommes sans cesse livrés à la mort à cause de Jésus, afin que la vie de Jésus soit aussi manifestée dans notre chair mortelle. Ainsi, la mort agit en nous, et la vie agit en vous" (2 Corinthiens 4 : 10-12).
    En l’année 1897, à la Convention de Keswick, ce fut le professeur Mouls, par la suite promu évêque, qui prononça le discours d’ouverture, sur le texte que nous venons de citer : "Portant toujours en ce corps la mort de Jésus". Il fit remarquer que le mot de l’original n’était pas : "mort", mais "mourant". Porter en son corps l’agonie de la mort du Seigneur Jésus, c’est consentir, avec le secours de la grâce de Dieu, à un crucifiement qui glorifie le Seigneur devant les Siens. La même semaine, M. Hopkins parla sur le même sujet, et fit remarquer qu’il ne pouvait y avoir de vie victorieuse pour le Chrétien, aussi longtemps que la vieille nature n’était pas morte. Et que, d’autre part, c’était uniquement par la puissance de la mort de Christ que nous pouvions en finir avec elle.
    "Que porte Jésus en son corps sur la croix ? Vos péchés ? Oui, et vous-même..." C’est là que fut faite la grande transaction, là que le pardon fut acquis, là que fut acquise la délivrance, par la mort de notre vieille nature.
    "Nous sommes un, avec le Christ en croix", dit M. Fox. Sa croix est aussi la nôtre ; Sa mort est aussi la nôtre. Ces dernières années, des milliers d’enfants de Dieu l’ont compris ; et ils ont accepté subjectivement tout ce que cela impliquait dans leurs vies :
  1. Mort au péché.
  2. Séparation d’avec la vieille nature, la vie charnelle, psychique.
  3. Complète séparation d’avec le monde, pour ne plus appartenir qu’au Rédempteur, celui qui nous a rachetés.
  4. Victoire sur Satan. Celui-ci a été vaincu au Calvaire, à l’heure même où Jésus, exposé à l’ignominie, mourait sur le bois infâme de la Croix.
    D’avoir compris cela, sous l’action du Saint-Esprit, et de l’avoir vécu, les membres vivants du Corps de Christ sont allés de l’avant, et toute l’Église en a été vivifiée. "Béni soit Dieu qui nous a bénis de toutes sortes de bénédictions spirituelles dans les lieux célestes en Christ..., afin que les dominations et les autorités dans les lieux célestes connaissent aujourd’hui, par l’Église, la sagesse infiniment variée de Dieu, selon le dessein éternel qu’il a mis à exécution par Jésus-Christ notre Seigneur" (Ephésiens 1 : 3 ; 2 : 7 ; 3 : 10-12).
    Ces membres du Corps de Christ ont-ils atteint le but ? Pas encore. A son point ultime, la vie de résurrection ramène à la croix. "Afin que je le connaisse, Lui, et la puissance de sa résurrection, et la communion de ses souffrances, partageant la ressemblance à sa mort" (Version Conybeare). Et dans la seconde épître aux Corinthiens l’apôtre écrit : "Je porte toujours en mon corps la mort de Jésus, afin que la vie de Jésus puisse aussi être manifestée en moi. Car, au milieu de la vie, je suis quotidiennement livré à la mort pour l’amour de Jésus, afin que la vie de Jésus, par laquelle la mort fut vaincue, manifeste sa puissance" (2 Corinthiens 4 : 10-11).
    Que signifient ces paroles ? Pourquoi est-il nécessaire de porter toujours en son corps la mort de Jésus ?
    Parce que le corps est exposé aux attaques du monde, de la chair et du diable, bien qu’en esprit, le racheté soit déjà dans les lieux célestes, uni au Seigneur ressuscité, et partageant Son trône. Par cette mort quotidienne, le croyant est de plus en plus rendu conforme à la mort de son Sauveur, tandis que la vie spirituelle en lui, la vie selon l’Esprit, se fortifie de plus en plus.
    Prenons garde de maintenir un juste équilibre entre l’une et l’autre vérités pour ne pas tomber dans l’erreur.
    "Notre plus grande victoire, c’est de mourir avec Christ, en Sa mort. Car c’est la condition même de la manifestation de la Vie divine en nous, écrit M. Hopkins. Notre affaire, c’est de descendre dans la mort de Christ. Son affaire à Lui, c’est de vivre Sa Vie en nous".
    Et pour qu’il y ait une continuelle manifestation de la vie de Jésus en son racheté, il faut aussi que la mort agisse constamment en lui.
    Des Chrétiens sont convaincus que nous devons toujours rester cachés en Christ en Sa mort. Cependant, NOUS SOMMES APPELÉS A MARCHER EN NOUVEAUTÉ DE VIE. L’un et l’autre sont vrais. Il n’est pas facile de faire comprendre aux jeunes ce double aspect de la Croix. Les uns ont plus de réceptivité de compréhension que d’autres. Le Saint-Esprit emploie diverses images pour révéler les profondeurs de la Croix. Ainsi nous lisons au livre de l’Exode que Yaweh dit à Moïse : "Je te mettrai dans l’anfractuosité du rocher, quand ma gloire passera devant toi" (Exode 32 : 22-23. Et nous chantons le cantique : "Roc séculaire, frappé pour moi, je me cache en Toi". Figure de langage, qui dit la nécessité de maintenir une attitude de mort. Et Jésus illustre souvent par Ses paroles la nécessité d’être "planté en sa mort". "Comme Moïse éleva le serpent dans le désert, ainsi il faut que le Fils de l’homme soit élevé, afin que quiconque croit en lui ait la vie" (Jean 3 : 14-15). Élevé sur la croix, Il a porté nos péchés en Son corps sur le bois. C’est en Lui, en Sa mort, que nous avons la vie. Dans la mesure que nous descendons en Sa mort, notre esprit s’élève jusqu’au dedans du Voile, où nous sommes cachés avec Christ en Dieu. "Car vous êtes morts, dit l’apôtre, et votre vie est cachée avec Christ".
    Nous pouvons aussi illustrer le double aspect de mort et de vie en Jésus par le gland et le chêne (ou tout autre semence à vrai dire), comme le fit Andrew Murray : "Le gland se dissocie, étend ses racines dans le sol, tandis que le germe le traverse, gagne la lumière, s’étend, et s’élève vers le ciel. Le sol, c’est la mort apparente de la semence". "Si le grain de blé ne meurt, il demeure seul, dit Jésus ; s’il meurt, il porte beaucoup de fruit". Ainsi le racheté dont la foi est profondément plantée en la mort de. Christ, s’élève en nouveauté de vie, en résurrection de vie, en ascension de vie, derrière le voile.
    Mais si les racines sont faibles, insuffisamment développées, si l’accent est mis sur la vie, plutôt que sur la mort en Christ, cette vie reste frêle et se trouve exposée à toutes les ruses de l’Ennemi dans le domaine spirituel.
    La vie tout extérieure, tout en hauteur, sans racines suffisantes, peut être comparée à celle d’un jeune chêne presque sans racines, à cause d’un sol défavorable, et qui pousse en abondance des branches et des feuilles. Cet arbre est condamné, du fait de ce déséquilibre. La première tempête le déracinera.
    Le langage humain est bien pauvre pour expliquer les réalités divines. Heureusement qu’il y a derrière nos limites l’action vigilante et puissante du Saint-Esprit, qui révèle la Vérité aux âmes qui en ont soif.
    "Maintenir l’attitude de mort libère la puissance de vie", dit encore M. Fox. "La mort agit en moi, et la vie en vous", dit l’apôtre (2 Corinthiens 4 : 2). La mort à l’œuvre ? La mort agissante ? Oui, il en est bien ainsi ; car il s’agit ici de la mort de Jésus. Ce ne fut pas une mort ordinaire. Elle est active ; par elle nous avons la délivrance ; elle opère la séparation d’avec le péché ; elle fait mourir l’activité chamelle, et nous rend conformes au Seigneur en Sa mort.
    La vie qui jaillit de l’union au Christ en Sa mort développe magnifiquement le croyant, son individualité. En un certain sens, celui-ci se réalise davantage lui-même, plus qu’il ne l’avait jamais fait jusque-là. Car la vie nouvelle ne détruit pas la personnalité ; elle la développe au maximum, à la louange de Christ, qui communique Sa vie.
    Une libération de la vie de puissance, c’est bien là ce dont l’Église a besoin. La mort en Christ, avec Christ, libère la vie. Mais cette vie, point culminant de la vie de résurrection, ramène à la Croix. L’action de celle-ci est constamment nécessaire pour séparer du péché : "Le sang de Jésus-Christ purifie de tout péché".
"Lorsque nous parlons du sang de Christ, a écrit un Chrétien, nous entendons par-là :
  1. La vie qu’Il a répandue en sacrifice, donc Sa mort.
  2. Sa mort pour la séparation d’avec la vie psychique héritée du premier Adam : "Si quelqu’un veut venir après moi, dit Jésus, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix chaque jour, et qu’il me suive" (Luc 9 : 23-24).
  3. Sa mort, pour que la foi puisse se fortifier, s’étendre, s’enraciner toujours plus profondément.
  4. Sa mort, pour une vie spirituelle plus riche, plus puissante en Dieu, laquelle se donne en faveur d’un monde qui meurt".
    Si tous les membres du Corps de Christ voulaient, unis au Chef, vivre d’une vie crucifiée (conformité à Sa mort), ils y trouveraient cette plénitude glorieuse, ces fleuves d’eau vive dont le monde a tant besoin. Cachés en la mort de Jésus, ils trouveraient aussi un refuge assuré contre tous les pièges et toutes les activités du diable. A la Croix, il est vaincu.
    Et comment tout cela peut-il se faire ? Par la puissance du Saint-Esprit, lequel conduit à la Croix ; et celle-ci au Saint-Esprit. Car l’onction ne peut être faite que sur le sang ; elle ne peut être faite sur la chair de l’homme, sur la vieille nature.
    Il y aurait encore beaucoup à dire sur les résultats pratiques, les fruits d’une vie crucifiée ; sur le fait de marcher comme Jésus dans une vie de service, avec humilité, en faveur de tous. Que tous ceux qui ont une certaine maturité spirituelle chérissent ces pensées ! Et si, de quelque manière, ils pensent autrement : "Dieu les leur révè1era aussi. Seulement, au point où nous sommes parvenus, marchons d’un même pas" (Philippiens 3 : 15-16.)
    Allons plus loin : la mort de Jésus doit agir continuellement en nos vies, pour que nous soyons constamment délivrés de la vieille nature, soumise au péché et sous la domination de Satan. Vous n’avez pas à lutter, à combattre la vieille nature. Vous n’avez pas à essayer de l’apprivoiser, ou de la conquérir, ou de l’ignorer. Mais vous pouvez réclamer la délivrance que le Rédempteur a acquise pour vous par Sa mort, ET PAR VOTRE IDENTIFICATION A CETTE MORT.
    Alors les fleuves d’eau vive jaillissent spontanément. "La vie de Jésus est manifestée en notre chair mortelle".
    Le Saint-Esprit enseigne de façon merveilleuse les richesses, les profondeurs de cette vie vécue avec Christ en Sa mort, avec le Christ mourant pour nous. Je citerai l’exemple de Jacob Boehme qui écrivait, en 1622, les lignes suivantes :
    "Je n’ai jamais désiré connaître quoi que ce soit du divin mystère ; encore moins découvrir le chemin pour y arriver. Telle est la condition des pauvres laïques, en leur simplicité, J’ai seulement recherché le cœur de Jésus, pour pouvoir me réfugier en Lui, et échapper aux violents assauts du diable. J’ai aussi ardemment supplié le Seigneur pour qu’Il daigne m’accorder Son Saint-Esprit et Sa grâce, qu’il Lui plaise de me bénir et de me conduire en Lui. Et je me suis entièrement donné à Lui, bien résolu à ne plus vivre selon ma volonté, mais selon Sa volonté à Lui. Qu’Il daigne me conduire et me diriger, jusqu’à la fin, afin que je sois Son enfant dans le Christ Jésus.
    "De moi-même, je ne puis rien faire devant Toi. Je m’enfonce, je disparais entièrement dans Tes blessures et dans Ta mort. Je n’ai de refuge qu’en Tes saintes blessures et dans Ta mort, où je descends. Fais de moi ce que Tu voudras, ensevelis-moi en Ta mort. Que soient brisés Tes jugements sur moi dans le sang de Ton Amour. Je descends en Toi totalement. Même si corps et âme devaient périr en cet instant, je ne Te laisserais pas aller. Bien que mon cœur dise non, cependant les désirs de mon âme tiennent fermement Ta vérité, et ni la mort ni le diable ne m’arracheront aux blessures de mon Sauveur. A la fin, tu seras vaincu, toi, le Malin, tu lâcheras ta proie, car je la noierai dans l’amour de Jésus, et demeures-y si tu le peux.
    "Je te supplie, ô Christ ! Toi, patient Agneau de Dieu, donne-moi toute patience en ce chemin de la Croix, et que j’en sorte en Ta victoire, comme l’un de Tes patients agneaux. Que je vive avec Toi, en Toi". Paroles pleines de beauté et de vie divines !
    Au livre des Actes des Apôtres, nous avons la vie de l’apôtre Paul, telle qu’elle apparaît aux yeux des autres. Dans 1es épîtres, nous découvrons ce que fut sa vie intérieure, intime.
    Appelé sur le chemin de Damas, converti, Paul est baptisé du Saint-Esprit (Actes 9 : 17). Peu après, il est envoyé en Arabie où il demeure trois ans. Là, enseigné par Jésus Lui-même, il comprend la profonde signification de la Croix ; et, par la suite, c’est la prédication de la Croix qui caractérise son ministère. A quoi Dieu répond en agissant avec puissance et en donnant des fruits abondants à Son serviteur. Mais quelle est l’expérience de l’Apôtre lui-même ? "La faiblesse, la crainte, un grand tremblement", écrit-il aux Corinthiens. Il fut enlevé jusqu’au troisième ciel, où il entendit des paroles ineffables qu’il n’est pas permis à un homme d’exprimer. Cependant, loin de s’enorgueillir, il écrit : " Je me glorifie plutôt de mes faiblesses, POUR QUE LA PUISSANCE DE CHRIST REPOSE SUR MOI". "Ma puissance s’accomplit dans la faib1esse, lui dit le Seigneur (2 Corinthiens 12 : 10). Pour l’apôtre, de l’angoisse, des pleurs, à cause des chutes de ceux qui, convertis, retombent dans le péché ; pour lui, la vie est une succession d’épreuves.
    Écoutons-le, défendant son ministère devant les Corinthiens, à cause des faux apôtres qui se sont introduits dans l’Église de Corinthe : "Sont-ils ministres de Christ ? Je le suis plus encore. Par les travaux, par les coups, par les emprisonnements, souvent en danger de mort ; cinq fois j’ai reçu des Juifs quarante coups moins un ; trois fois j’ai été battu de verges, une fois j’ai été lapidé, trois fois j’ai fait naufrage ; j’ai passé un jour et une nuit dans l’abîme, fréquemment en voyage, j’ai été en péril sur les fleuves ; en péril de la part des brigands, de la part de ceux de ma nation, de la part des païens ; en péril dans les villes, dans les déserts, sur la mer, parmi les faux frères. J’ai été dans le travail et dans la peine, exposé à de nombreuses veilles, à la faim, à la soif, à des jeûnes multipliés, au froid, à la nudité. Et, sans parler d’autres choses, je suis assiégé chaque jour par les soucis que me donnent toutes les Églises. Qui est faible, que je ne sois faible ? Qui vient à tomber, que je ne brûle !" (2 Corinthiens 11 : 23-31).
    Pour les autres : vie, bénédiction, puissance. Pour lui : faiblesse, souffrance, patience, endurance, douceur, fruits véritables de l’Esprit. Ainsi la Croix conduit au Saint-Esprit, lequel ramène à la Croix (Andrew Murray).
    Pour terminer cette étude, je communiquerai encore quelques extraits d’une lettre que je reçois, laquelle donne aussi quelque lumière sur ce sujet :
    "Il y a deux ans, j’ai eu comme une nouvelle vision du Calvaire et de l’œuvre qu’y accomplit le Seigneur, ce qui fut suivi d’un baptême du Saint-Esprit. Je fus alors remplie d’un ardent amour pour les âmes. J’appartenais déjà au Seigneur depuis longtemps, et Il avait permis que je lui gagne quelques âmes. Mais, dès l’instant que je décidai de ne plus connaître que Jésus, et Jésus crucifié, j’eus à combattre les puissances invisibles des ténèbres. Combat terrible, au-delà de ce que je croyais possible. Incompréhension, faux témoignage, jugement, envie, combats, et tout cela venant de Chrétiens au service de Dieu ! Ce que j’ai dû supporter m’aurait rendu folle, si je n’avais pas appris le secret, et si je n’avais pu me réfugier en mon Sauveur. Autrefois, je recourais constamment au docteur, réclamant quelque tonique pour le système nerveux. Il secouait la tête, et me disait : "Vous êtes usée. Ce qu’il vous faut, c’est du repos, du changement, etc…" L’hiver dont je vous parle, je n’ai pas eu besoin de tonique, malgré tous les assauts de l’ennemi, et toute la souffrance endurée. Le repos était en mon esprit, la paix en mon âme : une paix profonde... De sorte que j’étais capable de penser aux autres, et de m’occuper de leurs besoins comme jamais encore je n’avais pu le faire jusque-là. J’ai appris à dire avec l’apôtre : "Je me plais dans les outrages, les calamités, les persécutions, les détresses pour Christ" (2 Corinthiens 12 : 10). C’est une grâce que de pouvoir souffrir et d’être bon, de servir et de ne rien attendre en retour. Seulement cela : Que le Seigneur soit glorifié. A Lui toute la louange !"
    Ces lignes donnent l’ordre de la croissance spirituelle : délivrance de la vieille nature par une révélation de la Croix ; baptême du Saint-Esprit et passion pour les âmes ; enfin le processus de mort : s’unir toujours plus profondément par la foi au Seigneur crucifié, afin de pouvoir manifester dans la vie quotidienne l’esprit de sacrifice de l’Agneau immolé.

CHAPITRE III

Le sacrifice : "Il ne peut se sauver lui-même".

   "Il a sauvé les autres, II ne peut se sauver lui-même" (Mathieu. 27 : 42). Ainsi se moquaient ceux qui passaient devant le Crucifié. A leur insu, leurs moqueries contenaient ce que fut le mot d’ordre de la vie et de la mort du Fils de Dieu ; ce qui fut au cœur même de l’œuvre de Dieu en faveur du monde. "Dieu a tant aimé le monde, qu’il a donné son Fils unique".
    Pour sauver les autres, le Père donne son Fils. Pour sauver les autres, le Fils ne peut Se sauver Lui-même. "Il doit livrer son âme à la mort pour se voir une postérité, et partager le butin avec les puissants" (Esaïe 53).
    Pour sauver les autres, le Saint-Esprit ne peut éviter l’agonie, une agonie comme ceI1e de Jésus en Gethsémané. Lorsqu’Il pénètre dans les cœurs des hommes plongés dans le péché, souvent rebelles et désobéissants, Il intercède en leur faveur ; Il plaide pour eux par des soupirs inexprimables (Romains 8 : 26-27). "N’attristez pas le Saint-Esprit de Dieu", dit l’apôtre (Eph. 4 : 30). Le même mot est employé pour les souffrances du Seigneur en Gethsémané : "Mon âme est triste jusqu’à la mort", dit-Il.
    "Il a sauvé les autres, Il ne peut se sauver lui-même !" Ces mots disent, en somme, ce que fut le chemin parcouru ici-bas par le Fils de Dieu, pour manifester aux hommes perdus l’image du Père céleste. Le Fils, reflet de la gloire de Dieu, et l’empreinte de Sa Personne (Hébreux 1 : 3) révèle le Père. "C’est en ceci que l’amour du Père a été manifesté envers nous, c’est que Dieu a envoyé son Fils unique dans le monde, afin que nous vivions par lui" (1 Jean 4 : 9). Bref, sauver les autres en refusant de se sauver soi-même, c’est ressembler à Dieu.
    Jésus aurait pu sauver Sa vie. Il en avait la puissance. Mais Il refusa de l’employer pour Lui-même. Pour sauver les autres, oui ! Sauver quand cela ne coûte rien, chacun peut le faire ; même de pauvres créatures pécheresses. Mais "les sauver au prix de sa propre vie, à la place de soi-même, ah ! cela est divin. Jésus ne pouvait Se sauver, parce qu’Il n’est pas dans la nature divine de sauver Sa vie, en laissant les autres se perdre.
    II ne peut pas ! Paroles magnifiques, prononcées par des moqueurs, par des pécheurs qui crucifient leur Sauveur. Ils ne se rendent pas compte de ce qu’ils disent : Déjà, lors de la tentation au désert, Jésus révéla cette loi qui domina Sa vie. Plus tard, Il nourrira les foules. Mais là, tenté par le diable, ayant faim, Il refusa d’employer Son pouvoir pour Se nourrir Lui-même. Il puise dans la puissance divine pour bénir les autres, pour les nourrir, les guérir, les sauver. Pour Lui, rien ! Pour S’éviter la torture de la faim, pour arrêter les paroles de mépris ou empêcher les coups qui Le frappent, Jésus refusa de recourir à la puissance divine. Tel doit être l’enfant de Dieu pour être transformé en l’image du Fils et manifester Son caractère divin, ainsi que le Fils Lui-même révéla le Père céleste. "Il a sauvé les autres, Il ne peut Se sauver Lui-même". Cette loi a dominé la vie de Jésus. Elle doit être aussi la loi des disciples, de tous ceux qui veulent suivre l’Agneau, où qu’Il aille.
    Donner votre vie pour ceux qui vous rejettent, ceux qui vous jugent mal, quand vous pourriez vous en dispenser, voilà le Calvaire. Avoir le pouvoir de sauver votre vie, et ne pas user de ce pouvoir, parce que d’autres seraient perdus ; voilà le Calvaire. S’employer à délivrer les âmes du pouvoir de Satan, et être comme à la merci apparente de l’adversaire, à l’heure de la puissance des ténèbres ; c’est bien là 1e Calvaire.
    Enfant de Dieu, tu as peut-être été employé à délivrer les autres. Et maintenant, tu t’étonnes de ne pas être délivré toi-même des combats au dehors et des craintes au dedans qui assiègent ta vie. D’autres viennent à toi pour être secourus, délivrés, et tu leur donnes ce dont tu as le plus grand besoin toi-même. Tu réclames la victoire pour ceux qui sont dans ]’affliction, et, semble-t-il, tu en as besoin bien plus que ceux qui viennent à toi pour être secourus. Il en fut ainsi au Calvaire. Que de victimes du diable furent délivrées par le Seigneur ! Il commandait aux démons et aux esprits mauvais, qui Lui obéissaient. Au Calvaire, aux prises avec le diable et toute la puissance des ténèbres, Il reste dans l’impuissance ; victime expiatoire en faveur de l’humanité. Tel est le Calvaire.
    Vie, puissance, bénédictions, délivrance pour les autres. Rien pour soi-même, que de rester dans la Volonté de Dieu, et d’accepter de Sa Main, ce qu’Il permet pour Son enfant.
    Telles sont les marques de la plus haute manifestation de la vie de l’Agneau ; marques que nous voyons en ces héros de la Foi du chapitre onzième de l’épître aux Hébreux. Et dans cette liste de héros, ,il y a des femmes qui, "livrées au supplice, n’acceptèrent point de délivrance, pour obtenir une meilleure résurrection" (verset 35). Souffrir et mourir plutôt que d’échapper au supplice. C’est bien là l’esprit du crucifiement.
    C’est ici, semble-t-il, le chemin ouvert devant ceux qui, aujourd’hui, entendent l’appel de Dieu en Jésus-Christ, devant ceux qui veulent avoir part à l’esprit de 1 "Agneau.
    Un autre chemin s’ouvre devant le racheté : Se sauver soi-même. Se détourner de tout ce que suivre l’Agneau implique de renoncement à soi-même, et de sacrifice en faveur des autres. C’est alors perdre la récompense, le partage du trône et de la gloire de l’Agneau. Car il est écrit : "Si nous souffrons avec lui, nous régnerons aussi avec lui". (2 Timothée 2 : 12). Lire aussi Romains 8 : 17.
    Les souffrances du Christ furent volontaires. Il dit : "Personne ne m’ôte la vie ; je 1a donne de moi-même" (Jean 10 :17-18). Plusieurs de ceux qui ont choisi d’être rendu conformes à leur Sauveur en la mort, conformes à leur Sauveur mourant, et de suivre 1"Agneau où qu’Il aille, pourraient échapper au chemin de la Croix où ils se trouvent engagés. Ils pourraient accepter la délivrance, et se sauver eux-mêmes, en perdant la meilleure résurrection.
    Toutes les voix de la terre, celles des amis, celles du monde leur crient : "Sauve-toi toi-même, et nous avec toi", comme l’un des brigands le dit au Seigneur sur la croix. Mais l’Esprit de Christ qui les anime, les conduit sur le chemin où l’Agneau a marché. Comme Lui, ils ne peuvent se sauver eux-mêmes. S’évader, ce serait quitter le chemin de la ressemblance à Celui qui, dans Son agonie, entendait les moqueurs crier : "Il a sauvé les autres, et Il ne peut se sauver Lui-même".

CHAPITRE IV

Fils de la Croix.

   Au commencement du psaume 84, nous lisons ces indications : "Au chef des chantres, sur la guitthith. Un psaume des fils de Koré". Dans un sermon du Pasteur C.-H. Pridgeon de Pittsburgh (U. S. A.), sur le sixième verset de ce psaume, nous trouvons des explications suggestives sur le titre de ce morceau. "Sur la guitthith" signifie : "concernant le pressoir". Ce qui fait supposer que le psaume était chanté au moment de la vendange. Quant au mot Koré (un psaume des fils de Koré), il serait l’équivalent de notre mot Calvaire. Les fils de Koré peuvent donc être considérés, spirituellement parlant, comme fils de la Croix, et le psaume peut s’appliquer à ceux qui sont au pressoir dans la vallée de Baca.
    Seuls, les fils de la Croix peuvent chanter lorsqu’ils passent par le pressoir, car ils connaissent les voies de Dieu. Ils savent que la vie jaillit de la mort, qu’une joie céleste succède à la souffrance, et que le néant reçoit la plénitude de Dieu. Aussi ne voient-ils pas les choses comme leur entourage les voit. Ils ne s’arrêtent pas à considérer le pressoir et la croix, dans leurs afflictions ; ils ne pensent pas à ce qu’ils perdent (en apparence) pour la cause de Christ. Mais ils voient les choses depuis les tabernacles de l’Éternel des armées ; depuis le sanctuaire de Dieu. Et ils peuvent chanter au pressoir quand, sous l’action divine, le vin, ici image de vie, jaillit d’eux-mêmes en bénédiction pour les autres. I1s peuvent chanter, sachant que celui qui, seul, foula pour eux au pressoir, est satisfait.
    Psaume de la vallée de Baca ! Psaume du pressoir pour les fils de Koré. Quel est donc le thème du cantique chanté par les fils de Koré ? Le voici :
    "Que tes tabernacles sont aimables, Éternel des armées. Mon âme soupire et languit après les parvis de l’Éternel !"
    Pour l’enfant de Dieu, au pressoir de l’affliction, les choses de la terre s’estompent, s’éloignent ; le ciel se rapproche, s’ouvre. Dieu devient tout en tout. Alors, les fils de la Croix chantent la joie de ceux qui placent en Dieu leur appui ! Ils ne comptent ni sur les circonstances, ni sur les secours humains, ni sur aucun soutien terrestre. Une traduction littérale donne ceci : "Heureux l’homme dont la puissance (puissance d’endurance) est en toi". Et Jacques écrit : "Voici, nous disons bienheureux ceux qui ont souffert patiemment. Vous avez entendu parler de la patience de Job, et vous avez vu la fin que le Seigneur lui accorda (Jacques 5 : 10-11). Oui ! Heureux celui qui endure 1’épreuve jusqu’au bout ; jusqu’à l’instant de la délivrance, où il reçoit au double ce que Dieu avait jugé nécessaire de reprendre. Le double pour lui, mais aussi le double en bénédictions pour les autres.
    Les fils de la Croix chantent, parce que, au pressoir, leur cœur est devenu comme de la cire. "Mon cœur est comme de la cire ; il se fond dans mes entrailles" prophétise David sur le Seigneur mourant sur la Croix (Psaume 22 : 15). Par là, ils s’identifient davantage au Seigneur en Sa mort. Les barrières, les limitations de tout genre ont été renversées, les cœurs fermés sont devenus des chemins vers Sion, où d’autres peuvent passer, ceux qui cherchent Dieu. Leurs cœurs se sont élargis pour les autres, pour leurs afflictions, leurs épreuves. Ils ressentent la douleur d’un monde qui meurt. "Quiconque voit son frère dans le besoin, et lui ferme ses entrailles, comment l’amour de Dieu demeure-t-il en lui ? (1 Jean 3 : 17). Oh ! Ces cœurs enclos de hautes murailles que personne ne peut franchir. Il est bon qu’ils passent au pressoir, de sorte que maintenant l’amour de Dieu peut s’épancher librement par eux, en faveur d’un monde qui a besoin de sympathie plus que de prédication, d’amour plus que de préceptes et d’ordonnances,
    Les fils de la Croix chantent parce que, dans la vallée de Baca, ils sont devenus eux-mêmes un lieu de sources, des fleuves d’eau vive en faveur des autres, ce qu’ils désiraient ardemment depuis longtemps (Jean 7 : 3). Le secret leur en fut révélé par la bonté de Dieu. Tous les hommes semblaient fouler aux pieds les grappes au pressoir ; et voici qu’une source d’amour divin, pur comme du cristal, a jailli dans leurs cœurs, pour ceux qui foulent les grappes. Alors, les fils de Koré ont connu qu’ils étaient en un lieu de sources : le cœur même de Dieu, révélé en Christ sur la Croix.
    Dès lors, ils connaissent la joie, la joie de l’Agneau ; lequel allant à Jérusalem pour y être crucifié, dit aux disciples : "Je vous donne ma joie". Cette joie du pressoir, cette joie à la vue du Calvaire, ne peuvent être connues que par ceux qui demeurent dans le cœur de Dieu, et qui voient les choses sous l’angle où Dieu les voit.
    Ils vont de force en force, parce que leur vie est en Dieu. "Avec Christ en Dieu", lisons-nous dans le Nouveau Testament. Ce sont des vainqueurs, désormais au-dessus de tout, parce qu’ils ont tout perdu pour Dieu. Toujours plus détachés des biens d’ici-bas, ils règnent déjà au ciel avec Jésus.
    Cette conformité au Seigneur, à l’Agneau de Dieu, est le fruit de la plénitude du Saint-Esprit ; bien plutôt que les signes et les miracles qui frappent les yeux. "Vous recevrez une puissance, et vous serez mes témoins, mes martyrs" (Actes 1 : 8). Telle est la promesse du Seigneur ressuscité à Ses disciples. De même que par l’Esprit éternel Il s’offrit à Dieu, de même, pour Le suivre sur le chemin du sacrifice, pour être rendus conformes à Son image (celle de l’Agneau), les disciples ont besoin du Saint-Esprit, la puissance promise.
    Deux sphères de service s’ouvrent devant ceux qui connaissent la plénitude du Saint-Esprit : celui des œuvres puissantes ; ou bien celui de n’être qu’un instrument, un canal, par quoi passe : la vie de Dieu pour vivifier les âmes. La première peut être comparée à l’activité du Seigneur, après Son baptême au Jourdain ; la seconde à l’action de Christ donnant sa vie en Golgotha.
    Il est de la plus haute importance que nous sachions collaborer avec l’Esprit de Dieu, dans l’état de croissance spirituelle atteint. On peut retourner en arrière, en cherchant à faire une expérience qu’on s’imagine très avancée, au lieu de suivre le chemin qu’indique l’apôtre : "La mort agit en nous, et la vie en vous. Nous sommes constamment livrés à la mort à cause de Jésus" (2 Corinthiens 4 : 11-13.) Le but que Dieu poursuit, ce n’est pas tellement de faire du racheté un puissant instrument ; Il veut que Christ soit formé en lui. Cela se fait au pressoir, et dans la communion aux souffrances du Seigneur. "Il fut crucifié dans la faiblesse". Au Calvaire, point de prodiges, point de miracles pour frapper d’étonnement la multitude. Mais dans Sa faiblesse, dans Son silence, par Ses souffrances et Sa vie donnée, Il fit infiniment plus pour le monde, que lorsqu’Il guérissait les malades et chassait les démons en Galilée. Que Dieu daigne révéler à ceux qui veulent aller de l’avant ce caractère du Seigneur, doux et humble de cœur ; de l’Agneau qui, par Sa mort a vaincu la puissance des ténèbres. Ce ne sont point des visions du Calvaire, ni une expérience mystique des souffrances de la Croix qui peuvent communiquer l’Esprit de l’Agneau. Mais bien plutôt l’obéissance journalière à ce que Dieu demande, dans les tout petits détails de la vie de chaque jour. C’est de ne point répondre quand on est accusé faussement ; de ne point essayer de se justifier ; c’est de rester caché en Christ, de garder le silence sur le chemin du sacrifice, chemin qu’ignore le monde. C’est de faire le bien, et d’en souffrir, comme si l’on était un malfaiteur méritant la condamnation... (Matthieu 5 : 1 l-12).

CHAPITRE V

Le cœur brisé de Jésus au Calvaire.

    "Mon cœur est comme de la cire, il se fond dans mes entrailles". Tel est le langage de Jésus-Christ sur la Croix ; selon que prophétise David, en ce psaume vingt-deuxième ; psaume nommé par l’Archevêque Alexander : le psaume des sanglots. Car, dit-il, dans la première partie du texte hébreu, pas une seule phrase n’est complète. Cela fait penser aux soupirs, aux paroles entrecoupées, inachevées, d’un mourant.
    Dans le chemin de l’âme amenée à la conformité avec son Sauveur, en sa mort, il vient un moment où elle comprend ce que signifie la communion avec ce cœur brisé qui fond comme la cire, sous l’attouchement de Dieu. Alors, elle acquiert cette tendresse, cette douceur, cette compassion qui caractérisent ceux qui vivent en Jésus.
    "Revêtez-vous comme des élus de Dieu, saints et bien aimés, d’entrailles de miséricorde", écrit l’apôtre aux Colossiens. Dans toutes ses lettres, dans sa vie, il fait preuve de compassion, de miséricorde, pour ceux qu’il a amenés à Christ, lesquels restent cependant souvent si enfants, si charnels. "Moi je suis de Paul ! Et moi d’Apollos ! Et moi de Céphas ! Et moi de Christ !" disent les Corinthiens. Et l’apôtre proteste : Christ est-il divisé ? Paul a-t-il été crucifié pour vous ? (1Corinthiens 1 : 12-13). Cependant Il ne se sépare pas de ces bébés, spirituellement parlant." Auriez-vous dix mille maîtres en Christ, vous n’avez pas plusieurs pères, puisque c’est moi qui vous ai engendrés en Jésus-Christ par l’Évangile" (1 Corinthiens. 4 : 15). Pourquoi ces divisions ? Pourquoi s’enfler d’orgueil ? L’apôtre met en garde les nouveaux convertis contre ce danger ; puis il trace comme un parallèle entre eux et leur père spirituel. Les Corinthiens, eux, se croient sages en Christ, ils règnent déjà. Paul et ApoIIos sont fous, par amour pour Christ. Les Corinthiens sont forts ; mais ceux que Dieu a choisis pour annoncer l’Évangile et qui ont à supporter de grandes souffrances, sont faibles. Les Corinthiens sont honorés ; mais les apôtres sont méprisés.
    Quelle distance entre ces bébés qui se croient forts, et l’apôtre Paul ! Comme dans l’Église de Corinthe, autrefois, on trouve encore aujourd’hui bien des maîtres. Mais les pères, ceux qui acceptent de souffrir, de porter les bébés en Christ dans leur cœur, jusqu’à ce que leur croissance spirituelle soit accomplie, ceux-là sont peu nombreux.
    Un cœur de père plein de compassion, de tendre pitié, d’ardent désir pour la croissance et la vie d’autres âmes, cela ne peut être que le fruit de la Vie divine dans le racheté. Cette Vie-là rend capable de souffrir, d’endurer l’incompréhension et le mépris, par amour pour Jésus. Quelques Chrétiens s’imaginent que la communion aux souffrances du Christ, en sa mort, endurcit nécessairement le cœur, et rend moins vulnérable aux émotions. D’autres s’élèvent contre cette conception. Ils ne croient pas possible d’éliminer l’émotion des expériences spirituelles. La vie même du Seigneur Jésus, et les lettres de l’apôtre Paul, nous montrent ce que sont vraiment les résultats de la vie crucifiée.
    Il est certain que la communion avec Christ en Sa mort délivre d’une émotivité exagérée, d’une sensibilité maladive, laquelle peut être une manifestation de la vieille nature. Ainsi libérée, l’âme devient toujours plus sensible, réceptive, pour tout ce qui concerne Christ et le prochain. Il est nécessaire que toute émotion superficielle disparaisse pour que la Vie divine puisse atteindre les profondeurs de l’être, pour que celui-ci soit accessible, réceptif. Ensuite, rempli de la Vie d’En-Haut, il peut la répandre en faveur des autres.
    "Revêtez-vous d’entrailles de miséricorde", dit l’apôtre aux Colossiens (3 : 2). Expression bien suggestive qui évoque la profondeur, la réalité, la puissance du sacrifice ; ce qui ne peut résulter d’émotions de surface, ces émotions facilement ressenties en certaines réunions où l’orateur les éveille, sciemment ou non. D’autre part, de nombreux maîtres peuvent enseigner, communiquer la lumière et la connaissance, sans avoir ces entrailles de miséricorde, sans ce cœur rempli de compassion que recommande l’apôtre. Bref, c’est le cœur qui est nécessaire, c’est la capacité de sentir et de se sacrifier pour les autres qu’il faut. Et c’est le manque de cœur, le manque d’amour qui rend froide et indigeste la Vérité, lorsqu’elle est rejetée.
    "Mes entrailles ! mes entrailles !" s’écrie le prophète Jérémie. "Je souffre au dedans de mon cœur, le cœur me bat. Je ne puis me taire" (4 : 19). C’est à cause d’Israël que le prophète est envahi par la douleur. Et c’est à cause de cette capacité de souffrance pour son peuple qu’on a comparé Jérémie à Celui qui vint ici-bas, comme l’Homme de Douleur, brisé par la souffrance.
Son immense compassion pour l’humanité amène Dieu à envoyer ici-bas son Fils unique : "Béni soit le Seigneur, le Dieu d’Israël de ce qu’il a visité et racheté son peuple... GRÂCE AUX ENTRAILLES DE LA MISÉRICORDE DE NOTRE DIEU, en vertu de laquelle le Soleil levant nous a visités d’en haut" (Cantique de Zacharie, Luc 1 : 68-80.) Écrivant à Philémon, l’apôtre dit au sujet d’Onésime : "Je te le renvoie, lui, mes propres entrailles (c’est-à-dire un autre moi-même)". D’autres traductions rendent ainsi cette expression : "lui, mon propre cœur" (Philémon 1 : 12). Lire aussi Ephésiens. 4 : 32 ; Philippiens. 2 : 1,2.
   Tous ces passages montrent que Dieu peut communiquer a Ses rachetés ces entrailles de miséricorde, ce cœur compatissant, qui L’amenèrent Lui-même à envoyer Son Fils ici-bas. Compassion qui conduisit le Fils unique à mourir sur la Croix pour les pécheurs.
    "Soyez compatissants, vous pardonnant... comme Dieu vous a pardonné", dit l’apôtre Paul. Celui qui a senti son cœur s’émouvoir, se fondre sous les effets de la compassion divine, celui qui en a éprouvé la douceur et la joie, peut aisément aimer, pardonner à celui qui a tort, avant même que celui-ci ait manifesté aucune tristesse, aucun repentir de la faute commise. Et, d’avoir fait ces expériences rend capable d’annoncer le pardon de Dieu aux âmes qui se repentent. Un cœur compatissant, des entrailles de miséricorde se réjouissent de la joie des autres.
Et quelles paroles exquises, quel tact dans l’expression ils savent trouver pour plaider en faveur des coupables. Lisez la lettre de Paul à Philémon : "Je te prie pour mon enfant, que j’ai engendré étant dans les chaînes, Onésime..." (10-12). Avec quelle tendresse l’apôtre parle de cet esclave fugitif phrygien ! II l’a amené à Christ, il a prié pour lui jusqu’à ce que Christ fût formé en lui. Aussi maintenant, Onésime est pour lui un fils.
    Dans les diverses Églises qu’il a fondées au sein du paganisme, pour ceux qu’il a amenés à Christ, même en prison, nous voyons de quelle patience, de quelle compassion, de quelle tendresse l’apôtre est animé. Il a vraiment pour eux des entrailles de miséricorde. "Ce ne sont pas vos biens que je cherche, c’est vous-mêmes", écrit-il aux Corinthiens. "Pour moi, je dépenserai très volontiers, et je me dépenserai moi-même pour vos âmes, dussé-je, en vous aimant davantage, être moins aimé de vous..." (2 Corinthiens 2 : 14-15). "Maintenant nous vivons, puisque vous demeurez fermes dans le Seigneur". Une autre traduction dit : "La vie est vraiment pour nous la vie, puisque vous demeurez fermes dans le Seigneur" (1 Thessaloniciens 3 : 8). L’apôtre pense sans cesse à tous ceux qu’il a amenés à Christ. Il prie sans cesse pour eux, comme un père pour ses enfants.
    Dix mille maîtres ! Oui. Mais les pères ne sont pas nombreux. Ils sont peu nombreux ceux qui consentent à la souffrance pour les autres, à porter dans leur cœur le fardeau de leurs besoins, à éprouver de l’angoisse pour leurs âmes, à verser des larmes.
    Dirons-nous que le langage de l’apôtre était exagéré ? Certes non ! Car dans la communion avec Dieu et avec son Fils Jésus-Christ, il a entendu le grand soupir de la Création ; en son cœur, il a ressenti l’immense douleur, l’angoisse des âmes sans Dieu dans le monde, sans Sauveur. Pour elles, son cœur est rempli de compassion, de tendresse. Pouvons-nous, comme l’apôtre, avoir un cœur rempli de compassion active, effective ? Assurément. "Revêtez-vous, dit-il, comme des élus de Dieu, saints et bien-aimés, d’entrailles de miséricorde, de bonté, d’humilité, de douceur, de patience" (Colossiens 3 : 1-2). Il vient de les exhorter à se dépouiller du vieil homme et de ses œuvres, et à revêtir l’homme nouveau, qui se renouvelle dans la connaissance, selon l’image de celui qui l’a créé (versets 10-11). Ah ! Voilà le secret : le vieil homme a été crucifié ! La Croix du Calvaire est l’endroit de la bénédiction. Là tombent toute étroitesse, toutes ces barrières dressées par ce qui est terrestre. Là est dépouillée cette vie égoïste qui cherche la satisfaction du moi, qui ramène tout à soi. Ensuite, l’homme nouveau (ou la nouvelle nature) est revêtu, qui se renouvelle selon l’image de Celui qui l’a créé. Là, plus de distinctions terrestres, plus de divisions, de séparations, Christ est tout en tous. C’est seulement dans le Christ Jésus que nous pouvons recevoir ces entrailles de miséricorde, entrer dans la communion de Ses souffrances, et connaître cette ferveur d’amour, cette tendresse, qui sont d’essence divine.
   Il est question du renouvellement du nouvel homme. Un processus de croissance suit effectivement le dépouillement de la vieille nature. Toute colère, toute animosité, toute malice, toute moquerie, toute parole déshonnête doivent être rejetées. Et, dans ce renouvellement progressif de l’homme nouveau, l’heure sonne de la communion aux souffrances de Christ pour le salut des perdus. Alors l’être intérieur tout entier, animé des compassions de Dieu, sera peut-être amené à plaider pour une nation comme Jérémie ; ou bien à travailler à la formation de Christ dans les âmes comme l’apôtre Paul ; ou encore à manifester l’amour de Dieu envers les autres ; à être bon, compatissant, à pardonner comme Dieu nous a pardonnés en Christ (Ephésiens 4 : 32). Il ne pourra pas fermer ses entrailles au frère dans le besoin (1 Jean 3 : 17) ; il ne pourra pas non plus négliger de prier pour les autres avec la tendresse de Jésus-Christ (Philippiens 1 : 8). Enfin, il est prêt à donner sa vie aux frères, à exercer la miséricorde envers tous ; bien qu’aimant davantage, il soit moins aimé.
    Comment cela se peut-il faire ? Par la foi. "Celui qui croit en moi, dit Jésus..." II y a là une foi qui unit celui qui croit à son Sauveur. C’est plus qu’un acquiescement mental, plus que le fait de croire à une autre personne. "Quand j’aurai été élevé de la terre, dit Jésus, j’attirerai tous les hommes à moi" (Jean 12 : 32-33).
    Ainsi le Seigneur sur la croix attire le racheté qui croit en Lui ; et le sauvé est uni au Sauveur, en sa mort. Il est planté avec Lui en Sa mort (Romains 5 : 5), ou bien encore greffé en Lui au Calvaire, afin d’être fait participant de Sa Vie. Une seule vie désormais pour la greffe et la plante où elle a été insérée. La greffe est solidement maintenue par des liens. Ici, les liens de la foi et du don total de soi-même.
DÉPOUILLÉ ! REVÊTU ! UNI AU CHRIST, EN SA MORT ! DÉSORMAIS UNE MÊME PLANTE AVEC LUI ! FAIT PARTICIPANT DE SA VIE, LA VIE DIVINE ! Telles sont les étapes par lesquelles le Saint-Esprit conduit le racheté. Dès lors, des fleuves d’eau vive coulent de celui-ci ; en réalité de Jésus. Car le racheté est une même plante avec son Sauveur, CELUI QUI EST LA VIE.
    Uni au cœur brisé du Sauveur en faveur d’un monde perdu, le racheté est constamment livré à la mort pour l’amour de Jésus, afin que la vie de Jésus puisse être manifestée dans sa chair mortelle. "La mort agit en nous, mais la vie en vous", dit l’apôtre. La vie du Christ en abondance, en faveur des autres.
    "C’est du cœur que procèdent les sources de la vie", écrit Salomon. Et ceci est magnifiquement illustré par l’Amour dont nous sommes aimés, et comme enveloppés. "Dieu a tant aimé le monde qu’Il a donné son Fils Unique, afin que quiconque croit en lui ait la vie éternelle" (Jean 3 : 16).
    Et le Fils a tellement aimé le monde qu’Il a donné Sa vie pour le racheter ; perdu, Il le ramène à Dieu. "Personne ne m’ôte la vie, dit-Il, je la donne de moi-même". "Il partagera le butin avec les puissants, parce qu’il s’est livré lui-même à la mort, qu’il a porté les péchés de beaucoup d’hommes, et qu’il a intercédé pour les coupables" (Esaïe 53 : 12).
Tous ceux qui sont unis à Lui, Jésus les fait passer de la puissance des ténèbres à la lumière. Mais c’est de Son cœur brisé que procèdent les sources de la Vie ; de Sa Vie pour un monde qui meurt. Sa Vie qu’Il manifeste maintenant par ceux qui sont plantés avec Lui en Sa croix ; une même plante avec Lui.

CHAPITRE VI

L’unité que Christ a achetée de Sa Vie.

    Nous avons, dans l’épître aux Ephésiens, un nouvel aspect du sacrifice de Jésus. "Son dessein fut d’unir en Lui les deux fractions de l’humanité, pour former un homme nouveau, en faisant la paix ; et, en réconciliant Juifs et Gentils en un seul corps pour Dieu, par le moyen de Sa Croix. Par là, Il détruisit leur mutuelle inimitié". (Ephésiens 2 : 16, Traduction Weymouth). Autre traduction : "Afin de créer, avec les deux, un seul homme nouveau, en établissant la paix ; et de les réconcilier l’un et l’autre en un seul corps avec Dieu par la croix, en détruisant par elle l’inimitié" (Version Segond).
C’est la croix qui est à la base de cette unité entre les croyants : l’homme et l’homme ; l’homme et Dieu. C’est de la Croix que jaillit toute lumière et toute vie pour l’Église et pour le monde. Mais arrêtons-nous quelque temps sur le dessein d’union de Jésus en donnant Sa vie au Calvaire. Laissant la gloire du ciel, Il descendit ici-bas, se rendant obéissant jusqu’à la mort, même la mort de la Croix.
    Par là Il détruisit toute inimitié entre les croyants, et même entre tous les hommes. Et cela est vrai pour tous les siècles, si seulement les enfants de Dieu acceptent le message de la Croix pour leur propre délivrance.
    Au moment où l’apôtre écrivait ce message, l’humanité était divisée en deux parties : les Juifs et les païens ; les circoncis et les incirconcis. Les circoncis portaient en leur corps la marque qui les séparait des autres hommes pour Dieu. A eux appartenaient l’Alliance, les promesses, et les autres privilèges d’Israël. Les incirconcis, les Gentils, c’était le reste du monde ; tout ce qui ne faisait pas partie du peuple élu. Mais les uns et les autres descendaient du premier homme, Adam ; les uns et les autres, également tombés, avaient besoin d’un Sauveur qui les délivre du péché.
   La différence entre eux était surtout extérieure. La circoncision est faite par la main des hommes. Le mur de séparation n’était pas d’ordre spirituel ; la loi des préceptes et des ordonnances non plus.
Le Fils de Dieu vint pour unir les uns et les autres, et créer en Lui un homme nouveau. La séparation entre Juifs et Gentils était d’ordre surtout religieux. Il y avait pour le Juif une question de conscience et d’obéissance aux commandements de Dieu. Chez le Gentil il y avait ignorance, ou manque de sympathie, pour ce que le Juif considérait comme essentiel. En apparence, l’union entre les uns et les autres était impossible. Et cependant, le dessein de Christ, c’est de les réunir ; et la Croix est tout à la fois l’endroit et le moyen de cette union.
    Là, une nouvelle race fut créée, dont le Chef est le second Adam, le Fils de Dieu, l’Homme-Dieu. Cette nouvelle création est à Son image ; elle est celle des fils de Dieu dans le Christ Jésus. Sur la Croix, en la Personne du Rédempteur, Juifs et Gentils doivent être crucifiés et mourir. "Si quelqu’un est EN CHRIST, il est une nouvelle création". "Et c’est en Lui que Juifs et Gentils ont accès auprès du Père, par un même Esprit" (Ephésiens 2 : 18, Weymouth).
    Ce message est-il aussi pour les Chrétiens de ce XXIe siècle ? Certainement oui ! Il proclame que LA CROIX EST LE TERRAIN DE L’UNITÉ et son moyen. Quiconque est crucifié avec Christ, planté avec Lui en Sa mort, est une nouvelle création. Unis au Seigneur ressuscité, les Chrétiens sont aussi unis les uns aux autres, en nouveauté de vie.
Jésus a détruit par Sa mort l’inimitié qui existe entre Juifs et Gentils. Pouvons-nous dire qu’Il a aussi détruit celle qui existe entre Chrétiens et Chrétiens, lesquels, dans leur vie religieuse, marchent selon la chair ?
    La vieille création doit mourir, pour faire place à la nouvelle, selon l’image de Celui qui l’a créée. "En Lui, il n’y a plus ni Grec ni Juif, ni circoncis, ni incirconcis, ni barbare, ni Scythe, ni esclave, ni libre, mais Christ est tout en tous" (Colossiens 3 : 10-11). "Baptisés en Christ, il n’y a plus ni Juif ni Grec, il n’y a plus ni esclave ni libre, il n’y a plus ni homme ni femme, car tous, vous êtes UN en Christ Jésus" (Galates 3 : 27-28).
    Devant ces déclarations, nous comprenons que la Croix soit une pierre d’achoppement ; et que son message soit comparé à une épée ou à un couteau qui taille profondément dans l’orgueil de la vieille création (la vieille nature). Le remède que Dieu donne pour les divisions, la désunion, n’est pas un remède superficiel. L’idéal moderne d’union de la chrétienté ne le satisfait pas ; car l’union y manque totalement. Par la Croix, il détruit l’inimitié entre Chrétiens, qui considèrent en étrangers d’autres Chrétiens, lesquels n’emploient pas leur schibboleth.
Accepter cette vérité qu’il serait malaisé de rejeter, et la vivre, sont deux choses. Cependant, nous sommes exhortés à ne pas être seulement des auditeurs oublieux de la Parole, mais d’obéir selon la lumière communiquée. Autrement, nous méritons les reproches du Seigneur aux Pharisiens : ils disent, et ne font pas. Toutefois, lorsque nous voulons obéir implicitement à la lumière reçue et vivre selon les principes de la Croix, nous découvrons qu’elle est un scandale.
    L’obéissance possible est uniquement EN CHRIST JÉSUS. Nous avons été baptisés en Sa mort (Romains 6 : 3). "Nous avons revêtu Christ". En Lui, il ne peut y avoir ni distinctions, ni divisions, ni préventions, ni préférences. Avec quelle force l’apôtre parle aux Chrétiens de son temps. La Croix, leur dit-il, les sépare du monde, de ses façons de faire, de ses ambitions, de ses plans. Par la Croix, ils ont échappé aux rudiments du monde concernant la manière d’adorer Dieu : aux règles, aux injonctions, aux doctrines humaines (Colossiens 2 : 20-23). Par la Croix, ils ne sont plus ni Juif ni Gentil, en guerre l’un avec l’autre, concernant les ordonnances religieuses. Dans la mesure où nous sommes plantés avec Christ en Sa mort, nous réalisons la puissance de la Croix pour nous affranchir de toutes ces choses.
    Quelle est la portée de ce message pour nous, dans nos conditions actuelles ? Cet aspect de la Croix du Calvaire a une importance infinie pour le Chef ressuscité. L’Esprit éternel est à l’œuvre dans les membres du Corps désirant ardemment amener chacun d’eux à la place qu’il doit occuper. Chacun, étant parfaitement uni à la Tête et aux membres du Corps, peut croître normalement. "C’est de Christ, et grâce à tous les liens de son assistance, que tout le corps, bien coordonné, et formant un solide assemblage, tire son accroissement, et s’édifie lui-même dans la charité" (Ephésiens 4 : 16).
    Si chacun cède à la puissance de la Croix pour détruire toute inimitié : opposition de la vieille création qui se manifeste par des préventions, des préférences, de l’orgueil, de l’obstination, de l’étroitesse, toutes ces causes de division et de désunion disparaissent insensiblement entre les membres vivants du Corps de Christ.
    Mais que penser des positions prises par de véritables enfants de Dieu, positions qui séparent, qui empêchent toute union, et qui sont à vues humaines sans réconciliation possible ? Comment ces brèches ouvertes dans le Corps de Christ peuvent-elles être fermées ? Spirituellement parlant, Ephésiens chapitre deux donne la réponse. Oui, elles peuvent l’être, elles doivent l’être à la Croix, place de l’Unité. "Et comment les fermer ?" demande-t-on. Le fait d’accepter le message de la Croix implique la réception de l’Esprit de l’Agneau et sa manifestation en faveur des autres. A ceci, quelques Chrétiens répondent : "Encore faut-il que les autres aient aussi l’Esprit de Jésus, qui détruit l’inimitié. Pour fermer les brèches dont il est ici question, il faut être deux, il faut travailler des deux côtés de la barrière pour qu’elle soit abattue, et la brèche réparée".
    Que dit la Bible ? Les exemples, les faits, les enseignements qu’elle renferme, révèlent l’Esprit de Jésus à ceux qui, vraiment, veulent être rendu conformes à Lui en Sa mort. La vie de Jésus mourant révèle ce que doit être la nôtre.
    En résumé, l’esprit qui conduit à répandre sa vie pour les autres, à être en bénédiction à ceux qui refusent d’être réconciliés, à prier pour ceux qui vous font du mal, à bénir ceux qui vous maudissent, à faire du bien à ceux qui vous haïssent, à aimer ses ennemis sans jamais désespérer d’aucun d’eux, bref, l’esprit qui conduit à agir pour les autres COMME CHRIST A AGI POUR NOUS, QUAND CLOUE AU BOIS D’INFAMIE, IL FUT COMME UN AGNEAU AU MILIEU D’UNE BANDE DE LOUPS, tel est l’Esprit de la Croix, l’Esprit de l’Agneau, celui qui doit animer les rachetés.
    C’est d’ailleurs l’enseignement central du Sermon sur la Montagne qui donne les lois du Royaume pour ceux qui, en Jésus, sont déjà dans le Royaume. "Conduisez-vous de telle manière que le monde voie que vous êtes enfants de votre Père qui est dans les cieux". "Il fait luire son soleil sur les méchants et sur les bons, et il fait pleuvoir sur les justes et sur les injustes". Nous sommes aussi invités à manifester l’esprit de l’Agneau envers tous : les bons et les méchants. Dieu a aimé le monde qui s’était révolté contre Lui, en choisissant d’obéir à Satan plutôt qu’à son Créateur. Dieu a donné ce qu’Il avait de meilleur, Son Fils unique, pour sauver ce qu’il y avait de pire. Unis au Seigneur ressuscité, nous devons aimer. Nous n’avons pas à ignorer ou à fuir ceux qui nous haïssent et nous persécutent, mais nous devons les aimer. Que l’inimitié subsiste chez des enfants de Dieu, c’est possible, mais qu’il n’y ait pas d’inimitié mutuelle. Si d’autres vous traitent en ennemis, laissez triompher en vous l’Esprit de la Croix. Gardez le silence, attendant que Dieu Lui-même agisse.
Quelqu’un a écrit : "Il m’est arrivé de fuir une situation intenable. Dieu m’a montré que je devais retourner d’où je venais. Mais à ce jour, ceux que j’avais fuis n’ont pas changé. L’inimitié est toujours la même, et je n’ai rien pu arranger..."
    Cependant, la Croix demeure le terrain et le moyen pour détruire l’inimitié. Il faut aimer quand même ceux qui refusent d’être réconciliés. Une vie patiente, fidèle, silencieuse, vécue quotidiennement pour eux, amassera des charbons de feu sur leurs têtes (Romains 12 : 20). Tôt ou tard, les charbons (les remords) feront l’œuvre nécessaire, et la brèche sera réparée.
    Ainsi, nous le constatons à nouveau, il faut que l’œuvre accomplie par le Seigneur au Calvaire soit comme reproduite constamment dans nos vies. Que ce ne soit pas seulement un consentement, une acceptation d’être rendu conforme à Christ, en Sa mort, mais un humble acquiescement à la Providence de Dieu qui, dans Sa sagesse, permet les jugements défavorables, les incompréhensions, même la méchanceté et la persécution, pour que nous puissions manifester que nous avons vraiment l’esprit de la Croix. Comment pourrions-nous manifester l’Esprit de l’Agneau, si nous n’étions pas placés dans des milieux difficiles, si nos circonstances n’étaient pas impossibles, humainement parlantes ?
--Le dessein divin c’est d’unir.
--Celui du diable, c’est de diviser.
--La Croix est la place de l’union, et de l’Unité.
    Cette union de ceux qui vivent séparés a coûté la vie du Fils de Dieu. Sachons entrer dans le but qu’Il poursuit et vivre pour cette unité qu’Il a si chèrement achetée. Plantés en Lui, vivant de Lui, que Sa prière devienne aussi la nôtre, jusqu’à ce que, dans notre union avec Lui, toute inimitié disparaisse par la puissance de Sa mort ; parce que nous aimons l’Église comme Il l’a aimée, et que nous sommes prêts à achever en notre vie les souffrances de Christ pour Son Corps, l’Église.
Ainsi, selon notre mesure, nous réparerons les brèches, et nous préparerons les chemins, selon la volonté de Celui qui est venu pour supprimer toute inimitié, et abattre le mur de séparation. Alors, le cœur de Jésus sera satisfait.

Jessie Penn-Lewis


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