jeudi 23 juin 2016

L'essentiel, cest la grâce de Dieu Charles-Haddon Spurgeon

L’essentiel, c’est la grâce de Dieu | CHARLES SPURGEON

Qu’est-ce que la foi ? Elle se compose de trois éléments : connaître, croire, et faire confiance.

« Car c’est par la grâce que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. Ce n’est point par les œuvres, afin que personne ne se glorifie » (Ephésiens 2 :8-9).

                    Je pense qu’il est bon que j’exhorte le lecteur à se tourner avec adoration vers la source véritable de notre salut, c’est-à-dire vers la grâce de Dieu. « Car c’est par grâce que vous êtes sauvés ». Dieu est plein de grâce. C’est pour cela que les hommes sont pardonnés, transformés, purifiés, et sauvés. Ce n’est pas parce qu’ils ont, ou qu’ils pourront avoir, quoi que ce soit de bon en eux, qu’ils sont sauvés. Mais c’est par l’amour infini de Dieu, par Sa bonté, Sa compassion, Sa miséricorde et Sa grâce ! Restez donc un moment auprès de cette source ! Contemplez cette pure rivière d’eau de la vie, qui sort du trône de Dieu et de l’Agneau !

                    Qui peut mesurer la profondeur de cette grâce de Dieu ? Qui peut évaluer sa largeur ? Comme tous les autres attributs de Dieu, Sa grâce est infinie. Dieu est rempli d’amour, car Dieu est amour ! Dieu est rempli de bonté ! La bonté et l’amour infinis de Dieu sont au cœur même de sa nature. C’est parce que « Sa miséricorde dure à jamais » que les hommes ne sont pas détruits. C’est parce que « Ses compassions ne sont pas à leur terme » que les pécheurs peuvent être attirés à Lui et pardonnés !
                     Rappelez-vous bien cela ! Sinon vous pourriez tomber dans l’erreur de ne vous occuper que de la foi qui vous est nécessaire pour être sauvé, au point d’oublier que la grâce est la source même de la foi. La foi résulte de l’œuvre de la grâce de Dieu en nous ! Personne ne peut confesser que Jésus est le Christ, si ce n’est par l’Esprit de Dieu. « Nul ne vient à moi, a dit Jésus, à moins que le Père ne l’attire ». Il en est de même de la foi, qui est le fait de s’approcher de Jésus avec confiance. C’est Dieu Lui-même qui nous attire à Jésus. Le commencement et la fin du salut, c’est encore la grâce ! La foi, pour essentielle qu’elle soit, n’est qu’un aspect important de l’œuvre de la grâce.

                    Nous sommes sauvés « par la foi « mais le salut nous est donné « par grâce « Faites résonner ces paroles comme la trompette de l’archange : « C’est par grâce que vous êtes sauvés !» Quelle bonne nouvelle pour ceux qui ne méritaient rien!

                    La foi peut être comparée à un canal, ou à un tuyau. La grâce est la fontaine et le courant d’eau. La foi est l’aqueduc qui conduit jusqu’à nous le flot de la miséricorde divine, afin d’étancher la soif des hommes. Quelle tristesse, lorsque cet aqueduc est rompu ! Quel triste spectacle que de voir, dans tous environs de Rome, ces beaux aqueducs qui ne peuvent plus conduire l’eau dans la ville, parce que leurs arches sont brisées, et que leurs merveilleuses structures sont en ruine ! Un aqueduc doit être maintenu en bon état pour pouvoir laisser passer le courant d’eau. De même, notre foi doit être ferme et en bon état, pour permettre au courant de la grâce divine de nous atteindre !

                   Il faut toujours vous rappeler que la foi n’est que le canal ou l’aqueduc. Elle n’est pas la source d’eau ! Nous devons donc veiller à ne pas exalter la foi, au point de la mettre au-dessus de la source divine de toutes les bénédictions, c’est-à-dire la grâce de Dieu. N’idolâtrez jamais votre foi, ne la mettez pas à la place de Christ, et ne pensez jamais qu’elle est la seule source de votre salut ! C’est en regardant à Jésus que nous pouvons recevoir la vie, pas en regardant à notre propre foi ! Certes, c’est par la foi que toutes choses nous sont possibles. Mais la vraie puissance ne réside pas dans la foi. C’est la grâce qui possède la vraie puissance. C’est elle qui est le vrai moteur. La foi n’est qu’un moyen de transmission, qui fait bénéficier le véhicule de la puissance de ce moteur. La justice de la foi n’est pas l’excellence morale de la foi, mais simplement la justice de Jésus-Christ Lui-même, dont nous pouvons nous saisir et nous approprier par la foi. La paix que nous pouvons recevoir dans notre âme ne vient pas du fait que nous contemplons les qualités de notre propre foi. Mais elle vient de Celui qui est notre paix. C’est par la foi que nous pouvons toucher le bord de Son vêtement. C’est alors que la puissance de Jésus peut pénétrer dans notre âme !

                    Comprenez donc bien, cher ami Chrétien, que ce n’est pas la faiblesse de votre foi qui va vous détruire. Une main tremblante peut toujours recevoir un cadeau royal ! Pour que le salut de notre Seigneur puisse vous atteindre, il vous suffit d’avoir une foi pas plus grosse qu’un grain de sénevé ! La vraie puissance réside dans la grâce de Dieu, pas dans votre foi. De minces fils téléphoniques peuvent transmettre de grands messages ! Le témoignage profond du Saint-Esprit peut remplir un cœur de paix, en passant simplement par une foi mince comme un fil, un fil si mince qu’il semblerait ne pas pouvoir résister à son propre poids ! Pensez donc plutôt à Celui que vous regardez, au lieu de vous préoccuper autant de votre vue ! Vous devez oublier le fait même que vous êtes en train de regarder, pour ne contempler que le Seigneur Jésus, et la grâce de Dieu révélée en Lui !

Qu’est-ce donc que la foi ?

                    Qu’est-ce donc que cette foi, dont il est dit : « C’est par la grâce que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi« ? On a fait de nombreuses descriptions de la foi. Mais presque toutes les définitions que j’ai pu lire n’ont abouti qu’à me rendre les choses plus confuses. Nous pouvons donner beaucoup d’explications de la foi, au point que plus personne n’y comprenne plus rien. J’espère que je ne serai pas moi-même coupable de cette faute ! La foi est la chose la plus simple au monde. C’est peut-être à cause de cette simplicité qu’elle est si difficile à expliquer !

                   Qu’est-ce que la foi ? Elle se compose de trois éléments : connaître, croire, et faire confiance.

Il faut d’abord connaître.
« Comment croiront-ils en celui dont ils n’ont pas entendu parler ? » (Romains 10 :14).

                    Avant de croire en quelque chose, je dois d’abord être informé de son existence ! « La foi vient de ce que l’on entend ». Il nous faut donc entendre, afin que nous sachions en quoi nous devons croire. « Ceux qui connaissent ton nom se confient en toi » (Psaume 9 :10). Une certaine mesure de connaissance est donc essentielle à la foi. D’où l’importance d’avoir accès à la connaissance. « Il m’instruisait alors, et il me disait : Que ton cœur retienne mes paroles ; observe mes préceptes, et tu vivras » (Proverbes 4 :4). Telles étaient les paroles des anciens prophètes. Telles sont toujours les paroles de l’Évangile. Sondez les Écritures et apprenez ce que le Saint-Esprit nous enseigne en ce qui concerne Christ et Son salut. Cherchez à connaître Dieu ! « Car il faut que celui qui s’approche de Dieu croie que Dieu existe, et qu’il est le rémunérateur de ceux qui le cherchent » (Hébreux 11 :6).

                    Que le Saint-Esprit vous donne un esprit de connaissance et de crainte de l’Éternel ! Connaissez l’Évangile, connaissez la Bonne Nouvelle, sachez que l’Évangile nous parle de pardon gratuit, de changement de cœur, d’adoption dans la famille de Dieu, et de bien d’autres bénédictions. Connaissez tout particulièrement Jésus-Christ, le Fils de Dieu, le Sauveur des hommes, uni à nous par Sa nature humaine, et pourtant Un avec Dieu, capable donc d’être le Médiateur entre Dieu et les hommes, capable d’étendre Ses mains à la fois vers Dieu et vers les hommes, et d’être le lien nécessaire entre le pécheur et le Juge de toute la terre !

                    Efforcez-vous de connaître toujours plus le Seigneur Jésus ! Efforcez-vous tout spécialement de connaître toujours mieux la doctrine du sacrifice de Christ. Car le point principal sur lequel peut se fixer notre foi est le suivant : « Dieu était en Christ, réconciliant le monde avec lui-même, en n’imputant point aux hommes leurs offenses » (2 Corinthiens 5 :19). Sachez que Jésus « a été fait malédiction pour nous, car il est écrit : Maudit est quiconque est pendu au bois » (Galates 3 :13). Méditez profondément sur la doctrine de l’œuvre expiatrice de Christ. Car elle est la source de notre réconfort le plus doux, nous qui sommes des hommes coupables. Car « Celui qui n’a point connu le péché, il l’a fait devenir péché pour nous, afin que nous devenions en lui justice de Dieu (2 Corinthiens 5 :21). La foi vient par la connaissance.

Il nous faut ensuite croire que ces choses sont vraies.

                    Notre âme croit en l’existence de Dieu, croit qu’Il entend le cri des cœurs sincères. Elle croit que l’Évangile vient de Dieu, que la justification par la foi est la grande vérité que Dieu nous a révélée dans ces derniers jours par Son Esprit, beaucoup plus clairement que jamais auparavant. Puis notre cœur croit que Jésus est véritablement notre Dieu et notre Sauveur, le Rédempteur des hommes, le Prophète, le Sacrificateur, et le Roi de Son peuple.

                    Nous acceptons tout cela comme une vérité sûre, qui ne peut être remise en question. Je prie que vous puissiez croire cela sans aucun délai ! Croyez fermement que « le sang de Jésus, le Fils de Dieu, nous purifie de tout péché » (1 Jean 1 :7). Croyez que Son sacrifice est parfait, et a été pleinement accepté par Dieu pour notre bénéfice, afin que celui qui croit en Jésus ne soit pas condamné. Croyez en ces vérités, de la même manière que vous croyez en toutes les autres. Car la différence entre la foi qui sauve, et la foi ordinaire, ne concerne que le type de vérité concernée. Croyez au témoignage de Dieu, de la même manière que vous croiriez au témoignage de votre père ou de votre ami ! « Si nous recevons le témoignage des hommes, le témoignage de Dieu est plus grand ; car le témoignage de Dieu consiste en ce qu’il a rendu témoignage à son Fils » (1 Jean 5 :9).

                    Vous savez déjà un peu mieux ce qu’est la foi. Il ne vous manque plus qu’un ingrédient pour en avoir une définition complète.

Il s’agit de la confiance.

                    Livrez-vous entre les mains d’un Dieu miséricordieux ! Mettez votre espérance tranquille dans l’Évangile de la grâce ! Confiez-vous en un Sauveur mort et ressuscité pour vous ! Lavez vos péchés dans le sang se Son sacrifice expiatoire ! Acceptez Sa justice parfaite, et tout ira bien ! La confiance est la vie de la foi ! Sans cela, il n’y a point de foi qui sauve !

                    Les Puritains avaient l’habitude de définir la foi comme « quelque chose sur laquelle on s’appuie ». Appuyez-vous de toutes vos forces sur Christ ! Pour employer une meilleure illustration, je dirai : Tombez de tout votre long sur le Rocher des siècles, allongez-vous complètement sur Jésus ! Reposez-vous en Lui, livrez-vous entièrement à Lui ! Quand vous aurez fait cela, vous aurez mis en œuvre la foi qui sauve ! La foi n’est pas quelque chose d’aveugle, car elle commence par la connaissance. Ce n’est pas non plus une spéculation, car elle croit en des choses dont elle est sûre. La foi n’est pas quelque chose de théorique et de nébuleux. Car la foi fait confiance, elle confie son destin à la vérité de la révélation. C’est une première manière de décrire la foi.  

                    Je vais à présent le dire d’une autre manière : La foi, c’est croire que Christ est vraiment ce qu’Il a dit qu’Il était, c’est croire qu’Il fera ce qu’il a promis qu’Il ferait, et c’est attendre tout cela avec confiance.

                    La Bible nous dit que Jésus-Christ est Dieu, Dieu incarné dans la chair ; qu’Il est parfait dans Son caractère ; qu’Il a été offert en sacrifice pour le péché en notre faveur ; qu’Il a porté nos péchés dans Son corps sur le bois. Les Écritures nous Le présentent comme ayant annulé nos transgressions, comme ayant détruit le péché, et comme nous ayant offert une justice éternelle. La Parole sacrée nous dit aussi qu’Il est ressuscité d’entre les morts, qu’Il vit éternellement pour intercéder pour nous, qu’Il est monté au Ciel dans la gloire, qu’Il a pris possession du Ciel en faveur de Son peuple, et qu’Il reviendra bientôt pour juger le monde avec justice, et Son peuple avec équité.

                    Nous devons croire fermement qu’il en est ainsi. Car tel est le témoignage de Dieu le Père, quand Il a dit : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai mis toute mon affection : écoutez-le ! » (Matthieu 17 :5). Ce témoignage est aussi attesté par Dieu le Saint-Esprit. Car l’Esprit a rendu témoignage de Christ, dans la Parole inspirée, mais aussi par divers miracles, ainsi que par Son œuvre dans le cœur des hommes. Nous devons croire que ce témoignage est vrai.

                    La foi, c’est aussi croire que Christ fera ce qu’Il a promis. Il a promis qu’Il ne mettrait pas dehors tous ceux qui s’approchent de Lui. Il l’a dit, et il est donc certain qu’Il ne nous rejettera pas si nous nous approchons de Lui. La foi, c’est croire que Jésus a dit : « L’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d’eau qui jaillira jusque dans la vie éternelle » (Jean 4 :14). S’Il l’a dit, c’est donc vrai. Si nous recevons de Christ cette eau vive, elle demeurera en nous, et jaillira de nous comme des fleuves d’eau vive. Christ accomplira tout ce qu’Il a promis d’accomplir, et nous devons le croire. Ainsi, si nous recherchons auprès de Lui le pardon, la justification, la protection et la gloire éternelle, selon ce qu’Il a promis à ceux qui croiraient en Lui, Il nous l’accordera !

                    Mais nous devons encore franchir une troisième étape, indispensable. Jésus est bien ce qu’Il a dit qu’Il était. Il fera ce qu’Il a dit qu’Il ferait. C’est pourquoi chacun de nous doit Lui faire confiance !

                    Nous aussi nous devons dire : « Il sera pour moi ce qu’Il a dit qu’Il serait ! Il fera pour moi ce qu’Il a dit qu’Il ferait ! Je m’abandonne entre les mains de Celui qui a été envoyé pour sauver, pour me sauver ! Je me repose sur Sa promesse, qu’Il fera tout ce qu’Il a dit qu’Il ferait ! »

                      C’est cela la foi qui sauve ! Celui qui a cette foi possède la vie éternelle ! Quels que soient les dangers et les difficultés que nous pouvons traverser, quels que soient les découragements et les ténèbres que nous pouvons connaître, quels que soient nos péchés et nos infirmités, si nous croyons ainsi en Jésus-Christ, nous ne serons pas condamnés, nous ne recevrons jamais aucune condamnation !

                     Que ces quelques explications puissent vous être utiles ! Je crois qu’elles seront utilisées par le Saint-Esprit pour donner à mes lecteurs une paix immédiate ! « Ne crains rien, crois seulement ! » Ayez confiance, et soyez tranquilles !

               Ma crainte, c’est qu’un lecteur se contente de ce qu’il a compris intellectuellement de la foi, sans jamais le mettre en pratique ! Il vaut mieux une petite foi, mais réelle, qu’une grande foi théorique qui reste au niveau de la spéculation ! L’essentiel, c’est de croire au Seigneur Jésus-Christ immédiatement ! Ne vous occupez pas des définitions et des explications compliquées ! Un homme affamé va manger, même s’il ne connaît pas la composition de sa nourriture, l’anatomie de sa bouche, ou le processus de la digestion ! Il sait que le fait de manger lui donnera la vie ! Quelqu’un de bien plus intelligent connaîtra peut-être toute la science de la nutrition. Mais s’il ne mange pas, il mourra, malgré toute sa connaissance ! Il ne fait aucun doute que beaucoup de gens ont très bien compris la doctrine de la foi, mais sans croire. En revanche, aucun de ceux qui ont réellement fait confiance au Seigneur Jésus n’a jamais été rejeté, même s’il n’a jamais été capable de bien définir ce qu’est la nature de la foi ! Oh, cher lecteur, reçois le Seigneur Jésus dans ton âme, et tu vivras éternellement ! « Celui qui croit en Lui a la vie éternelle » !

Comment illustrer la foi ?

                    Pour expliquer ce qu’est la foi, d’une manière encore plus claire, je vais employer quelques illustrations concrètes. Je sais que seul le Saint-Esprit peut éclairer mes lecteurs. Mais c’est mon devoir et ma joie de fournir toute la lumière que je peux fournir, et de prier notre divin Seigneur d’ouvrir les yeux des aveugles. Oh, que mes lecteurs puissent faire la même prière pour eux-mêmes !

                   La foi qui sauve présente beaucoup d’analogies avec la foi ordinaire que nous pouvons trouver dans la vie des hommes.

                    La foi, c’est l’œil qui voit. Notre œil transmet à notre cerveau la vision de tout ce qui nous entoure. C’est l’œil qui peut instantanément transmettre au cerveau la vision des étoiles les plus distantes ! De la même manière, par la foi, nous pouvons instantanément rapprocher de nous le Seigneur Jésus. Bien qu’Il soit bien loin, dans le Ciel, Il entre dans nos cœurs par la foi. Il nous suffit de regarder à Jésus ! Comme le dit si justement ce cantique :

Regarder au divin Crucifié, c’est la vie !
En cet instant, pour toi, regarder c’est la vie !

                    La foi, c’est la main qui saisit. Quand la main se saisit d’une chose quelconque, elle fait exactement ce que fait la foi quand elle s’approprie Christ et les bénédictions attachées à Sa rédemption. La foi dit : « Jésus m’appartient ! » La foi entend parler du sang qui pardonne, et s’écrie : « J’accepte ce pardon pour moi ! » La foi proclame que l’héritage de Christ mourant lui appartient. Et cet héritage lui appartient effectivement, car la foi est l’héritage de Christ. Il S’est donné Lui-même à la foi, avec tout ce qu’Il possède. Prends, mon ami, tout ce que la grâce te donne. Tu ne seras pas un voleur en prenant tout cela, car c’est Dieu qui te permet de le prendre ! « Et que celui qui a soif vienne ; que celui qui veut, prenne de l’eau de la vie,gratuitement » (Apocalypse. 22 :17). Celui qui pourrait obtenir un trésor, simplement en étendant la main pour s’en saisir, serait bien insensé s’il restait pauvre !

                    La foi, c’est la bouche qui se nourrit de Christ. Avant que la nourriture puisse nous profiter, nous devons la saisir et la mettre dans notre bouche. C’est une chose toute simple que de manger et de boire. C’est volontairement que nous mettons dans notre bouche notre nourriture. Ce n’est pas sans notre consentement que nous avalons tout ce qui passe ensuite dans nos organes digestifs, pour y être transformé et assimilé par le corps. Dans l’épître aux Romains, Paul écrit, au chapitre 10 : « La parole est près de toi, dans ta bouche » ! Tout ce que nous devons faire, c’est l’avaler, et la faire descendre dans notre âme.

Oh, si les hommes pouvaient avoir de l’appétit pour la Parole de Dieu !

                    Car celui qui a faim et qui voit un bon plat devant lui n’a pas besoin d’être enseigné pour apprendre à manger ! Il lui suffit de dire : « Donne-moi un couteau et une fourchette, et donne-moi ma chance ! » Il est pleinement préparé à faire le reste ! Un cœur qui a faim et soif de Christ n’a besoin que de connaître ce qui lui est donné gratuitement, et il Le recevra aussitôt ! Si mes lecteurs sont dans ce cas, qu’ils n’hésitent pas à recevoir Jésus ! Ils peuvent être assurés qu’ils ne le regretteront jamais. Car « à tous ceux qui l’ont reçu, il a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu » (Jean 1 :12). Il ne rejette jamais personne, mais Il permet à tous ceux qui viennent à Lui d’être Ses enfants pour toujours.

                    La vie courante permet d’illustrer la foi de nombreuses manières. Le fermier plante sa bonne semence dans la terre, puis il attend non seulement qu’elle vive, mais aussi qu’elle se multiplie. Il a la foi en cette promesse de Dieu, selon laquelle « les semailles et les moissons ne cesseront jamais », et il est récompensé pour sa foi.

                    Le négociant confie son argent aux bons soins de son banquier, et se confie dans l’honnêteté et la bonne gestion de sa banque. Il confie son capital à quelqu’un d’autre, et sent que ce capital est bien plus en sécurité que s’il gardait chez lui, dans son coffre, un lingot d’or.

                    Le nageur se lance sur les flots. Quand il plonge dans la mer, il nage là où il n’a plus pied, tranquille sur l’océan agité. Il ne pourrait pas nager s’il ne se lançait pas avec confiance dans l’eau !

                    Le joaillier met son précieux métal dans le feu, qui semble prompt à le dévorer, mais il le sort du four, purifié dans la fournaise.

                     Vous ne pouvez vous tourner nulle part dans la vie sans voir la foi en œuvre, que ce soit dans les relations entre les hommes entre eux, ou dans les relations des hommes avec les lois naturelles. Nous avons constamment l’habitude de faire confiance à quelqu’un ou à quelque chose dans notre vie de tous les jours. De même, nous devons faire confiance à Dieu, tel qu’Il nous est révélé en Jésus-Christ.

                   Nous avons tous une mesure de foi variable, en fonction de la connaissance que nous avons, ou de notre croissance dans la grâce. Parfois, notre foi n’est pas plus grande que celle de celui qui ne fait que s’accrocher faiblement à Christ. Elle n’est que le simple sentiment de dépendance de celui qui veut se confier au Seigneur.

                    Par exemple, vous vous promenez le long d’un rivage, et vous apercevez certains mollusques sur des rochers. Vous vous approchez doucement du rocher, et vous frappez rapidement le mollusque avec un bâton. Il se détache facilement. Mais essayez à présent de décrocher un autre mollusque proche, de la même manière. Il est averti ! Il a entendu le coup de votre bâton qui a fait sauter son voisin, et il s’accroche au rocher de toutes ses forces. Ce n’est pas vous qui le détacherez ! Frappez, frappez fort, vous n’arriverez qu’à faire sauter le rocher ! Notre petit ami le mollusque n’a peut-être pas beaucoup d’intelligence, mais il sait s’accrocher ! Il ne sait rien de la formation géologique du rocher, mais il s’accroche. Il peut s’accrocher, et il a trouvé un support pour s’accrocher. C’est tout ce qu’il sait faire, mais il le fait pour sa sécurité et son salut. Il y va de la vie du mollusque, de savoir s’accrocher à un rocher. Il y va aussi de la vie du pécheur de savoir s’accrocher à Jésus !

                     Des milliers de Chrétiens n’ont pas une foi plus grande que celle-ci ! Ils en savent assez pour s’accrocher à Jésus de tout leur cœur et de toute leur âme, et cela leur suffit pour avoir la paix pour le présent, et la sécurité pour l’éternité. Jésus-Christ est pour eux un Sauveur fort et puissant, un Rocher inamovible et indéracinable. Ils s’accrochent à Lui en sachant qu’il y va de leur précieuse vie. C’est cela qui les sauve ! Cher lecteur, ne pouvez-vous pas vous accrocher aussi ? Faites-le immédiatement, sans tarder !

                    On peut voir la foi à l’œuvre, quand un homme fait confiance à un autre homme, parce qu’il sait que cet homme possède une connaissance supérieure à la sienne. C’est déjà une foi plus grande, une foi qui connaît la raison de sa dépendance, et qui agit en conséquence. Je ne crois pas que le mollusque dont nous parlions ait une connaissance quelconque de la nature du rocher sur lequel il s’accroche. Mais, à mesure que nous devenons plus intelligents, notre foi grandit. Un aveugle peut faire confiance en un ami qui le guide, parce qu’il sait que ce dernier peut voir. Et c’est avec confiance qu’il suit son guide qui le conduit. Si ce pauvre homme est né aveugle, il ne sait pas ce que c’est que voir. Mais il sait que la vue existe, et que son ami peut voir. C’est pour cela qu’il consent à mettre sa main dans la main de son ami, pour en faire son guide.

                    Nous, « nous marchons par la foi, et non par la vue ». « Heureux ceux qui n’ont pas vu, mais qui ont cru ! »

                    C’est une excellente image de la foi. Nous savons que Jésus possède l’amour, la puissance, et des bénédictions que nous ne possédons pas. C’est pour cela que nous Lui faisons joyeusement confiance, afin qu’Il fasse pour nous ce que nous ne pouvons pas faire nous-mêmes ! Nous Lui faisons confiance de la même manière que l’aveugle fait confiance à son guide. Jésus ne trahira jamais notre confiance, car « Il a été fait pour nous sagesse, justice, sanctification et rédemption ».

                    Tout écolier doit également exercer la foi pour étudier ce qu’on lui enseigne. Son maître lui enseigne la géographie, lui montre quelle est la forme de la terre, lui parle de l’existence de certaines grandes villes et d’immenses empires. L’écolier ne sait pas si toutes ces choses sont vraies, mais il croit ce que lui dit son maître, ainsi que le livre qu’il tient entre ses mains. C’est exactement ce que vous devez faire avec Christ, si vous voulez être sauvé. Vous devez croire, simplement parce qu’Il vous le dit, et parce qu’Il vous assure qu’il en est ainsi. Vous pouvez Lui faire confiance, parce qu’Il vous promet que vous recevrez le salut comme prix de votre confiance.

                     Presque tout ce que nous savons, vous et moi, nous l’avons reçu par la foi. Pare exemple, on vient de faire une certaine découverte scientifique, et vous le croyez. Pour quelle raison le croyez-vous ? En raison de l’autorité de certains scientifiques renommés, dont la réputation est incontestable. Vous n’avez jamais fait la moindre expérience pour vérifier leur découverte, mais vous avez cru en leur témoignage. Vous devez faire de même en ce qui concerne Jésus ! Il vous enseigne certaines vérités, et vous devez être Son disciple. Vous devez croire à Ses paroles. Il a accompli une certaine œuvre, et vous devez être son « client », en Lui faisant entièrement confiance. Il est infiniment supérieur à vous, et Il Se présente Lui-même à vous comme votre Maître et Seigneur, pour que vous Lui fassiez confiance. Si vous Le recevez, et si vous recevez Ses paroles, vous serez sauvé !

Il existe une autre forme de foi, encore supérieure. C’est la foi qui résulte de l’amour.

                    Pourquoi un enfant fait-il confiance à son père ? L’enfant fait confiance à son père parce qu’il l’aime. Bénis et heureux ceux qui ont cette foi en Jésus, une foi qui naît d’un profond amour pour le Seigneur. C’est la clef d’une confiance paisible. Ceux qui aiment Jésus sont émerveillés par Son caractère, enthousiasmés de savoir pourquoi Jésus est venu sur la terre ! Ils sont transportés de joie en connaissant l’amour que Jésus a manifesté dans Sa vie. Ils ne peuvent donc s’empêcher de Lui faire confiance, parce qu’ils L’admirent tant, Le respectent tant, et L’aiment tant !

                    Je pourrais illustrer de la manière suivante cette confiance qui naît de l’amour. Supposons qu’une certaine femme soit l’épouse d’un éminent médecin. Elle est soudain la victime d’une dangereuse maladie qui la terrasse. Mais elle reste merveilleusement tranquille et paisible, car cette maladie est justement la spécialité de son mari. Il en a fait le sujet de ses études, et il a déjà guéri des milliers de personnes qui avaient la même maladie. Cette femme n’est donc absolument pas troublée, car elle se sent parfaitement en sécurité entre les mains de cet homme qui lui est si cher, et qui lui manifeste des preuves si évidentes d’amour et de compétence. Sa foi est donc raisonnable et naturelle, et son mari, de toutes manières, mérite que sa femme lui fasse confiance.

                    C’est cette foi que les plus heureux d’entre les Chrétiens ont en leur Seigneur. Il n’y a aucun autre médecin semblable à Lui, aucun qui puisse sauver comme Lui ! Nous L’aimons, et Il nous aime. Nous pouvons donc nous livrer entre Ses mains, accepter tout ce qu’Il nous prescrira, et faire tout ce qu’Il nous demandera ! Nous savons qu’Il ne pourra rien nous prescrire de mauvais tant que nous serons entre Ses mains. Car Il nous aime trop pour nous laisser périr, ou nous laisser passer par la moindre souffrance inutile.

La foi est la racine de l’obéissance.

                     On peut aussi le voir clairement dans notre vie courante. Quand le capitaine d’un navire fait confiance à un pilote qui le guide pour entrer dans un port, il le laisse diriger son navire. Quand un voyageur fait confiance à son guide pour le conduire à travers un passage difficile, il se contente de suivre soigneusement les indications de son guide. Quand un patient croit en son médecin, il obéit soigneusement à ses prescriptions et se conforme à ses ordonnances. Une foi qui refuserait d’obéir aux commandements de notre Sauveur n’est qu’une vaine présomption. Elle ne sauvera jamais notre âme. Nous faisons confiance à Jésus pour qu’Il nous sauve. C’est Lui qui nous montre le chemin du salut. Nous suivons Ses directives, et nous sommes sauvés. Que mes lecteurs n’oublient jamais cela ! Faites confiance à Jésus, et montrez votre confiance en faisant tout ce qu’Il vous demande !

                      Une forme remarquable de la foi est celle qui résulte d’une connaissance certaine. Cette foi vient de notre croissance dans la grâce. C’est la foi de quelqu’un qui croit en Christ parce qu’il Le connaît, qui Lui fait confiance parce qu’il a pu vérifier que le Seigneur lui avait été invariablement fidèle. Une sœur, qui était Chrétienne depuis longtemps, avait pris l’habitude d’écrire en marge de sa Bible un « V » et un « P », chaque fois qu’elle avait pu vérifier et prouver qu’une promesse s’était vérifiée dans sa vie. Combien il nous est facile de croire en un Sauveur dont nous avons pu maintes fois vérifier et éprouver la fidélité ! Peut-être que vous n’en êtes pas encore là, mais vous y parviendrez bientôt ! Toute chose a son commencement. Votre foi deviendra forte en son temps ! Quand votre foi sera mûre, vous n’aurez plus besoin de demander des signes et des preuves, mais vous vous contenterez de croire !

                    Considérez la foi d’un capitaine de vaisseau ! Cette foi m’a toujours étonné. Il détache les amarres, et s’éloigne du rivage. Pendant des jours, des semaines, et parfois des mois, il peut rester en mer sans voir la moindre côte. Il continue pourtant d’avancer sans crainte. Un beau matin, il se retrouve exactement à l’endroit désiré ! Comment a-t-il pu tracer son chemin sur cette immensité profonde ? Il s’est confié en son compas, en ses cartes nautiques, en ses instruments, et aussi dans la position des étoiles. Il a obéi à toutes ces indications qui le guidaient, sans jamais voir une terre. Il a pu se diriger avec tellement de précision qu’il n’a même pas eu à changer de direction pour entrer dans le port. C’est quelque chose de merveilleux, cette navigation qui ne se fait pas à la vue !

                     Sur le plan spirituel, c’est aussi quelque chose de merveilleux, quand nous acceptons de quitter les rivages de la vue et des sens, de dire « au revoir » aux sensations intérieures, aux signes, aux coups de pouce de la providence, etc… Il est glorieux de nous retrouver au milieu de l’océan de l’amour divin, de croire en Dieu, et de mettre le cap vers le Ciel, guidé seulement par la Parole de Dieu ! « Bénis soient ceux qui n’ont pas vu, mais qui ont cru » ! C’est à eux que sera assurée une pleine entrée dans le Ciel, après une traversée en toute sécurité ! Cher lecteur, ne veux-tu pas placer ta confiance en Dieu et en Jésus-Christ ? C’est là que je demeure moi-même, dans le repos de la foi, et dans une joyeuse confiance. Mon frère, Ma Sœur, viens avec moi, et crois en notre Père et en notre Sauveur ! Crois sans tarder, maintenant même !

Auteur : Charles-Haddon Spurgeon

Le dur combat spirituel Charles Spurgeon

Le dur combat spirituel : Vous aurez des tribulations dans le monde; (Jean 16:33)

                    Es-tu en train de te poser la question à ce sujet, croyant? Regarde en haut vers ton père céleste, et contemple-le dans sa pureté, et sa sainteté. Sais-tu qu'un jour tu seras semblable à lui? Seras-tu facilement rendu conforme à son image? Ne nécessiteras-tu pas beaucoup de l'action purificatrice dans la fournaise de l'affliction pour détacher les scories? Sera-t-il une chose facile que de te débarrasser de tes corruptions, et de t'amener à la perfection de même que ton père qui est dans le ciel est parfait? Et ensuite, chrétien tourne ton regard vers la terre, ici-bas. Sais-tu quels ennemis tu as sous tes pieds? Tu étais autrefois un serviteur de Satan, et aucun roi ne perd volontairement ses sujets. Penses-tu que Satan te laissera seul?

                   Non, il veut toujours être chez toi, car il erre comme un lion rugissant, cherchant qui il dévorera. Attends-toi à la détresse, car tu n'en seras pas exempt. Ensuite regarde autour de toi, où es-tu? Tu es dans un pays ennemi; un étranger et un voyageur. Le monde n'est pas ton ami. S'il l'était, alors tu ne serais pas l'ami de Dieu, car celui qui est ami du monde est l'ennemi de Dieu. Sois sûr que tu trouveras partout des adversaires. Quand tu dors penses que tu reposes sur le champ de bataille; quand tu marches crains une embûche dans chaque fourré. Comme il est dit que les moustiques piquent davantage les étrangers que les gens du pays, ainsi les épreuves de la terre seront les plus sévères pour toi. Enfin, regarde en dedans de toi, dans ton propre cœur et observe ce qu'il y a. Le péché et le moi sont encore dedans. Ah! si tu n'avais pas le diable pour te tenter, ni d'ennemis pour te combattre, ni le monde pour te tendre des pièges, tu trouverais encore en toi même assez de méchanceté pour être une douloureuse affliction pour toi, car le cœur est tortueux par-dessus tout et désespérément méchant. Attends-toi à la peine, au chagrin alors, mais ne perd pas courage à cause de cela, car Dieu est avec toi pour te secourir et te fortifier. Il a dit: "je serai avec toi dans la détresse, je te délivrerai et t'honorerai".
- Charles Spurgeon

«Ne vous conformez pas au siècle présent.» (Rom.12:2) 

S’IL EST possible qu’un chrétien soit sauvé alors même qu’il se conforme à ce monde, cela ne pourrait être qu’au travers du feu. Un salut si démuni est tout autant à redouter qu’à désirer. 

Cher lecteur, aimerais-tu quitter ce monde dans les ténèbres d’un misérable lit de mort, et accéder au ciel tel un marin naufragé escaladant les rochers de son pays natal? Alors permets à ce monde de te presser pour te faire entrer dans son moule, et refuse de t’identifier à Christ et de porter Son opprobre.
Mais préfères-tu vivre un paradis ici-bas, aussi bien qu’hériter celui au-dessus de ta tête? Souhaites-tu «connaître l’amour de Christ, qui surpasse toute connaissance»? Veux-tu te voir accorder une libre entrée dans la joie de ton Seigneur? Alors «sors du milieu d’eux, et sépare-toi; ne touche pas à ce qui est impur.»
Si tu désires la pleine assurance de la foi, tu ne pourras l’obtenir tout en communiant avec des pécheurs. Si tu veux brûler d’un ardent amour pour Dieu, sois conscient que le feu de ton affection souffrira de la pluie glacée de la société impie.
Tu ne pourras devenir un grand chrétien, un croyant mature en Jésus-Christ, tant que tu céderas aux maximes d’ici-bas et au mode de vie des gens du monde.
Il est incongru pour un héritier des cieux d’être un grand ami des héritiers de la destruction. Il est mal vu qu’un serviteur soit trop intime avec les ennemis de son Roi.
Même de petites inconséquences sont dangereuses. De petites épines provoquent de grandes plaies, et de petites mites détruisent les habits délicats: de la même manière, de petites frivolités et de petites indiscrétions dépouilleront ton témoignage d’un millier de joies.
Toi qui te dis chrétien, tout en étant pourtant si peu séparé des pécheurs, tu ne sais pas ce que tu perds par ta conformité au monde. Celle-ci tranche les tendons de ta force, et t’oblige à ramper alors que tu devrais courir.
Donc pour ton propre réconfort, et pour le bien de ta croissance dans la grâce, si tu es un chrétien, alors sois bel et bien un chrétien, clairement identifié comme tel.
Charles Haddon Spurgeon (1834-1892)

mardi 21 juin 2016

(13) LE SERMON SUR LA MONTAGNE, TREIZIÈME DISCOURS WESLEY Matthieu 7,21-27

Numérisation Yves PETRAKIAN Copie autorisée pour diffusion gratuite uniquement Obligation d'indiquer la source http://456-bible.123-bible.com

Sermon 33 :           LE SERMON SUR LA MONTAGNE, TREIZIÈME DISCOURS

Matthieu 7,21-27   (1750)

Ceux qui me disent: Seigneur, Seigneur! n’entreront pas tous dans le royaume des cieux, mais celui-là seul qui fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux.
  
Plusieurs me diront en ce jour-là: Seigneur, Seigneur, n’avons-nous pas prophétisé par ton nom? n’avons-nous pas chassé des démons par ton nom? et n’avons-nous pas fait beaucoup de miracles par ton nom? Alors je leur dirai ouvertement: Je ne vous ai jamais connus, retirez-vous de moi, vous qui commettez l’iniquité.

C’est pourquoi, quiconque entend ces paroles que je dis et les met en pratique, sera semblable à un homme prudent qui a bâti sa maison sur le roc. La pluie est tombée, les torrents sont venus, les vents ont soufflé et se sont jetés contre cette maison: elle n’est point tombée, parce qu’elle était fondée sur le roc.
 
Mais quiconque entend ces paroles que je dis, et ne les met pas en pratique, sera semblable à un homme insensé qui a bâti sa maison sur le sable. La pluie est tombée, les torrents sont venus, les vents ont soufflé et ont battu cette maison: elle est tombée, et sa ruine a été grande.

                      Notre divin Maître ayant déclaré tout le conseil de Dieu quant au chemin du salut, et fait remarquer les principaux obstacles que rencontrent ceux qui désirent y marcher, conclut maintenant son discours par ces graves paroles par lesquelles il met, pour ainsi dire, le sceau à sa prophétie, et imprime toute son autorité sur son témoignage, afin qu'il demeure ferme dans tous les siècles.

                     Car, ainsi a dit le Seigneur, afin que jamais personne ne s'imagine qu'il y a une autre voie de salut : « Ceux qui me disent : Seigneur, Seigneur, n'entreront pas tous au royaume des cieux ; mais celui-là seulement qui fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux. Plusieurs me diront en ce jour-là Seigneur ! Seigneur, n'avons-nous pas prophétisé en ton nom ? Et n'avons-nous pas chassé les démons en ton nom ? Et n'avons-nous pas fait plusieurs miracles en ton nom ? Alors je leur dirai ouvertement : Je ne vous ai jamais connus. Retirez-vous de moi, vous qui faites métier d'iniquité. Quiconque donc entend ces paroles que je dis, et ne les met pas en pratique, sera comparé à un homme insensé qui a bâti sa maison sur le sable. Et la pluie est tombée, et les torrents se sont débordés, et les vents ont soufflé et sont venus fondre sur cette maison-là, elle est tombée, et sa ruine a été grande ! »

                     Je me propose dans ce discours : 1° de considérer le cas de celui qui bâtit sa maison sur le sable ; 2° de montrer la sagesse de celui qui bâtit sa maison sur le roc ; et 3° de terminer par une application qui fasse ressortir l'importance pratique des avertissements du Seigneur Jésus.

I

                     Je considère d'abord le cas de celui qui bâtit sa maison sur le sable. C'est pour lui que le Seigneur dit : « Ceux qui me disent Seigneur, Seigneur, n'entreront pas tous au royaume des cieux ». C'est un décret irrévocable et qui demeure pour toujours ferme. Il nous importe donc, au plus haut degré, d'en comprendre entièrement le sens et la force. Eh bien ! Que faut-il entendre par cette expression : « Ceux qui me disent, Seigneur ! Seigneur ? » Elle désigne indubitablement ceux qui pensent aller au ciel par quelque autre chemin que celui qui vient d'être décrit par Jésus. Elle implique donc (pour commencer par le plus bas degré) toute religion en paroles ; — à cela se rapportent tous nos symboles, toutes nos professions de foi, tout ce que nous pouvons dire ou répéter en fait de prières et d'actions de grâces. Nous pouvons bénir le nom de Dieu et déclarer sa bonté aux enfants des hommes ; nous pouvons discourir de ses faits merveilleux, nous entretenir chaque jour de son salut, et comparant entre elles les choses spirituelles, nous pouvons en tirer l'explication des oracles de Dieu. Nous pouvons éclaircir les mystères de son royaume, qui étaient demeurés cachés dès le commencement du monde ; nous pouvons parler la langue des anges plutôt que des hommes, concernant les choses profondes de Dieu ; nous pouvons crier aux pécheurs : « Voilà l'Agneau de Dieu qui ôte les péchés du monde  » ; que dis-je ? Nous pouvons le faire avec une telle puissance de Dieu, une telle démonstration de son Esprit, que nous sauvions beaucoup d'âmes de la mort, et couvrions une multitude de péchés ; nous pouvons faire tout cela et pourtant n'avoir rien fait de plus que de nous écrier : « Seigneur ! Seigneur ! » Après avoir efficacement prêché aux autres, je puis moi-même n'être qu'un réprouvé. Après avoir, dans la main de Dieu, arraché beaucoup d'âmes à l'enfer, je puis, en fin de compte, y tomber moi-même. Après en avoir conduit plusieurs au royaume des cieux, il se peut que moi-même je n'y entre jamais. Lecteur, si jamais Dieu a béni ma parole pour ton âme, prie-le d'avoir compassion de moi qui suis pécheur !

                     Dire : « Seigneur ! Seigneur ! » peut impliquer, en second lieu, l'innocence dans les actions ; ne pas faire le mal. Nous nous abstenons peut-être de tout acte de présomption, de toute méchanceté extérieure ; nous nous abstenons de tous ces actes, de toutes ces paroles qu'interdit l'Écriture ; nous pouvons dire à tous ceux qui nous entourent. « Qui de vous me convaincra de péché ? » Nous pouvons avoir la conscience nette de toute offense extérieure envers Dieu et envers les hommes, être exempts de toute impureté, de toute impiété, de toute injustice quant au dehors, ou comme l'apôtre le témoigne de lui-même, être, quant à la justice de la loi, « sans reproche ». Mais pour tout cela, nous ne sommes pas justifiés. Ce n'est encore rien de plus que dire, « Seigneur ! Seigneur ! » Et si nous en demeurons là, jamais nous n'entrerons au royaume des cieux.

                      Dire : « Seigneur ! Seigneur ! » peut impliquer, en troisième lieu, plusieurs de ces œuvres qu'on appelle particulièrement « les bonnes œuvres ». Je puis participer à la Cène du Seigneur, entendre force excellents sermons et n'omettre aucune occasion de prendre part aux autres moyens de grâce ordonnés de Dieu ; je puis faire du bien à mon prochain, rompre mon pain aux affamés, vêtir ceux qui sont nus et pousser le zèle jusqu'à donner tout mon bien pour la nourriture des pauvres ; que dis-je ? je puis faire tout cela avec le désir de plaire à Dieu et la ferme persuasion de lui plaire en effet (comme c'était indubitablement le cas pour ceux que Jésus représente ici, lui disant : Seigneur ! Seigneur !), et néanmoins n'avoir aucune part à la gloire qui doit être révélée au dernier jour.

                     Si cette doctrine vous surprend, reconnaissez par là même que vous êtes encore étrangers à la religion de Jésus-Christ ; et, en particulier, au parfait tableau qu'il en a tracé devant nous dans ce discours. Car combien tout cela est peu de chose en comparaison de cette justice et de cette vraie sainteté qu'il y décrit ! Combien c'est loin de ce royaume des cieux qui s'établit dans l'âme croyante ; de cette piété qui, d'abord semée dans le cœur comme un grain de semence de moutarde, pousse bientôt de grandes branches, oh croissent tous les fruits de justice et tout ce qui est bien en fait de sentiments, de paroles et d'actions !

                     Mais, quelque clarté qu'il eût mise dans cette déclaration, quelque soin qu'il eût pris de répéter qu'aucun de ceux qui n'ont point reçu dans leur cœur ce royaume de Dieu, n'entrera dans le ciel, notre Sauveur n'ignorait pas que plusieurs hésiteraient à recevoir cette parole : c'est pourquoi il veut bien encore la confirmer : « Plusieurs », dit-il (non pas un seulement ou quelques-uns, mais) « plusieurs me diront en ce jour-là », non seulement nous avons dit beaucoup de prières, nous avons célébré tes louanges, nous nous sommes abstenus du mal et exercés à bien faire, mais ce qui est beaucoup plus que tout cela, — « n'avons-nous pas prophétisé en ton nom ? n'avons-nous pas chassé les démons en ton nom ? n'avons-nous pas fait plusieurs miracles en ton nom ? » — Nous avons prophétisé, c'est-à-dire nous avons déclaré ta volonté aux hommes ; nous avons montré aux pécheurs le chemin de la paix et de la gloire, et cela en ton nom, c'est-à-dire conformément à la vérité de ton Evangile, et avec ton autorité, ton Saint-Esprit envoyé du ciel confirmant notre prédication. Car en ton nom ou par ton nom, par la puissance de ta Parole et de ton Esprit, nous avons chassé les démons hors des âmes sur lesquelles ils avaient longtemps maintenu leur empire et dont ils avaient une pleine et paisible possession. Par ton nom, par ta puissance et  non par la nôtre, nous avons fait plusieurs miracles, tellement que même les morts revenaient à la vie en entendant, par notre bouche, la voix du Fils de Dieu. « Mais à ceux-là même je dirai ouvertement : Je ne vous ai jamais connus ! » —Non, je ne vous ai jamais connus comme miens, pas même lorsque vous chassiez les démons en mon nom, car votre cœur n'était pas droit devant Dieu. Vous n'étiez pas, quant à vous, doux et humbles, vous n'aviez pas l'amour de Dieu et du prochain, vous n'étiez pas renouvelés à l'image de Dieu, vous n'étiez pas saints comme je suis saint. Retirez-vous de moi, vous qui êtes, malgré tout cela, « des ouvriers d'iniquité  » ; vous qui êtes transgresseurs de ma loi, de ma loi de parfaite sainteté et de parfait amour !

                      C'est pour rendre la chose entièrement évidente et incontestable, que le Seigneur la confirme par cette frappante comparaison : « Quiconque entend ces paroles que je dis, et ne les met pas en pratique, sera comparé à un homme insensé qui a bâti sa maison sur le sable, et la pluie est tombée et les torrents se sont débordés, et les vents ont soufflé et sont venus fondre sur cette maison-là », — comme ils le feront sûrement un jour ou l'autre sur toute âme d'homme : les flots de l'affliction au dehors, ou de la tentation au dedans ; les vents de l'orgueil, de la colère, de la crainte, de la convoitise ; — « et elle est tombée et sa ruine a été grande ! » Telle sera nécessairement la portion de tous ceux qui restent en quelque chose en dessous de cette religion précédemment décrite. Et leur ruine sera d'autant plus grande qu'ils « ont entendu ces paroles et ne les ont pas mises en pratique ».

II

                     Je dois maintenant montrer la sagesse de celui qui les met en pratique, de celui qui bâtit sa maison sur le roc. Il est sage, en vérité, « celui qui fait la volonté de mon Père qui est aux cieux ». Il est vraiment sage celui dont « la justice surpasse celle des Scribes et des Pharisiens ». Il est « pauvre en esprit », se « connaissant lui-même comme il est connu ». Il voit, il sent combien il est pécheur et coupable, jusqu'à ce qu'il soit lavé par le sang expiatoire. Il sait qu'il est perdu, que la colère de Dieu repose sur lui, et il se sent incapable de rien faire à moins qu'il ne soit rempli « de paix et de joie par le Saint-Esprit ». Il est humble et doux patient envers tous, ne rendant jamais mal pour mal, ni injure pour injure, mais au contraire bénissant, jusqu'à « surmonter le mal par le bien ». Son âme n'a soif sur la terre que du Dieu vivant. Il a pour tous les hommes « des entrailles de miséricorde », et il est prêt à donner sa vie pour ses ennemis. Il aime le Seigneur son Dieu « de tout son cœur, de toute son âme, de toute sa pensée et de toutes ses forces ». Celui-là seul entrera au royaume des cieux qui, dans cet esprit, fait du bien à tous les hommes, et qui, méprisé et rejeté par cela même, haï, injurié, persécuté des hommes, « se réjouit et tressaille de joie », sachant en qui il a cru et ne doutant pas que « ces légères afflictions du temps présent » ne produisent en lui « le poids éternel d'une gloire infiniment excellente ».

                     Que cet homme est vraiment sage ! Il se connaît lui-même, il sait qu'il est un esprit immortel, issu de Dieu et envoyé ici-bas dans une maison d'argile peur faire, non sa volonté, mais la volonté de Celui qui l'a envoyé. Il sait ce qu'est le monde, — le lieu où il doit passer un petit nombre de jours on d'années, non comme habitant, mais comme un étranger et un voyageur qui se dirige vers les demeures de l'éternité. Et c'est pour cela qu'il « use du monde comme n'en abusant pas », sachant que « la figure de ce monde passe ». Il connaît Dieu comme son père et son ami, l'auteur de tout bien, le Dieu des esprits de toute chair, le seul centre de bonheur pour tous les êtres intelligents. Il voit, plus clairement que par le soleil en plein midi, que le tout de l'homme, c'est de glorifier Celui qui l'a créé pour soi, c'est de l'aimer et de le posséder à jamais. Et il ne voit pas moins clairement que le moyen de parvenir à cette possession de Dieu dans la gloire, c'est de le connaître, de l'aimer, de l'imiter dès maintenant, et de croire en Jésus-Christ qu'il a envoyé.

                     Cet homme est sage, même au jugement de Dieu, car il bâtit sa maison « sur le roc », — sur « le rocher des siècles », sur le Seigneur Jésus-Christ le rocher éternel. Jésus mérite bien ce titre, puisqu'il ne change point, puisqu'il est « le même hier, aujourd'hui et éternellement », suivant qu'il est dit dans ce témoignage d'un homme de Dieu des anciens temps, cité par l'apôtre dans son Epître aux hébreux : « C'est toi, Seigneur, qui as fondé la terre au commencement, et les cieux sont l'ouvrage de tes mains. Ils périront, mais tu subsistes toujours. Ils vieilliront tous comme un vêtement, tu les plieras comme un habit, et ils seront changés. Mais toi tu es toujours le même, et tes années ne finiront point ». Bien sage est donc l'homme qui bâtit sur Lui comme sur son unique fondement, sur son sang et sa justice, sur ce qu'il a fait et souffert pour nous. Il établit sa foi sur cette « pierre du coin », il y repose son âme entière. Enseigné de Dieu, il peut dire : Seigneur, j'ai péché, et je mérite d'être ; jeté aux dernières profondeurs de l'enfer. Mais je suis « justifié gratuitement par ta grâce, par la rédemption qui est en Jésus-Christ. Et je vis, non plus moi-même, mais Christ vit en moi ; je vis d'une vie cachée avec Christ en Dieu », et « si je vis encore dans ce corps mortel, je vis par la foi au Fils de Dieu qui m'a aimé et qui s'est donné lui-même pour moi ». Je vis, même dans la chair, d'une vie d'amour, d'un amour pur pour Dieu et pour les hommes ; d'une vie de sainteté et de bonheur, louant Dieu et faisant toutes choses à sa gloire.

                      Toutefois, qu'il ne se persuade pas qu'il n'aura plus de combats, qu'il est désormais hors des atteintes de la tentation. Dieu veut montrer en lui la réalité de sa grâce. Il sera donc éprouvé « comme l'or dans le feu ». Il sera tenté non moins que ceux « qui ne connaissent point Dieu  » ; peut-être beaucoup plus encore ; car Satan ne manquera pas de cribler à l'excès ceux qu'il ne peut détruire. C'est pourquoi « la pluie tombera » avec force ; seulement ce sera quand et comme il plaira, non pas au « Prince de la puissance de l'air », mais à Celui « dont le règne a la domination sur tout ». « Les torrents se déborderont », ils élèveront leurs vagues avec fureur. Mais ici encore le Seigneur qui a présidé sur le déluge et qui préside comme roi éternellement, dira : « Vous viendrez jusqu'ici et vous ne passerez pas plus avant », et « ici s'arrêtera l'élévation de vos ondes ». « Les vents souffleront et fondront sur cette maison-là », comme pour l'arracher de ses fondements ; mais leurs efforts seront vains ; elle ne tombe point, car elle est fondée sur « le roc ». Cet homme prudent a bâti sur Christ par la foi et l'amour ; il ne sera point ébranlé. « Il ne craindra point, quand même la terre se bouleverserait et que les montagnes se renverseraient au milieu de la mer, et que ses eaux viendraient à bruire, et à se troubler et que les montagnes seraient ébranlées par l'élévation de ses vagues ». Il habite toujours dans « la retraite secrète du souverain  » ; il est en sûreté « à l'ombre du Tout-Puissant ».

III

                    N'est-ce donc pas la grande affaire de tout enfant de Dieu de s'appliquer ces choses à lui-même ? d'examiner avec soin sur quel fondement il bâtit sur le sable ou sur le  rocher ? N'avez-vous- pas le plus profond besoin de vous demander : Quel est le fondement de mon espérance ? Sur quoi fais-je reposer mon attente. d'entrer au royaume des cieux ? N'est-ce. pas sur le sable ? Sur mon orthodoxie. c'est-à-dire, sur la vérité de mes opinions religieuses que par un grossier abus de langage je décore du nom de foi ? Sur ce que j'ai un formulaire de doctrine plus rationnel, peut-être, ou plus scripturaire que celui de tels ou tels ? Hélas, quelle folie ! Certes, c'est bien là bâtir sur le sable, ou mieux encore sur l'écume de la mer ! — Ou bien encore n'ai-je point bâti sur un autre fondement non moins fragile, peut-être sur ce que j'appartiens à une Eglise si excellente, réformée suivant le vrai patron des Écritures, dotée de la plus pure doctrine, de la liturgie, de la discipline la plus ancienne, la plus apostolique ? Ce sont là, indubitablement, tout autant de raisons de bénir Dieu, et ce peuvent être tout autant de moyens de sanctification, mais ce n'est pas la sanctification elle-même, et sans elle, ils ne me profitent de rien, ils me rendent, au contraire, d'autant plus inexcusable, et m'exposent à une condamnation d'autant plus grande. Mon espérance est donc bâtie sur le sable si elle repose sur ce fondement.

                     Vous ne pouvez, vous n'oseriez vous y appuyer. Mais sur quoi bâtirez-vous donc pour votre salut ? Sur votre innocence ? Sur ce que vous ne faites de tort à  personne et ne commettez point de mal ? Bien, j'admets qu'il en soit ainsi : vous êtes justes en toute affaire ; vous êtes un franc honnête homme, vous rendez à chacun ce qui lui est dû, vous ne vous rendez coupable ni de fraude, ni d'extorsion, vous avez de la bonne foi et de la conscience, et l'on ne vous connaît aucun péché. Jusque-là c'est très bien ; mais ce n'est pas de cela qu'il s'agit. Vous pouvez avoir toutes ces qualités et n'aller jamais au ciel. Toute cette innocence, si même elle part d'un bon principe, n'est encore que la moindre partie de la religion de Christ. Mais chez vous le principe n'en est pas le droit, en sorte qu'elle n'a rien à faire avec la religion. En bâtissant là-dessus, vous bâtissez donc encore sur le sable.

                      Faites-vous un pas de plus, et à cette innocence ajoutez-vous l'usage des moyens de grâce ordonnés de Dieu ? Participez-vous, en toute occasion, à la Cène du Seigneur ? Priez-vous en public et en particulier ? Jeûnez-vous souvent ? Écoutez-vous, méditez-vous, sondez-vous la sainte Parole ? Ces choses pareillement, étaient, de tout temps, votre devoir. Mais ces choses ne sont encore rien à elles seules. Elles ne sont rien sans « les choses les plus importantes de la loi » que vous oubliez ou dont au moins vous n'avez aucune expérience : « la justice, la miséricorde et la fidélité » l'amour de Dieu, la sainteté de cœur, le ciel commencé dans l'âme. Vous bâtissez donc encore sur le sable.

                     Je vais plus loin : êtes-vous zélé pour les bonnes œuvres ? Faites-vous, selon votre pouvoir, du bien à tous les hommes ? — donnant du pain aux affamés, et des vêtements à ceux qui sont nus, « visitant les orphelins et les veuves dans leurs afflictions ? » Visitez-vous les malades et consolez-vous les prisonniers ? Recueillez-vous les étrangers ? Montez encore plus haut, ami. Prophétisez-vous au nom de Christ ? Prêchez-vous la vérité telle qu'elle est en Jésus ? et votre parole, accompagnée de son Esprit, est-elle puissante à salut et amène-t-elle les pécheurs « des ténèbres à la lumière » et « de la puissance de Satan à Dieu ? Alors, allez et appliquez-vous ce que vous avez si souvent enseigné : « Vous êtes sauvés par grâce, par la foi » — « non par des œuvres de justice que vous ayez faites, mais par sa grande miséricorde ». Apprends à t'appuyer uniquement sur la croix de Christ, dépouillé de tout et comptant tout ce que tu as pu faire pour de l'ordure. Invoque-Le, ni plus ni moins, comme le brigand crucifié, comme la prostituée qui avait sept démons ! Autrement tu bâtis encore sur le sable, et après avoir sauvé les autres, tu perdras ta propre âme.

                    Seigneur ! si je crois, augmente-moi la foi ! sinon, donne-moi la foi, ne serait-ce que comme un grain de semence de moutarde ! Mais « à quoi servirait-il à un homme de dire : J'ai la foi, s'il n'avait pas les œuvres ? Cette foi le pourrait-elle sauver ? » Oh non ! Cette foi qui est sans les œuvres, qui ne produit pas au dedans et au dehors la sainteté, qui n'a point pour effet d'imprimer l'image entière de Dieu, sur le cœur, et de nous rendre purs comme Dieu est pur, cette foi qui n'opère pas, dans son ensemble, la religion décrite dans ces trois chapitres, cette foi n'est pas la foi de l'Evangile, la foi chrétienne, la foi qui conduit à la gloire Oh ! par-dessus tous les autres piéges du diable, gardez-vous de vous reposer sur une foi sans sainteté et sans efficace ! Si c'est là votre appui, vous êtes à jamais perdu ; vous bâtissez encore votre maison sur le sable. La pluie venant à tomber et les torrents à se déborder, elle tombera infailliblement et la ruine en sera grande !

                     Toi donc, maintenant, bâtis sur le rocher ! Par la grâce de Dieu, connais-toi toi-même. Vois et sens que tu as été « formé dans l'iniquité et que ta mère t'a conçu dans le péché » et que tu n'as fait toi-même qu'accumuler péché sur péché dès l'âge où tu as pu « discerner le bien du mal ». Confesse que tu as encouru la peine d'une mort éternelle, et renonce à tout espoir de jamais te sauver toi-même. Que ton seul espoir soit d'être lavé, purifié, par le sang, par l'Esprit, de Celui qui « a lui-même porté tes péchés en son corps sur le bois ». Et si tu peux dire : « Je sais qu'il a lui-même ôté mes péchés », abaisse-toi d'autant plus devant lui, dans le sentiment constant que tu dépends de lui pour toute bonne pensée, toute bonne parole, toute bonne œuvre, et que tu es entièrement incapable de faire aucun bien, à moins qu'il ne t'arrose de moment en moment.

                       Toi donc, pleure sur tes péchés et mène deuil devant Dieu, jusqu'à ce qu'il change en joie ta tristesse. Mais alors même « pleure avec ceux qui pleurent », et pour ceux qui ne pleurent point encore pour eux-mêmes. Mène deuil sur les péchés et les misères des hommes ; et vois, oui là, devant tes yeux, l'océan de l'éternité, immense, sans fond et sans rivages, qui a déjà englouti des milliers, des millions d'hommes, et dont les gouffres ouverts attendent ceux qui restent. encore ! Vois d'un côté « la maison de Dieu éternelle dans les cieux  » ; de l'autre l'enfer et le gouffre sans couverture, et apprends de là le prix de chacun de ces moments qui paraissent et ne sont déjà plus !

                     Toi donc, au sérieux, ajoute la douceur de la sagesse. Tiens en balance toutes les passions, mais particulièrement la colère, la tristesse et la crainte. Accepte avec calme toute dispensation de Dieu. Apprends à être toujours content de la position où tu te trouves.

                      Sois affable avec les bons, doux envers tous les hommes, mais surtout envers les méchants et les ingrats. Garde-toi non seulement des manifestations extérieures de la colère (comme, par exemple, d'appeler ton frère raca ou fou), mais de toute émotion intérieure contraire à l'amour, lors même qu'elle resterait cachée au fond du cœur. Aie de l'indignation contre le péché, comme portant atteinte à la majesté de Dieu, mais aime toujours le pécheur, comme Jésus qui « regarda avec indignation les Pharisiens, étant indigné de l'endurcissement de leurs cœurs ». Il s'affligeait pour les pécheurs ; il était courroucé contre le péché. De la même manière, mets-toi en colère, « mais ne pèche point ».

                      Toi donc aie faim et soif, rien de la nourriture qui périt, mais de celle qui demeure pour la vie éternelle. Foule à tes pieds le monde et les choses du monde, toutes les richesses, tous les honneurs, les plaisirs du temps présent. Qu'est le monde pour toi ? « Laisse les morts ensevelir leurs morts  » ; mais toi poursuis l'image de Dieu. Et si déjà cette soif bénie est dans ton âme, garde-toi de vouloir l'apaiser avec ce qu'on appelle vulgairement religion ; pauvre et stupide comédie, affaire de forme et de vaine apparence qui laisse le cœur aussi terrestre et aussi sensuel que jamais ! Que rien ne puisse te satisfaire, si ce n'est la force de la piété, si ce n'est une religion qui soit « esprit et vie », par laquelle Dieu demeure en toi et tu demeures en Dieu, si ce n'est d'être dès à présent un habitant de l'éternité, d'entrer « par le sang de l'aspersion » au dedans du voile et d'être « assis dans les lieux célestes avec Jésus-Christ ».

                     Toi donc, puisque « tu peux toutes choses par Christ qui te fortifie », sois miséricordieux comme ton Père céleste est miséricordieux ! « Aime ton prochain comme toi-même  » ; aime amis et ennemis comme ta propre âme, et que ta charité soit magnanime et patiente envers tous les hommes. Qu'elle soit bonne, douce, bienveillante, t'inspirant l'amabilité la plus agréable, les plus tendres et les plus vives affections. Qu'elle se réjouisse de la vérité où elle la trouve, de la vérité « qui est selon la piété ». Sois heureux de tout ce qui avance « la gloire de Dieu, la paix et la bonne volonté parmi les hommes ». Couvre tout de ta charité, ne parlant jamais qu'en bien des morts ou des absents ; crois tout ce qui tend à excuser ou à justifier le prochain, espère tout en sa faveur, et supporte tout, triomphant de toute opposition, car la vraie « charité ne périt jamais » dans le temps ou dans l'éternité.

                      Toi donc, aie « le cœur pur », étant purifié par la foi de toute affection qui n'est pas sainte, « de toute souillure de la chair et de l'esprit », et « achevant ta sanctification dans la crainte de Dieu  » ; étant, par la puissance de la grâce, purifié d'orgueil par une profonde pauvreté d'esprit, de colère et de toute passion haineuse ou turbulente par la douceur et par la miséricorde, de tout désir autre que celui de plaire à Dieu et de le posséder, par la faim et la soif de la justice.Toi donc, aime le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur et de toute ta force !

                     En un mot : que ta religion soit la religion du cœur ! Qu'elle soit enracinée au plus profond de ton âme. Sois petit, bas et vil, au-delà de toute expression à tes propres yeux, et que l'amour de Dieu révélé en Jésus-Christ t'humilie jusque dans la poussière, et te remplisse d'étonnement et d'admiration. Sois sérieux. Que toutes tes pensées, tes paroles et tes actions découlent de la conviction profonde que tu es, ainsi que tous les hommes, sur le bord de l'éternité, prêt à entrer dans la gloire éternelle, ou à tomber dans l'éternelle perdition. Que ton âme soit pleine d'affection, de débonnaireté, de patience, de support envers tous les hommes, et qu'elle ait « soif de Dieu, du Dieu fort et vivant », soupirant après le moment de te « réveiller à sa ressemblance », et d'en être « rassasié ! » Sois l'ami de Dieu et des hommes ; fais et supporte tout dans cet esprit ; « montre » ainsi « ta foi par tes œuvres  » ; fais ainsi « la volonté de ton Père qui est aux cieux  » ; et autant il est vrai que c'est là « marcher avec Dieu » sur la terre, autant il est certain que tu régneras avec lui dans la gloire !



dimanche 19 juin 2016

(12) LE SERMON SUR LA MONTAGNE, DOUZIÈME DISCOURS Matthieu 7:15-20

Numérisation Yves PETRAKIAN Copie autorisée pour diffusion gratuite uniquement Obligation d'indiquer la source http://456-bible.123-bible.com

Sermon 32 :           LE SERMON SUR LA MONTAGNE, DOUZIÈME DISCOURS

Matthieu 7,15-20  (1750)

Gardez-vous des faux prophètes. Ils viennent à vous en vêtements de brebis, mais au dedans ce sont des loups ravisseurs.

Vous les reconnaîtrez à leurs fruits. Cueille-t-on des raisins sur des épines, ou des figues sur des chardons?

Tout bon arbre porte de bons fruits, mais le mauvais arbre porte de mauvais fruits. Un bon arbre ne peut porter de mauvais fruits, ni un mauvais arbre porter de bons fruits.

Tout arbre qui ne porte pas de bons fruits est coupé et jeté au feu. C’est donc à leurs fruits que vous les reconnaîtrez.   (Matthieu 7,15-20)

                    Il est presque impossible d'exprimer ou de concevoir quelle multitude d'âmes ont couru à la perdition pour ne pas vouloir, même en vue du salut, suivre un chemin étroit. Et c'est ce que nous observons encore journellement. Telle est la folie, la démence des hommes, que des milliers d'entre eux continuent à courir dans la voie de l'enfer, par le seul motif que c'est une voie large. Ils y marchent parce que d'autres y marchent. Puisqu'il y en a tant qui périssent, ils veulent grossir le nombre. Telle est sur les pauvres enfants des hommes la surprenante influence de l'exemple ! Elle ne cesse de peupler les régions de la mort et de précipiter d'innombrables multitudes dans la perdition éternelle !

                     Pour avertir les hommes et pour en sauver le plus possible de cette envahissante contagion, Dieu a commandé à ses sentinelles d'élever la voix et de leur montrer le danger où ils sont. C'est pour cela que de siècle en siècle il a envoyé ses serviteurs les prophètes pour indiquer l'étroit sentier et pour exhorter tout homme à ne point se conformer au siècle présent. Mais que sera-ce si les sentinelles mêmes tombent dans le piège qu'elles devraient signaler ? Que sera-ce si les prophètes prophétisent le mensonge et font détourner le peuple du chemin ? S'ils montrent comme chemin de la vie éternelle celui qui conduit en réalité à l'éternelle mort, et s'ils exhortent les gens à marcher, comme ils le font eux-mêmes, dans la voix large et non dans la voie étroite ?

                     Est-ce une chose inouïe ou peu commune ? Hélas, non ! Dieu le sait. Les exemples en sont presque innombrables, et cela dans tous les siècles et chez toute nation. Mais quoi ! les ambassadeurs de Dieu se changer en agents du Diable, ceux qui avaient charge d'enseigner aux hommes le chemin du ciel leur enseigner celui de l'enfer, n'est-ce pas terrible ? Ils sont comme les sauterelles d'Egypte « qui broutèrent tout ce que la grêle avait laissé de reste ». Ils dévorent le petit reste qui avait échappé au mauvais exemple. Est-ce donc sans motif que notre sage et miséricordieux Maître nous prévient si solennellement contre eux ? « Gardez-vous, nous dit-il, des faux prophètes qui viennent à vous en habits de brebis, mais qui, au dedans sont des loups ravissants ».

                     Grave et important avertissement ! Pour qu'il pénètre avec plus d'efficace dans nos cœurs, recherchons 1° qui sont ces faux prophètes ; 2° de quelle apparence ils se revêtent ; et 3° comment, en dépit de cette belle apparence, nous pouvons connaître ce qu'ils sont réellement.

I

                     Recherchons d'abord qui sont ces faux prophètes. C'est ce qu'il faut faire d'autant plus soigneusement qu'ils ont eux-mêmes plus travaillé à tordre cette parole, à leur propre perdition et à celle d'autrui. Je vais donc pour couper court à toute dispute, sans me servir, comme quelques-uns, d'exclamations vagues et emphatiques, pour jeter de la poudre aux yeux et séduire les cœurs des simples, je vais, dis-je, présenter de ces vérités simples et sévères que doit reconnaître quiconque a un reste d'intelligence et de modestie ; des vérités d'ailleurs intimement liées à tout ce qui précède ; car trop souvent on a interprété ces paroles sans égard au contexte et comme si elles n'avaient aucune relation au discours dont elles forment la conclusion.

                     Par prophètes il faut entendre ici (comme dans plusieurs autres passages des Écritures et surtout du Nouveau Testament), non pas ceux qui prédisent l'avenir, mais ceux qui parlent au nom de Dieu, ceux qui font profession d'être envoyés de Dieu pour enseigner aux autres le chemin du ciel. — Les faux prophètes sont donc ceux qui enseignent un faux chemin, un chemin qui ne conduit point au ciel, ou tout au moins ceux qui négligent d'enseigner le véritable.

                     Tout chemin large est infailliblement un faux chemin. De là cette règle simple et certaine : Quiconque enseigne aux hommes un chemin large, un chemin de multitude, est un faux prophète.

                     Réciproquement, le vrai chemin du ciel est un chemin étroit. De là cette autre règle non moins certaine : Quiconque n'enseigne pas aux hommes un chemin étroit, un chemin à part du grand nombre, est un faux prophète.

                  Et pour préciser encore plus, le seul vrai chemin est indiqué dans le discours précédent du Seigneur. Tous ceux qui n'enseignent pas aux hommes à marcher dans ce chemin, sont de faux prophètes. Or le chemin indiqué dans ce qui précède est l'humilité, la tristesse à cause du péché, la douceur, les saints désirs, l'amour de Dieu et du prochain, la pratique du bien et la patience dans la persécution endurée pour l'amour de Christ. Ceux donc qui nous enseignent comme chemin du ciel un autre chemin quelconque, sont de faux prophètes.

                     Peu importe le nom qu'ils donnent à cette autre voie. Qu'ils l'appellent la foi — ou les bonnes œuvres, — ou la foi et les œuvres, — ou la repentance, — la foi et la nouvelle obéissance ; — tous ces noms sont excellents ; mais si, à l'abri de ces noms ou de tout autre, ils enseignent aux hommes un chemin différent de celui que Jésus nous trace dans ce discours, ils ne sont réellement que de faux prophètes.

                    Combien plus cette sentence retombe-t-elle sur ceux qui médisent du vrai chemin et surtout sur ceux qui enseignent un chemin directement contraire : le chemin de l'orgueil, de la légèreté, des passions, des désirs mondains ; qui enseignent à aimer le monde plutôt que Dieu, à être malveillant pour le prochain, à négliger les bonnes œuvres et à ne supporter ni maux, ni persécutions pour la cause de la justice !

                      Mais, dites-vous, qui a jamais enseigné ou qui enseigne que ce soit là le chemin du ciel ? — Je réponds : Ce sont des milliers et des dix milliers de gens sages et honorables, ce sont même, quelque nom qu'ils prennent, tous ceux qui laissent vivre dans l'espérance d'aller au ciel les orgueilleux, les gens frivoles, colères, amateurs du monde, les hommes de plaisir, les injustes ou les  malveillants, les êtres inutiles et insouciants, ceux qui aiment leurs aises, ou ceux qui ne veulent souffrir aucun opprobre pour la cause de la justice. Ils ne sont rien moins que de faux prophètes, et, dans toute la force du terme, les premiers-nés de Satan, les fils d'Apollyon, « le destructeur  » ; bien plus coupables que des meurtriers ordinaires, car ils sont les meurtriers des âmes. Sans cesse ils travaillent à peupler les régions de l'obscurité, et quand, à leur tour, ils descendront vers les pauvres âmes qu'ils ont fait périr, « l'enfer s'émouvra pour aller au-devant d'eux à leur venue ».

II

                    Mais se présentent-ils à vous maintenant sous leur vraie forme ? Nullement. S'il en était ainsi, ils ne pourraient vous nuire. Vous prendriez l'alarme et vous vous hâteriez de sauver votre vie. Ils se revêtent donc d'une apparence toute contraire (c'est le second point à considérer), « ils viennent à vous en habit de brebis, quoiqu'ils soient, au dedans, des loups ravissants ».

                     « Ils viennent à vous, 1° en habit de brebis », c'est-à-dire sous une apparence innocente. Ils viennent de l'air le plus inoffensif, le plus doux, sans aucune marque, ni signe d'inimitié. Qui pourrait croire que ces êtres paisibles voudraient nuire à âme qui vive ? Peut-être leur reprocheriez-vous quelque tiédeur, quelque défaut de zèle pour le bien. Néanmoins vous ne voyez pas de raison de les soupçonner d'en vouloir à qui que ce soit. Mais il y a plus :

                     Ils viennent à vous, 2° comme très capables de vous faire du bien. C'est, en effet, à cela qu'ils sont particulièrement appelés. Ils sont mis à part dans ce but. Ils ont charge spéciale de veiller sur vos âmes et de vous former pour la vie éternelle. Ils n'ont pas d'autre affaire que « d'aller de lieu en lieu, faisant du bien et guérissant ceux qui sont opprimés par le diable  » ; et c'est sous cet aspect que vous êtes accoutumés à les considérer « comme des messagers de Dieu » qui vous apportent de sa part la bénédiction.

                    Ils viennent, en troisième lieu, avec une apparence de religion. Ne font-ils pas tout par conscience ? C'est par zèle pour Dieu, à les en croire, qu'ils font Dieu menteur ! C'est par zèle désintéressé pour la religion qu'ils voudraient la détruire jusqu'aux racines. S'ils parlent, ce n'est que par amour pour la vérité et pour la garantir d'outrages, c'est peut-être même par amour pour l'Eglise et par le désir de la défendre contre ses ennemis.

                    Surtout ils viennent à vous sous une apparence d'amour. N'est-ce pas uniquement pour votre bien qu'ils se donnent tant de peine ? Ils ne se tourmenteraient pas pour vous s'ils n'avaient de la tendresse pour vous. Ils feront de grandes protestations de leur bon vouloir, du souci que leur donne le danger où vous êtes, de leur vif désir de vous préserver de tomber dans l'erreur et d'être embarrassés dans des doctrines nouvelles et funestes. Ils auraient vraiment du chagrin à voir des gens sages comme vous jetés dans les extrêmes, embrouillés d'idées étranges et inintelligibles, ou séduits par les illusions de l'enthousiasme. C'est dans ce sentiment qu'ils vous avertissent de vous tenir toujours dans un juste milieu et de ne point être « justes plus qu'il ne faut », de peur que vous ne vous perdiez.

III

                     Mais comment pourrons-nous, sous ces belles apparences, reconnaître leur vrai caractère ? Notre Sauveur, sachant combien il est nécessaire pour tous de discerner les faux prophètes, et combien la plupart des hommes sont incapables de suivre un raisonnement compliqué, nous donne ici une règle courte et facile, accessible aux intelligences les plus communes et d'une application aisée et constante : « Vous les connaîtrez à leurs fruits ».

                      Cette règle est d'une application facile et constante. Voulez-vous savoir si tel homme qui parle au nom de Dieu est ou non un vrai prophète ? Observez, vous le pouvez aisément, quels sont les fruits de sa doctrine, d'abord pour lui-même. Quel effet a-t-elle sur sa vie ? Est-il saint et irréprochable en toutes choses ? Quel effet sur son cœur : voit-on, par l'ensemble de sa conduite, qu'il soit dans des dispositions saintes et célestes ? qu'il ait en lui les mêmes sentiments que Jésus-Christ a eus ? qu'il soit doux, humble, patient, ami de Dieu et des hommes, et zélé pour les bonnes œuvres ?

                       Il vous sera facile, en second lieu, d'observer quels sont les fruits de sa doctrine pour ceux qui l'écoutent ; pour plusieurs, du moins ; non, il est vrai, pour tous ; car les apôtres eux-mêmes ne convertirent pas tous leurs auditeurs. Leurs disciples ont-ils les sentiments de Jésus-Christ, marchent-ils comme il a marché lui-même ? Est-ce en entendant cet homme qu'ils sont devenus tels ? Avant de l'entendre étaient-ils intérieurement et extérieurement adonnés au mal ? S'il en est ainsi, c'est une preuve manifeste que cet homme est un vrai prophète, un docteur envoyé de Dieu. Mais s'il n'en est point ainsi, s'il n'apprend réellement l'amour et l'obéissance de Dieu ni aux autres, ni à lui-même, c'est une preuve manifeste que c'est un faux prophète, et que Dieu ne l'a point envoyé.

                    « Cette parole est dure, qui peut l'ouïr ! » Le Seigneur sachant cela daigne la confirmer par plusieurs arguments clairs et convaincants. « Cueille-t-on, dit-il, des raisins sur des épines, ou des figues sur des chardons ? » (Verset 16.) Pouvez-vous attendre que ces hommes méchants portent de bons fruits ? Autant auriez-vous le droit d'espérer que les épines produisent des raisins ou les chardons des figues ! « Tout bon arbre porte de bons fruits ». (Verset 17.) Tout vrai prophète, tout docteur que j'ai envoyé, porte le bon fruit de la sainteté. Mais tout faux prophète, tout docteur que je n'ai point envoyé, ne produit que péché et méchanceté. « Un bon arbre ne peut porter de mauvais fruits, ni un mauvais arbre porter de bons fruits ». Un vrai prophète, un docteur envoyé de Dieu produit de bons fruits, non pas quelquefois seulement, mais toujours ; ce n'est pas un accident, mais comme une nécessité. De même un faux prophète, un docteur que Dieu n'a pas envoyé, ne produit pas de mauvais fruits accidentellement ou quelquefois seulement, mais toujours et nécessairement. « Tout arbre qui ne produit pas de bons fruits est coupé et jeté au feu ». (Verset 19.) Tel sera infailliblement le sort de ces prophètes qui ne portent pas de bons fruits, qui ne sauvent pas les âmes du péché, qui n'amènent pas les pécheurs à la repentance. Qu'ainsi donc cette règle demeure : « Vous les connaîtrez à leurs fruits ». (Verset 20.) Ceux qui, de fait, amènent les orgueilleux, les amateurs du monde, les hommes colères et sans miséricorde, à la douceur, à l'humilité, à l'amour de Dieu et des hommes, ceux-là sont de vrais prophètes ; Dieu les a envoyés, c'est pourquoi il confirme leur parole. Mais, par contre, ceux dont les auditeurs, injustes qu'ils étaient, demeurent injustes, ou du moins sans une « justice qui surpasse celle des Scribes et des Pharisiens », ceux-là sont de faux prophètes ; Dieu ne les a pas envoyés, c'est pourquoi leurs paroles tombent à terre, et à moins d'un miracle de la grâce, ils tomberont, avec ceux qui les écoutent, dans l'abîme !

                        Oh ! gardez-vous de ces faux prophètes ! car s'ils viennent en habit de brebis, ils n'en sont pas moins au dedans « des loups ravissants  » ; ils ne font  que détruire et dévorer le troupeau, ils le mettent en pièces, s'il n'y a personne pour le délivrer de leurs mains. Ils ne veulent ni ne peuvent vous conduire au chemin des cieux. Comment le pourraient-ils s'ils ne le connaissent pas eux-mêmes ? Oh ! prenez garde qu'ils ne vous détournent du bon chemin, et ne vous fassent perdre le fruit de votre travail !

                     Mais, si leurs paroles sont si dangereuses, demandera quelqu'un, dois-je en aucune manière les écouter ? Grave question qui mérite l'examen le plus sérieux et qui ne doit être résolue qu'après la plus calme et la plus mûre délibération. Pendant bien des années, j'ai redouté, même d'en parler, étant incapable de rien décider ni pour ni contre, ou de me prononcer en aucun sens. Bien des raisons plausibles me porteraient encore à dire : Ne les écoutez point ! Et pourtant ce que le Seigneur déclare touchant les faux prophètes de son temps, semble nous diriger en sens contraire. « Alors Jésus parlant au peuple et à ses disciples, leur disait : Les Scribes et les Pharisiens sont assis dans la chaire de Moïse », — sont les docteurs ordinaires, les docteurs établis de votre Eglise ; « observez donc et faites tout ce qu'ils vous diront d'observer ; mais ne faites point comme ils font, car ils disent et ne font pas (Mat 23 : 1,3)  ». Or, que ce fussent de faux prophètes dans toute la force du terme, c'est ce que le Sauveur a montré par tout son ministère, comme il le montre, au reste, par ces paroles mêmes : « Ils disent et ne font pas ». Il était donc impossible que ses disciples ne les « connussent pas à leurs fruits », puisque ces fruits étaient évidents pour tous les hommes. C'est pourquoi il ne cesse de les prémunir contre ces faux prophètes. Et néanmoins il ne défend pas à ses disciples de les écouter, il le leur commande plutôt en disant : « Observez et faites tout ce qu'ils vous diront d'observer  » ; car, à moins de les écouter, ils ne pouvaient connaître, combien moins garder ce qu'ils ordonnaient de garder. Ici donc le Seigneur lui-même donne à ses apôtres et à toute la multitude une direction claire d'écouter, dans certaines circonstances, même de faux prophètes manifestement connus et reconnus pour tels.

                       Mais, dira-t-on peut-être, il voulait seulement qu'on les écoutât lorsqu'ils lisaient l’Écriture dans les synagogues. Je réponds : Lorsqu'ils lisaient ainsi les Ecritures, ils avaient coutume d'en faire aussi l'explication. Et rien ici ne dit que les disciples dussent écouter la lecture et non l'explication. Mais plutôt les termes mêmes : « tout ce qu'ils vous diront d'observer », excluent absolument un tel partage.

                         Il y a plus. A de tels faux prophètes, bien manifestés comme tels, est souvent confiée (oh ! douleur ! car il ne devrait sûrement pas en être ainsi) l'administration des sacrements. Défendre aux hommes de les écouter, ce serait donc, par le fait, les priver des ordonnances de Dieu. Mais nous n'avons pas le droit de le faire. Car l'efficacité de l'ordonnance ne dépend pas de la pureté de celui qui l'administre, mais uniquement de la fidélité de Dieu, qui veut bien se faire trouver par, nous, et qui effectivement vient à nous dans la voie qu'il a lui-même établie. Pour ce motif encore je me fais scrupule de dire, même pour les faux prophètes : Ne les écoutez point. Même par ces hommes sur qui repose la malédiction, Dieu peut et veut vous bénir. Car le pain qu'ils rompent, nous le savons par expérience, est pour nous « la communion du corps de Christ », et la coupe que Dieu bénit par leurs mains profanes, est pour nous « la communion du sang de Christ ».

                         Voici donc ce que je puis dire : Dans chaque cas particulier, consultez Dieu par d'humbles et ferventes prières, puis agissez pour le mieux, selon vos lumières ; faites ce que vous croirez convenir le mieux à votre avantage spirituel. Gardez-vous bien de juger personne témérairement, de considérer légèrement qui que ce soit comme faux prophète, et même, si les preuves sont convaincantes, n'ayez ni colère ni mépris dans vos cœurs. Prenez alors, dans la crainte et sous le regard de Dieu, une détermination pour vous-même,. Je vous dirai seulement : Ne les écoutez pas si vous éprouvez que cela nuise à votre âme. Retirez-vous en paix vers ceux qui vous font du bien. Si vous trouvez, au contraire, que votre âme n'en souffre pas, continuez à les écoutez. Seulement « prenez garde à ce que vous écoutez ! » Gardez-vous d'eux et de leur doctrine. Écoutez « avec crainte et tremblement », de peur que vous ne soyez séduits et livrés, comme eux, à l'efficace de l'erreur. Ils mêlent sans cesse le mensonge et la vérité ; qu'il vous est difficile de ne pas les recevoir ensemble ! Ecoutez, mais en adressant de ferventes et continuelles prières à Celui qui seul enseigne la sagesse. Et tout ce que vous entendrez, ayez soin de le rapporter « à la loi et au témoignage ». Éprouvez avant de recevoir, pesez toutes choses « à la balance du sanctuaire  » ; ne croyez rien qui ne soit clairement confirmé par les passages des saints livres. Rejetez absolument tout ce qui en diffère, tout ce qui n'y trouve pas sa confirmation. Repoussez surtout, avec horreur, toute voie de salut étrangère ou inférieure à celle que notre Seigneur indique lui-même dans le discours qui précède.

                       Je ne puis terminer, sans adresser aussi quelques paroles simples et claires à ceux dont nous nous occupons. O vous, faux prophètes ! O vous, ossements secs ! Écoutez, une fois, la Parole du Seigneur ! Jusques à quand mentirez-vous au nom de Dieu, disant : « Ainsi dit l'Éternel », quand l'Éternel ne parle point par vous ? jusques à quand pervertirez-vous les voies de Dieu qui sont droites, faisant des ténèbres la lumière et de la lumière les ténèbres ? Jusques à quand donnerez-vous le chemin de la mort pour le chemin de la vie ? Jusques à quand livrerez-vous à Satan les âmes que vous faites profession de conduire à Dieu ?

                     « Malheur à vous ! aveugles, conducteurs d'aveugles ! » car vous fermez aux hommes le royaume des cieux : vous n'y entrez point vous-mêmes et vous ne laissez point entrer ceux qui y entrent. S'efforcent-ils d'entrer par la porte étroite ? vous les rappelez dans la voie large. Ont-ils fait un premier pas dans les voies de Dieu ? vous leur donnez l'avertissement satanique de ne pas aller trop loin. Commencent-ils à avoir faim et soif de la justice ? vous leur recommandez de n'être pas justes plus qu'il ne faut. C'est ainsi que sur le seuil même vous les faites broncher, que dis-je ? tomber pour ne plus se relever ! Oh ! pourquoi agissez vous de la sorte ? Quel profit avez-vous à leur sang s'ils descendent dans la fosse ? Triste profit pour vous ! car « ils périront dans leur iniquité, mais Dieu redemandera leur sang de votre main ! »

                       Où sont vos yeux ? Où est votre intelligence ? A force de séduire, vous êtes-vous séduits vous-mêmes ? Qui vous demande d'enseigner un chemin que vous n'avez jamais connu ? Êtes-vous tellement livrés à l'efficace de l'erreur que vous croyiez vous-mêmes le mensonge que vous enseignez ? et pouvez-vous penser que Dieu vous envoie, que vous êtes ses messagers ? Ah ! si le Seigneur vous avait envoyés, l'œuvre du Seigneur prospèrerait entre vos mains. Aussi vrai que Dieu est vivant, si vous étiez ses messagers, il confirmerait votre parole. Mais l'œuvre du Seigneur ne prospère point entre vos mains, car vous n'amenez point les pécheurs à la repentance. Le Seigneur ne confirme point votre parole, car vous ne sauvez point les âmes de la mort.

                       Comment pouvez-vous éluder la force des paroles du Seigneur, qui sont si complètes, si fortes, si expresses ? Comment fermez-vous les yeux à l'évidence pour ne pas vous reconnaître à vos fruits, fruits mauvais d'arbres mauvais ? Et s'ils sont mauvais, qu'y a-t-il d'étonnant ? Cueille-t-on des raisins sur des épines, ou des figues sur des chardons ? Prenez à cœur ces paroles qui s'adressent à vous, ô arbres stériles ! Pourquoi occupez-vous inutilement la terre ? « Tout bon arbre porte de bons fruits ». Ne voyez-vous pas qu'il n'y a point d'exception ? Reconnaissez-le donc, vous n'êtes pas de bons arbres puisque vous ne portez pas de bons fruits. « Mais tout mauvais arbre porte de mauvais fruits », et c'est ce que vous avez fait depuis le commencement. En parlant au nom de Dieu, vous n'avez fait qu'affermir vos auditeurs dans les dispositions ou même dans les œuvres du diable. Oh ! recevez instruction de Celui au nom de qui vous parlez, avant que s'accomplisse cette sentence qu'il a prononcée : « Tout arbre qui ne porte pas de bons fruits sera coupé et jeté au feu ! »

                       Frères, n'endurcissez pas vos cœurs ! Trop longtemps vous avez fermé les yeux pour ne pas voir la lumière. Ouvrez-les, maintenant, avant qu'il soit trop tard, avant que vous soyez jetés « dans les ténèbres du dehors ! » Qu'aucune considération temporelle ne pèse sur vous, car l'éternité est en jeu. Vous avez couru avant d'être envoyés. Oh ! n'allez pas plus loin ! Ne persistez pas à vous perdre en perdant ceux qui vous écoutent ! Vous n'avez pas de fruits de votre travail, et pourquoi ? Par cette raison même que le Seigneur n'est point avec vous. Mais iriez-vous à cette guerre à vos propres dépens ? Cela ne se peut. Humiliez-vous donc devant Lui. Crie à lui, le front dans la poussière, pour qu'il vivifie premièrement ton âme, pour qu'il te donne à toi-même la foi qui opère par l'amour, la foi qui est humble et douce, pure et compatissante, zélée pour les bonnes œuvres, et qui se réjouit dans les tribulations, dans les opprobres, dans les détresses, dans les persécutions pour la justice ! C'est ainsi que l'Esprit de gloire, l'Esprit de Christ reposera sur toi, et qu'on pourra connaître que Dieu t'a envoyé. C'est ainsi que tu feras « l'œuvre d'un évangéliste » et que tu « rempliras ton ministère ». C'est ainsi que la Parole de Dieu sera dans ta bouche comme un marteau qui brise la pierre ! »  Alors tu seras manifesté comme prophète de l’Éternel par les fruits, savoir : par « les enfants que le Seigneur t'aura donnés ». Et après en avoir « amené plusieurs à la justice, tu luiras comme les étoiles, à toujours et à perpétuité !