dimanche 29 avril 2012

La Vraie Grâce de Dieu Par John Nelson Darby


"Je vous ai écrit... attestant que cette grâce dans laquelle vous êtes est la vraie grâce de Dieu."  1 Pierre 5:12
 
    Dieu nous est révélé comme le "Dieu de toute grâce"; et la position qui nous est faite est celle où nous "goûtons que le Seigneur est bon" (ou: plein de grâce). Combien il nous est souvent difficile de croire que le Seigneur est bon! Le sentiment naturel de nos cœurs est celui-ci: "Je sais que tu es un homme sévère"; il y a en chacun de nous une incompréhension absolue de la grâce de Dieu.

    Quelques-uns pensent que le mot grâce implique que Dieu passe par-dessus le péché; mais tel n'est pas le cas; la grâce suppose que le péché est une chose si abominable que Dieu ne peut pas le supporter: s'il était au pouvoir de l'homme, après avoir fait le mal, de redresser ses voies et de corriger sa propre nature de manière à pouvoir se tenir devant Dieu, il n'y aurait nul besoin de grâce. Le fait même que le Seigneur agit en grâce démontre que le péché est une chose si affreuse, que l'état de l'homme est absolument ruiné et sans espoir puisqu'il est un pécheur, et que rien sinon la libre grâce ne pourra répondre à son besoin. Nous devons apprendre ce que Dieu est pour nous, et cela non au moyen de nos propres pensées, mais par la révélation qu'Il nous a donnée de Lui-même, c'est-à-dire "le Dieu de toute grâce".

    Du moment où je comprends que je suis un homme pécheur, et que le Seigneur est venu à moi parce qu'Il connaissait l'étendue et l'horreur de mon péché, je comprends aussi ce que c'est que la grâce. La foi me montre que Dieu est plus grand que mon péché, et non pas que mon péché est plus grand que Dieu... Le Seigneur que j'ai connu laissant Sa vie pour moi, est le même Seigneur avec lequel j'ai à faire tous les jours de ma vie, et toute Sa manière d'agir envers moi repose sur les mêmes principes de grâce.

     Le grand secret pour croître, c'est de regarder au Seigneur comme au Dieu de grâce. Combien il est précieux et encourageant de savoir qu'à tout moment Jésus éprouve à mon égard et exerce envers moi le même amour que lorsqu'Il est mort pour moi sur la croix.

    C'est là une vérité que nous devrions réaliser dans toutes les circonstances les plus ordinaires de la vie. Supposez, par exemple, que j'aie un défaut de caractère qui me paraisse difficile à corriger; si je m'adresse à Jésus comme à mon Ami, Il me fournit la puissance dont j'ai besoin pour le faire. La foi devrait être ainsi constamment en exercice contre les tentations et non pas simplement mes propres efforts qui ne se seront jamais suffisants. La source de la véritable force, c'est le sentiment que le Seigneur est plein de grâce. L'homme naturel ne veut jamais reconnaître Christ comme la seule source de force et de bénédictions. Si ma communion avec le Seigneur est interrompue, mon cœur naturel dira toujours: "Il faut que je corrige ce qui a causé cet état, avant de pouvoir venir à Christ." Mais Il est plein de grâce; et sachant cela, la seule chose que nous ayons à faire, c'est de retourner à Lui, aussitôt, tels que nous sommes, puis alors de nous humilier profondément devant Lui. Ce n'est qu'en Lui que nous trouverons et de Lui que nous recevrons ce qui peut restaurer nos âmes. L'humilité en Sa présence est la seule véritable humilité. Si dans Sa présence nous reconnaissons être exactement ce que nous sommes, nous découvrons qu'Il ne manifeste à notre égard que de la grâce et rien d'autre …
    C'est Jésus qui donne un repos durable à nos âmes, ce n'est pas notre opinion personnelle sur nous-mêmes. La foi ne considère jamais ce qui est en nous-mêmes comme le fondement du repos; elle reçoit, aime et craint la révélation de Dieu et les pensées de Dieu à l'égard de Jésus en qui se trouve Son repos. Si Jésus a du prix pour nos âmes, si nos yeux et nos cœurs sont occupés de Lui, la vanité et le péché qui nous entourent n'auront pas de prise sur nous; et ce sera aussi là notre force contre le péché et la corruption de nos propres cœurs. Tout ce que je vois en moi en dehors de Lui est péché; mais ce qui me rendra humble, ce n'est pas de penser à mes propres péchés, à ma mauvaise nature, et d'en être occupé, c'est au contraire de penser au Seigneur Jésus, de méditer sur l'excellence de Sa Personne. Il est bon d'en avoir fini avec nous-mêmes et de n'avoir à faire qu'à Jésus. Nous avons le droit de nous oublier nous-mêmes, nous avons le droit d'oublier nos péchés, nous avons le droit de tout oublier sauf Jésus.
    Rien n'est plus difficile pour nos cœurs que de demeurer dans le sentiment de la grâce, de rester pratiquement conscients que nous ne sommes pas sous la loi, mais sous la grâce; c'est par la grâce que le cœur est "affermi", mais rien n'est plus difficile pour nous que de comprendre réellement la plénitude de la grâce, cette "grâce de Dieu dans laquelle nous sommes", et de marcher dans la puissance qui en découle.
    Ce n'est que dans la présence de Dieu que nous pouvons la connaître et c'est notre privilège de nous trouver . Dès que nous nous éloignons de la présence de Dieu, nos propres pensées sont toujours à l’œuvre au-dedans de nous, et nos propres pensées ne peuvent jamais atteindre les pensées de Dieu à notre égard, la "grâce de Dieu."

    Si je pensais avoir le moindre droit à quelque chose, ce ne serait pas la pure et libre grâce, cela ne pourrait être la "grâce de Dieu"... Ce n'est que dans la communion avec Lui que nous sommes capables de mesurer toutes choses en rapport avec Sa grâce... Lorsque nous demeurons dans le sentiment de la présence de Dieu, il est impossible que quoi que ce soit nous trouble -- fût-ce même l'état de l'Église -- car nous comptons sur Dieu, et toutes choses se trouvent alors pour nous dans une sphère où s'exerce Sa grâce.
    La vraie source de notre force comme chrétiens c'est d'avoir des pensées très simples au sujet de la grâce; et le secret de toute sainteté, paix et tranquillité d'esprit, c'est de demeurer dans le sentiment de la grâce, en la présence de Dieu.

    La "grâce de Dieu" est si illimitée, si complète, si parfaite, que si nous nous éloignons pour un moment de la présence de Dieu, nous ne pouvons en avoir une juste appréciation, nous n'avons pas de force pour la saisir; et si nous cherchons à la connaître hors de Sa présence, nous ne pouvons que la changer en licence. Demandons-nous simplement ce que c'est que la grâce. Elle n'a ni bornes, ni limites. Quels que nous puissions être (et nous ne pouvons être pires que nous sommes) en dépit de tout, Dieu est AMOUR à notre égard. Ni notre joie, ni notre paix ne dépendent de ce que nous sommes pour Dieu, mais de ce qu'Il est pour nous, et c'est la grâce.

    La grâce est la précieuse révélation que, par le moyen de Jésus, tout le péché et tout le mal qui est en nous a été ôté. Un seul péché est plus affreux aux yeux de Dieu qu'un millier de péchés ne le sont à nos yeux; et cependant, malgré une connaissance parfaite de ce que nous sommes, tout ce que Dieu se plaît à être à notre égard, c'est AMOUR.
    Au chapitre 7 de l'épître aux Romains, nous est décrit l'état d'une âme vivifiée, mais dont tous les raisonnements se concentrent en elle-même... Elle ne connaît pas la grâce, le simple fait que, quel que soit son état, DIEU EST AMOUR, et rien qu'amour à notre égard. Au lieu de regarder à Dieu, il n'est question que de "moi", "moi", "moi". La foi regarde à Dieu, tel qu'Il s'est révélé Lui-même en grâce. Est-ce moi, est-ce mon état qui est l'objet de la foi? Non, la foi ne prend jamais pour objet ce qu'il y a dans mon cœur, mais la révélation que Dieu fait de Lui-même en grâce.

    La grâce se rapporte à ce que Dieu est et non à ce que nous sommes, excepté en ce que l'étendue de nos péchés ne fait que magnifier l'immensité de la "grâce de Dieu". Nous devons aussi nous rappeler que la grâce a pour objet et pour effet indispensable d'amener nos âmes dans la communion avec Dieu, de nous sanctifier en nous apprenant à connaître Dieu et à L'aimer; la connaissance de la grâce est donc la véritable source de la sanctification.

    Le triomphe de la grâce apparaît en ceci: c'est que lorsque l'inimitié de l'homme avait rejeté Jésus de la terre, l'amour de Dieu introduisit le salut par cet acte même. Il vint expier le péché de ceux qui L'avaient rejeté. En regard du développement le plus complet du péché de l'homme, la foi voit le déploiement le plus complet de la grâce de Dieu. Si j'ai le plus léger doute, la moindre hésitation au sujet de l'amour de Dieu, je me suis éloigné de la grâce. Je dirai alors: "Je suis malheureux parce que je ne suis pas ce que je voudrais être": là n'est pas la question. La vraie question est celle-ci: Dieu est-Il ce que nous voudrions qu'Il soit, Jésus est-Il tout ce que nous pouvons désirer? Si la conscience de ce que nous sommes, de ce que nous trouvons en nous-mêmes, a un autre résultat que d'accroître notre adoration pour ce que Dieu est, même en nous humiliant, nous sommes hors du terrain de la pure grâce... Y a-t-il du mécontentement et de la méfiance dans votre esprit ? Voyez si la raison n'en était pas que vous dites encore : "moi", "moi", et que vous perdez de vue la grâce de Dieu.

    Il vaut mieux être occupé de ce que Dieu est, que de ce que nous sommes. Si nous regardons à nous-mêmes, c'est une preuve d'orgueil; c'est que nous n'avons pas réellement conscience que nous ne sommes bons à rien. Jusqu'à ce que nous ayons compris cela, nous ne pouvons détourner tout à fait nos regards de nous-mêmes et les porter sur Dieu. En regardant à Christ, c'est notre privilège de nous oublier nous-mêmes. La vraie humilité ne consiste pas tellement à penser du mal de nous-mêmes qu'à n'y pas penser du tout. Je suis trop mauvais pour mériter qu'on pense à moi. Ce dont j'ai besoin, c'est de m'oublier moi-même et de regarder à Dieu qui est digne de toutes mes pensées. Le résultat en sera nécessairement de nous rendre humbles à l'égard de nous-mêmes.

    Bien-aimés, si nous pouvons dire comme en Rom. 7 : "Je sais qu'en moi, c'est-à-dire en ma chair, il n'habite point de bien", cela suffit en ce qui nous concerne nous-mêmes; dirigeons alors nos pensées vers Celui qui a eu à notre égard "des pensée de paix et non de mal", longtemps avant que nous ayons pensé quoi que ce soit de nous-mêmes. Considérons Ses pensées de grâce à notre égard, et retenons cette parole de la foi: "Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous?"

QUELQUES PENSEES SUR LE PSAUME 50 ET L'ENSEIGNEMENT DU SEIGNEUR

7  Écoute, mon peuple ! et je parlerai ; Israël ! et je t’avertirai. Je suis Dieu, ton Dieu.
8  Ce n’est pas pour tes sacrifices que je te fais des reproches ; Tes holocaustes sont constamment devant moi.
9  Je ne prendrai pas de taureau dans ta maison, Ni de bouc dans tes bergeries.
10  Car tous les animaux des forêts sont à moi, Toutes les bêtes des montagnes par milliers ;
11  Je connais tous les oiseaux des montagnes, Et tout ce qui se meut dans les champs m’appartient.
12  Si j’avais faim, je ne te le dirais pas, Car le monde est à moi et tout ce qu’il renferme.
13  Est–ce que je mange la chair des taureaux ? Est–ce que je bois le sang des boucs ?
14  Offre  pour sacrifice à Dieu des  actions de grâces,  Et accomplis tes vœux envers le Très-Haut.
15  Et invoque–moi au jour de la détresse ; Je te délivrerai, et tu me glorifieras.  

(Psaume 50)
 
20 Car, je vous le dis, si votre justice ne surpasse celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez point dans le royaume des cieux. (Mathieu 5)

    "Si votre justice n'est pas supérieure à celle des scribes et des pharisiens, vous n'entrerez point dans le royaume des cieux." Cette affirmation de Jésus est la base de cette méditation. Le psaume 50 illustre parfaitement ce que le Seigneur a mis sur mon cœur. Nous voyons que Dieu reçoit favorablement les holocaustes que le peuple lui offre. L’Éternel déclare qu'ils sont constamment devant Lui. S'ils sont devant Lui, nous pouvons affirmer qu'ils sont agréés et agréables.... mais le Seigneur n'est pas satisfait.
    Pourquoi alors le Seigneur leur fait ces reproches ? Pourquoi veut-Il témoigner contre Son peuple ? Les holocaustes sont constamment devant Moi, dit-Il. Les sacrificateurs ont offert des bêtes sans défaut, sans tare, exactement conformes aux exigences de la loi. De ce point de vue, l'holocauste ne peut être qu'agréé car il est conforme à la norme établie par la loi. Le problème ne peut venir que de celui qui offre ce sacrifice.
    Quand nous lisons : "Je ne prendrai pas un taureau de ta maison, ni des boucs de ta bergerie", l’Éternel, par cette parole, dévoile le cœur de celui qui sacrifie. Il lui reproche son attitude intérieure. Celui qui offre, offre de ce qui lui appartient. Il ne reconnaît pas que c'est le Seigneur qui lui a donné cette bête et lui a permis de pouvoir la sacrifier pour s'approcher de Lui. Il ne comprend pas qu'il n'est que le gérant de ce que Dieu lui a confié. Il ne fait que Lui restituer une partie de ce qu'il a reçu. Le sacrifice est parfait, mais le cœur de celui qui offre est terriblement loin de la justice selon le cœur de Dieu. Il offre "sa propre justice", son propre bien, ce qui lui appartient. Il ne reconnaît pas que c'est le Seigneur qui a pourvu à ce sacrifice. Il est rempli de cette propre justice dénoncée par notre Seigneur dans ces passages de Mathieu. Le sacrifice devient un "moyen" par lequel celui qui offre est en paix avec Dieu, sans tenir compte de l'état de son cœur. C'est devenu un rituel dénué de tout ce qui en fait la valeur, et accompli par des cœurs incirconcis.
    Personne ne peut rien faire pour Dieu. Il est le Propriétaire de tout ce qui existe. On ne peut rien Lui offrir de ce qui est à nous-mêmes. Impossible ! Rien ne nous appartient ! Tout est de Lui, par Lui et pour Lui. C'est une pensée qui nous tient dans l'humilité et nous fait apprécier d'autant plus ce Dieu merveilleux que nous servons. Esaïe  s'est écrié dans un cantique : 

Éternel, tu nous donnes la paix ; Car tout ce que nous faisons, C’est toi qui l’accomplis pour nous. (Esaïe 26.12)

   Celui qui reconnaît ce que dit le prophète peut s'approcher de Dieu car il a un cœur circoncis, il sait que tout vient de l’Éternel. Nous ne pouvons rien Lui donner, tout ce que nous avons vient de Lui. Quand nous avons accompli un service, une action, un acte ou toute autre œuvre qui glorifient Dieu, nous sommes entrés dans ce qui était déjà préparé par Lui, pour nous, afin que nous le pratiquions ! C'est très important de comprendre cela. C'est la seule et stricte obéissance à Son Esprit qui nous permet de Le servir en vivant ce que le Seigneur a déjà préparé.Cette vérité nous tient dans l'humilité et la crainte de Dieu.
    La seule chose que demande le Seigneur est ce sacrifice de louanges, ces cœurs humbles et reconnaissants qui Le remercient pour tout ce qu'Il est en premier,et ce qu'Il a fait, car le mérite de cette offrande est celui de la bête qui a été immolée selon les prescriptions de la loi et sur laquelle a été déchargées les fautes de celui qui offre ce sacrifice. Ce sacrifice est agréé car il est conforme à la loi et celui qui offre est au bénéfice de ce sacrifice. Ce n'est sûrement pas le mérite de l’offrant  qui compte, mais celui du sacrifice sans défaut. Cette bête offerte est le symbole de l'Agneau de Dieu. Nous savons cela.
    Pour nous, chrétiens, nous sommes au bénéfice de notre Agneau immolé "dès la fondation du monde". Ce sacrifice parfait nous donne accès auprès de Dieu par les mérites de notre Agneau. Le sacrifice est parfait et nous sommes mis à son bénéfice. Notre cœur est parfois loin de réaliser cette grâce indescriptible dont nous bénéficions et il nous arrive d'être comme les hommes de ce Psaume. Nous présentons au Seigneur notre "œuvre" en sacrifice de reconnaissance avec un cœur imbu de ce que nous "avons réalisé". Ce que nous avons fait est le moyen par lequel nous nous approchons de Dieu, souvent inconsciemment et nous oublions les mérites de notre Agneau. L'orgueil nous guette, surtout si le Seigneur permet que nous réussissions ce qu'Il nous a donné de faire. Ainsi, souvent notre cœur s'enfle et nous tombons dans la mauvaise voie.
    Regardons ces actes de justice des scribes et des pharisiens tels que nous les présente le Seigneur dans Mathieu 6.
    Le premier acte de justice mentionnée par le Seigneur est "l'aumône". Le Seigneur décrit le cœur de celui qui donne en sonnant de la trompette. Nous pouvons comprendre que, même si cet acte est préconisé par la loi, le fait de proclamer cette "justice", montre l'orgueil démesuré de cette personne. Il veut se faire glorifier par les hommes. Son acte est juste, son cœur est mauvais. Il en est de même pour la prière et le jeûne.
    Au sujet de la prière, le Seigneur conclut par un enseignement sur le pardon. Si nous ne pardonnons pas, il nous est impossible d'être pardonnés par le Seigneur.
    Les actes de justice de cette nature ne permettront jamais à un homme de rentrer dans le royaume de Dieu. L'orgueil lui barre la route. L'acte en lui-même est selon la volonté de Dieu, mais le cœur de l'homme est une abomination aux yeux de Dieu.

13  Allez, et apprenez ce que signifie : Je prends plaisir à la miséricorde, et non aux sacrifices. Car je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs. ( lire le contexte dans Mathieu 9)

    Jésus dit cette parole aux pharisiens qui l'accusaient de manger avec des pécheurs et des péagers. La réponse du Seigneur est lumineuse. Les pharisiens se séparaient de ces personnes pour ne pas "se souiller" en leur présence. Le Seigneur montre, par son attitude, que la séparation d'avec les pécheurs et les péagers est une séparation intérieure (ce que dira plus tard Paul dans ses écrits en la nommant la circoncision du cœur) et qu'ainsi, Il peut vivre et manger avec eux afin de leur donner les paroles du royaume. C'est la miséricorde qui devient efficace pour toucher les pécheurs et les mener au salut. Les pharisiens étaient dans le visible qui ne sert à rien, le Seigneur les conduit dans l'invisible, ces choses éternelles qui resteront pour toujours. C'est ce que voulait exprimer notre Seigneur lorsqu'Il a affirmé : "Car, je vous le dis, si votre justice ne surpasse celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez point dans le royaume des cieux." Non seulement, il est impossible d'entrer dans le royaume, mais aussi, il est impossible de toucher ceux qui ne sont pas sauvés, qui ont besoin du salut. La miséricorde prévaut sur les sacrifices offerts de façon légaliste et avec un cœur sec. Le sacrifice sans la miséricorde est vain. Il est en horreur à l’Éternel.

 7  Si vous saviez ce que signifie : Je prends plaisir à la miséricorde, et non aux sacrifices, vous n’auriez pas condamné des innocents.  (lire le contexte dans Mathieu 12)

    Le contexte, ici, est différent. Les disciples arrachent des épis dans un champs de blé, un jour de sabbat pour les manger car ils ont faim. La réaction des pharisiens est immédiate : "la loi interdit cela le jour du sabbat !" Le Seigneur va leur démontrer l'esprit de la loi en prenant deux exemples. Le premier est celui de David et de ses hommes qui ont mangé les pains de proposition que "ni lui, ni ceux qui étaient avec lui, mais les sacrificateurs seuls avaient la permission de manger." (1Samuel 21.3-6) Ahimélek, le sacrificateur, a accepté de donner ces pains à David et à ses hommes car il a exercé la miséricorde en donnant à manger "ce qui était interdit" à ceux-ci. Le sacrificateur n'avait rien d'autre à offrir. C'est pour cette raison qu'il a enfreint la loi. La miséricorde, dans ce passage, a annulé la loi car le besoin comblé par cet acte de miséricorde est supérieur à la loi. 
    Le Seigneur prend un second exemple : celui de ces sacrificateurs qui violent la loi, durant leur service, le jour du sabbat, sans se rendre coupable. Lisons Nombres 28.9 :

Le jour du sabbat, vous offrirez deux agneaux d’un an sans défaut, et, pour l’offrande, deux dixièmes de fleur de farine pétrie à l’huile, avec la libation.

    Le jour du sabbat, il était formellement interdit (et il est toujours interdit pour les Juifs pieux qui observent le sabbat de nos jours) d'allumer un feu ou de faire n'importe quel travail de quelque nature que ce soit. Pour sacrifier ces deux agneaux, le sacrifice perpétuel du matin et du soir, les sacrificateurs devaient entretenir le feu. Le fait d'offrir ces agneaux étaient aussi un travail. De plus, ils devaient offrir la fleur de farine pétrie à l'huile comme offrande. Il devait donc "travailler" pour cela le jour du sabbat et pour présenter les agneaux, et pour préparer le pain. La farine pétrie la veille risquait de lever et être corrompue par le levain. 
    Dans ce cas aussi, le service est supérieur à la loi. En refusant de donner les pains de proposition à David et à ses hommes, Ahimélek pouvaient les condamner à mourir de faim ou à être incapables de se défendre, étant sans forces, s'ils étaient attaqués par des ennemis. 
    Il en est de même pour les sacrificateurs. Dans ce cas, ils violent le sabbat pour que le peuple soit toujours sous le sang de l'agneau, au bénéfice de l'alliance.  
    Lisons quelques versets qui sont en accord avec ce que nous venons de voir. Il y en a tellement dans la Bible

La pratique de la justice et de l’équité, Voilà ce que l’Éternel préfère aux sacrifices. (Proverbes 21.3)
 Le sacrifice des méchants est en horreur à l’Éternel,  Mais la prière des hommes  droits lui
est  agréable. (Proverbes 15.8)

   Ces deux versets que nous regardons, (il y en a bien d'autres) montrent la volonté de Dieu et ce qu'Il désire par-dessus tout : la pratique de la justice et de l'équité. Dans ce cas les sacrifices ne sont pas nécessaires car ces personnes sont au bénéfice du sacrifice perpétuel du matin et du soir. Ils peuvent réellement jouir de la grâce de Dieu matérialisée par ce sacrifice perpétuel. Le sacrifice des méchants est en horreur à l’Éternel. Il veut la prière des hommes droits. Le Seigneur ne demande pas la pratique de ces sacrifices qui masquent l'état du cœur de ceux qui les offrent. Le cœur droit n'a aucunement besoin d'un autre sacrifice. Ceux du matin et du soir lui suffisent amplement. Il peut s'approcher de son Dieu avec assurance et sa prière est agréable. Celui qui multiplie les rites religieux avec un cœur partagé irrite Dieu et sa pratique religieuse est en horreur à l’Éternel.

    Nous pouvons lire dans Ecclésiaste 4.17 ce verset qui va dans le même sens :

Prends garde à ton pied, lorsque tu entres dans la maison de Dieu ; approche–toi pour écouter, plutôt que pour offrir le sacrifice des insensés, car ils ne savent pas qu'ils font mal. 

    Il s'agit de personnes qui ont l'habitude de se présenter devant la Face de Dieu (le Temple) par des pratiques religieuses, formalistes, répétitives sans avoir dans le cœur cette  pureté morale qui doit accompagner ces rites. Ils veulent plaire à Dieu par leur vie religieuse, mais leurs cœurs sont remplis de ce qui est écrit dans ce Psaume 50 (versets 16-21) que nous allons regarder plus loi dans notre méditation.
    Dans le contexte de ce Psaume, il s'agit du sacrifice de reconnaissance (ou de communion) Ce sacrifice que le fidèle offrait était mangé par celui-ci, en compagnie du sacrificateur, et devant l’Éternel. C'est le symbole de la communion profonde entre l'homme et son Dieu. La part pour l’Éternel était mangé par le sacrificateur. La graisse était toujours brulée et réservée pour Dieu. Le sacrifice était accompagné de gâteaux sans levain pétris à l'huile, de galettes arrosées d'huile, et de la fleur de farine faite en gâteaux pétris à l'huile. Ces précisions sur ces gâteaux et sur cette farine sont une image, un symbole dont la réalité est la vie pure et sans tâche de notre Seigneur, ce Pain vivant descendu du ciel. Toute sa vie a été embrasée par le feu de l'autel d'airain, cet autel donné par Dieu pour l'expiation des péchés. Le Pain descendu du ciel, notre Seigneur, tellement éprouvé lorsqu'Il était au milieu de son peuple est représenté par cette offrande sur l'autel d'airain. Hébreux 2 dit : 

10 Il convenait, en effet, que celui pour qui et par qui sont toutes choses, et qui voulait conduire à la gloire beaucoup de fils, élevât à la perfection par les souffrances le Prince de leur salut.
   
    Nous trouvons la réalité de ce pain et cette fleur de farine qui étaient mis à brûler sur l'autel par ces versets d'Hébreux 2. Que c'est beau !  Combien sont merveilleux notre Seigneur et le Père dans leur action pour venir nous chercher, nous purifier, nous sauver. Combien ces ombres dans le Lévitique nous éclairent de toute cette souffrance nécessaire pour nous sauver! C'est vraiment glorieux ! Le pain offert sur l'autel représente pour nous, notre appréciation de Christ que nous offrons au Père. Il est impossible de s'approcher du Père sans cette amour que nous devons avoir pour Christ. Ces pains représentent notre part pour le Père, part issue de notre travail "dans le Seigneur".
   Et merveille des merveilles, ces oblations étaient accompagnées de pains levés. Ces pains levés sont l'image, le symbole de celui qui offre et qui est purifié par l'offrande de la vie pure et sans tâche de notre Seigneur. Lui, Il est passé sur le feu de l'autel pour nous et nous en Lui, ce pain levé que nous sommes est accepté car il passe sur l'autel avec Christ. Il n'y a pas de mélange, mais la grâce d'être avec le Seigneur sur l'autel d'airain. (Lévitique 7.11-15) Il a souffert pour nous et notre participation sur l'autel d'airain est bien moins éprouvante et douloureuse que la sienne.  
   Comme nous sommes à Sion et que les seuls sacrifices sont la louange et l'adoration, sans qu'il soit question de l'autel d'airain qui se trouvait à Gabaon, seul est pris en compte l'état du cœur de celui qui offre. Le Seigneur dit : "En guise de sacrifices, offre à Dieu des actions de grâces!" (v. 14) C'est clair. Puisque l'offrant est au bénéfice du sacrifice perpétuel de Gabaon, seul le cœur doit être pur pour que le sacrifice de louanges soit agréable à Dieu.
    Paul  a écrit dans Galates 2. 20 : "Je suis crucifié avec Christ, et ce n'est plus moi qui vit, c'est Christ qui vit en moi..." Crucifié signifie être sur l'autel avec le Seigneur, Pain sans levain et Paul, pain levé, mais avec le Seigneur, sur l'autel!

   Ceux qui venaient sacrifier, par leur comportement, l'état de leurs cœurs, leur façon de s'approcher de l’Éternel avec un cœur partagé ou plein de ce qui est décrit dans le Psaume pour ce sacrifice ne pouvait que déplaire fortement au Seigneur. C'est pour cette raison qu'Il dit : "La pratique de la justice et de l’équité, Voilà ce que l’Éternel préfère aux sacrifices. Ce n'est pas la peine d'aller plus loin dans cette méditation, si ce n'est de mentionner ce deuxième verset des Proverbes : 

"Le sacrifice des méchants est en horreur à l’Éternel, Mais la prière des hommes droits lui est agréable." 
     
Lisons encore ces autres versets du Psaume 50 :

16  Et Dieu dit au méchant : Quoi donc ! tu énumères mes lois, Et tu as mon alliance à la bouche,
17  Toi qui hais les avis, Et qui jettes mes paroles derrière toi !
18  Si tu vois un voleur, tu te plais avec lui, Et ta part est avec les adultères.
19  Tu livres ta bouche au mal, Et ta langue est un tissu de tromperies.
20  Tu t’assieds, et tu parles contre ton frère, Tu diffames le fils de ta mère.
21  Voilà ce que tu as fait, et je me suis tu. Tu t’es imaginé que je te ressemblais ; Mais je vais te reprendre, et tout mettre sous tes yeux.

    
    C'est la description des actions du cœur d'un homme dont le sacrifice ne peut être agréé. Combien de fois nous approchons-nous du Seigneur avec ce qui est décrit ici ! Surtout au niveau de notre langue ! Le Seigneur peut-Il regarder favorablement notre "sacrifice de reconnaissance", le fruit des lèvres qui confessent son Nom", (Hébreux 13.15) si nous sommes dans ces cas décrits par le Psaume ? 
    Souvenons-nous que ce Psaume a été écrit par Asaph qui officiait avec ses frères, dans la tente sur la colline de Sion. Il était en communion intime avec le Seigneur, dans la louange et l'adoration sans les sacrifices sanglants qui étaient pratiqués à Gabaon. C'est un type du sacerdoce de l’Église, libre de s'approcher du Seigneur étant couverte perpétuellement du Sang de l'Agneau pour la louange et l'adoration. 
    Peut-être que nous ne nous plaisons pas avec un voleur, mais combien de fois nous livrons notre bouche au mal en parlant d'un frère ou d'une sœur dans la foi en décrivant une situation délicate! Combien de fois notre langue dérape pour des choses futiles!  
    Les recommandations de ce Psaume sont renouvelées dans la nouvelle Alliance à travers les lettres de Paul et surtout celle de Jacques qui décrit si bien le mal de la langue qui n'est pas domptée !

5 De même, la langue est un petit membre, et elle se vante de grandes choses. Voici, comme un petit feu peut embraser une grande forêt !
6  La langue aussi est un feu ; c'est le monde de l'iniquité. La langue est placée parmi nos membres, souillant tout le corps, et enflammant le cours de la vie, étant elle–même enflammée par la géhenne.
 
7 Toutes les espèces de bêtes et d’oiseaux, de reptiles et d’animaux marins, sont domptés et ont été domptés par la nature humaine ;
8  mais la langue, aucun homme ne peut la dompter ; c’est un mal qu’on ne peut réprimer ; elle est pleine d’un venin mortel.
9 Par elle nous bénissons le Seigneur notre Père, et par elle nous maudissons les hommes faits à l’image de Dieu.
10  De la même bouche sortent la bénédiction et la malédiction. Il ne faut pas, mes frères, qu’il en soit ainsi.
 
 

    Ces quelques versets développent ceux de ce Psaume. Jacques explique très bien, même si parfois il est dur dans ses propos, le mal que peuvent générer des paroles. Notre Seigneur a affirmé que c'est de l'abondance du cœur que la bouche parle. Tout ce qui sort de notre bouche a sa source au fond de nos cœurs. C'est avec ce cœur que nous nous présentons devant notre Dieu ! 
    Que chacun puisse aller plus loin dans cette méditation, avec l'aide du Saint-Esprit pour avoir ces cœurs débarrassés de tout ce qui peut nous souiller. Que notre bouche puisse exprimer les bonnes choses qui nous habitent par la vie de Christ en nous!
    J'ai vraiment conscience que ce n'est qu'une très faible approche des trésors qui sont écrits dans ce Psaume et dans ces passages  de la Bible que nous avons regardés. Ce n'est qu'un peu d'eau pour amorcer la pompe spirituelle de chacun!

jcb



dimanche 22 avril 2012

QUELQUES PENSÉES SUR LE PSAUME 50

1  Psaume d’Asaph. Dieu, Dieu, l’Éternel, parle, et convoque la terre, Depuis le soleil levant jusqu’au soleil couchant.
2  De Sion, beauté parfaite, Dieu resplendit.
3  Il vient, notre Dieu, il ne reste pas en silence ; Devant lui est un feu dévorant, Autour de lui une violente tempête.

    Ce Psaume d'Asaph est le premier d'une série de douze qui lui sont attribués (50 et 73 à 83) Il est très important de connaître sa fonction au sein de la prêtrise ou sacerdoce. Il était le chef des chantres (1Chroniques 16.5) Il a été établi par David pour invoquer, célébrer et louer l’Éternel dans la tente préparée par le roi, sur la colline de Sion. Il était accompagné de ses frères. Lisons les derniers versets de 1Chroniques 16 :

37 David laissa là, devant l’arche de l’alliance de l’Éternel, Asaph et ses frères, afin qu’ils fussent continuellement de service devant l’arche, remplissant leur tâche jour par jour.
38 Il laissa Obed–Edom et Hosa avec leurs frères, au nombre de soixante–huit, Obed–Edom, fils de Jeduthun, et Hosa, comme portiers.
39  Il établit le sacrificateur Tsadok et les sacrificateurs, ses frères, devant le tabernacle de l’Éternel, sur le haut lieu qui était à Gabaon,
40  pour qu’ils offrissent continuellement à l’Éternel des holocaustes, matin et soir, sur l’autel des holocaustes, et qu’ils accomplissent tout ce qui est écrit dans la loi de l’Éternel, imposée par l’Éternel à Israël.
41  Auprès d’eux étaient Héman et Jeduthun, et les autres qui avaient été choisis et désignés par leurs noms pour louer l’Éternel. Car sa miséricorde dure à toujours.
42  Auprès d’eux étaient Héman et Jeduthun, avec des trompettes et des cymbales pour ceux qui les faisaient retentir, et avec des instruments pour les cantiques en l’honneur de Dieu. Les fils de Jeduthun étaient portiers.

    Il est nécessaire, pour bien saisir la beauté de ce Psaume, de se situer dans le contexte de la vie du chantre qui l'a écrit. Nous avons déjà vu que Sion est la description d'une sacrificature très différente de celle pratiquée durant toute la période de l'Ancien Testament, sacrificature que nous voyons décrite principalement dans les livres de l'Exode et du Lévitique. C'est un sacerdoce d'exception qui a commencé avec David dans la tente qu'il avait préparée à cet effet sur cette colline de Sion qui était le lieu de sa forteresse conquise aux Yébousiens. C'est lui qui introduisit cette sacrificature dans la tente qu'il avait fait dressée à cet effet et qui s'est achevée lors de la mise en service du temple par Salomon.
    La tente préparée par David sur la colline de Sion a accueilli l'arche de l'alliance lorsqu'elle fut ramenée depuis la maison d'Obed-Edom jusque sur cette colline de Sion et placée en son centre (1Chroniquue 16.1)
    Asaph et ses fils, établis par le roi David, remplissaient leur sacrificature dans la louange, les chants, l'adoration. Ils étaient continuellement dans la présence de Dieu qui "siège entre les chérubins". Dans cette tente, (comme nous l'avons déjà vu dans d'autres méditations) se tenait l'arche en son milieu et les sacrificateurs officiaient devant elle. Il n'y avait pas de voile, pas de table des pains de proposition, pas de chandelier, pas d'autel d'or. Les prêtres étaient devant "la face de Dieu" sans aucune barrière, comme l’Église à présent. (pas de voile de séparation) La seule différence avec l’Église se situe dans le fait que l'arche était le symbole de la présence de Dieu, tandis que l’Église est réellement en présence du Seigneur. Là où deux ou trois se réunissent en mon Nom, Je suis au milieu d'eux.(Mathieu 18.20)  L'arche était Son trône, un trône de grâce à cause du sang répandu une fois l'an pour l'expiation des péchés du peuple.
    Il n'y avait pas de sacrifices sanglants à Sion, car l'autel des holocaustes se tenait dans le tabernacle à Gabaon, ainsi que la cuve de bronze pour les ablutions et tous les objets nécessaires à ce culte. A Gabaon, le sacrificateur Tsadoq et ses frères offraient le sacrifice perpétuel du matin et du soir nécessaire pour la louange et l'adoration qui se pratiquaient à Sion (1Chronique 16.39). 
    Sion ne pouvait exister que sur le fondement du sacrifice perpétuel de Gabaon. A Gabaon, se trouvaient les deux autels (holocauste et parfums) la cuve de bronze, le chandelier en or, la table des pains de proposition, avec les trois parties du sanctuaire : le parvis, le Lieu Saint et le Lieu très Saint dont le voile séparait le Lieu Saint du Saint des Saints dans la tente.
    Nous avions, d'une part, le sacrifice perpétuel à Gabaon, dans la non présence de Dieu, et d'autre part, la louange et l'adoration à Sion, dans la présence de Dieu. Gabaon est le type, le symbole du sacrifice de Christ (une fois pour toute) et Sion celui de la sacrificature de l’Église dans la louange et l'adoration fondée sur le sacrifice perpétuel de Christ.
   C'est à la lumière de ce contexte que nous allons méditer sur ce Psaume pour essayer d'en retirer tout ce qui peut nous faire grandir dans la connaissance de notre Dieu, nous le faire aimer d'avantage et avoir une vie qui glorifie notre Dieu.
    Asaph, dans ce Psaume, nomme Dieu de trois de Ses Noms divins : Dieu (Elohim) et  l’Éternel (YHWH) dans le premier verset,  le Très-Haut (El Elyon) dans le verset 14.
    Le chantre s'adresse en premier au Dieu Créateur du ciel et de la terre et de tout ce qui existe : hommes, bêtes, plantes, univers etc. C'est Dieu dans la plénitude du Dieu Créateur. Celui par qui et pour qui tout existe, Celui par qui, sans Sa main sur la création, rien ne pourrait exister et continuer à être.
    Ensuite, il le nomme l’Éternel. C'est par ce Nom que Dieu s'est révélé à Moïse : le Dieu qui vient sauver le peuple, Son peuple, le libérer de la servitude d’Égypte. C'est la traduction, dans nos Bibles, du saint Nom du Dieu de l'alliance YHWH, le Nom dont on a oublié comment Le prononcer. Les Juifs pieux l'appellent tout simplement :"le Nom" avec une vraie crainte de Dieu. C'est le Dieu "qui descend" pour délivrer. Celui qui s'est nommé : "Je suis celui qui suis". La Bible du Rabbinat français traduit : "Je suis l'Être invariable" C'est ce Dieu que le chantre invoque, le Dieu de l'alliance, le Sauveur.
    Puis, il le nomme le Dieu Très-Haut au verset 14. Dans ce verset, Asaph invoque d'abord Dieu (Elohim) pour Lui offrir la reconnaissance par des actions de grâces. Puis il recommande d'accomplir les vœux que l'on a fait envers le Très-Haut. Ce Nom a été mentionné pour la première fois, dans Genèse 14.18. Il s'agit de l'épisode de la rencontre d'Abram avec le sacrificateur du Dieu Très-Haut, Melchisédek. Le Dieu Très-Haut est défini comme étant "le Maître du ciel et de la terre"  
    Nous voyons, par ces Noms, combien est grande la louange et l'adoration que le chantre rend à Son Dieu en le définissant ainsi. C'est un homme qui connaissait Son Dieu ! Combien est grande l’admiration et la reconnaissance que lui voue ce chantre !
   De Sion, beauté parfaite, Dieu resplendit. Le chantre décrit l’Éternel à partir de Sion. C'est le lieu de l'adoration et de la louange. Le Lieu où il n'y a plus de sacrifices sanglants. C'est uniquement la louange et l'adoration qui constituent la sacrificature. C'est le lieu de la grâce et de la présence de Dieu, dans la liberté, le péché étant traité et expié jour après jour à Gabaon. C'est beau ! 
    Mais lorsque Asaph décrit Son Dieu, il Le décrit comme Celui qui s'est révélé au Mont Sinaï. Il est très important de comprendre cela. Le Dieu de la grâce est aussi le Dieu de la Loi, du Mont Sinaï. Dieu ne change pas ! Il est le même ! Nous devons bien réaliser cela, nous, qui sommes sous la grâce. Nous devons toujours avoir présent en nous, à notre esprit, ce Dieu du Sinaï, avoir cette sainte crainte de Dieu, afin de vraiment apprécier ce qu'est la grâce. Dans Hébreux 12.28-29 nous lisons ceci : 

28  C'est pourquoi, recevant un royaume inébranlable, montrons notre reconnaissance en rendant à Dieu un culte qui lui soit agréable, (12–29) avec piété et avec crainte,
29  car notre Dieu est aussi un feu dévorant.
 


   Nous ne devons pas être trop familier ou comme bien des personnes que parfois je côtoie qui prononcent avec légèreté ce beau Nom qui nous a sauvés. Il est vraiment très triste de constater combien ce Nom est devenu quelque chose de banal, de culturel dans les expressions courantes de la vie. Le Nom du Seigneur fait partie de la culture chrétienne. Il est devenu une expression parmi tant d'autres. Combien nous devons reconnaître que ce Nom ne peut pas être employé sans discernement, ni respect ou crainte, comme faisant partie de la "culture chrétienne". Notre Dieu, le Dieu de la grâce, est aussi un feu dévorant, à cause de Sa jalousie. La jalousie de Dieu n'a rien de commun avec celle de l'homme. Le Seigneur, dans les dix paroles nous l'a formellement demandé :

7  Tu ne prendras point le nom de l’Éternel, ton Dieu, en vain ; car l’Éternel ne laissera point impuni celui qui prendra son nom en vain. (Exode 20.7)
 

   Combien de fois nous prononçons ce Nom en vain ! Combien de fois, nous sommes irrévérencieux envers notre Dieu en banalisant Son Nom ! Il est devenu un nom commun. Il est dans cette culture chrétienne pétrie de formules toutes faites et nous l'employons souvent de manière trop légère. Nous devrions avoir cette sainte crainte de Dieu issue de cœurs d'adorateurs que nous sommes... ou devrions être. 
    Nous lisons dans Malachie 3.16 : "Alors ceux qui craignent l’Éternel se parlèrent l'un à l'autre" Ce même verset est traduit, dans la Bible du Rabbinat français : "Cependant, les adorateurs de l’Éternel s'exhortèrent mutuellement" La crainte de l’Éternel est la preuve d'un cœur d'adorateur. Il ne peut pas prononcer le Nom béni de façon légère. Ce Nom, tellement beau et grandiose, pour un adorateur, ne peut être que respectueusement prononcé. Le Seigneur n'est pas notre copain ! Et bien sûr, ne soyons pas, non plus, idolâtre du Nom, mais respectueux. 
    Nous sommes sous la grâce, avec un Dieu éternellement le même. Il est vrai que notre Seigneur Jésus a pris sur Lui toutes nos transgressions et que nous ne sommes plus sous la condamnation.....si nous marchons par l'Esprit ! C'est une raison de plus pour honorer ce Nom, si bien sûr nous savons réellement ce que représente ce Nom qui est au-dessus de tout nom. Il ne peut pas, ne doit pas  faire partie d'une "culture chrétienne." C'est le banaliser et en faire un sujet de tradition, de culture générale. Or, la Parole de Dieu nous exhorte "à offrir sans cesse à Dieu un sacrifice de louanges, c'est-à-dire le fruit des lèvres qui confesse son Nom."  (Hébreux 13.15) Si ce Nom est devenu quelque chose de banal dans notre vie, comment pourrions-nous en faire une louange à notre Dieu ? Il est bon de réfléchir et méditer sur ces choses.
    Continuons notre lecture.

4  Il crie vers les cieux en haut, Et vers la terre, pour juger son peuple:
5  Rassemblez–moi mes fidèles, Qui ont fait alliance avec moi par le sacrifice ! –
6  Et les cieux publieront sa justice, Car c'est Dieu qui est juge. –Pause.

    Il crie vers les cieux et vers la terre pour juger son peuple. Le verset 4 est terrifiant si la suite ne présentait pas les fidèles qui ont fait alliance avec Dieu. Dès que le Seigneur parle du jugement, Il nous présente l'alliance. L'alliance est le moyen par lequel la justice de Dieu est manifestée par le jugement tombant sur la victime expiatoire afin que le coupable soit justifié et reconnu innocent. Dieu montre sa justice (la victime expiatoire) en étant juste toute justifiant celui qui a la foi en la victime expiatoire. Ce n'est que l'ombre des choses à venir dont la réalité est le sacrifice de Christ. "Il a voulu montre sa justice dans le temps présent, de manière à être reconnu juste, tout en justifiant celui qui a la foi en Jésus." (Romains 3.26)
    Par ce Psaume nous ne sommes que dans l'ombre de cette merveilleuse réalité. Les chantres louaient et adoraient librement Dieu dans Son sanctuaire et dans Sa présence, dans la tente sur la colline de Sion en étant sous le sang du sacrifice perpétuel de Gabaon. Les cieux publient la justice de Dieu, car c'est Dieu qui est juge ! Sa justice c'est le sacrifice perpétuel pour celui qui croit en ce jugement de substitution et qui donc est justifié tout en reconnaissant la justice de ce "Dieu qui ne tient pas le coupable pour innocent." Dans le contexte du Psaume c'est celui de Gabaon et pour nous celui de notre adorable Seigneur. Dieu est justifié tout en justifiant le pécheur qui a accepté sa condamnation à mort subie sur l'Agneau de Dieu.

7  Écoute, mon peuple ! et je parlerai ; Israël ! et je t’avertirai. Je suis Dieu, ton Dieu.
8  Ce n’est pas pour tes sacrifices que je te fais des reproches ; Tes holocaustes sont constamment devant moi.
9  Je ne prendrai pas de taureau dans ta maison, Ni de bouc dans tes bergeries.
10  Car tous les animaux des forêts sont à moi, Toutes les bêtes des montagnes par milliers ;
11  Je connais tous les oiseaux des montagnes, Et tout ce qui se meut dans les champs m’appartient.
12  Si j’avais faim, je ne te le dirais pas, Car le monde est à moi et tout ce qu’il renferme.
13  Est–ce que je mange la chair des taureaux ? Est–ce que je bois le sang des boucs ?
14  Offre pour sacrifice à Dieu des actions de grâces, Et accomplis tes vœux envers le Très–Haut.
15  Et invoque–moi au jour de la détresse ; Je te délivrerai, et tu me glorifieras.
 

   
    Le Seigneur parle à Son peuple. Il ne le condamne pas comme dans d'autres passages de la Parole dans lesquels Il déclare avoir en abomination les sacrifices qui Lui sont offerts. (par exemple : Jérémie 6.20 ; Amos 5.22) D'autres passages de l’Écriture vont dans le même sens. L’Éternel ne prends pas plaisir à ces sacrifices. Nous retrouvons ces reproches du Seigneur dans Malachie 1.6-8 où Il indique pourquoi ces sacrifices ne peuvent Lui être agréables.
    Dans ces versets du Psaume, c'est différent. Le Seigneur demande à Son peuple qui sacrifie de ne pas rester devant le sacrifice, mais d'avancer vers Lui, car ce sacrifice est la porte d'entrée pour la communion avec l’Éternel. Le Seigneur demande de continuer sur la base du sacrifice agréé pour entrer en communion avec Lui par "le sacrifice d'actions de grâces." Comme nous sommes à Sion, il s'agit de la louange d'un cœur reconnaissant qui se sait agréé étant fondé sur l'expiation du sacrifice de substitution de Gabaon.
    Le Seigneur dit bien que les holocaustes du peuple sont constamment devant Lui. Ils sont donc agréés. Il sont monté en parfum de bonne odeur et la porte des cieux est ouverte pour ceux qui ont sacrifié. La bonne odeur (l'encens) du sacrifice est parvenu jusqu'à Dieu.
    Puisque la porte est ouverte, Dieu demande simplement la reconnaissance, la louange et l'adoration d'un homme quitte de son péché expié par le sang du sacrifice. Nous avons la réalité dans Hébreux 13.15 comme nous l'avons vu plus haut : "Le fruit des lèvres qui confessent son Nom." Le Seigneur ne veut pas que nous restions à la croix, mais avancer pour contempler Celui qui est assis sur le Trône et qui règne. Nous devons garder la croix pour la destruction des œuvres de la chair mais aller au-delà pour offrir ce merci et cette reconnaissance à notre Dieu.
    La sublime récompense de cette attitude de cœur est cette affirmation : "Invoque-moi au jour de la détresse : Je te délivrerai et tu me glorifieras."  Ce qui implique que les jours de détresse font aussi partie de la vie du peuple de Dieu.

6  Et Dieu dit au méchant : Quoi donc ! tu énumères mes lois, Et tu as mon alliance à la bouche,
17  Toi qui hais les avis, Et qui jettes mes paroles derrière toi !
18  Si tu vois un voleur, tu te plais avec lui, Et ta part est avec les adultères.
19  Tu livres ta bouche au mal, Et ta langue est un tissu de tromperies.
20  Tu t’assieds, et tu parles contre ton frère, Tu diffames le fils de ta mère.
21  Voilà ce que tu as fait, et je me suis tu. Tu t’es imaginé que je te ressemblais ; Mais je vais te reprendre, et tout mettre sous tes yeux.


    Le Seigneur se tourne vers le méchant pour lui dire qu'Il connaît son comportement. Il se tait, mais aucun des faits et gestes de celui-ci sont oubliés. Le Seigneur énumère les griefs de cet homme. IL s'adresse au méchant de Son peuple. Il ne s'agit pas de l'étranger. Il fait des reproches afin que ces personnes se repentent, changent d’attitude. Il ne tient pas le coupable pour innocent, mais Il ne veut pas détruire. Il reprend afin que ce "méchant" se repente et change de voie. Sinon, le jugement viendra sur lui.
    Le Seigneur décrit les cœurs de ces adorateurs. Nous voyons pourquoi Il réprimande son peuple. Le sacrifice est agréé car il est aux normes fixés par la loi. Le sacrifice est selon Dieu. C'est le cœur de celui qui sacrifie qui est décrit dans ces versets. Nous développerons cela dans notre prochaine méditation.

22 Prenez–y donc garde, vous qui oubliez Dieu, De peur que je ne déchire, sans que personne délivre.
23  Celui qui offre pour sacrifice des actions de grâces me glorifie, Et à celui qui veille sur sa voie Je ferai voir le salut de Dieu.
 


    La fin de ce Psaume est empreinte de grâce. Le méchant est repris afin qu'il se repente. La rébellion est sanctionnée très durement pour celui qui a reçu de la part du Seigneur l'injonction de se repentir et qui refuse. Pour les autres, offrir des actions de grâces glorifie le Seigneur. Ceux qui agissent ainsi et qui veillent sur leur voie peuvent voir le salut de Dieu. Ils ont la ferme assurance que Dieu veille sur eux pour les maintenir dans ce salut qui vient de l’Éternel.
     Voilà juste quelques pensées sur ce Psaume de ce chantre qui ne connaissait que la grâce d'une vie de louanges et d'adoration.
    Que chacun puisse aller plus loin dans la richesse de ce Psaume !

jcb



dimanche 15 avril 2012

La Croix, l'Eglise et le conflit. De Paul Blomme.

Reproduction autorisée, pourvu que les sources soient indiquées. http ://www.paroledevie.org


Ce livre fut écrit en 1975 par Paul Blomme, ancien Jésuite converti à Jésus-Christ. Il est mort en 2001 en Belgique. Il fut rejeté par les églises traditionnelles, à cause de son message puissant et profond sur la Croix. Il a vécu isolé et dans l'anonymat jusqu'à sa mort. La compréhension spirituelle de ce message nous est absolument indispensable, si nous voulons accomplir la volonté parfaite de Dieu pour notre vie, comme pour la vie de l'Eglise. La mission, le rôle et le message de Jésus-Christ.
"Ils le crucifièrent, et deux autres avec Lui, un de chaque côté, et Jésus au milieu"
(Jean 19.18).
"Que la grâce du Seigneur Jésus-Christ soit avec vous !"
(1 Corinthiens 16 :23).

Table des matières.

1) Qu'est-ce que le Christianisme ?

La vraie nature du Christianisme.
La révélation intérieure du Fils de Dieu.

2) L’Église selon la Pensée de Dieu.

L'expression de la vie du Seigneur dans l’Église.
La Croix, fin de toute idolâtrie.
Ce qu'est l'idolâtrie.
La personne même de Dieu, vie et bien suprême de l'homme.
La Croix ôte la malédiction de Babel.
En Christ : un petit mot qui en dit long.
Christ et Son Corps.
Quelques prépositions significatives.
Les marques de Jésus-Christ.
Les marques de la propriété.

3) Le conflit.

L'objectif suprême de la Croix et de l’Église.
Le point de convergence de toute l'opposition satanique.
La vie, réponse à tous les problèmes.
L’Église et l'opposition des forces du mal.
Les ruses du diable.
En Christ : un petit mot qui en dit long (suite) : Conformes à Lui dans Sa mort.
Les marques de Jésus-Christ (suite).
Les marques de l'image de Jésus.

1) Qu'est-ce que le Christianisme ?

La vraie nature du Christianisme.

   Elle nous est familière, cette épître aux Galates. Mais cette familiarité n'est pas sans inconvénient, elle risque de nous faire oublier le choc formidable qu'elle produisit sur les esprits à l'époque ou elle fut écrite. Par sa nature, par le but qu'elle cherche à atteindre, c'est un tocsin qu'elle fait retentir, et il n'y a dans la Bible aucun message qui fût plus nécessaire aux contemporains, et aucun qui réponde avec plus d'à propos au besoin actuel du Christianisme.
    Cette lettre, on l'a mise en boîte, fondamentaliste, bien sûr, et l'on se contente d'une phrase pour la décrire. Mais c'est un tremblement de terre qu'elle représente, une révolution, un cataclysme. En la méditant, des images saisissantes ont surgi dans mon esprit. J'ai vu un certain Shamma, défendant, glaive à la main, une pièce de terre remplie de lentilles. Sans personne pour l'y aider, il faucha les Philistins jusqu'à ce qu'il n'en restât pas un pour se mesurer à lui. J'ai vu les hordes des Philistins menacer Israël, couvertes par Goliath le géant, et semer journellement la terreur dans le cœur des Israélites.
Puis j'ai vu le jeune David décider que cette affaire avait bien assez duré et qu'il fallait en finir. Il chargea, et d'un seul coup régla la question, pour la plus grande déconfiture de l'armée philistine. Puis, pour en venir à une époque de beaucoup postérieure, j'ai revu l'histoire d'Angleterre et la révolte des barons. A Runnymede, devant le roi Jean sans Terre assis à une table une plume à la main, leurs regards farouches et leurs mines rebelles proclament qu'un long régime d'injustice devait maintenant cesser, et une charte établissant une perpétuelle justice devait leur être octroyée.
    Aucune issue pour le monarque : il signe la Grande Charte, chère à tous les Anglais. Ces épisodes de l'Histoire, qui ont valeur de symboles, sont tellement dans la note de l'épître que
nous avons sous les yeux ! Partout où il allait, l'apôtre fut suivi de ville en ville par une campagne de fausse interprétation du Christianisme. Lui, le plus patient et le plus tolérant des serviteurs de Jésus-Christ, supporta longtemps avec humilité les assauts livrés contre sa personne, contre son caractère, contre la réalité de son apostolat, contre son intégrité.
    Mais les choses étaient arrivées à un point tel, que la substance même du Christianisme était en train de se modifier. Sa vraie nature était en voie de transformation. La limite de la tolérance étant atteinte, ce Shamma néo-testamentaire tire son épée et dit : "Le jour des règlements de compte est venu, en voilà assez !" Il avait le feu dans les os. Le sang bouillait dans ses veines. Des paroles enflammées jaillirent de ses lèvres : "Quand nous-mêmes, quand un ange du ciel vous annoncerait un autre évangile que celui que vous avez reçu, qu'il soit anathème !" Son épée s'attache à sa main ce jour-là, et il ne cessa de braver à mort les judaïsants incirconcis de cœur.
    Mais ceci dit, et nous pourrions en dire bien davantage, il nous faut en venir au véritable enjeu de cette bataille, au vrai problème posé. Nous devons nous demander ceci : "Qu'était-ce donc, ce qui était en cause ?" De nombreuses questions connexes demanderaient aussi une réponse, mais ce qui domine le débat, ce n'est rien de moins que 

LA VRAIE NATURE DU CHRISTIANISME !

    Ce qui était en cause, ce qui est toujours en cause périodiquement, c'est la mission, le rôle et le message de Jésus-Christ. II est venu, en réalité, pour faire quoi ? Que signifie-t-elle Sa personne ? Et quel est, en dernière analyse, Son message ? Qu'on me permette ici une courte parenthèse. Bien que le ministère de ce livre soit destiné à tout le peuple de Dieu, je sais que bon nombre de ses lecteurs sont des serviteurs de Dieu occupant des positions de responsabilité et d'influence. A ceux-là, j'adresse ce message d'une manière particulièrement pressante. Mes frères, vous avez certainement conscience que ce monde est en train de subir une invasion en force d'esprits corrupteurs, qui s'emploient à semer la confusion dans les relations humaines. Rien ne leur échappe. Or ce que nous constatons au niveau des pays et des relations internationales nous le retrouvons avec une particulière intensité au sein du Christianisme.
    Que ce soit à l'échelle de la chrétienté dans son ensemble, du protestantisme, ou plus près de nous, du Christianisme évangélique, qu'il s'agisse même des Chrétiens les plus sincères et des serviteurs de Dieu qui ont une valeur à Ses yeux, on se trouve embarrassé de complications et de perplexités qui mènent à une paralysie presque totale.
    Des pratiques, des mouvements, des enseignements nouveaux, exotiques, fantastiques, extrêmes, particuliers, bizarres, déséquilibrés, se succèdent rapidement. Au sein du peuple de Dieu, nombreux sont ceux qui s'y laissent prendre, pour ne moissonner en définitive, que désillusion et cynisme.
L'atmosphère est saturée de situations embarrassées et de problèmes insolubles, et cette confusion discrédite de plus en plus le Christianisme. Aussi est-ce le devoir impérieux de tous ceux qui sont chargés de responsabilités et ont une influence, de savoir où ils en sont. C'est à eux qu'incombe l'obligation d'éclairer le peuple de Dieu sur ce qu'est vraiment le Christianisme. Ce que nous cherchons ici, c'est apporter notre contribution à cette tache.
    Pour en revenir à notre épître aux Galates, nous voulons savoir ce qu'elle veut nous dire, qui puisse répondre à notre question principale : "Qu'est-ce que le Christianisme ?" Il y a des questions subsidiaires qui nous mettront sur la voie de la vraie réponse. Le Christianisme est-il une relève, une continuation ou une adaptation de l'Ancien Testament dans son système rituel, sacramentel, cérémoniel, dans son régime d'ordonnances, dans les prescriptions vestimentaires de son sacerdoce ?
    Le Christianisme est-il la reproduction sous forme mystique du système de l'Ancien Testament ? J'entends, la conservation des mêmes rites, des mêmes cérémonies, mais en leur attribuant une signification spirituelle plus mystique, en sorte qu'on puisse dire : "Non, bien sur, ce n'est pas la chose elle-même qui compte, mais c'est ce quelle implique ou illustre." C'est là ce que disent et enseignent les tenants du régime sacramentel, ainsi que beaucoup d'évangéliques.
    Mais, prétendent-ils, une vertu est attachée aux formes et aux gestes ! Le Christianisme est-il une idéologie, c'est-à-dire un système d'idées, le résultat de l'activité mentale et intellectuelle de personnalités religieuses ? En d'autres termes, est-ce une philosophie traitant de Dieu, de l'homme et de sa destinée, du bien et du mal, du comportement de l'individu ? Est-ce un système de prescriptions, de lois, de préceptes, de règles, de techniques, de détails à observer ? Est-ce un nouveau système d'exigences et d'interdictions ? Le Christianisme est-il une tradition, une succession historique, un héritage?
    A toutes ces questions, et à bien d'autres qui leur ressemblent, l'épître aux Galates, comme le Nouveau Testament tout entier, répond d'une voix de tonnerre NON ! NON ! NON ! Et NON ! Ces explications, qu'on les prenne ensemble ou chacune isolément, représentent tout ce que l'apôtre appelle ici "un autre Évangile", et son verdict contre l'ange du ciel qui viendrait le prêcher ( à supposer que cela fût possible ) le voici : "Que cet ange soit anathème!" Ici, pas de compromis. L'épée est tirée, et les Philistins (ci-dessus mentionnés et décrits) doivent être fauchés sans merci.
    Paul, après tout, n'est pas plus véhément que son Divin Maître, quand il était confronté avec ceux qui égaraient leurs adeptes, tordant la vérité de Dieu et laissant déconcertés ceux qui n'auraient pas demandé mieux que de se laisser éclairer.
Quelle est donc la réponse ?
Cette lettre qui est devant nous est appelée, à juste titre, la Grande Charte du Christianisme,
exprimée dans cette brève déclaration doctrinale : La justification par la foi. Oui, c'est vrai, sans ce fondement, il n'y a pas de Christianisme. Mais nous ne pouvons pas en rester là. Par toutes les fibres de notre être, nous croyons à ce fondement. Mais, une fois cette affirmation admise, savons-nous vraiment ce qui compose et constitue la foi ?
    La justification par la foi peut n'être qu'une théologie, une doctrine, un credo, un admirable concept. Examinez cette lettre et voyez ce qui a amené l'apôtre à la position qu'il occupe.  
    Dans son Christianisme, il fonde tout son salut, sa vie, son ministère, son endurance, son espérance éternelle, sur une seule chose, qui est présentée comme la racine de la lettre elle-même au chapitre 1, verset 15 :

"Lorsqu'il plut à celui qui m'avait choisi et mis à part dès le sein de ma mère, et qui m'a appelé par sa grâce, de révéler en moi soin Fils .... ",
ou dans une autre traduction :
"Lorsque celui qui m'avait choisi et mis à part même avant ma naissance, et qui m'a appelé par sa grâce, trouva bon de révéler Son Fils en moi... "

Quelle est donc la réponse que nous cherchons ?

La révélation intérieure du Fils de Dieu.

Voilà une ligne de force qui court à travers toute la lettre, comme à travers tous les écrits de Paul. "Christ vit en moi" dit-il. Qu'il s'agisse de la loi, de l'alliance, de l'Esprit d'adoption, il souligne le passage de ce qui est extérieur à ce qui est intérieur, de l'objectif au subjectif. Tout maintenant émane de Christ qui demeure en moi par le Saint-Esprit, et c'est là ce qu'il entend quand il met tellement en relief la liberté spirituelle. Il est entré dans toute la signification de cette parole du Seigneur : "Si le Fils vous affranchit, vous serez réellement libres." Libérés par la vie et la puissance de Christ en nous! C'est l'Esprit d'adoption en nous, qui constitue le Christianisme.
    On ne devient Chrétien par aucune autre voie. Dieu a révélé Son Fils en Nous. Nous devons alors demander à Paul quelle est la première chose qu'il a vue, quand cette révélation lui est venue, et quel fut son effet. Naturellement, tout ce que nous avons de la plume de l'apôtre lui était venu par révélation. Pourtant, il y a dans cette lettre quelque chose qui est à la base de tout le reste. Mais ici il faut que je m'arrête pour souligner un point. Paul se donne du mal pour bien faire comprendre que cette connaissance du Fils de Dieu, qui constitue pour lui le Christianisme, fut personnelle, directe et indépendante de toute influence extérieure. Voici comment il s'exprime :

"L'Évangile n'est pas de l'homme, car je ne l'ai reçu, ni appris d'un homme, mais par une révélation de Jésus-Christ" (1 :11-12).

    Le voilà, le vrai Christianisme. Quel que soit l'instrument qu'il plaise à Dieu d'utiliser pour nous le faire connaître, il ne pourra jamais nous communiquer Christ, le mettre en nous, accomplir le miracle de donner à l'aveugle la faculté de voir. Seul, le Tout-Puissant Esprit de Dieu peut l'accomplir, et nous faire pousser cette exclamation émerveillée : "Je vois !…" En dehors de cet acte, notre Christianisme, si bon qu'il nous paraisse, ne sera jamais qu'extérieur et de seconde main. Pour présenter l'Évangile dans la vérité, il faut insister sur la nécessité d'une expérience personnelle de la souveraineté du Saint-Esprit en nous. C'est cela qui constituera l'enjeu de l'épreuve suprême a laquelle le Christianisme devra tôt ou tard être soumis.
    Nous pouvons maintenant poser la question : "Dans la circonstance à laquelle Paul fait allusion, que vit-il ? Que découvrit-il du Fils de Dieu ?" La réponse complète exige un retour au chemin de Damas. Mais que nous montre t-elle, cette lettre ? On peut résumer la réponse en un seul mat : "la Croix." Les trois allusions de Paul à la Croix, dans les Galates, portent sur trois aspects :

"J'ai été crucifié avec Christ"  (2 :20) – 
"Ceux qui sont à Jésus-Christ ont crucifié la chair avec ses passions et ses désirs"  (5 :24) –
"Loin de moi la pensée de me glorifier d'autre chose que de la Croix de notre Seigneur Jésus-Christ, par qui le monde est crucifié pour moi comme je le suis pour le monde " (6.14)

   Les trois aspects sont : 1) L'aspect personnel : "J'ai été crucifié", 2) La vie sous la domination de la chair : "... ont crucifié la chair avec ses passions et ses désirs", 3) Le monde : "crucifié  pour le monde", les valeurs, les systèmes, les ambitions de ce monde.
    La Croix sous ce triple rapport, c'est le Christianisme. Nous ne finirons jamais de nous émerveiller de ce que cet homme violent, qui aurait volontiers traîné Jésus de Nazareth à la crucifixion, en soit venu à voir qu'il allait être crucifié lui-même. Mais c'est pour d'autres raisons qu'il s'en glorifie maintenant.
    Rien d'étonnant de l'entendre dire : " ...qui m'a appelé par Sa grâce." Quelle leçon tirer de tout cela ? La leçon que nous devons en tirer, c'est que le vrai Christianisme est le produit d'une expérience dévastatrice de la Croix. Voir Christ, le Fils de Dieu crucifié, c'est se voir soi-même cloué au bois et mis en pièces.
  Tôt ou tard, cette expérience doit nous atteindre pour que notre Christianisme soit l'expression du Christ en nous, du Christ crucifié, ressuscité et souverainement élevé. Le vrai Chrétien est un homme crucifié, et l'Église est un corps crucifié.
Le Fils de Dieu se révélant en Lui ! Quel fut donc, pour l'apôtre, l'effet de cette révélation ? Elle lui donna une nouvelle dimension et lui ouvrit un nouvel horizon. Ce fut le point final d'une histoire et le commencement d'une autre. Auparavant la Croix était un scandale intolérable, elle devint la puissance et la sagesse de Dieu. Cette Jérusalem d'en bas n'était plus la véritable ; la Jérusalem d'en haut avait pris sa place.
    L'ancienne histoire était fondée sur la perspective d'un temps nouveau, qui serait concentré sur les institutions d'Israël, Jérusalem, le Temple, la Loi, le Sabbat. La nouvelle histoire est basée sur l'inimitié, démontrée à la Croix, de tout ce système.
Elle est centrée maintenant sur une nation spirituelle, une Jérusalem céleste, qui n'a pas été "faite de main d'homme", une "loi de l'Esprit de vie en Jésus-Christ" et un "repos de Sabbat", réservé au peuple nouveau. Le voilà, le Christianisme selon le Nouveau Testament, selon la révélation que Paul eut du Fils de Dieu en lui.
Résumons :
    Nous reconnaissons pleinement que la réelle occasion de la rédaction de cette épître aux Galates était, et est toujours, la question de savoir quel est pour l'homme, le seul moyen de s'approcher de Dieu et d'être agréé par Lui. Cette question fondamentale est ici  débattue victorieusement, toute équivoque est levée, et rien ne pourra infirmer les conclusions de cette épître.
    Or, même si nous avons accepté tout ce qui précède, nous ne sommes toujours pas à l'abri de certains conflits. Comment se fait-il, qu'après avoir accepté cette doctrine fondamentale et l'avoir fixée dans ses articles de foi, le Christianisme connaisse tant de conflits ? Le Christianisme primitif lui-même, bien qu'ayant accepté ce fondement, nous renvoie l'écho de certaines divergences.
    Or, en regardant de plus près la controverse qui agite cette lettre, nous constatons que ce n'est pas seulement le fondement qui devait être purifié, mais ce que l'on mettait dessus également. Les apôtres dans ce domaine, même Pierre et Jacques, manquaient parfois de franchise (voyez ch.2 :11-14).
    Les principaux d'entre eux étaient en désaccord, non pas sur la doctrine, mais sur ce qui était leur vraie position dans le secret de leur cœur. Extérieurement et de manière doctrinale, ils ne contestaient rien, mais dans les profondeurs de leur constitution religieuse, une draconienne "circoncision," coupure et séparation, n'avait pas encore été consumée. Ils étaient encore attachés à leur naissance, à leur formation, leur tradition, leur hérédité, leur héritage.
    Chez Paul, qui avait connu un enracinement plus absolu dans le Judaïsme, qui l'avait absorbé plus qu'eux tous (1 :11-14), cette coupure radicale, cette opération de chirurgie spirituelle, était chose faite. Les reliquats du Judaïsme historique et les survivances de la religion naturelle, se heurtant à l'émancipation absolue et définitive par la Croix, provoquèrent un conflit dont la véritable cause était la menace de voir s'altérer la vraie nature du Christianisme, l'Évangile.
    C'était la dangereuse insinuation d'un mélange, dont Dieu avait formellement condamné le principe sous l'ancienne alliance, en interdisant de labourer avec un bœuf et un âne attelés ensemble, ou de porter un vêtement tissé de laine mêlée de coton. Paul, en raison du labourage profond qu'avait opéré la Croix dans son être le plus intime, perça à jour cette menace contre la pureté du Christianisme, et se leva pour assurer "la défense de l'Évangile."
    Nous débouchons ainsi sur le conflit séculaire, non seulement entre la Loi et la Grâce, mais entre la vraie nature du Christianisme et les éléments qui lui ont été ajoutés. Il y a des gens que l'on appelle Chrétiens, qui n'ont aucune expérience de la nouvelle naissance et de la régénération, pas plus que d'une connaissance personnelle du Seigneur ou d'une marche personnelle avec Lui. Et il y en a beaucoup dont la conduite, la tenue et les fréquentations son non seulement un reniement de Christ, mais un défi à la décence. La nomenclature des écarts va de la religion de simple tradition jusqu'à la mondanité sans voile, avec des degrés et des nuances intermédiaires.
    Nous terminons donc en disant que le véritable enjeu de la bataille qui est engagée, c'est la sauvegarde de la vraie nature du Christianisme. Ce qu'il nous faut, ce sont des hommes "dont les yeux ont vu le Roi," des hommes qui peuvent dire en toute vérité : "Il a plu à Dieu de révéler Son Fils en moi ", des hommes qui auront un fardeau sur le cœur : "défendre la pureté de l’Évangile", et qui ne reculeront pas devant le prix à payer pour le témoignage de Jésus.
    C'est au sein du "Christianisme" qu'ils se heurteront aux oppositions qui les feront le plus souffrir. Il en a toujours été ainsi.

2) L’Église selon la pensée de Dieu.

    Notre attention a été attirée, une fois de plus, sur le rapport qui existe entre la Croix, l’Église et le conflit spirituel. Ce qui nous a surtout frappé, c'est que dans la pensée de Dieu, la Croix doit mener directement et sans délai à l’Église. Vous permettrez qu'avant de poursuivre j'ajoute quelques mots pour insister sur cette vérité.

L'expression de la vie du Seigneur Jésus dans l’Église.

    Il peut arriver qu'un message d'évangélisation soit une prédication de la Croix, sans pour autant déboucher directement sur l'Église. II est également possible d'enseigner le sens profond de la Croix, c'est-à-dire ses aspects qui dépassent les questions élémentaires de la nouvelle naissance et de la justification, sans toutefois déboucher sur l'Église.
    Dans les deux cas ont est passé à côté de la pensée de Dieu, on a manqué son but. Quelqu'un dira peut-être : "Tous ceux qui sont nés de nouveau font partie de l'Église et c'est d'ailleurs par la nouvelle naissance qu'elle est constituée. L'Église n'est-elle pas l'assemblée de tous ceux qui sont né de nouveau ?" C'est vrai, mais ce n'est pas de cela que je parle. 
    Cette condition fondamentale, un rassemblement de Chrétiens nés de nouveau, peut-être remplie ici ou là sans que l'on soit pour autant en présence de la réalité pratique de l'Église. Dans ce domaine, dans ce qui touche aux valeurs pratiques, à la réalité concrète, on peut se trouver confronté à quelque chose qui n'est quand même pas une expression de l'Église, le Corps de Christ.
    Je ne parle pas en ce moment de ce que certains appellent l'Église mystique qui, quelque part, en dehors de cet univers visible, réaliserait l'unité réelle de tous les enfants de Dieu. Je ne cherche pas à contester cette idée, elle est peut-être juste, mais je voudrais faire comprendre qu'il y a plus. S'il n'y avait que cela, alors peut-être, aurions-nous eu des excuses pour tout ce qui existe sur cette terre aujourd'hui. Nous pourrions tout accepter sans nous poser de questions, sans connaître de souffrance intérieure, et, continuant notre bonhomme de chemin, nous pourrions dire : "Oh ! oui, c'est vrai que les enfants de Dieu sont divisés en des milliers de sectes et de factions antagonistes, cependant nous n'y prenons pas garde car, dans les cieux, ils sont tous un, ils partagent une vie commune !"
    Je suis sûr que certains d'entre nous sentent que ce n'est pas là l'attitude que le Seigneur voudrait que nous ayons. Non, je ne parle pas de l'Église mystique (pour employer un terme dont j'ai toujours eu peu peur), ce qui m'intéresse, c'est l'Église réelle, l'Église telle quelle est véritablement.
    Le Seigneur Jésus est mort afin qu'il y ait sur cette terre une expression de ce qu'Il est, Lui, au Ciel, une expression vivante et visible de Sa Vie. Il n'y a aucun doute que l'expression "le Corps de Christ" signifie plus que le simple fait que tous les membres partagent une même vie. Elle signifie que tous forment ensemble un seul corps.
    Prenez l'exemple de nos corps humains, il peut arriver que quelque chose vienne rompre l'harmonie de nos membres : des microbes, une blessure, de sorte que la coordination entre eux soit perdue, qu'il n'y ait plus de coopération, plus d'harmonie dans leur fonctionnement, que l'anarchie s'instaure. Certains membres agiront indépendamment, négligeant les autres. Toutefois, malgré toutes ces irrégularités, ces incohérences, nous ne pourrons pas dire que ce corps soit habité de deux ou trois types de vies différentes.
    Nous ne dirons pas que cet homme ou cette femme ont la vie d'un homme et d'un chien, celle d'un oiseau et d'un poisson, deux vies qui n'ont rien de commun, ce qui expliquerait les contradictions relevées dans leur constitution.
Non, il s'agit d'un seul type de vie, de la vie humaine, et à cet égard, mon corps est une unité. Mais nous dirons que ce corps-là n'exprime pas qu'un seul type de vie l'habite, il ne manifeste pas l'unité de sa constitution par une activité coordonnée. C'est aussi le cas de l'Église de tous ceux qui sont nés de nouveau. Ils partagent la même vie, celle du Seigneur, et, cependant, dans le corps qu'ils forment, ils ne permettent pas à cette vie de se manifester sous la forme d'un organisme aux éléments bien coordonnés fonctionnant dans un ordre parfait.
    Et pensez-vous qu'il suffit au Seigneur de savoir que la vie s'y trouve, si l'expression de cette vie est un tissu de contradictions ? Certainement non. Il ne suffit donc pas d'être né de nouveau, d'avoir reçu la vie du Seigneur. Cette vie a été donnée dans le seul but de produire cet organisme équilibré dont l'activité bien réglée est le signe qu'une parfaite harmonie règne entre ses différentes fonctions : "l'église qui est Son Corps ". C'est de cela que je veux vous parler, car l'existence d'une Église, une mais invisible, dont les membres partagent la même vie, ne m'intéresse pas autant que l'Église qui est un organisme vivant fonctionnant sous le gouvernement souverain de Christ, la Tête. C'est à cette réalité-là que la Croix devrait aboutir.
    Je le répète, il est possible de prêcher un Évangile qui ne débouche pas du tout sur ce que je viens de décrire. Un tel Évangile passe à côté de l'intention de Dieu, concernant la Croix. Il peut arriver que nous ayons un enseignement de la signification complète de la Croix qui n'ait pas comme conséquence l'Église selon la pensée de Dieu. Un tel enseignement n'atteint pas le but.
    Nous avons connu des enseignements de ce genre qui présentaient la signification complète de la Croix, mais ne pouvaient rien changer à ce que nous avons toujours vu parmi les hommes. Toutes les divisions sont demeurées, toutes les distinctions entre les diverses sections du Christianisme se sont perpétuées, toutes ces différences, ces conflits ont continué d'exister en présence d'un message sur la pleine signification du Calvaire.
    C'est qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas dans cet enseignement, car la Croix, là où elle est vraiment reçue, où elle est libre d'agir, ne peut que détruire tout ce qui est en contradiction avec la pensée divine concernant l'Église. La Croix est destinée à conduire à l'Église telle que Dieu la conçoit.
   Nous disions tout à l'heure que la Croix agissait dans différents domaines, dans différentes
directions, pour détruire tout ce qui empêche Dieu de réaliser Sa pensée en ce qui concerne l'Église. Reconnaissons avant d'en étudier d'autres que la Croix fournit le terrain sur lequel l'Église est édifiée, et que l'Église est destinée à révéler ce que la Croix signifie.
    Lorsque l'Église approchera de l'expression complète de la pensée de Dieu, vous verrez alors tout ce que la Croix représente et ce quelle est capable de produire. L'Église sera l'incarnation du Calvaire. L'Église doit prêcher la Croix, tout d'abord en la vivant. C'est ainsi que s'ouvre le livre des Actes.
    Vous pouvez vous rappeler combien la situation était lamentable dans les jours qui précédèrent le Calvaire et ce, malgré la présence de Christ parmi les hommes. Tous ces vieux ferments de division, ces luttes, ce besoin d'affirmer ses droits, vous les retrouvez dans les Évangiles, même parmi les disciples, et même parmi ceux qui étaient les plus proches de Lui. Mais lorsque la Croix est devenue un fait accompli et que le Saint-Esprit en a fait pénétrer toute la valeur dans la vie de cette communauté, alors vous avez une révélation magnifique de ce que la Croix produit : "Car ils avaient tout en commun et aucun ne disait que ce qu'il possédait lui appartint en propre".
    Quelque chose s'était passé, tout intérêt personnel avait disparu et les rivalités d'autrefois n'existaient plus. Désormais, tout ce qu'ils avaient était pour les autres, et c'est l'amour, la joie et la paix qui régnaient. Les derniers versets d'actes 2 sont une révélation magnifique de ce que la Croix peut faire dans un peuple. Et le Seigneur souhaite qu'il en soit toujours ainsi.  
    Lorsque vous arrivez aux épîtres aux Corinthiens, à cette situation qui se trouve en contradiction absolue avec ce qu'est l'Église dans la pensée de Dieu, la seule solution, c'est de ne connaître rien d'autre que "Jésus-Christ, et Jésus-Christ crucifié."
    Pour ramener l'Église à ce quelle devrait être, il faut toujours revenir à la Croix. En trouvant dans la Croix son terrain et ses moyens, l'Église devient l'incarnation de tout ce que la Croix représente. Ces principes deviennent une réalité lorsque Dieu obtient que Son peuple se conforme à Sa pensée. Si donc l'Église est le fruit de la Croix, elle doit en illustrer la nature et la signification.
    Quelle est l’œuvre de la Croix ? Quelle est la fonction de la Croix ? Nous avons déjà étudié ces questions dans trois directions différentes : Dieu, l'homme et Satan. Il nous reste à voir une ou deux conséquences de l’œuvre de la Croix, qui portent dans les trois directions à la fois.

La Croix, fin de toute idolâtrie.

    Avant tout, la Croix met un point final à toute forme d'idolâtrie. Réfléchissez à ce problème quelques instants. A l'idolâtrie est liée une longue histoire, une histoire lourde de conséquences. Ce que je vais dire maintenant peut être vérifié tout au long des Écritures, mais si nous voulons rassembler tous les éléments et passer en revue tous les événements qui s'y rapportent, il nous faudrait un temps considérable. C'est que, si nous connaissions la vérité, nous verrions que l'idolâtrie se trouve derrière tout ce qui a rendu la Croix de Christ nécessaire.
    Lorsque la Croix devient vraiment vivante et efficace, son oeuvre est de détruire toute idolâtrie sous une forme ou une autre. Je crois qu'il vous sera difficile de saisir ces choses pour le moment, mais nous allons quand même poursuivre.
    La Croix, dans son essence même, est liée à l'adoration. C'est là, en dernière analyse, la signification suprême et le but d'un univers qui converge tout entier vers la Croix. C'est-à-dire que, depuis la chute, la Croix de Christ est devenue le centre de l'univers, et qu'elle doit l'envahir en partant de son centre pour atteindre sa circonférence. Par sa nature même, la Croix a une position centrale et une portée universelle, tandis qu'au cœur même et aux frontières de l'univers, ce qui seul compte, c'est l'adoration.
    Si vous compreniez le sens de l'adoration, vous verriez aussi que l'idolâtrie est toujours ce qui, directement ou indirectement, retire ou tend à retirer son caractère absolu à cette vérité que "Dieu seul est la vie de l'homme."
    Dieu a voulu être la source, l'origine et le centre de la vie de l'homme. Ainsi l'homme, pour subsister, dépend absolument de Dieu, ce n'est qu'en Lui qu'il peut trouver sa vie. Dieu a établi des liens indissolubles entre l'homme et Lui, et II ne permettra jamais que l'homme ait la vie authentique en dehors de Lui. Il en a fait une loi dans Son univers : L'homme ne peut vivre vraiment, il ne peut connaître le sens que Dieu a donné à la vie, en dehors de Lui. Dieu est la vie de l'homme, et tout ce qui se substitue chez l'homme à la vie de Dieu est une idolâtrie. De même, tout ce qui l'en éloigne ou tend à l'en éloigner est, en principe, une idolâtrie. Retenez bien que c'est Dieu en Personne qui est la vie de l'homme et son centre. Nous y reviendrons plus loin.

Ce qu'est l'idolâtrie.

    L'idolâtrie, c'est tout ce qui ne fait pas de Dieu le fondement ou le but de la vie de l'homme. Cette définition va très loin, car nous avons l'habitude de croire que l'idolâtrie, c'est adorer les idoles des païens.
    Parfois, nous en faisons quelque chose de plus actuel, en disant qu'il s'agit de ce que les gens mettent à la place de Dieu. Mais l'idolâtrie va beaucoup plus loin, jamais les Écritures ne la considèrent comme un élément négatif ou passif.
    Dans la Parole de Dieu, l'idolâtrie est toujours présentée comme une force agissante mise en œuvre par un cerveau ennemi de Dieu. Ce cerveau satanique a toujours comme premier souci et comme objectif immuable d'arriver par tous les moyens à mettre quelque chose à la place du Seigneur.
    Il se peut, voyez-vous, que nous mettions les choses du Seigneur à la place du Seigneur Lui-même, et ceci, dans son essence, c'est de l'idolâtrie. A la place du Seigneur qui est la raison de vivre de l'homme, on a mis Son oeuvre et ce qu'Il a institué : c'est de l'idolâtrie. Et la Croix a toujours été employée par le Saint-Esprit pour détruire tout ce qui prend la place du Seigneur, la place qui Lui revient de droit. L'idolâtrie a toujours été religieuse et la religion chrétienne, comme les autres, peut être marquée par l'idolâtrie.
    Ce sont des paroles sévères mais justifiées. L'idolâtrie existe, en principe, chaque fois qu'une chose, même bonne, devient une fin en soi au lieu de mener à Dieu, le Seigneur. Il existe des œuvres et des institutions qui sont non seulement inoffensives, mais même très bonnes, et auxquelles, pourtant, on a permis de prendre la place du Seigneur. Ainsi de bonnes choses peuvent incarner le principe de l'idolâtrie chez ceux gui leur ont donné leur vie.
    Touchez, devant certains Chrétiens, à telle ou telle institution chrétienne et, même si votre tentative a pour but de leur apporter quelque chose de plus du Seigneur, vous vous heurterez à un sentiment de vénération jalouse envers l'institution, qui les rend complètement aveugles, incapables d'imaginer une mesure plus grande du Seigneur.  
    Il peut vous arriver d'être tellement consacré, tellement dévoué à une dénomination, à une société missionnaire, à une quelconque oeuvre chrétienne, qu'il n'y ait plus de place en vous pour une mesure plus grande du Seigneur.
    La chose est devenue une fin en soi, votre raison de vivre, et lorsque le Seigneur veut vous faire découvrir quelque chose de plus de Sa Personne, l'obstacle est devenu cette bonne oeuvre, cette association, cette institution ou cette tradition chrétienne.
    Une telle attitude est dans son essence une forme d'idolâtrie, et l'histoire nous rappelle combien de fois le Seigneur a dû donner des coups terribles à ce qui était bon en soi, afin de S'assurer que Son peuple le recherche Lui, et Lui Seul.
    Cela même qu'Il a pu donner de Sa main, à un moment ou à un autre, a dû être retiré ou détruit parce que le don était devenu une fin en soi. C'est ce qui est en train de se passer de nos jours, et il est indispensable que le Seigneur agisse ainsi.
    Aujourd'hui, le Seigneur ne protège plus les bonnes choses. Si elles ont évolué de telle manière que les hommes leur aient donné leur vie et s'y soient attachés, Il va permettre qu'elles soient brisées et complètement détruites.

La personne même de Dieu, vie et bien suprême de l'homme.

    Que recherche Dieu aujourd'hui ? II veut faire de Sa Propre Personne la raison de vivre de l'homme, à l'exclusion des choses qui ont rapport avec Lui. Je le répète, chaque fois que vous touchez à une institution ou à une oeuvre qui porte le nom du Seigneur, même si c'est dans le but de faire avancer les gens avec le Seigneur, vous vous heurtez à une opposition farouche.
    Inversement, si l'appel que vous adressez aux gens d'aller de l'avant avec le Seigneur paraît impliquer qu'il leur faille se séparer de telle ou telle institution ou oeuvre chrétienne, alors la guerre est déclarée. Ce qui montre que Satan, dans la campagne permanente qu'il a engagée pour promouvoir l'idolâtrie, a réussi à s'introduire parmi les Chrétiens au niveau de ces choses qui, quoique bonnes, très bonnes même, prennent la place du Seigneur.
    Et vous verrez, si vous êtes sensibles spirituellement, que ce n'est pas aux institutions établies que vous aurez à faire, mais à une puissance spirituelle redoutable. En avez-vous déjà fait l'expérience ? C'est en tout cas une réalité terrible. Si je ne m'y étais pas personnellement heurté, je n'aurais jamais cru qu'il y avait des forces si formidables derrière les institutions chrétiennes, prêtes à vous faire la guerre si votre ministère les touche. Ce n'est pas l'institution elle-même ou ceux qui la défendent, mais une puissance qui menace votre vie, qui veut vous détruire. Or, dans son principe et dans son essence, cette puissance, bien-aimés, c'est l'idolâtrie. Car finalement, le résultat de son action, c'est que le Seigneur ne peut obtenir ce que Son amour recherche, qu'Il n'arrive pas à amener Son peuple là où Il le veut, parce que Son peuple s'est laissé prendre par l’œuvre de Dieu. Les enfants de Dieu ne sont pas capables de faire la distinction entre les choses du Seigneur et la Personne du Seigneur.
    La Croix fera table rase de tous ces obstacles. Ce qui est merveilleux, c'est que cette action est la conséquence inévitable d'une oeuvre authentique du Saint-Esprit. Mettez donc ce principe à l'épreuve dans votre propre cas. Qu'en fut-il de Saul de Tarse ? Essayez de toucher aux institutions qu'il défend, au Judaïsme et à tout son système religieux, et vous verrez ce qui vous attendra. La force d'un bigot, certes, mais plus encore, toutes les puissances spirituelles de l'enfer.
    Existe-t-il quelque chose dans l'univers de Dieu qui puisse faire fasse à pareille opposition, avoir raison d'elle, la détruire et s'en débarrasser totalement, en sorte qu'elle n'ait plus aucun pouvoir sur l'homme ?
    Il n'existe rien de semblable dans tout l'univers de Dieu, si ce n'est la Croix du Seigneur Jésus. Elle seule est capable de le faire, elle seule l'a effectivement fait.
    Il ne s'agissait pas, dans le livre des Actes, d'un développement nouveau du Judaïsme, de l'absorption de nouvelles idées qui auraient supplanté les anciennes, mais d'une destruction totale. La Croix, Jésus-Christ crucifié, en furent les artisans. Et il y a bien d'autres exemples similaires.
    Chaque fois qu'elle en a l'occasion, la Croix intervient avec une puissance extraordinaire pour détruire tous ce qui a pris la place du Seigneur, et Lui permettre de devenir ce qu'Il a toujours voulu être : la vie de Son peuple et son bien suprême.
    C'est l’œuvre de la Croix. Elle se débarrasse des formes visibles et du principe même de l'idolâtrie, détruisant par la même occasion les œuvres de l'ennemi et retirant à Satan les fondements de sa puissance. La Croix du Seigneur Jésus donne à Dieu la place qui Lui revient, la place de souveraineté absolue.
    Nous comprenons peut-être un peu mieux pourquoi le Seigneur doit retirer certaines choses qu'il a Lui-même données, et qui sont des dons de Sa grâce. Nous comprenons pourquoi Il S'efforce de nous amener à tout Lui abandonner et à ne rien considérer comme une fin en soi, de nous maintenir détachés intérieurement de tout, afin qu'à tout moment nous puissions, sans aucune difficulté, laisser tomber notre position, notre ministère ou notre oeuvre pour le Seigneur, n'importe quoi et tout. Ce que nous avons, ce que nous sommes, nous en disposons pour le Seigneur. Nous laisserions volontiers notre place à d'autres sans aucune trace de jalousie, sans amertume.
    C'est pour cette raison que le Seigneur pouvait employer des termes si élogieux de Moïse  "Moïse, mon serviteur !" "Moïse, l'homme de Dieu !" Voilà les titres, les distinctions de Moïse.
Pourquoi donc ? Vous vous rappelez que certains en Israël avaient contesté la position de Moïse : "Est-ce seulement par Moïse que l'Eternel parle ? N'est-ce pas aussi par nous qu'il parle ?" Et puis, plus tard, quand Dathan, Abiram et leurs partisans le réprimandèrent, et Aaron avec lui, en disant : "C'en est trop, car toute l'assemblée, tous sont saints, et l'Eternel est au milieu d'eux. Pourquoi vous élevez-vous au-dessus de l'assemblée de l'Eternel ?
    " Que fit Moise ? Est-ce qu'il combattit pour garder sa position ? Chercha-t-il à se justifier? Se laissa-t-il sombrer dans un noir désespoir en se voyant contesté et sur le point de perdre sa place ? Non, il se tourna vers l'Eternel et lui dit : "Puisque Tu m'as donné cette position, aussi longtemps que Tu voudras m'y maintenir, Il Te faudra veiller sur moi et me rendre capable de remplir mon ministère. Mais si Tu veux que je me retire, je suis prêt à m'en aller, si Tu veux me remplacer par eux, je n'y vois aucune objection !
    Puisse tout le peuple de l'Eternel être composé de prophètes !" Telle fut son attitude, et le Seigneur dit : "Je suis tout à fait disposé à te donner ma caution et à m'engager à tes côtés." Et c'est ce qu'Il fit. Vous savez ce qui arriva à Abiram, à Dathan et à leurs partisans. La douceur et l'humilité de Moise furent la caractéristique dominante de sa vie : "Or Moïse était un homme fort patient, plus qu'aucun homme sur la face de la terre" (Nombres 12 :3) (Synodale et Darby : "un homme fort doux"). En quoi consistait cette patience, cette douceur ?  Tout ce qu'il avait entre les mains, il en disposait pour le Seigneur et non pour lui-même. Avec une telle attitude, il n'est jamais difficile d'accepter que nous soit retiré, quand il le faut, ce qui nous a été donné par le Seigneur.
    Mais hélas, il n'en est pas toujours ainsi des Chrétiens. Si par hasard vous touchez à leur oeuvre, ou si vous vous trouvez en travers de leur ministère, alors à quelle opposition ne vous heurtez-vous pas ! C'est de l'idolâtrie.
    La Croix en finit avec cela, et, lorsqu'elle aura fait son oeuvre en nous, nous deviendrons patients et très doux, nous ne retiendrons rien pour nous-mêmes, nous disposerons de tout pour le Seigneur et pour Sa gloire. Et, lorsqu'on nous retirera quelque chose, nous n'aurons aucune difficulté à céder, nous pourrons sans peine nous retirer et laisser les autres prendre la place. Ce sera au Seigneur de décider, et nous laisserons au Seigneur toute liberté d'action. Tel est le résultat du passage de la Croix, bien-aimés !
    Aucun de nous n'aura à se faire du souci pour l'accomplissement de son ministère, quand 1'œuvre de la Croix lui aura appris à s'abandonner aux intérêts du Seigneur. Le Seigneur veillera à ce que, lorsque la course sera terminée, ce qu'Il avait l'intention d'accomplir dans notre vie soit réalisé envers et contre toutes les oppositions des hommes et des démons. Ce ne sera peut-être pas de la manière à laquelle nous avions pensé, mais ce sera fait.
    Dieu aura préservé ce qui fait la valeur de nos vies. Il ne permettra pas la perte. Tout ce qui est contraire à cette attitude est, dans son principe même, de l'idolâtrie, et la Croix y est absolument opposée. C'est la raison pour laquelle, comme nous l'avons déjà dit, le Seigneur est si souvent obligé de retirer les dons que Sa main a faits, parce qu'au cours des années ils ont pris Sa place.

La Croix ôte la malédiction de Babel.

    Encore un ou deux mots avant de conclure pour dire que la Croix ôte la malédiction de Babel. Qu'est-ce que donc que Babel ou Babylone, et qui est Babel à son apogée ? C'est d'abord le principe selon lequel l'homme possède en lui-même le pouvoir de se sauver : "Bâtissons une tour et faisons-nous un nom" (Genèse 11 :4).
    Ceci c'était, comme vous le savez bien, la réaction des hommes au déluge. Si Dieu devait décider de noyer de nouveau le monde entier, eux auraient trouvé le moyen de se sauver grâce à cette tour s'élevant jusqu'aux cieux, qui les porterait plus haut que tout ce que Dieu pourrait atteindre, leur donnant ainsi un salut forgé de leurs propres mains.
    Personne de nos jours ne pourrait tenir un langage pareil, mais le principe qui se trouve derrière ces paroles est humain et revient à croire qu'il existe dans la nature de l'homme une vertu qui, si elle était développée et nourrie, lui permettrait de se sauver par ses propres forces, d'être délivré par ses propres ressources. C'est là Babel ou Babylone : "Voyez Babylone la grande, que j'ai bâtie" (Daniel 4 :30).
    Babel et Babylone représentent ce que peut faire le "moi", leur rôle est de glorifier l'homme. Dans l'intention de Dieu la destinée de l'homme est d'aboutir à la gloire, mais c'est le moyen d'y parvenir qui constitue le problème. Dieu dit que l'homme n'arrivera à réaliser sa destinée que grâce à la Croix du Seigneur Jésus, par laquelle il est totalement vidé de tout ce qu'il est en lui-même. C'est là, la voie du Fils de l'Homme, qui Se dépouilla Lui-même et fut finalement couronné de gloire et d'honneur.
    Mais, par sa nature, l'homme ne prend pas spontanément cette voie. Vous voyez, Babylone n'est, après tout, que le principe qu'incarnent la Bête et le Faux Prophète. C'est ce que l'homme a en lui-même et ce sur quoi il compte pour arriver à son salut. Personne parmi nous n'oserait adopter consciemment une attitude pareille, et, cependant, tôt ou tard nous nous laissons prendre au piège. Je doute qu'il y en ait un seul parmi nous qui ne soit jamais tombé dans cet égarement. Ne vous est-il jamais arrivé de sonder votre cœur en cherchant à y trouver quelque chose qui vous procurerait joie et satisfaction, qui vous donnerait l'impression d'être en paix avec Dieu, en bons termes avec Lui ? Vous le faites constamment, chaque fois que vous vous lamentez sur vous-même, par exemple.
    Vous voyez, il n'y a que deux possibilités : "Se lamenter sur soi ou se réjouir dans le Seigneur." Et ceux qui ont le plus de raisons de désespérer d'eux-mêmes sont justement ceux qui devraient être les plus joyeux dans le Seigneur, si seulement ils savaient sur quelle base Il sauve. Car le salut de Dieu est très pratique : "Tu es l'être le plus misérable, le plus incurable qui soit, et en toi-même tu ne seras rien de plus. Cependant, grâce à la foi que tu as en Mon Fils, Je considère que tu n'as jamais péché." C'est là le fondement du salut de Dieu. Si seulement nous pouvions vraiment nous en pénétrer, nous serions libérés de nos lamentations sur nous-mêmes, et la joie et le repos du Seigneur seraient l'inexpérience constante de nos vies. Toute autre attitude que celle-là, bien-aimés, c'est la malédiction de Babel.
    Dieu a mis Sa malédiction sur le principe du salut par nos propres forces et sur tout ce qui est une recherche d'une gloire personnelle. Si vous vous laissez prendre par cet esprit, vous serez abattus et misérables, car vous vous trouverez sous une malédiction terrible. Tout ce que nous venons de dire s'applique à l'Eglise et quand nous chantons : "Ton Église triomphante, ô Saint Agneau." Ne pensons pas qu'il s'agit d'un bel idéal que nous devons atteindre dans un avenir lointain. Nous sommes conviés à le vivre aujourd'hui même ! Dans la pensée de Dieu, l'Église est l'incarnation du message de ce cantique. En elle-même, vile et méprisable, mais, en Christ, infiniment glorieuse, promise par la foi dans le Seigneur Jésus à un merveilleux avenir, telle est la vocation de l'Église, tel est l'aboutissement de l’œuvre de la Croix.
    Si la Croix annule le principe de la malédiction de Babel, elle touche également à la conséquence directe de cette malédiction, au ferment de division que contient la nature humaine. Lorsque Dieu descendit maudire les constructeurs de la tour, Il jeta la confusion parmi eux, de sorte qu'à partir de ce moment, ils se divisèrent en une multitude de petits groupes ayant chacun une langue différente, totalement incapables de comprendre les autres, de marcher avec eux dans l'harmonie et la bonne entente. Ils n'avaient plus rien de commun, plus de base de communion. Ils étaient éparpillés, dans la confusion, complètement désintégrés.
    Le Calvaire répond à ce problème, il détruit tous les éléments de division de la nature humaine, il en triomphe et les transcende. Bien entendu, dans une certaine mesure, nous en avons fait l'expérience. Mais, il y a plus, l'Église doit être l'incarnation du Calvaire et ce n'est pas une petite affaire. L'Église, l'incarnation de ce principe, malgré ce que nous connaissons de son état sur cette terre, mais oui, il nous faut le répéter, il ne s'agit pas de quelque chose de mystique, d'abstrait, de théorique, mais d'une réalité pratique, d'une réalité vécue aujourd'hui sur cette terre.
    Il se pourrait que, comme ce fut le cas d'Israël après la captivité, la vraie représentation de la pensée de Dieu ne se trouve que dans un reste. Mais il faut qu'elle existe visiblement, c'est Dieu qui le veut. Et tout cela doit nous toucher de très près. La Croix nous débarrasse de ces traces de la malédiction qui, dans votre nature et dans la mienne, dans notre chair, nous Son peuple, provoque les divisions, les malentendus et les conflits.
    Ce sont les marques de la malédiction, et il faut que la Croix les détruise. Elle doit nous élever, vous et moi, à un niveau où un principe plus grand opère en nous et nous maintient dans l'unité malgré le poids du passé. Ce qui est merveilleux dans la Croix, c'est qu'elle permet à une communion fraternelle de se perpétuer, malgré tout ce qui, dans la constitution de la nature humaine, dans ses différences de tempéraments et de prédispositions, constitue un redoutable obstacle à la vie en commun. Elle forme un rempart contre les assauts directs et répétés de Satan, qui cherche par tous les moyens à la détruire.
    La Croix est capable de garder à la communion fraternelle son unité et son harmonie et de la faire durer jusqu'à la fin sans se désintégrer. Tout ceci à condition que la Croix reste constamment une réalité vivante. Si vous rencontrez une telle communion fraternelle, vous saurez que la Croix y est une réalité pratique et triomphante. S'il y a des discordes et des divisions, c'est sûrement parce que les enfants de Dieu n'ont pas accepté certaines implications de la Croix.
    J'ai souvent pensé que le don des langues au commencement n'était qu'un aspect du triomphe de la Croix sur les oeuvres de Satan et sur la malédiction. Je ne le recherche pas particulièrement en ce moment, mais j'ai souvent imaginé que, lorsqu'ils se réunissaient dans un même lieu à Parthes, Mèdes et Elamites, habitants de la Mésopotamie et d'autres contrées, ils entendaient, ensemble, et comprenaient tout ce qui se disait dans leur langue maternelle, comme s'il n'y avait eu qu'une seule langue. Dieu, par la Croix de Son fils, avait annulé Babel, quel triomphe ! Nous en resterons là pour l'instant, mais nous savons qu'à la fin, quoique nous ayons été tirés de toutes les nations, tribus et langues, nous parlerons tous la même langue, une langue céleste.
    Nous dirons peut-être : "Si ce n'est qu'un signe (et c'est un signe), que signifie-t-il donc ?" Il signifie que la Croix est le secret, le fondement du témoignage de l'Église, et que l'Église doit être l'incarnation de son triomphe définitif sur ces éléments de division et de destruction qui se trouvent dans la race humaine, en vous et en moi. II faut quelle influe chaque jour sur nos rapports les uns avec les autres.
    Plus nous connaîtrons la Croix et mieux nous nous entendrons, et plus vite nous pourrons surmonter tout ce qui nous blesse et nous divise. Dans ce domaine donc, l'existence même de l'Église est le résultat de l’œuvre de la Croix.
    Nous en avons assez dit pour le moment. Ce message demande une réaction de notre part, il nous adresse un appel très solennel. Que le Seigneur nous rende capables d'y répondre, de répondre à l'appel de la Croix dans tout ce qu'il représente et implique pour nos vies. L'Église est une réalité, et une réalité des plus concrètes. Demandez sans plus tarder au Seigneur de vous faire comprendre que l'Église est plus que quelque chose de mystique, d'abstrait, de lointain. Il faut qu'elle entre dans l'expérience de notre vie quotidienne et en devienne partie intégrante. Vous avez dit avoir vu l'Église, le Corps de Christ, vous en avez rendu témoignage, mais quel effet cela a-t-il eu sur vous ?
     Est-ce que vous continuez à mener une vie indépendante, à vous diriger tout seul, à faire vos projets personnels sans consulter personne, sans rechercher la communion des frères ? Est-ce que vous continuez à violer ces lois de la communion fraternelle et de la vie du Corps, ne voulant rendre compte qu'à vous-même ? Si vous en êtes encore là, et dans la mesure où vous n'avez pas changé, vous ne connaissez pas la Croix et encore moins l'Église. Vous ne pourrez pas connaître l'Église avant d'avoir connu la Croix. Vous ne savez rien de la Croix, elle n'a fait aucune oeuvre en vous. Si vraiment la Croix agit en nous, nous nous placerons spontanément sur le terrain de l'Église, le terrain de la communion fraternelle, de la dépendance les uns des autres, de la coopération. Oh ! Que le Seigneur nous confronte avec les conséquences pratiques de ce que nous croyons !

En Christ : un petit mot qui en dit long.

    Aucune formule, aucune expression ne se rencontre dans le Nouveau Testament plus souvent que cette petite locution : "en Christ." Elle se présente parfois sous des formes différentes dans nos Bibles, suivant les traductions. Nous aurons par exemple : "par le Christ" ou "avec Christ." Quelquefois, même dans l'original, on pourra avoir : "en Jésus-Christ" ou "en Lui" ou une autre forme équivalente. Mais dans les quelque deux cents passages où cette locution apparaît, le sens est le même. Dans l'ensemble du dogme chrétien, il n'y a rien qui soit plus expressif, mais il n'y a rien non plus qui soit plus mal compris, et dont la valeur soit plus méconnue.
    Dans une déclaration qui est le couronnement de tout ce qu'on peut dire et penser sur la question, les Écritures nous apprennent que Dieu a réuni, ou plus exactement, "récapitulé" "toutes choses" en Christ", et qu'en dehors de Lui, il n'existe rien qui puisse prétendre à une place quelconque dans Son dessein éternel (Ephésiens 1 :10). Tout ce qui se rapporte à ce dessein éternel, plan, méthodes, ressources, aussi bien que le temps et l'éternité, est christocentrique.

La création est en Christ.
La vie est en Christ.
La grâce magnifique est en Christ (Eph.1 :6).
La rédemption est en Christ.
La justice est en Christ.
L'espérance est en Christ.
La sanctification est en Christ.
Les bénédictions spirituelles sont en Christ.
La consolation est en Christ.
La paix est en Christ.
La prière efficace est seulement en Christ.
La force et les richesses sont en Christ.
Le dessein éternel est en Christ.
La nouvelle création est en Christ.
Les promesses sont en Christ.
C'est en Christ seulement qu'il n'y a plus de condamnation.
C'est en Christ qu'il n'y a qu'un seul Corps.
La récapitulation de toutes choses est en Christ.
Les liens unissant les Chrétiens dans l'affliction sont en Christ.
La réponse à "qui nous séparera ?", est en Christ.
C'est en Christ que se trouve l'homme devenu parfait,
La collaboration dans le ministère est en Christ (Rom. 16 :9).
Il y a les églises qui sont en Christ.
Il y a les morts en Christ.
C'est en Christ qu'il y a un seul homme nouveau.
C'est en Christ que nous avons tout pleinement.

    Cette formule embrasse l'éternité passée, les temps et l'éternité future. C'est en Christ, avant la fondation du monde, que Dieu nous a élus (Eph.1 :41 ; 1 Pi. 5 :10). Dans le temps, ce fait éternel et céleste prend corps et devient, par la Croix une réalité concrète, une expérience personnelle. Comme on va le voir, la Parole de Dieu exprime cette réalité en une série de termes qui représentent une progression les uns par rapport aux autres. Mais le principe est toujours le même.

"....devenus une même plante avec Lui par la conformité à sa mort" (Romains 6 :5).
"...rendu à la vie avec Lui" (Ephésiens 2 :5).
"...ressuscités ensemble en (Jésus-Christ)" (Ephésiens 2 :6).
"...assis ensemble en (avec) Jésus-Christ" (Ephésiens 2 :6).
" ...rapprochés... en Christ" (Ephésiens 2 :13).
" ...parfaitement unis" (1Corinthiens 1 :10).
" ...bien coordonné (tout l'édifice)" (Ephésiens 2 :21).
" ...noués ensemble" (Col. 2 :2, version anglaise).
" ...édifiés" (c'est-à-dire cimentés les uns aux autres)(Eph.2 :20).
" ...que nous vivions ensemble avec Lui" (1 Thes. 5 :10).
" ...travaillant avec Lui" (2 Corinthiens 6 :1).
" ...combattant ensemble d'une même âme" (Phi. 1 :27).
" ...assemblés en Son nom" (Matthieu 18 :20).

    A la fin de cette dispensation, quand tout ce qui précède aura eu son accomplissement, nous atteindrons le point culminant, en étant enlevés tous ensemble avec Lui (1 Thes. 4 :17).
L'éternité enfin pointe à l'horizon, et nous voyons dans Romains 8 :17 que nous sommes "glorifiés avec Lui."
    Dans le même ordre d'idée, nous avons le diptyque paulinien : "En Adam - En Christ", diptyque qui est en réalité, non pas de Paul, mais de l'Esprit de vérité, l'Esprit de Dieu. C'est, d'une part, le système qui nous rattache par nature à Adam et à l'ancienne création et, d'autre part, un régime nouveau et différent, qui est la conséquence de notre incorporation à Christ.

En Adam
"Dieu lui insuffla un souffle de vie" (Genèse 2 :7).
En Christ
"Il souffla sur eux et dit : recevez le Saint-Esprit" (Jean 20 :22).
En Adam
"Le premier Adam devint une âme vivante" (1 Cor. 15 :45).
En Christ
"Le dernier Adam devient un esprit vivifiant" (1Cor. 15 :45a).
En Adam
"Le jour où tu en mangeras, certainement tu mourras" (Gen. 2 :17).
En Christ
"Nouveauté de vie" (Romains 6 :4).
En Adam
"Tous meurent en Adam" (1 Cor. 15 :22).
En Christ
"Tous revivront en Christ" (1 Cor. 15 :22).
En Adam
"La loi du péché et de la mort" (Rom. 8 : 2).
En Christ
"La loi de l'Esprit de vie" (Romains 8 :2).
En Adam
"Il est devenu chair" (Gen. 6 :3) (version littérale).
En Christ
"Non pas selon la chair, mais selon l'Esprit" (Romains 8 :4).
En Adam
"La chair ne sert de rien" (Jean 6 :63).
Le "Moi" = échec (Ro.7).
En Christ
"Esprit" = victoire.
En Adam
"Le vieil homme qui se corrompt" (Eph. 4 : 22).
En Christ
"L'homme nouveau créé dans la justice et la sainteté" (Eph.4 : 24).
En Adam
"L'homme naturel... l'affection de la chair" (1 Cor. 2 :14, Ro.8 :6).
En Christ
"L'homme nouveau" (Col. 3 :10).
En Adam
"Dans ma chair… rien de bon" (Rom. 7 :18).
"La chair... la corruption" (Gal. 6 :8).
En Christ
"Nouveauté d'Esprit" (Ro.7 :6) " … par la conformité à sa résurrection" (Romains 6 :5).
En Adam
"Ce qui est né de la chair est chair" (Jean 3 :6).
En Christ
"Ils ont crucifié la chair" (Galates 5 :24).
En Adam
"La fin de ces choses, c'est la mort" (Romains 6 :21).
En Christ
" ... notre vieil homme a été crucifié" (Romains 6 :6).

    Toutes ces expressions, qui ne sont que de simples citations des Écritures, mettent en lumière le fait que Dieu a établi une séparation absolue entre les deux régimes ; ils s'excluent l'un l'autre. Un examen attentif de ces passages nous aidera en outre à reconnaître cette réalité fondamentale :
    Aucun homme ne peut vivre la vie chrétienne. Il n'y en a qu'un qui puisse vivre cette vie-là, c'est Christ. Notre incorporation doit être une expérience si réelle que ce soit Lui, en fait, qui vive Sa vie par nous, membres de Son Corps, de telle sorte que ces paroles bien connues se vérifient pour nous : "Pour moi, vivre, c'est Christ." Quand le forgeron a mis le fer au feu, c'est à la fois le feu qui est dans le fer et le fer qui est dans le feu. Il en est de même pour nous, nous devons d'abord accepter la position qui nous à été réservée à la Croix, avant que Christ puisse manifester Sa vie à travers nous.

Christ et Son Corps.

   Il est une vérité que Christ a soulignée avec beaucoup d'insistance, et sur laquelle il est important que nos yeux soient ouverts. C'est que, dans un certain sens, après être entré dans ce monde comme dans Son héritage légitime, il n'a jamais été dans l'intention de Christ de S'en absenter. Il est venu pour le racheter, pour poser les bases juridiques de Sa souveraineté sur lui, et pour étendre progressivement Son règne sur l'ensemble de Son territoire. Il accomplit tout cela en étant personnellement présent, sous l'une ou l'autre forme qu'Il a choisie pour Se manifester. S'il a beaucoup parlé de Son départ, de Son retour auprès du Père, Il s'est exprimé avec non moins de clarté sur Sa présence : " Voici, je suis avec vous jusqu'à la fin du monde."
    Plus tard, parlant de ce mystère caché de tout temps et dans tous les âges, Paul dira que sa grande caractéristique c'est : "Christ en vous, l'espérance de la gloire." La présence physique de Christ dans le monde avait un double but. Il s'agissait premièrement de manifester par Sa vie la nature, les ressources, les principes régulateurs, les intérêts et la puissance de cette Présence, dans les jours qui succéderaient à Son Ascension.
    Le second but de Sa présence matérielle dans ce monde était de rendre tout cela possible et réel par l’œuvre qu'il allait accomplir à la Croix.
    Celui qui est venu de Dieu parle de la nécessité d'être "né de l'Esprit" pour que la volonté de Dieu puisse se faire sur la terre comme elle est faite dans les cieux. Et Il montre en même temps quelle est la nature de cette nouvelle naissance. D'autre part, au seuil même de Son ministère, Il introduit la Croix sous la forme du baptême. A partir de ce moment-là, toutes Ses paroles et tous Ses actes s'éclairent de la lumière de la Croix et se nourrissent de sa puissance.
    L'enseignement de Christ ne sera efficace, et les œuvres faites en Son Nom ne seront durables, que si c'est la Croix qui en est le fondement. Essayer de propager "la doctrine de Jésus" ou d'accomplir Ses œuvres, en rejetant tout ce que ce fondement de la Croix représente pour Lui, c'est travailler en vain. Jamais le Père n'agréera de tels efforts.
    Nous reprendrons cette pensée plus tard. Qu'il nous suffise, maintenant, de comprendre ceci : c'est que, ayant, par Sa présence personnelle et physique, posé les bases de Son oeuvre à venir et montré quelle en serait la nature, Jésus a, par la Croix, accompli quelque chose qui permet aux hommes d'atteindre le plan sur lequel Il était Lui-même, d'entrer dans Son royaume, Il a ensuite échangé Sa présence individuelle distincte contre une présence corporative et universelle. C'est ainsi qu'a vu le jour l'Église, qui est Son Corps, instrument permanent de Son incarnation mondiale. C'est là l'unique sorte d'Église qu'il reconnaît : "Ceux qui sont attachés au Seigneur, sont un seul Esprit avec Lui." La nature de cette union fera également l'objet de nos considérations ultérieures.
    Le terme "Corps" employé ici n'est pas une simple métaphore. Les membres de Son Corps sont, pour Christ, exactement ce que nos corps physiques sont pour nous-mêmes, des moyens d'action, ou d'expression, des organes servant à la manifestation extérieure de notre personnalité. Cette vérité-là jette un jour nouveau sur bien des choses affectant notre vie et notre service. L'efficacité de "notre travail pour le Seigneur" et de "nos prières" est déterminée par des principes bien plus profonds que nous ne le pensons.
    II ne faut pas croire qu'il suffise d'entrer dans l’œuvre de Dieu, de faire ses plans, d'établir son programme, d'organiser son temps, de mettre sur pied une entreprise chrétienne, pour que, nécessairement, le sceau et la bénédiction de Dieu viennent couronner nos efforts.  
    Prier comme bon nous semble, fût-ce avec une ferveur qui nous arrache des larmes, est loin de suffire pour nous assurer l'approbation divine. Faute de réaliser cela, des quantités de personnes en sont venues à désespérer de tout, parce qu'elles ne reçoivent aucune réponse à leurs prières, ou voient leurs labeurs les plus assidus demeurer stériles.
    En révélant les lois qui gouvernaient Sa propre vie et qui expliquaient la fécondité, le Maître a attribué une importance considérable au fait que Ses paroles et Ses œuvres n'étaient pas de Lui-même, mais du Père ; c'est le Père qui parlait, c'est le Père qui faisait les œuvres. Une étude approfondie de l’Évangile de Jean ne laisse subsister aucun doute à cet égard. "Le Fils ne peut rien faire de Lui-même", dit Jésus, "Il ne fait que ce qu'il voit faire au Père." Cette connaissance se rapportait aussi bien à la chose à faire qu'à la manière de la faire, et au moment où il fallait la faire.
    Car le "quand" et le "comment" avaient autant d'importance que la chose elle-même. Et Jésus a établi très clairement que, s'il pouvait en être ainsi pour Lui, c'est parce qu'Il demeurait dans le Père.
    C'est pour cela qu'en pensant à l'avenir de Son oeuvre, Il pria que Ses disciples demeurent en Lui. A la base d'une existence féconde, d'un ministère béni, d'une vie de prière efficace, on trouve toujours cette loi : "Notre union avec Christ doit être telle, que nous ne ferons rien d'autre que ce qu'il fait Lui, mais que nous le ferons sans y manquer."
    Nous devons, dans notre esprit, savoir ce que Christ fait, comment Il le fait, quels sont les moyens qu'Il emploie, et quel est Son moment pour le faire. De plus, nos prières doivent êtres les prières du Seigneur Lui-même, formulées en nous et par nous par le Saint-Esprit. Il ressort très clairement des Écritures que c'est sur ce plan-là que se mouvait l'Église des temps apostoliques. Et nous ne pourrons y atteindre nous-mêmes que Si nous acceptons de passer au crible, même au prix de déchets importants, tout ce qui prétend se faire au Nom de Jésus. Ensuite, il s'agira pour nous de ne plus rien entreprendre du tout, tant que la pensée du Seigneur ne se sera pas fait connaître. Le résultat, alors, manifestera un rendement de cent pour cent, avec des fruits qui ne périront jamais.
    Pour l'exécution des plans de Dieu dans notre dispensation, il y a un seul organe, un seul Corps, avec un seul Chef, une seule Tête : Christ. Et il appartient à chaque membre de comprendre, d'une façon toujours plus complète, la vraie portée de son incorporation à Christ, le vrai sens de cette identité de nature. Il nous est demandé expressément, dans la Parole de Dieu, de "revêtir l'homme nouveau" et il nous est dit que cet homme nouveau, c'est Christ. Ce n'est là qu'une manière différente d'exprimer la grande vérité dont nous nous occupons, selon laquelle nous sommes "en Christ." Elle nous ouvre toutefois une nouvelle perspective sur les ressources d'ordre pratique dont nous disposons.

Christ est notre Rédemption. "Il a été fait pour nous Rédemption" (1 Cor.1 :30 ; Rom. 3 :24 ; Eph. 1 :7 ; Col. 1 :14).
Christ est notre justice (1 Cor. 1 :30 ; Eph. 4 :24 ; Phil. 3 :9).
Christ est notre sanctification (1 Cor. 1 :30).
Christ est notre foi (Marc 11 :22 - litt. "Ayez la foi de Dieu" ; Act. 26 :18, Gal. 2 :20 - litt. "Dans la foi du Fils de Dieu" ; Eph. 1 :15 ; Phil. 3 :9 ; Col. 1 :4).
Christ est notre paix (Jean 14 :27 ;16 : 33 ; Eph. 2 :14).

    On peut faire la même observation pour beaucoup d'autres éléments essentiels de la vie chrétienne : l'Amour, l'Espérance, la Sagesse, la Pensée (ou plus exactement la manière de penser), la Puissance, l'Autorité, la Gloire. Ceux qui désirent voir la chose de plus prés examineront avec profit les références dans différentes traductions ou même mieux encore, l'original.
    Le fait essentiel auquel nous voulons venir, c'est que, dans toutes ces choses, pour peu que certaines conditions soient réalisées, nos ressources humaines se révéleront absolument insuffisantes et nous devons fatalement y renoncer. Mais nous avons en Christ un équipement nouveau capable de nous rendre vainqueurs, de nous faire triompher sur tous les points. Qu'il survienne, par exemple, un temps d'adversité, notre foi ne résistera pas longtemps aux assauts de l'épreuve ni à la tension continuelle.
    Tandis que si nous vivons par la foi du Fils de Dieu, le résultat sera tout autre. Toutes les épreuves auxquelles nous serons soumis manifesteront au grand jour si nous vivons par sa foi devenue nôtre, ou s'il y a un point faible dans note union avec Lui. Il en est de même dans tous les autres domaines. Quelle bénédiction de savoir que nous avons en Christ toute une réserve de vertus et de grâces prêtes à l'emploi, et parfaitement aptes à nous sauver de notre médiocrité. C'est à cela que l'apôtre fait allusion quand il nous exhorte à nous dépouiller du vieil homme, et à revêtir l'homme nouveau qui est créé à l'image de Dieu.

Quelques prépositions significatives.

    Nous avons jusqu'ici étés guidés, dans l'étude de notre sujet, par trois petites prépositions grecques : ek = de, à partir de ; en = en, dans ; sun = avec ou ensemble.
    En fait, cette grande vérité de notre union avec Christ en un seul Corps tourne tout entière autour de ces trois prépositions. Ce sont elles qui en expriment la nature, et qui représentent les lois fondamentales d'une vie spirituelle vraiment féconde. Peut-être ferions-nous bien de les examiner de plus près avant d'aller plus loin. Christ a prononcé certaines paroles et accompli certains actes qui étaient tout à fait caractéristiques de Sa mission de "Fils de l'Homme." Mais Il a pris grand soin d'écarter de l'esprit de Ses disciples la pensée que ces paroles ou ces actes viennent de Son propre fonds. Il a formellement répudié toute suggestion qu'il ait pu en être ainsi.

1) "EK".

a) Quant à Sa personne, Il affirme et Il répète : "Je suis venu de Dieu" (Jean 7 :29 ; 8 :42 ; 17 :8 ; etc…)
b) Quant à Son apostolat (Héb. 3 :1) ; de même : "Celui que Dieu a envoyé " (Jean 3 :17-34; 5 :36 ; 6 :9-57 ; 7 :28 ; 8 :42 ; 10 :36 ;11 :42 ; 17 :3, 8, 18, 21,25 ; 20 :21).
c) Quant à Sa vision : "Le Fils ne fait que ce qu'Il voit faire au Père" (Jean 5 :19).
d) Quant à Ses œuvres : "Les œuvres de mon Père" (Jean 5 :36-37 ; 9 :3-4 ; 10 :25, 32, 37; 14 :10).
e) Quant à Ses paroles : "Je ne parle pas de moi-même" (Jean 8 :28-38 ; 12 :49 ; 14 :10 ; 17 :8-14).
f) Quant au Royaume : "Mon Royaume n'est pas de ce monde," ek, dans le sens de l'origine, la provenance (Jean 18 :36).
g) Qu'il en soi de même pour tout le reste, c'est ce qu'atteste Jean 17 :7 où une préposition
équivalente est employée : "maintenant, ils ont connu que toutes choses viennent de toi... "
    Le principe fondamental, ainsi mis en lumière par cette déclaration générale, c'est que seul ce qui vient de Dieu est reconnu par Dieu, accomplit le dessein de Dieu, atteint l'objectif divin, et finalement, retourne à Dieu. Ce qui suppose donc qu'il y a d'autres sources que Dieu. Par opposition aux déclarations qui précèdent, au sujet de ce qui vient de Dieu, le Maître a prononcé des paroles comme celles-ci :
1) "Vous êtes de (ek, exprimant l'origine) votre père le Diable. Vous faites les oeuvres de votre Père" (Jean 8 :41-44).
2) "Pas de moi-même" Jean 8 :28. Cette parole, naturellement, ne se rapporte pas à Jésus en tant que Fils de Dieu, mais en tant que Représentant de l'homme, envoyé par Dieu dans une chair semblable à celle du péché. Sa divinité est hors de cause ici. C'est là justement que porte l'effort constant de l'ennemi : tâcher de l'amener à agir "selon la chair" comme agirait un homme. S'il avait réussi à Lui faire violer le principe de Sa dépendance de Dieu, il aurait pu avoir raison de Lui. Mais, Jésus a toujours refusé d'agir sur le principe de la chair.
    Il ressort donc clairement, et les Écritures tout entières s'accordent sur ce point, que le produit de la chair ne peut pas trouver grâce devant Dieu, même quand il se manifeste sous des formes religieuses, et par l'organe d'entreprises chrétiennes.
3) Enfin, il y a le "monde", dont il est constamment parlé dans le même sens. Une bonne part de ce qu'il produit est rejetée par Dieu et livrée au jugement. Voyez l'expression "du monde," indiquant l'origine, dans le chapitre 17 de Jean, et poursuivez cet examen dans les épîtres de Jean. Un rapprochement avec l'enseignement de Pierre et de Paul vous montrera assez clairement ce qu'il faut penser du monde et de ce qui vient de lui.
    Nous sommes donc amenés peu à peu à constater qu'une signification toute spéciale s'attache "à ce qui vient de Dieu." Or, ce qui est vrai de Christ doit avoir sa contrepartie chez tous ceux que Dieu reconnaît pour Siens, ou qu'Il emploie, à quelque titre que ce soit, à l'accomplissement de Son dessein éternel.

Ils doivent :

a) Être nés de Dieu (origine).
b) Être envoyés de Dieu (origine).
c) Avoir reçu de Dieu (origine) révélation et vision.
d) Dire les paroles de Dieu (origine).
e) Faire les œuvres de Dieu (origine) et celles-là seulement.
f) Chercher premièrement le Royaume qui est de Dieu (origine).
g) Être bien sûrs qu'en ce qui les concerne "toutes choses sont de Dieu" (origine) (2 Cor 5 :18, traduction littérale).

    Telle était la base sur laquelle les apôtres travaillaient. Le Saint-Esprit était venu pour rendre tout cela non seulement possible, mais vivant et réel. Il ne faut pas chercher ailleurs l'explication du succès de leurs travaux et de leur témoignage. Ils savaient ce que c'était que d'être baptisés dans un seul Esprit pour former un seul Corps. Pour eux, c'était Christ qui était le Chef, la Tête de ce Corps, de telle sorte que le Chef Souverain ne faisait que poursuivre Son oeuvre par le moyen des membres qu'Il S'était incorporés.
    Ces premiers Chrétiens étaient tous solidaires les uns des autres dans leur activité ; ils n'avaient pas de plans à eux. Toute cette organisation, ces entreprises, ces initiatives qui, même lorsqu'elles sont pour Christ, ou, pour le Royaume de Dieu, ou en Son nom, ne sont après tout que le fruit de la pensée de l'homme, ou de son raisonnement, ou de son enthousiasme, ils les ignoraient, car pour eux, tout devait venir directement du Chef, de la Tête, par une révélation de l'Esprit.
    La seconde préposition fait ressortir qu'il en était bien ainsi dans le cas de Christ Lui-même, et qu'il doit de même en être ainsi pour nous.

2) "EN".

    Pour Christ, "en," "en, dans", représentait une position spirituelle dans laquelle Il demeurait constamment. Cette position spirituelle est sous-entendue dans un grand nombre de passages comme les suivants :
"Le Fils unique qui est dans le sein du Père" (non pas qui était) (Jean 1 :18).
"Je suis dans le Père" (Jean 14 :10).
"Je vis par le Père" (Jean 6 :57).
    Il faut reconnaître naturellement que cette relation était l’œuvre du Saint-Esprit. Depuis le moment où le Saint-Esprit descendit sur Lui au Jourdain, chacun de Ses pas fut gouverné par l'Esprit. Même à la Croix, c'est par "l'Esprit éternel" qu'Il s'offrira en sacrifice. Il demeurait en Dieu et, en tant qu'homme, c'est par l'Esprit que cette attitude était maintenue.
   Comme nous cependant, Il était à la merci de tentations, de suggestions, de provocations, d'émotions sans nombre. Comme nous, Il était exposé à des réactions personnelles impliquant des possibilités néfastes et pouvant conduire à l'emploi de méthodes et de ressources purement humaines. Comme nous, Il devait compter avec les multiples activités de Son intelligence, de Son âme, de Son Corps.
    Mais Son attitude constante fut de maintenir toutes ces choses sous le gouvernement de l'Esprit de Dieu, en Se gardant bien de les prendre comme points de départ ou justifications de Sa conduite. Jamais Il ne Se serait fié à l'un quelconque de ces éléments, pas plus qu'à un homme du reste, à moins qu'Il n'eût le témoignage de l'Esprit que la chose venait de Dieu. C'est grâce à cette attitude qu'Il s'épargna les échecs, les déceptions, la confusion et le désordre que produit immanquablement l'intervention de l'homme naturel (grec : l'homme de l'âme, par opposition à l'homme de l'esprit, l'homme spirituel), dans les choses spirituelles. Ainsi, ayant été oint du Saint-Esprit, Il demeura en Dieu et refusa d'abandonner cette position. Si l'on veut dans le service de Dieu la puissance et la plénitude, tout le secret est là.

3) "SUN".

   Le caractère limité de cette étude ne nous permet pas de voir en détail le sens de cette préposition. Elle a trait tout particulièrement à l'unité et à la cohésion du Corps de Christ. Nous nous contenterons de faire remarquer qu'elle est employée pour souligner le fait que ceux qui sont "nés d'En Haut" ne sont pas des individus isolés, mais autant de membres d'un même Corps, solidaires et dépendants les uns des autres. Ils sont "ensemble" unis entre eux et attachés "ensemble" à Christ, la Tête du Corps. C'est ainsi que Dieu les a considérés à chaque phase de l’œuvre rédemptrice de Christ. Ce mystère est exprimé dans les paroles du Psaume 139 :15-16. Nous aborderons plus loin les conséquences pratiques de cette vérité.
    Nous avons exposé le principe général représenté par l'expression "en Christ", mais nous devons insister sur la contrepartie essentielle que nous trouvons à la vie de Christ. Comme le Père est, pour ainsi dire la Tête ou le Chef du Fils, de même le Fils est la Tête du Corps, l'Église. Et, de même que Lui demeurait dans le Père, nous, nous devons demeurer en Lui.
    Nous nous trouvons sollicités, dans notre activité, à la fois de l'intérieur, par les différents éléments de notre vie naturelle, et de l'extérieur, par tout ce qui exerce une action sur nous. Mais nous ne devons pas céder à ces sollicitations, tant que nous ne les avons pas appréciées et jugées par notre esprit.
    Ceci s'applique tous spécialement aux questions religieuses, car c'est dans ce domaine-là que nous sommes exposés à commettre les plus graves erreurs. Sous l'effet d'une suggestion assez forte, les réactions spontanées de nos sentiments naturels, de notre entendement, ou de notre volonté peuvent nous entraîner dans bien des misères. Le danger de l'évangélisation à outrance, de l'enseignement religieux intensif, ou de la propagande missionnaire sur une grande échelle, réside précisément dans leur tendance à stimuler les émotions et à offrir en quelque sorte des récompenses spirituelles, au lieu de s'en tenir à la note sobrement impérative de la prédication du Christ et des apôtres. Maintes décisions de suivre le Seigneur, prises dans ces conditions-là, se sont révélées incapables de résister à l'épreuve, révélant qu'elles n'étaient pas le fruit d'un vrai travail du Saint-Esprit.
    Il n'a peut-être jamais existé d'époque où il y ait autant d'organisations religieuses que maintenant. Que de labeurs pour mettre sur pied, administrer et assurer la propagande de toutes ces entreprises chrétiennes ! Que d'énergies, que de ressources, que de temps mis à leur service ! Que de gens pleins de zèle pour s'intéresser à tout ce travail et pourtant, - toutes choses égales d'ailleurs-, y a-t-il jamais eu un âge où les résultats vraiment spirituels soient aussi maigres ? On peut en douter.
    La question qui est à la racine du problème est la suivante : "De tout ce fait d'activités, quelle proportion vient directement de Dieu ?" De combien de ces œuvres peut-on dire qu'elles procèdent d'une révélation d'En Haut, d'une initiative de l'Esprit éternel ? Dans combien de cas peut-on vraiment dire comme autrefois : "Le Saint-Esprit dit" (Actes 13.2) ; "Il a paru bon au Saint-Esprit" (15.28) ; "Je l'ai reçu... par une révélation de Jésus-Christ" (Galates 1 :12) ? Tout cela, au contraire, n'est-il pas dans une très large mesure simplement humain ? N'est-ce pas le résultat de discussions, de réflexions humaines, le produit d'un enthousiasme, d'une créativité, de bons sentiments humains ?
    L'ampleur de l’œuvre que Dieu accomplit réellement par le moyen d'un instrument dépend de l'ampleur de son union avec Christ en un seul Corps. Il ne faut pas se laisser tromper par l'apparence du succès. Nous nous laissons souvent impressionner par une belle façade, mais quand le "feu" a fait son oeuvre, on constate que la proportion de résultat réel est bien minime. A la longue, on est toujours obligé de reconnaître que "la chair ne sert de rien", bien quelle semble obtenir de beaux résultats. Ce n'est pas ce qui est fait pour Dieu qui durera, c'est ce qui est fait par Dieu. A nous de nous assurer que nous sommes entièrement, absolument, en Christ, que nous vivons dans l'Esprit, et tout le reste viendra spontanément.
    Or, on ne peut demeurer en Christ, tant qu'il n'y a pas eu une réelle incorporation à Lui. Nous voici ramenés au cœur de notre sujet, et nous allons pouvoir faire un pas de plus en examinant comment cette union doit être effectuée.

Les marques de Jésus-Christ.

    "Je porte sur mon corps les marques de Jésus" ou "stigmates de Jésus-Christ" – Synodale (Galates 6 :17).
    Les marques de Jésus ! L'apôtre parlait-il de marques réelles laissées sur son corps, cicatrices de ses souffrances, ou bien employait-il une figure de rhétorique bien connue, nous ne pouvons en être tout à fait sûrs. II est possible que l'apôtre Paul ait eu dans sa pensée les deux choses : il y avait sans aucun doute des marques sur son corps, les marques des verges qui l'avaient frappé, les marques des pierres par lesquelles il avait été lapidé, les marques des difficultés qu'il avait traversées, et, en les considérant, il les voyait comme des stigmates. Vous savez ce que sont des stigmates. Les animaux sont marqués, marqués par le fer chaud. Et l'apôtre considérait que ces marques étaient des stigmates. 
    Mais peu importe ce qu'elles étaient en réalité. Il est tout à fait certain que Paul portait dans son être les stigmates de Jésus. C'est cela qui est important, qu'il y ait là, dans notre être, les marques de Jésus.
    J'aimerais vous suggérer la pensée que ces marques, dont parle l'apôtre, ces stigmates, sont des marques qui représentent trois choses, qui sont en premier lieu :

Les marques de la propriété.

    Elles étaient des preuves qu'il appartenait au Seigneur Jésus, et tout le monde pouvait le voir. Je pense que beaucoup d'images se pressaient dans l'esprit de l'apôtre, quand il employait cette figure de rhétorique qui rappelle une coutume bien connue. "Je porte sur mon corps les stigmates de Jésus."
    Tout propriétaire avait sa propre marque, son propre fer à marquer, et tous ceux qui voyaient cette marque sur un être vivant pouvaient savoir à qui il appartenait. Je pense de plus que l'apôtre avait dans sa pensée, non pas la marque des animaux, mais ce qui, dans le monde grec de son temps, était une coutume très répandue, la marque des esclaves.
    Or, nous savons que, en ce temps et dans ce monde, les esclaves étaient achetés à un certain prix, qu'ils devenaient la propriété de leur maître, et qu'ils ne pouvaient obtenir leur liberté qu'en remboursant, dans une certaine mesure, le prix qui avait été payé pour eux ; ce qui était toujours très problématique. Alors même qu'ils auraient reçu un salaire, il aurait fallu toute une vie pour mettre de côté la somme nécessaire pour se racheter et être libre.
    Mais il y avait une issue, il existait une autre coutume. Les esclaves pouvaient se rendre au temple de leur dieu et voir le prêtre, et ils pouvaient se vendre au dieu, et devenir la propriété du dieu ou des dieux, dieux païens naturellement, qui n'étaient pas des dieux. Lorsqu'ils faisaient cela, le prêtre prenait un fer à marquer qui portait le sceau du dieu ou de la divinité. Il relevait la manche de l'esclave et imprimait sur son bras, à l'aide de ce fer rouge, la marque du dieu. A partir de ce moment, l'homme était considéré comme l'esclave des dieux, et cela signifiait qu'il était affranchi de tout autre esclavage. II pouvait sortir.
    Mais si son ancien maître, ou le successeur de son ancien maître, ou encore l'un de ses parents, cherchaient à le ramener en esclavage - ce qui pouvaient arriver - ils pouvaient le poursuivre, le saisir, chercher à le reprendre en esclavage. S'ils cherchaient à faire cela, l'homme n'avait qu'à relever sa manche et à montrer la marque du dieu, pour que personne n'ose plus le toucher. Le faire, ç'aurait été devenir l'ennemi du dieu, s'attirer son courroux, et personne n'osait s'y risquer. Parce qu'il était esclave du dieu, il était un homme libre dans le monde.
    Paul savait tout cela, et je pense que c'est ce à quoi il fait allusion, lorsqu'il dit : "Que personne ne me fasse de la peine." Que personne ne cherche à me ramener en esclavage ! Que personne ne pose sa main sur moi pour faire de moi sa propriété ! J'appartiens au Seigneur Jésus, "car je porte sur mon corps les stigmates de Jésus." Un peu avant, il avait dit : "Dieu me garde de me glorifier, si ce n'est de la Croix de notre Seigneur Jésus-Christ, par qui le monde est crucifié pour moi, comme je le suis pour le monde !" (Galates 6 :14).
    Il disait en fait : "0h monde, dont autrefois j'ai été l'esclave, qui avait tous les droits sur moi, qui me tenait captif et m'utilisait, ô monde, je suis affranchi de toi, parce que j'ai été fait esclave et prisonnier de Jésus-Christ, par Sa Croix. Il m'a affranchi de ton esclavage et de ta captivité. Le fait que je suis Son esclave signifie que je suis libre désormais du monde. 0 monde, ne cherche pas à me reprendre. Ne pose pas tes mains sur moi. Vielle vie, qui autrefois était mienne, ne cherche pas à me saisir de nouveau. J'appartiens au Seigneur Jésus. Je porte sur mon corps Ses stigmates".
    Je pense que le message de ce passage est tout à fait clair. Les marques de Jésus, que tous doivent voir, disent que nous Lui appartenons, qu'Il est notre Maître et cela signifie de notre part fidélité et loyauté dans notre obéissance envers Lui, notre Seigneur.
    Nous avons tous été éprouvés dans notre loyauté à l'égard du Seigneur au sein de ce monde. Le monde vient, pour ainsi dire, à notre aide pour nous faciliter la déloyauté envers le Seigneur Jésus, simplement pour que l'on ne sache pas que nous lui appartenons. Les prétentions des gens sont telles aujourd'hui que l'on pense généralement que ce n'est pas être un homme ou une femme que d'être Chrétien. Vous serez certainement considéré comme une espèce inférieure si vous dites que vous êtes Chrétien. Ce monde méprise les Chrétiens, et la tentation pour tout Chrétien, c'est d'être Chrétien sans se trahir, sans le laisser voir trop clairement et c'est ainsi que nous nous cachons derrière beaucoup de choses.
    Nous ne voulons pas faire étalage de la religion, nous ne voulons pas jeter la religion à la tête des gens ; nous ne voulons pas offenser les autres et mettre en danger notre chance de les influencer en nous trahissant trop tôt. Que de stratagèmes pour nous dérober, de recoins et de détours pour nous cacher. Nous nous imaginons que nous aurons de plus grands avantages, que nous servirons réellement mieux les intérêts du Seigneur en prenant des précautions, en avançant avec prudence, en nous mettant toujours à couvert et en nous camouflant.
    Eh bien ! "Que désormais personne ne me fasse de la peine ; car je porte sur mon corps les marques (les stigmates) de Jésus" et tout le monde peut les voir ! Je suis tout à fait certain que c'est ce que nous avons ici, que c'est là ce que l'apôtre veut dire : les marques sont la preuve évidente, le signe incontestable que nous Lui appartenons. Et je crois réellement que le monde, après tout, respecte et estime beaucoup plus le Chrétien qui montre ce qu'il est, que celui qui se cache.
    Je me souviens qu'un jour, il y a bien des années, alors que je n'étais qu'un tout jeune homme, je fis une expérience qui produisit sur moi une profonde impression. Je me trouvais dans un magasin, c'était le jour où les voyageurs de commerce faisaient leur visite, et deux d'entre eux entrèrent dans le magasin pendant que j'y étais. Le premier entra en hésitant, regarda de tous les côtés pour savoir ce qu'il devait faire, vit quelques personnes dans le magasin, se dirigea dans un coin et attendit. Il fit ensuite ses offres d'une manière qui suggéra en mon esprit que cet homme avait honte de sa marchandise, qu'il ne voulait pas que l'on sache ce qu'il était. Il faisait tout en cachette.
    Peut-être ne l'aurais-je pas tellement remarqué sans l'épisode suivant. La porte s'ouvrit, et un beau jeune homme, grand et bien bâti, entra. Il s'avança vers le propriétaire : "Bonjour Monsieur X..., j'ai pour vous aujourd'hui une collection splendide", et il se mit aussitôt à ses affaires. Tous ceux qui se trouvaient dans le magasin l'entendirent. II allait droit au but et saisissait séance tenante toutes les occasions qui lui étaient offertes. Il était déterminé à réussir. Cela produisit sur moi une impression profonde.
    Comme nous sortions du magasin, l'un de ceux qui m'accompagnaient exprima sa pensée : "Voilà comment on fait les affaires !" Pardonnez-moi si cet exemple vous paraît être d'un niveau trop bas, mais je sens qu'il est extrêmement important que nous soyons ouverts, disant franchement ce que nous sommes, sans cacher les stigmates.
    Nous appartenons au Seigneur ; nous sommes heureux d'appartenir au Seigneur ; nous sommes très heureux de L'appeler "Maître", il n'y a en nous aucun compromis à cet égard. Nous appartenons au Seigneur et nous le Lui disons, et nous le disons aussi à tous les autres Chrétiens. Mais cette attitude sera-t-elle uniquement réservée aux milieux qui nous reconnaissent et nous apprécient ? Ne sommes-nous prêts à avouer appartenir au Seigneur que lorsque nous n'avons aucun risque à courir ? Comment agissons-nous au regard du monde ?
    Les marques de Sa propriété ! Rappelons-nous Paul et son naufrage ! Que son comportement est remarquable ! Il avertit les hommes, puis, lorsque le moment arrive où ils sont à bout, il s'adresse au maître du navire en lui disant de prendre courage : "Le Dieu à qui j'appartiens et que je sers… " (Actes 27 :23).
    Voilà, il ne cache rien. Il fait connaître à qui il appartient. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de prouver que c'est l'attitude que nous devons avoir. C'est là, dès le commencement, les marques de notre fidélité et de notre loyauté dans l'obéissance à Celui que nous sommes heureux d'appeler Maître et Seigneur, à Qui nous devons réellement tout.
N'est-ce pas pour le moins un peu déloyal pour ne pas dire d'avantage, d'être prêts à reconnaître que nous Lui devons tout, lorsque nous gardons le secret sur nos relations avec Lui, que nous avons honte de Le faire connaître dans le monde ou nous sommes ?

3) Le conflit.

    Jusqu'ici nous nous sommes occupés de la Croix et de l'Église. Résumons en quelques petits mots ce que nous avons dit : Nous avons vu d'abord que dans la pensée de Dieu, la Croix doit déboucher immédiatement sur l'Église. Tout comme au désert, l'autel se trouvait à la porte du parvis du Tabernacle, dans l'alignement du sanctuaire auquel il conduisait. Le ministère sacerdotal commençait à l'autel, se poursuivait dans la tente, et culminait dans le lieu Très Saint. La Croix du Seigneur Jésus est la porte qui nous introduit dans la maison de Dieu, à cette vie corporative qui nous unit tous ensemble à Christ.
    Le même principe était respecté dans le Temple. Pour entrer dans la maison de Dieu, on doit obligatoirement passer par l'autel. Lors de la reconstruction du sanctuaire par le reste rentré de la captivité, la première opération avait été de rétablir l'autel à sa place ; puis fut posé le fondement de la Maison de Dieu. Alors seulement on put entreprendre les travaux de construction.
    La pensée de Dieu est toujours la même à cet égard : la Croix porte en germe la Maison de Dieu et y conduit. Un Évangile qui s'arrêterait à la Croix, comme si elle était une fin en soi, et ne conduirait pas à une expression vivante de la Maison de Dieu, de l'Église, serait un Évangile qui passerait à côté du but primordial que Dieu lui a assigné. Nous avons déjà longuement insisté là-dessus, mais il n'était peut-être pas superflu d'y revenir, pour donner au Seigneur l'occasion de nous rafraîchir la mémoire, et de rendre encore plus clair à nos yeux l'objectif qu'Il cherche à atteindre.
    Nous avons vu ensuite que, lorsque l'Église devient une réalité vivante, elle ne tarde pas à jouer le rôle d'expression pratique du message de l’Évangile, à fournir la grande démonstration de ce que la Croix signifie vraiment. L'Église est en effet la manifestation et l'incarnation de tout le contenu du Calvaire. Quand Dieu prêche, Il ne se contente pas de paroles ; la prédication de l’Évangile ne se borne pas à l'énoncé de certaines vérités ; elle est l'expression vivante et pratique de ces vérités dans un peuple. Autrement, l’Évangile aurait pu être annoncé par des anges ; n'importe qui aurait pu le prêcher.
    Le Seigneur a donné une révélation de Lui-même, et a rendu cette révélation solidaire d'un peuple qui en est l'incarnation vivante. Tel est le rôle, telle est la nature de l'Église.

Franchissons maintenant une nouvelle étape et passons au troisième volet de notre étude :

Le  Conflit.
    Le seul fait que, dans la pensée de Dieu, la Croix soit si intimement liée à l'Église suffit à expliquer le conflit que nous vivons. L'Église, incarnation de tout ce que le Calvaire représente, est bien la cause du conflit. Là où la pleine signification de la Croix a été saisie et traduite pratiquement dans un peuple qui en est l'expression vivante, le conflit revêt sa forme la plus intense, la plus persistante. En d'autres termes, l'intensité du combat est à la mesure de l'expression vivante et de l'incarnation du Calvaire dans un peuple. Plus la compréhension vivante de ce que représente la Croix grandit, plus l'expression pratique de la pensée de Dieu pour l'Église sera forte, et plus le conflit spirituel sera tenace, et plus terrible, plus virulent sera l'antagonisme ouvert à la haine des puissances du mal.

L'objectif suprême de la Croix et de l'Église.

    En traitant cette question du conflit spirituel, nous devons commencer par nous souvenir d'une chose : C'est que l'Église et la Croix n'ont qu'un seul objectif en vue. On se facilite beaucoup la tâche quand on peut réduire de grands sujets à une ou deux données simples et concrètes. La Croix est l'un de ces sujets qui comprennent une multitude d'éléments.  
    L'Église aussi est un grand sujet d'une portée infinie. Nous pourrions parler de la Croix toute notre vie en la considérant chaque fois sous un jour différent. Qui pourra jamais épuiser les profondeurs de ce que représente la Croix du Seigneur Jésus ? De même, pour l'Église, nous pourrions en parler indéfiniment, découvrant sans cesse quelques aspects nouveaux. Elle nous dépassera toujours ; il y aura toujours quelque chose à ajouter à ce qu'on en a déjà dit. Pourtant, quand tout ce qu'il y a à dire de la Croix et de l'Église aura été dit, il sera toujours possible d'en donner une définition simple et concluante. Tout se condense dans une phrase. Tout tient en trois mots. La Croix dans sa signification la plus complète, l'Église dans ce qu'elle comprend de plus puissant et de plus divin, ont, en dernière analyse, une seule et unique raison d'être : La "Souveraineté absolue de Jésus-
Christ."
    Dites tout ce que vous voudrez de la Croix, tout se résume là. Son centre de gravité, c'est la position d'autorité absolue qui appartient à Jésus-Christ seul Seigneur pour l'éternité. Quel que soit l'aspect sous lequel on envisage la signification de la Croix, elle est là, tout entière.
    Et la question qui ne manque pas de se poser est la suivante : "Oui, mais comment la Croix procède-t-elle pour détrôner toutes les autorités et les puissances qui agissent sur l'enfant de Dieu, soit au-dedans, soit au-dehors ? Comment fait-elle pour mettre le Seigneur Jésus sur le trône, pour Lui assurer, à Lui et à Lui seul, l'autorité absolue ?"
    C'est toujours ainsi que le problème se pose. Les effets de l'activité de la Croix peuvent être ressentis dans divers domaines, mais aucun ne constitue une fin en soi. Bien des aspects de notre vie et de nos êtres doivent passer par la Croix, être soumis à son action destructrice. Mais ne gardons jamais l'impression que l’œuvre du Saint-Esprit au moyen de la Croix se limite à ces choses, comme si elles représentaient le but que le Seigneur cherchait à atteindre. Lorsque le Seigneur agit pour régler les petits problèmes, Il a constamment un seul objectif en vue, un seul objectif qui justifie l'intérêt qu'Il porte aux détails. Cet objectif suprême est la Souveraineté absolue du Seigneur Jésus-Christ.
    Il en est de l'Église comme de la Croix. Que d'aspects admirables et glorieux n'offre-t-elle pas à notre contemplation ? Sa nature, son rôle, sa vocation, sa mission et tant d'autres choses encore. Mais, dans la pensée de Dieu, aucun de ces éléments ne constitue une fin en soi. L'Église a une raison d'être, et n'en aura jamais qu'une : exprimer l'autorité souveraine du Seigneur Jésus.
    Tout ce que nous avons à dire au sujet de nos relations mutuelles, de notre communion fraternelle, de notre vie de dépendance réciproque, du fonctionnement organique de ce Corps que nous formons, et tout ce qui peut être dit de l'Église, tout cela n'est qu'une entrée en matière, qui nous conduit à ce qui seul compte : exprimer que "Christ est Seigneur", et que c'est Lui qui, dans l'Église, a la prééminence sur tout, Lui qui en est la Tête souveraine.  
    Dans la pensée de Dieu, l'univers dont nous faisons partie a un centre autour duquel tout le reste gravite. C'est la "Souveraineté" de Son Fils qu'Il a établi Héritier de toutes choses, et par Lequel Il a aussi créé le monde.

Le point de convergence de toute l'opposition satanique.

   Si nous approuvons ce titre, nous sommes en bonne voie de comprendre pourquoi la bataille est si dure. L'autorité souveraine, qui appartient de droit à Jésus-Christ, est en effet violemment contestée par Satan. Elle constitue la cible de toute son opposition. Ne nous y trompons pas, l'antagonisme de Satan n'a rien à voir avec les petits détails, les petits incidents de notre vie.
    L'ennemi ne s'inquiète ni de nous ni de nos affaires. Oh non ! Satan a une vue d'ensemble de la situation. Il la connaît et en saisit tous les aspects. Il sait bien l'importance qui peut s'attacher à certains détails. Mais s'il concentre son attention sur un détail, comme cela lui arrive, il ne perd pas de vue son objectif d'ensemble ; c'est précisément pour mieux l'atteindre qu'il sait s'en prendre à de petites choses. A travers toutes les péripéties de cette lutte, son objectif secret, son objectif suprême, c'est de mettre en échec la "Souveraineté de Jésus-Christ."
    Il peut sans doute concentrer pas mal d'attention sur, par exemple, les rapports entre deux
Chrétiens, que Dieu a rapprochés et qui sont appelés à vivre ensemble : tensions, méfiance, mensonges, fourberies, calomnies, il mettra tout en oeuvre pour saper cette communion et séparer ces deux vies.
    Pensez-vous qu'il se soucie de provoquer des divisions pour le seul plaisir de l'opération? Quand il en est venu à bout, le croyez-vous satisfait simplement parce que la chose est faite ?  Mais non, ce n'est pas du tout là son but ! En provoquant cette rupture, il voit beaucoup plus grand, il voit l'autorité souveraine de Jésus-Christ mise en échec.
    Telle est la portée que peuvent avoir nos relations les uns avec les autres. Est-ce Satan qui va être le Seigneur, ou est-ce Christ ? Tout ce qu'il y a de solennel dans cette alternative peut dépendre de ce qui se passe entre quelques personnes, et la moindre petite chose qui se débat entre deux frères en la foi, examinée sous ce jour-là, prend soudain des proportions universelles.
    L'enjeu suprême du conflit de l'univers peut se trouver lié aux relations qu'entretiennent l'un avec l'autre deux simples enfants de Dieu. Et ce qui est vrai dans un exemple comme celui-là, est vrai aussi dans une quantité d'autres questions, qui, en elles-mêmes, ne méritent même pas qu'on y prenne garde, tant elles paraissent anodines. Il y a des choses qui semblent si mesquines, si insignifiantes, que c'est tout juste si l'on n'en rougit pas d'en parler, tant elles sont stupides. Cependant Satan est loin de s'en désintéresser, et elles ne passent pas inaperçues pour lui. Mais pensez-vous qu'il soit mesquin ou petit à ce point, ne trouvant son plaisir qu'à jouer de vilains tours à Pierre, Jacques ou Jean ? Oh, non ! Soyez tranquilles, il est plus avisé que cela. C'est son royaume en réalité qui est en jeu, et derrière toutes ces bagatelles si absurdes, si ridicules, se dissimule l'enjeu suprême qu'est la Souveraineté absolue de Jésus-Christ.
    Ainsi dans tous ces domaines, la Croix doit avoir sa place. Elle doit s'implanter très profondément en nous, qu'il s'agisse de nos relations à deux ou trois réunis ensemble, de petits groupes ou d'assemblées, de peur que Satan ne réussisse à nous surprendre et à pénétrer en notre sein pour détruire l'expression visible de la "Souveraineté de Jésus-Christ."
    La Croix est indispensable. Car elle n'est pas seulement le remède à nos manquements et à toutes les petites misères qui déparent la vie des enfants de Dieu. L'issue du conflit, dont l'enjeu est la Souveraineté du Fils de Dieu, dépend de la Croix.
    L'Église exprime la signification de la Croix, dans un groupe d'enfants de Dieu. Elle représente sur cette terre l'abolition de la puissance de Satan pour diviser ce qui est un, pour détruire la communion, les rapports fraternels et l'esprit de collaboration. Elle donne ainsi une démonstration pratique de l'autorité souveraine de Jésus-Christ, Chef suprême et Seigneur absolu. Tel est le rôle de l'Église.
    La "souveraineté" de Christ est bien l'objectif suprême de l'Église et de la Croix ; et Satan ne se soucie des enfants de Dieu que dans la mesure où il peut contrer cet objectif. Vous vous en rendez compte, maintenant : on peut être de "l'Église", on peut être dans ce qu'on appelle "les églises", et tout ignorer de cette guerre spirituelle.
    Ce conflit si réel qui se livre dans les cieux célestes contre les puissances des ténèbres, demeure absolument étranger à ce qu'on appelle communément "l'Église." Dans ces églises-là, il n'y a ni combats, ni bataille, ni conflits spirituels. De telles notions sont tout à fait étrangères à leurs préoccupations. Pourquoi ? Parce qu'on n'y a jamais senti la terrible secousse que produit une connaissance vivante de la Croix. La Croix reste pour elles un récit, une histoire, une doctrine, un article de foi, alors qu'elle devrait être une réalité puissante forgée au feu de l'expérience la plus vive et la plus concrète. Dès qu'elle deviendra cela pour elles, ces églises apprendront ce que c'est que la bataille.
    Là ou n'existe aucune oeuvre de la Croix, Satan se tient bien tranquille. Car, dans ce cas, on ne se trouve pas en présence de l'Église. On ne peut avoir une Église sans Croix, et l'on ne peut pas avoir la Croix sans son expression vivante qui éveille l'antagonisme des puissances mauvaises. Voilà ce qu'est la Croix dans la pensée de Dieu.
Une parenthèse est ici nécessaire pour préciser quelle est la vraie nature de l'Église.

Qu'est-ce que l'Église ?

    L'Église, pour comprendre les choses par le commencement, c'est l'interdépendance spirituelle des enfants de Dieu. C'est là le premier échelon de ce que l'Église représente, le niveau élémentaire, le point de départ des liens spirituels qui unissent tous les enfants de Dieu. Il n'est pas nécessaire de consacrer du temps à expliquer que tous les enfants de Dieu vraiment nés de nouveau forment ensemble une unité organique fondamentale, et qu'ils possèdent en commun une seule et même vie. Cela, nous le savons, c'est la définition même de l'Église. Elle se caractérise pour commencer par une interdépendance spirituelle due au fait que tous ses membres possèdent une même vie, la vie du Seigneur Jésus-Christ.  
    Mais ce n'est pas tout, l'Église est plus que cela. L'Église est l'interdépendance des enfants de Dieu, traduite dans la vie pratique. Il peut arriver qu'un corps humain ait la vie, sans être capable pour autant d'en exercer les fonctions. Paralysé par son infirmité, bien que vivant, il est inutile. Devant les exigences de la vie pratique, c'est comme s'il était mort. C'est un corps qui ne fonctionne pas, dont l'organisme est déréglé, toute coordination entre les fonctions faisant défaut. Quand, abaissant les regards sur les Siens, le Seigneur constate que, bien qu'ils aient la vie, ils ne constituent pas un corps au fonctionnement harmonieux, pensez-vous que Son cœur puisse être satisfait ? Croyez-vous qu'Il puisse prendre Son parti d'une situation pareille ? Ce qu'Il appelle Son Église, ce n'est pas simplement un organisme qui est habité de Sa vie. Quand Il dit : "Je bâtirai mon Église", par "mon Église", Il entend évidemment un Corps au fonctionnement normal, dont les membres ont entre eux des rapports harmonieux, Il ne pense sûrement pas à un organisme qui aurait seulement reçu Sa vie, sans rien d'autre.
    Aux yeux de Dieu, pour qu'elle accomplisse sa vocation conformément à Son dessein, l'Église doit être l'expression pratique des rapports harmonieux qui règnent au sein de Son peuple, dans la dépendance mutuelle et l'unité de ses membres.
    C'est de là justement que surgissent toutes nos difficultés et tous nos problèmes. Car il faut bien se placer sur le terrain pratique. Seulement, quantité de gens se heurtent alors à des obstacles de toutes sortes, et sombrent souvent dans le désarroi et la confusion, faute d'avoir su distinguer entre deux aspects très différents du même problème.
    Rechercher la communion spirituelle et collaborer avec ce qui est vraiment du Seigneur parmi les Siens, c'est normal ; mais s'associer activement avec ce qui n'est pas scripturaire dans les systèmes humains, c'est une autre affaire. Voici ce que je veux dire : il y a des gens qui pensent que pour être en communion avec tels ou tels Chrétiens, il faut entrer dans leur milieu, devenir partie intégrante de leur système, de leur communauté, accepter leur ordre religieux. Pour eux, si vous voulez montrer que vous êtes en communion avec des enfants de Dieu, vous devez devenir membres de leur mouvement.
    Une telle attitude n'a rien à voir avec la communion spirituelle active que nous pourrions établir avec eux sur une base spirituelle, parce que nous les reconnaissons pour des enfants de Dieu. Et c'est ici précisément que les points de vue divergent. C'est au moment où quelqu'un dit, soit en paroles, soit par des sous-entendus, soit par son attitude : "Si tu veux me prouver que tu es en communion avec moi, entre dans ce dans quoi je suis engagé, deviens membre, et travaille avec moi à l'intérieur de ce cadre". C'est à ce moment que tout se gâte, car il ne s'agit plus de la communion d'interdépendance spirituelle. Et c'est à ce niveau que surgissent toutes les difficultés. C'est là si souvent que le Seigneur oblige à des séparations si douloureuses.
    En effet, les difficultés essentielles sont les suivantes : Pour obtenir une expression vraiment vivante de l'Église remplissant son rôle de Corps, dont les membres bien unis fonctionnent normalement, le Seigneur est parfois "trop souvent" obligé de recourir à la manière forte. Pour libérer ceux de Ses enfants qui veulent avancer, Il doit rompre l'emprise que les systèmes humains exercent sur eux. Il y est obligé, c'est malheureux, c'est triste, mais si vous prenez un exemple concret, vous verrez que c'est habituellement ainsi que les choses se passent. Le "système" s'impose et finit par prendre un caractère à lui, qui est distinct de cette nature céleste, spirituelle et universelle qui caractérise l'Église. C'est quelque chose de sectaire, de schismatique, qui divise le peuple de Dieu. Que de fois le Seigneur n'est-Il pas amené à couper au sein de ces groupements, pour en sortir les Siens, et les amener sur un terrain neutre où ils pourront vivre et fonctionner, non pas comme une communauté séparée du peuple de Dieu, mais comme une communauté qui ne veut rien avoir à faire avec ce qui n'est pas scripturaire.
    La seconde difficulté consiste, pour ces Chrétiens-là, à maintenir une position spirituelle, et à ne pas devenir une autre secte. C'est une difficulté très pratique, mais elle n'est pas insurmontable. Elle exige beaucoup de vigilance, et ceux qui sont dans ce cas doivent être continuellement sur leurs gardes, non seulement dans leur doctrine, mais dans leur esprit, dans leur mentalité, dans leur attitude envers les autres. Ils doivent veiller, de peur que cet esprit qu'ils sont censés avoir laissé derrière eux revienne. Il s'agit de difficultés très réelles aux aspects très pratiques, mais dont on vient à bout.

La vie, réponse à tous les problèmes.

    Tout se ramène en somme à une question de vie. La vie est la solution de tous les problèmes. J'ai le sentiment, bien-aimés, que l'univers de Dieu est constitué tout entier sur un principe biologique. La vie est la réponse à tout, l'explication de tout, le principe qui régit toute forme d'épanouissement. La sagesse infinie de Dieu ramène tout à une proposition simple, à une méthode unique, en disant :
"Je mets la vie dans une semence, et Je l'abandonne à elle-même. Je ne vais pas Me mettre à former la fleur, à lui choisir un certain nombre de pétales, leur donnant une forme, puis une couleur, les rassemblant ensuite pour en faire un ensemble solidaire d'une tige. Ce n'est pas ainsi que Je travaille. Tout cela est artificiel. Non. Je vais mettre la vie dans une semence et la laisser tranquille".
    Bientôt on aura la fleur, la fleur parfaite. Tous les éléments de cet organisme, avec son ordre interne, la répartition des dimensions, des formes, des couleurs, la vie les possède en elle-même. C'est la vie qui contient tous ces éléments, et quand on lui en donne l'occasion, elle les produit et se manifeste dans la fleur, l'arbre, l'oiseau, le poisson, la bête des champs ou l'homme. Tout organisme est le produit du type de vie qui possède ses caractères particuliers, et, si l'on donne à cette vie-là l'occasion de s'exprimer, on obtiendra immanquablement l'organisme complet.
    Voilà le secret biologique que Dieu a mis en oeuvre dans Sa création. Mais la création naturelle n'est qu'une image des réalités spirituelles. Elle n'a jamais été que cela dans la pensée de Dieu.
    Dans le domaine spirituel, le secret, la solution de tout réside dans ce principe biologique fondamental. Mettez la Vie du Fils de Dieu dans n'importe qui, laissez-lui l'occasion de s'exprimer, laissez-la souveraine, laissez-lui le champ libre, et vous verrez que tout ira bien. Vous n'aurez pas besoin de vous agiter pour rassembler des membres, pour leur apprendre à se tenir comme il faut, à être gentils, heureux et souriants. Oh non ! La Vie s'en chargera. Dieu a la clé du problème : la Vie souveraine de Son Fils bien-aimé s'exprimera sans entrave. Le résultat viendra aussi sûrement que le jour après la nuit. Tout ce qui rend difficile l'expression véritable de l'Église et sa préservation, trouve son remède dans la vie du Seigneur Jésus et dans Sa Croix, dont l'action la protège de la mort, son grand ennemi, et de la chair, terrain sur lequel la mort travaille.
    Que la Croix soit maintenue sur la chair, terrain de la mort spirituelle, pour préserver cette vie précieuse, et tout ira bien. Il ne sera plus nécessaire alors de nous inquiéter beaucoup des aspects techniques, ils se régleront d'eux-mêmes. Les problèmes techniques de la vie de l'Église se résoudront tout seuls si la Croix fait son oeuvre, et si la vie a le champ libre.
    Il s'agit tout simplement de la souveraineté du Seigneur Jésus qui s'exprime dans la puissance de Son Esprit et se traduit par la vie. Si nous descendons à un niveau inférieur, pour construire sur un terrain différent de celui de la souveraine autorité et de la vie du Seigneur Jésus, nous deviendrons une secte, un groupement de plus au sein du peuple de Dieu, sur cette terre.
    Descendez sur le terrain de l'enseignement doctrinal, sur celui des conducteurs spirituels, ou sur n'importe quel autre terrain, et vous redeviendrez un "système" Mais si vous maintenez la position que vous avez prise par rapport au Seigneur Jésus vivant et souverainement élevé, vous "attachant au Chef", alors les gens pourront dire ce qu'ils voudront, il n'en sera pas moins vrai que nous aurons là une représentation vivante de la pensée de Dieu concernant l'Église, une communauté d'enfants de Dieu au caractère céleste, spirituel, universel et vivant.
    Il y aurait beaucoup à ajouter sur ce sujet, mais nous en avons sans doute assez dit pour faire sentir l'énorme fossé qui sépare les deux conceptions de l'Église dont nous avons parlé. L'Église incarne donc les rapports de dépendance mutuelle des enfants de Dieu, traduits dans la vie pratique sur la base de la souveraineté de Christ. C'est le Seigneur ressuscité qui est au milieu d'eux, ne laissant plus aucune place à l'homme. C'est sur cette base que nous devons rechercher la communion fraternelle, et, dans ce domaine, nous devons être prêts à tenir ce langage : "Écoutez !
    C'est sur un terrain spirituel que je suis venu à vous, sur le terrain de Christ, sur le terrain de la vie une et indivisible que nous avons en commun, et je suis prêt à collaborer avec vous dans tout ce qui est vraiment spirituel. Mais si vous attendez de moi que j'entre dans votre organisation, que je devienne partie intégrante de votre système, que j'adopte vos institutions, alors vous dressez une barrière, et vous souillez la communion fraternelle".
    Cette attitude-là n'est pas un reniement de l'Église, elle n'est pas en contradiction avec l'unité chrétienne. C'est simplement un refus de se laisser imposer quelque chose qui n'est pas du Seigneur, qui n'est pas scripturaire, quelque chose d'étranger à notre vie et à notre communion spirituelle. C'est au moment où les hommes quittent ainsi la pensée divine que les relations s'interrompent. Nous devons rester sur le terrain libre de la souveraineté du Saint-Esprit. Tout cela touche évidemment de très près à la vie pratique. Mais n'oubliez pas, bien-aimés, que toute la question de la plénitude spirituelle en dépend. Nous ne connaîtrons pas la plénitude de Christ si nous ne nous plaçons pas sur le terrain de Sa souveraineté et de Sa vie, si nous restons sur les terrains artificiels que les hommes ont choisis. C'est là que toutes les difficultés pratiques ont leur source.

L'Église et l'opposition des forces du mal.

    L'Église, nous l'avons vu, ne peut avoir de réalité pratique que dans l'interdépendance et la coopération de ses membres. Or, si l'Église a une bataille à livrer, c'est essentiellement parce qu'elle reconnaît Jésus-Christ comme le Seigneur. La souveraineté du Seigneur Jésus est liée au comportement de l'Église. En sorte que c'est à l'Église qu'il appartient de soutenir la lutte, c'est l'Église qui doit faire front contre l'opposition des forces du mal. "Je bâtirai mon Église et les portes du séjour des morts ne prévaudront point contre elle" a dit notre Seigneur (Matthieu 16 :18), comme si l'Église était le principal objectif des puissances mauvaises. C'est, d'un côté l'Église, et de l'autre les portes du séjour des morts.
    Les représentants de l'église sont donc appelés à faire face à ces puissances du mal. Permettez-moi ici de vous prévenir de ne jamais vous aventurer seul contre les puissances des ténèbres. Si vous vous y risquez, vous constaterez que vous aurez à faire à trop forte partie, et vous serez sérieusement maltraité. Soyez sur vos gardes. Un assaut personnel, individuel, isolé, contre les puissances du mal est une entreprise hasardeuse. C'est à l'Église qu'il revient d'intervenir.
    L'Église peut fort bien n'être représentée que par deux ou trois personnes, mais le principe du Corps doit être respecté. Cela ne signifie pas que nous ne devons pas résister personnellement au diable, et tenir ferme face à ses assauts, en nous opposant résolument à ses manœuvres. Mais si vous entendez assiéger les forteresses du Malin, vous devez rester sur le terrain de l'Église pour en venir à bout, car le Seigneur a fait de cette entreprise une affaire d'Église. Une affaire qui relève du Corps et non du membre individuel. Vous en avez sûrement fait l'expérience. Il y a des situations auxquelles on ne peut pas toucher si l'on est seul. Une collaboration spirituelle d'une sorte ou autre est la condition du succès. Sur ce point d'ailleurs le Seigneur ne nous laisse pas faire ce que nous voulons.
    Si vous faites profession d'avoir eu les yeux ouverts sur la vraie nature de l'Église, vous avez rendu témoignage à ce qu'elle est pour vous, le Seigneur vous tiendra lié au principe qu'elle représente, et vous ne parviendrez pas à dominer seul telle ou telle situation. Dieu vous forcera à vous adresser à l'Église, et toute votre vie sera bloquée tant que vous n'aurez pas fait de cette affaire une affaire d’Église. Le Seigneur est très jaloux pour Son Église. Satan est capable de mettre sens dessus dessous la vie entière de celui qui s'aventure tout seul, sans l'Église, à l'assaut de ses forteresses spirituelles. Prenez à cœur ce que je vous dis, car cela peut vous concerner directement à plus d'un titre.
    Savez-vous vraiment ce qu'est la vie de l'Église ? Vous me comprenez naturellement : quand je parle de la vie de l'Église, je ne parle pas de ce que les hommes appellent habituellement "l'Église." Je parle de ces rapports spirituels qui unissent les enfants de Dieu, de cette dépendance mutuelle des membres de Christ, et c'est bien vrai que nous dépendons les uns des autres. Le Seigneur l'a voulu ainsi, et dans toutes les affaires importantes, Il nous tiendra à ce principe. Si nous ne reconnaissons pas cette loi de Dieu, nous pouvons nous en aller à notre travail et nous apercevoir là que nous sommes mis en échec par l'ennemi, et qu'il n'y a pas d'issue pour nous.
    L'Église doit aller et venir avec nous, et nous avec elle. Dans cette affaire, il faut vivre avec le Corps. Si vous vouliez seulement le reconnaître, chers amis, vous verriez que bien des échecs et bien des déconvenues ont leur explication là. Revenez au livre d'Esdras. Souvenez-vous comment ses compagnons et lui remirent l'autel à sa place et posèrent les fondations de la maison de l’Éternel. Ils n'étaient pas plus avancés que cela dans leur oeuvre que les adversaires entraient déjà en scène. Et que firent-ils, ces adversaires ? Oh ! Ils firent toutes sortes de choses, ils mirent tout en œuvre pour frustrer les ouvriers dans leur travail. 
    Quel sentiment affreux que de se sentir frustré de quelque chose ! Est-ce là ce que vous éprouvez ? La frustration ! Aucun mot ne rend mieux compte de la situation. On fait un pas, et l'on se trouve arrêté. On n'arrive à rien. Tout n'est que déception.
    Eh bien, à l'époque d'Esdras, le peuple fut pour un temps victime des efforts de ses adversaires. Il resta paralysé pendant plusieurs années. Mais le Seigneur n'accepta pas la situation, Il réagit : "L’Éternel réveilla l'esprit de Zorobabel et de Josué" (Aggée l :14) par les prophéties d'Aggée et de Zacharie, et l'Eternel dit : "Ce n'est ni par la puissance ni par la force, mais c'est par mon Esprit" (Zach.4 :6).
    Dans ses efforts pour faire échouer les entreprises du peuple de Dieu, le malin se heurte à la puissance du Saint-Esprit exprimée par l'Église. L'Église est l'instrument du Saint-Esprit dans sa lutte contre l'ennemi. Oh ! Que Dieu nous fasse comprendre combien il est important que l'Église soit une réalité vivante et opérante. Nous l'avons dit et nous le répétons : L'Église est quelque chose de plus qu'une entité possédant la Vie. Elle est constituée par le fonctionnement harmonieux des enfants de Dieu, dans la dépendance les uns des autres. Son rôle est tout d'abord de relever le défi jeté par l'adversaire à la souveraineté de Jésus-Christ. Que surgisse au sein du peuple de Dieu une nouvelle expression des activités du Corps, une nouvelle collaboration entre enfants de Dieu, et les manœuvres de l'adversaire pourront être déjouées. Nous n'allons pas contempler les bras croisés ces manigances de l'ennemi : nous devons être réveillés dans notre esprit. Je ne suis ni Zorobabel ni Josué, mais je souhaite humblement que cette parole ait sur vous le même effet qu'eut la leur sur le peuple de Dieu de leur temps, pour susciter une action concertée des enfants de Dieu contre les manœuvres de l'adversaire, et pour dire : "Non ! Nous n'acceptons pas d'être mis en échec et frustrés par l'ennemi ! "

Les ruses du diable.

    Mais faisons encore un pas. Cette rude bataille qui nous est imposée a toujours pour objectif de mettre en échec la vraie signification de la Croix et la vraie nature de l'Église, parce que, dans l'une comme dans l'autre, c'est la souveraineté de Jésus-Christ qui est en jeu. Quelles sont donc les armes de l'ennemi ? Les Ecriture jettent sur ce point une abondante lumière. Pour l'apôtre Paul, tout peut se ramener à cette formule lapidaire : "les ruses du diable" (Ephésiens 6 :11).
    Esdras comme Néhémie nous donnent tous les deux un aperçu intéressant de ce que sont les ruses du diable. Son premier mouvement, comme on le voit dans le chapitre 4 d'Esdras, fut une tentative de paralyser le peuple de Dieu en provoquant un "mélange." Les adversaires de Juda et de Benjamin apprirent que les fils de la captivité étaient en train de construire. S'étant approchés, ils dirent : "Nous bâtirons avec vous, car, comme vous, nous invoquons votre Dieu et nous Lui offrons des sacrifices." Nous bâtirons avec vous : le mélange ! Voilà une des formes les plus subtiles de l'activité de Satan quand il veut mettre en échec l'autorité absolue de Jésus-Christ. Elle consiste à introduire des éléments qui font profession d'être sincèrement en accord avec le but poursuivi, mais qui, par nature, y sont étrangers et ennemis. Satan cherche toujours à amener des mélanges au moyen d'alliances avec des éléments de nature différente. Oh ! Laissons la Parole de Dieu nous sonder sur ce point ! La Croix a-t-elle vraiment fait son oeuvre en nous, a-t-elle été si profondément implantée en nous que nous pouvons dire en toute vérité que notre attachement à la Maison de Dieu n'est pas quelque chose de superficiel, mais que, tout an fond, dans notre être le plus intime, nous ressentons pour elle un véritable fardeau ? Dans quelle mesure vous sentez-vous concernés par ce qui touche à l'Église ?
    Bien-aimés, l'état actuel de la Maison de Dieu vous fait-il vraiment mal ? Êtes-vous certains que votre participation à l'édification de la Maison n'est pas purement extérieure, objective, comme on fait dans une oeuvre avec laquelle on est d'accord jusqu'à un certain point ? Êtes-vous tout à fait sûrs que vous êtes engagés à fond dans cette entreprise, à tel point qu'elle est devenue partie de vous-mêmes et que, dans le tréfonds de votre être, cette Maison est l'objet d'une constante, d'une douloureuse préoccupation ?`
    Les adversaires d'Esdras et de Néhémie, car malgré tout ce qu'ils disaient et prétendaient être,  étaient quand même des adversaires, ces adversaires n'avaient aucune préoccupation de cet ordre. Bien que servant le même Dieu et Lui offrant des sacrifices, ils n'étaient pas vraiment en souci, ils n'avaient pas le cœur chargé au sujet de cette Maison, comme on ne tarde pas à le voir dans la suite du récit. Empêchés de participer à la construction de la Maison, ils vont essayer de rendre la tâche impossible aux ouvriers.
    Ce qu'il faut au Seigneur, dans la trame la plus intime de notre vie, c'est un vrai fardeau, en ce qui concerne la vie spirituelle de Son peuple. Ce doit être en nous une vraie préoccupation, un souci constant, authentique et profond, qui fasse partie de notre vie et qui ne soit pas comme un vêtement d'emprunt que nous pourrions mettre de côté à tout moment, lorsque des désagréments ou des difficultés viendraient nous contrer et léser notre intérêt personnel. Ceux qui agissent ainsi, Jean les caractérise fort justement comme étant "ceux qui sont sortis du milieu de nous, mais qui n'étaient pas des nôtres" (1 Jean 2 :19).
    Peut-on sortir de quelque chose qui est devenu notre être même ? Nous avons peut-être pensé une fois ou l'autre à y renoncer, à nous retirer, mais quand le moment du choix était arrivé, il s'était avéré que ce que nous avions peut-être traité avec un certain recul et que nous allions laisser tomber faisait tellement corps avec nous, qu'il nous était impossible de nous en séparer. Car, dans le creuset où Dieu nous jette, l'Église est rendue partie intégrante de notre être.
    Êtes-vous sûrs qu'il en est ainsi pour vous ? Si oui, l'ennemi ne peut pas grand-chose. Mais, souvenez-vous qu'il cherchera toujours à obtenir un assemblage disparate de personnes dont les unes ont un fardeau réel, tandis que les autres, bien qu'elles soient convaincues de l'avoir aussi, et malgré toutes leurs prétentions de servir le même Dieu et de Lui offrir des sacrifices, n'ont dans tout cela qu'une préoccupation passagère sans aucun fardeau réel dans les profondeurs de leur être. Elles ont simplement adhéré à quelque chose, et ce n'est pas le Saint-Esprit qui les y a introduites.
    Ils voulaient faire alliance ! Et n'ayant pas obtenu ce qu'ils voulaient, leur subterfuge éclate au grand jour. Leur première manœuvre ayant échoué, ils vont essayer d'empêcher la construction de la Maison et, à grand renfort de menaces, espérant réussir par intimidation, ils se mirent à répandre de faux bruits et à calomnier les ouvriers, disant que c'était pour se révolter qu'ils construisaient le Temple. Ils s'attaquèrent à la construction de la muraille et à Néhémie, en faisant croire que c'était un homme qui désirait se faire un nom et grouper des partisans pour devenir quelqu'un.
     Faux bruits et calomnies, c'est ainsi que travaille l'opposition suscitée par le diable. Dans le cas particulier, leur pression fut énorme. Le livre d'Aggée projette sur cet épisode une lumière très significative. Vous vous souvenez qu'au début de ses prophéties qui devaient relancer la construction du Temple, on trouve cette parole : "Ce peuple dit : le temps n'est pas venu, le temps de construire la Maison de l’Éternel."
    Or ils avaient commencé, ils avaient mis l'autel à sa place et jeté les fondations de la Maison. Mais ils avaient changé d'avis. Ils appréciaient différemment la situation. "Le temps n'est pas venu, le temps de construire la Maison de l’Éternel." Pourquoi ? Parce qu'ils s'étaient heurtés à l'opposition farouche et implacable de leurs adversaires. Une opposition qui ne se limitait pas à des attaques venues de l'extérieur, mais qui se faisait aussi sentir au-dedans sous la forme d'une suggestion insidieuse : "Vous voyez, toutes ces difficultés, tous ces ennemis, ces persécutions, ces calomnies : cela signifie sûrement que Dieu ne veut pas que vous vous occupiez de cette affaire ; l'heure de Dieu n'est pas venue. Quand Son heure aura sonné, plus de difficultés, tout ira tout seul !" Mais, en a-t-il jamais été ainsi?
    Consultez l'Histoire. Vous aurez de la peine à trouver un seul exemple où l'enfer ne s'est pas mobilisé tout entier quand Dieu S'est mis à faire une chose nouvelle. Satan dit : "L'opposition signifie que le Seigneur n'est pas avec vous dans cette affaire. S'Il était avec vous, tout irait à la perfection !" Non ! Il n'en a jamais été ainsi ! Mais vous voyez comme Satan intervient de l'intérieur, et donne aux difficultés une signification qu'elles n'ont pas, disant ou insinuant que si le Seigneur était avec vous, vous n'en auriez pas, Il vous conduirait au but, sans que vous ayez le moindre ennui. Oh, non ! Pas du tout ! C'est là un mensonge de l'ennemi, qui cherche à mettre l’œuvre de Dieu en échec par tous les moyens imaginables, à cause du terrible échec que représentera pour lui le triomphe du peuple de Dieu.
    Demandez à Dieu de vous montrer ce que tout cela signifie, pour que cette parole ait des effets réels dans votre propre vie, et qu'Il puisse obtenir, Lui, ce que Son cœur désire. Et n'oubliez pas que l'ennemi cherchera continuellement à vous frustrer, vous aveugler, vous paralyser. Demandez au Seigneur de réveiller votre esprit et dites : "Si le Seigneur cherche à accomplir quelque chose, je refuse toute paralysie dans mon esprit ou ma pensée, toute influence qui produirait la mort. Je prends fermement position pour l'accomplissement intégral de toute Pensée de Die!"

En Christ : un petit mot qui en dit long (suite) : "Conformes à Lui dans Sa mort".

    La mort de Christ, on l'a souvent fait remarquer, a eu, et a toujours un double aspect. D'abord, l'aspect "substitut," qui est unique, complet, définitif. Personne ne peut rien ajouter, et personne ne peut contribuer en quoi que ce soit à son efficacité rédemptrice et propitiatoire. Nous en recevons le bénéfice par la foi, c'est un don par lequel nous sommes justifiés.
    Mais il y a un second aspect "représentatif", nous-mêmes, dans notre nature adamique déchue, sommes compris dans cette mort. L'aspect substitutif règle le problème de notre péché. L'aspect représentatif règle le problème de notre personne. Bien que ces deux problèmes soient, l'un et l'autre, en rapport vital avec le salut, le second, celui de notre personne, pourra rester assez longtemps à l'arrière-plan de notre vie spirituelle. Ce n'est que lorsque nous en viendrons à comprendre ce que c'est que de vivre la vie de Christ et de nous engager dans le "dessein éternel," que Dieu mettra l'accent sur ce côté-là de l’œuvre du Calvaire.
    Ce second aspect de la Croix se trouve souligné partout dans l'Ancien Testament, soit dans les types, soit dans l'enseignement général. Il fallait qu'Abraham soit séparé de son "pays" (le monde), de sa "famille" (les relations naturelles), et de la "maison de son père" (le vieil homme).
    Un auteur chrétien a fait remarquer que la vie d'Abraham tout entière est une illustration de ce principe de mort, dans son application, à toutes sortes de domaines de sa vie naturelle. Il fait un premier pas en sortant du pays des Chaldéens, mais à Charan, et jusqu'à la mort de son père, sa marche est arrêtée. Le vieil homme ne peut pas passer la frontière du Jourdain, celle qui représente la Croix. Les "lieux célestes" sont inaccessibles à la vieille vie. L'auteur dont nous avons parlé fait ressortir le caractère charnel des attachements d'Abraham, tel que le soulignent les différents événements de sa vie, causes de difficultés et de retards. Il montre aussi comment il lui fallut y renoncer. Voici quelques exemples :

--1. L'Egypte : le domaine des sens. L'Egypte représente une tentative pour trouver des forces
spirituelles, grâce à ce qui est tangible, visible, accessible aux sens.
--2. Lot : la droiture et l'intégrité de l'homme naturel. La mentalité naturelle et la mentalité spirituelle semblent au premier abord tellement proches, qu'il est difficile de distinguer l'une de l'autre. La différence entre la manière de penser de l'homme naturel, si intègre soit-il, peut se voir comme à l’œil dans tout le cours des vies d'Abraham et de Lot. Ce n'est qu'après que Lot se soit séparé de lui que Dieu dit à Abraham : "Lève les yeux maintenant…"
--3. Les Cananéens : la fausse religion. Religion spirituelle certes, mais satanique. Des formes
extérieures, accompagnées de signes et de prodiges, mais démoniaques.
--4. Agar et Ismaël : l'expédient. Essai d'atteindre des fins spirituelles par des moyens naturels. Abraham tâche d'être fécond par ses efforts personnels, grâce aux ressources de sa chair, sur un terrain naturel.

    On peut suivre ce principe dans nombre d'autres détails de sa vie. Pour pouvoir entrer dans les conditions de l'alliance éternelle et être spirituellement fécond, il faut qu'Abraham devienne un homme spirituel qui accepte de vivre par la foi seule. Il en est de même pour Moïse. Il doit connaître, lui aussi, la discipline qui le préparera à son oeuvre. Un des passages les plus extraordinaires et, pour beaucoup de lecteurs, les plus déroutants de l’Écriture, est cette déclaration d'Exode 4 :24 : "L’Éternel l'attaqua et voulut le faire mourir," et cela, après que Moïse eut reçu la vision céleste et l'appel de Dieu.
    Nous savons par les textes que cet incident est en rapport avec le signe de l'alliance, la circoncision ; mais nous ne devons pas oublier que la circoncision symbolise justement le dépouillement du corps de la chair, et que ceci se rapporte à notre identification avec Christ dans Sa mort (Col. 2 :11-12).
    Quarante ans auparavant, Moïse avait essayé de mettre les ressources de sa vie naturelle au service de Dieu. Il n'aboutit qu'à l'échec et à une totale paralysie, ce qui était inévitable. Il fallut quarante années vécues sur le principe de la mort pour que, devant les exigences du service de Dieu, il ne puisse plus dire que : "Je ne peux pas, c'est trop pour moi !"
    De propos délibéré, Dieu avait tout mis en oeuvre pour le réduire à rien. Mais il fallait que le principe fondamental que Moïse venait d'apprendre fût exprimé par un signe, ou témoignage visible. Il fallait, si vous voulez, un symbole. Or le symbole en lui-même n'est rien. Il n'a de valeur que dans la mesure où la réalité spirituelle qu'il représente a été sincèrement reconnue et vécue. Telle était, en Israël, la circoncision, image de la séparation entre l'homme naturel et l'homme spirituel, entre le vieil homme et le nouvel homme.
    D'où l'incident que relate notre texte. Le voyage de Moïse fut brutalement stoppé. Il lui fallut, par un geste visible, bien précis, proclamer le principe de séparation d'avec le domaine de la chair. Nous pouvons être certains que, si nous essayons d'introduire l'homme naturel, l'incirconcision de la chair, dans le domaine de la vie spirituelle et du service de Dieu, nous serons brisés. Tôt ou tard, l'homme naturel doit faire la dure expérience du jugement implacable du Calvaire.
    Ainsi, nous voyons que cette vérité de l'union avec Christ dans Sa mort représentative se trouve être, dans l'Ancien Testament, à la base même de l'expérience des serviteurs de Dieu. Nous pourrions en suivre le principe tout au travers des Écritures. Qu'est-ce que l'Histoire d'Israël, sinon un long commentaire sur ce sujet ? La Mer Rouge est la mort substitutive, Christ mort à notre place, et le désert est une révélation de la nécessité du Jourdain, c'est-à-dire de la mort représentative, de l'identification avec Christ dans Sa mort.
    L’œuvre substitutive de Christ, avec les bénédictions qu'elle nous procure et toutes les satisfactions de la justification par la foi, doit nous conduire plus loin. Si notre vie spirituelle reste pure et se développe, nous ne tarderons pas à nous rendre compte à quel point est profonde la différence entre l'ancienne créature et la nouvelle. Il y a un abîme entre l'homme naturel et l'homme spirituel.
    Nous n'en prenons conscience, nous, que petit à petit, par étapes successives. Mais Dieu voit les choses d'En Haut, comme une affaire déjà réglée pour Lui. L'homme naturel et l'homme spirituel ne se superposent pas, ils sont aux antipodes l'un de l'autre. Dans Sa pensée, le rapprochement, ou la réunion des deux, touche à la fornication spirituelle, et les fruits qui en résultent, soit dans la vie personnelle, soit dans le service chrétien, sont illégitimes.
    Le plan de Dieu pour nous est de nous rendre la chose toujours plus claire. Et, bien qu'il puisse nous sembler qu'il y ait entre ces deux domaines passablement de points communs et même de mélanges, Dieu nous montrera, avec une netteté croissante, qu'Il a placé, entre l'un et l'autre, les dimensions infinies de la Croix.
    Nous avons cité plus haut de nombreux passages de l’Écriture qui établissent des différences fondamentales entre ces deux modes d'existence, le naturel et le spirituel. Être "chrétien," ce n'est pas simplement modifier la direction de nos intérêts. Ce n'est pas orienter vers l’Évangile nos facultés, notre énergie, nos ressources, notre cœur, notre enthousiasme, qui étaient jusque-là au service du monde et de nous-même. Non. En ce qui concerne les choses de Dieu et de la vie divine, Dieu a prononcé sur l'homme naturel ce double verdict, que l’Écriture reproduit ou reflète à chacune de ses pages : "… Rien" (Jean 6 :63), et "… Il ne peut pas" (Romains 8 :7).
    Ne pas discerner le sens de ces mots, c'est être voué à la stérilité et au désespoir de Romains 7. Une lutte intense n'aboutissant à rien, tel sera immanquablement le résultat, pour peu que nous ayons de réels besoins spirituels. Du reste, que ces besoins existent ou non, si la notion de travail pour Dieu consiste simplement en une orientation de l'homme naturel vers le "service chrétien," ce service-là n'atteindra jamais l'objectif que Dieu lui a assigné, et ne parviendra jamais à des résultats vraiment spirituels. Nulle chair ne saurait se glorifier en la présence de Dieu, et la chair religieuse n'est pas plus agréable à Ses yeux que la chair irréligieuse.
    Que d'hommes bien intentionnés, qui s'efforcent d'atteindre un niveau spirituel qui les satisfasse, ou qui s'attellent courageusement à l’œuvre de Dieu, avec les ressources de leur intelligence, de leur volonté, de leurs sentiments ! Raisonnement, énergie, enthousiasme, rien n'y manque de ce qui fait la force de l'homme naturel. De là toutes ces organisations humaines, avec leurs rouages si encombrants pour l'Esprit de Dieu. Que nous sommes loin du témoignage apostolique !
    Non. Pour être agréé de Dieu et Le servir, c'est un homme nouveau qu'il faut. Cet homme nouveau a une vie nouvelle, une manière de penser nouvelle, un esprit nouveau, des moyens nouveaux, des aptitudes nouvelles, des intérêts nouveaux. En fait, "toutes choses sont devenues nouvelles."
    Cet homme nouveau apprendra de plus en plus à quel point la manière dont Dieu agit est différente de la manière de l'homme ; et aussi, à quel point ce que Dieu fait est différent. Les objectifs de Dieu, les méthodes de Dieu, les moyens employés par Dieu, l'heure de Dieu, représentent, pour cet homme en Christ, toute une éducation, et souvent toute une discipline. Jusqu'à ce que le "vieil homme" soit vraiment crucifié, accepter les voies de Dieu, Ses méthodes, Son heure, Son véritable but, sont encore pour lui une épreuve pénible. Ou bien il se révoltera et ira son propre chemin, ou bien il acceptera d'être humilié.
    De toute façon, il lui faudra comprendre un jour que, dans l'intention de Dieu, lui, l'homme naturel, doit aller à la Croix, puisque c'est la place que Dieu lui assigne une fois pour toutes, en la Personne de Jésus-Christ. L'homme naturel qui touche aux choses de l'Esprit ne produit que mort et désolation : d'où la nécessité pour le Seigneur, qui ne cherche que notre bien, de prendre des précautions contre cette vie naturelle chez les Siens. C'est pour cela qu'Il les fait passer par des chemins d'humiliation qui les mettent, pour ainsi dire, hors de combat, sur le plan naturel. Il plante une écharde dans la chair de Paul, toujours prête à s'enfler, et aussi pour que la fécondité spirituelle de Son serviteur ne soit pas compromise, mais s'accroisse plutôt.
    Nous avons une connaissance bien imparfaite des ressorts secrets de notre propre cœur. Nos mobiles, la nature de nos désirs, même quand il s'agit de bénédictions spirituelles, les intérêts personnels que nous avons dans le Royaume de Dieu, la soif de posséder, d'être satisfaits, d'avoir de l'influence, le désir d'être indépendants ou considérés, toutes ces choses et beaucoup d'autres, sont des éléments constitutifs de notre nature. Dieu sait à quel point toutes les sources de notre vie sont infectées, et comment cette corruption transparaît au-dehors.
    Loin de Lui la pensée de nous livrer à une introspection maladive et à nous lamenter sur notre état. Ce qu'Il cherche à obtenir de nous, c'est que nous prenions notre verdict qu'Il a prononcé sur "l'homme naturel," et que nous acceptions qu'il soit crucifié. Quand, par la foi en Sa Parole et en la justesse de Sa condamnation, nous acceptons ainsi la Croix, Il entreprend Lui-même de réaliser cette mort en nous. Et, peu à peu, nous nous rendons compte que c'est bien de cela que nous avions besoin. Alors, sur la base de ce grand principe divin : "J'ai été crucifié avec Christ, … ce n'est plus moi qui vis," nous refusons de faire un seul pas qui ne soit pas dans l'Esprit.
    De même que, selon le symbole de l'Ancien Testament, l'huile de l'onction sainte ne devait pas venir sur la chair de l'homme, de même, dans la dispensation de l'Esprit, Dieu ne permettra jamais que le Saint-Esprit vienne sur la chair.
    Dans l'expérience personnelle aussi bien que dans l'Histoire, le Calvaire précède la Pentecôte. L'onction pour le service est toujours obligatoirement précédée d'une claire révélation du caractère méprisable et de l'impotence de l'homme naturel aux yeux de Dieu. Le : "Je ne veux pas !" de Moïse, le : "Malheur à moi !" d'Esaïe, le : "Je ne suis qu'un enfant!" de Jérémie, le : "Je suis un homme pécheur !" de Pierre, l'aveu classique : "Ce qui est bon, je le sais, n'habite pas en moi", de Paul, sont caractéristiques de tous ceux qui ont été appelés par Dieu. Ces expressions résultent tout simplement d'une application, dans leur vie personnelle, du vrai sens de la Croix. Pourtant, dans le domaine de leur vie naturelle, ils étaient des enthousiastes de la religion, dévoués à la cause de Dieu.
    C'est toujours l'amour de Dieu qui nous conduit sur le chemin de la Croix, quelle que soit l'amertume de la coupe qu'il faut boire, quand "l'âme", et non l'esprit, est éprouvée jusqu'à la mort ; car ce n'est que par ce chemin que notre vie peut se libérer des limitations de la nature, pour entrer dans les possibilités universelles et infinies de l'Esprit.
    Relisons les Écritures en gardant cette pensée en nous. Quand nous verrons que vraiment Sa mort est notre mort, disons : "Amen ! Seigneur, réalise cela dans ma vie !"
Nous pourrons alors dire avec Paul : "… Connaître Christ, et la puissance de Sa résurrection, et la communion de Ses souffrances, étant devenus conformes à Lui dans Sa mort."

Les marques de Jésus-Christ (suite).

    Les marques, non seulement de la propriété, mais aussi de la dévotion dans le service. Paul avait gagné bien des cicatrices dans son service dévoué au Seigneur. Le service du Seigneur lui valait bien des souffrances, et les marques qu'il portait étaient celles de la fidélité jusqu'au sacrifice. Il se peut que nous ne soyons pas tous destinés au "service missionnaire" auquel Paul, et beaucoup d'autres, furent appelés. Mais peu importe. Nous n'irons pas très loin dans notre dévotion aux intérêts du Seigneur Jésus sans connaître souffrance et sacrifice. Cela nous coûtera. Nous risquerons notre position ou l'estime des autres ; sans doute devrons-nous parfois accepter de renoncer au meilleur dans ce monde. Les portes de certains milieux se fermeront.
    Beaucoup de personnes dont nous aurions aimé gagner l'amitié nous la refuseront. Si nous voulons être de ceux qui cherchent les intérêts du Seigneur et qui veulent contribuer à l'avancement de Son règne, nous devons nous attendre à perdre certains avantages et à souffrir jusqu'au sacrifice. Je doute qu'il soit possible de servir les intérêts du Seigneur sans qu'il y ait sacrifice de notre part.
    Il se peut qu'au terme de notre course ici-bas, lorsque nous regarderons en arrière, nous voyions beaucoup de choses que nous aurions pu gagner : une position, l'approbation et les récompenses des hommes, mais elles nous ont échappé. Nous avons dû les abandonner pour Jésus, préférant recevoir Ses stigmates dans ces domaines. "Pourquoi ? Pourquoi ceci ? Pourquoi a-t-il fallu cela ? Pourquoi cela a-t-il tant coûté ? Pourquoi ne suis-je jamais arrivé où d'autres sont arrivés ?" Ce sont les stigmates du Seigneur Jésus, la marque de Jésus.
    Mais il y a des gains qui sont cachés à notre vue, et qui feront plus que compenser les pertes apparentes. Cet homme qui écrivait ces mots, avait écrit à une autre occasion :

"Nos légères afflictions du moment présent produisent pour nous, au-delà de toute mesure, un poids éternel de gloire, parce que nous regardons, non point aux choses visibles, mais à celles qui sont invisibles ; car les choses visibles sont passagères, et les invisibles sont éternelles" (2 Corinthiens 4 :17-18).

Cependant, nous tenons tellement aux choses visibles, n'est-ce pas ? Il nous est si difficile de détourner les regards des choses visibles, c'est-à-dire de ce qui est manifeste, des choses dont on peut tenir compte. Elles sont si proches de la vue ! Les pertes, les souffrances, les épreuves, les difficultés, les adversités, ce sont des choses visibles. Les choses invisibles, que sont-elles après tout ?
    En ce qui nous concerne, les choses invisibles sont des promesses. Elles sont réelles en Dieu, mais pour nous elles ne sont que des promesses. Et cependant elles sont sans mesures et sans limites, infiniment plus excellentes, un poids de gloire sans mesure et éternelle, un poids de gloire ! Elles sont là, invisibles, tandis que nous portons ici-bas les marques de la perte des choses que nous aurions pu avoir. Ces choses étaient là pour nous, mais, à cause des intérêts du Seigneur Jésus, elles ont dû être abandonnées. Les marques du Seigneur Jésus, la fidélité jusqu'au sacrifice, le chemin de l'impopularité, avec tout ce qu'il en coûte. Enfin, ces marques de l'apôtre sont aussi :

Les marques de l'image de Jésus.

    Si les marques de quelqu'un ont une utilité, c'est qu'elles peuvent être vues par les autres. Elles se remarquent, elles montrent clairement à tous les intéressés que celui qui les porte est marqué et désigné comme étant la propriété de quelqu'un. C'est quelque chose qu'il faut montrer. Et les stigmates du Seigneur Jésus ne sont pas seulement des marques de propriété et des marques de dévotion dans le service, elles sont aussi des marques de ressemblance.
    J'ai toujours pensé que les exhortations à être semblables à Christ ne plaisent pas du tout à notre propre nature. Je dois confesser qu'à aucun des appels à devenir semblable à Christ que j'ai entendu faire, je n'ai vu de réponse enthousiaste. Il ne sert à rien que je vous dise d'être semblable à Christ, aussi ne vais-je pas le faire ; cependant, je vous dirai que, vous et moi, nous devons porter l'image de Christ comme la marque qu'Il possède nos vies.   Comment cette image de Christ se produit-elle ?
    Les marques de la dévotion dans le service nous viennent à mesure que nous souffrons pour Lui, que nous faisons des sacrifices pour Lui. Les marques de l'image de Christ nous viennent à mesure que notre communion avec Lui se développe. Elles sont le résultat de notre fidélité dans la communion.
    Ainsi, les marques de la possession sont le, résultat de la fidélité dans la loyauté ; les marques de la dévotion dans le service sont les marques de la fidélité dans la souffrance et le sacrifice ; et les marques de l'image de Jésus-Christ sont le fruit de la fidélité dans la communion avec le Seigneur. Comment deviendrai-je semblable à Christ ? Comment deviendrez-vous semblable à Christ ? Comment les autres verront-ils en nous les marques de Jésus ?
    Simplement dans la mesure où nous sommes fidèles dans notre communion avec Lui. Vous le savez, dans notre vie de tous les jours, commencez la journée sans votre moment de prière, et vous aurez bientôt dans votre vie d'autres marques que celles de Jésus. D'un autre côté, soignez la question de votre communion, préservez votre heure de recueillement, vos moments de prière, respectez vos moments de tranquille méditation, veillez à ce qu'il y ait une place dans votre cœur, chaque jour, et vous n'aurez pas besoin de vous efforcer de devenir semblables au Seigneur Jésus.
    Tous les soucis que vous pourrez vous faire pour devenir semblable au Seigneur Jésus ne seront d'aucun secours. Ceux qui marchent intimement avec Lui, qui veillent à leur vie de prière, portent ces marques de Son repos, de Sa paix, de Sa patience, de Sa douceur, de Sa grâce, de Son amour, les marques de Jésus !
    C'est ainsi que se forme Son image en nous. Je ne vous dis pas de vous efforcer de lutter pour être semblables à Jésus. Je dis : "Restez en contact avec Jésus !" Croyez-moi, car j'ai suivi ce même chemin. Je connais, oh ! Je connais, d'un côté le bonheur, et de l'autre côté l'amertume de la souffrance qui sont liés à cette vie-là. Le bonheur qu'il y a à veiller à nos moments de recueillement, à nos heures de prière, à notre vie de communion avec le Seigneur ! Oh oui ! Dans le travail, dans le monde, quelle différence cela fait-il !
    D'un autre côté, il y a les attaques et les événements qui surviennent, les obstacles qui freinent notre communion avec le Seigneur. Et quel en est le résultat ! Puis-je vous presser à veiller à votre fidélité dans la communion avec notre Seigneur ? Peut-être sans le savoir, et ce sera mieux ainsi, vous porterez les marques du Seigneur Jésus, Son image. Je ne désire pas que vous puissiez prouver aux autres que vous ressemblez à Christ. J'aimerais que cela arrive sans que vous le sachiez ! Il en sera ainsi si vous veillez à votre vie de communion. Soyez donc fidèles en cela. Et ensuite ? Qu'importe ! "Que désormais personne ne me fasse de la peine !" Tout serait vain ! L'on peut essayer de me détourner, de me séduire, le monde cherchera à m'attirer. L'on tentera de me troubler et de m'ennuyer, mais j'appartiens à Jésus. J'ai en Lui tout ce que je puis désirer. "Que personne ne me fasse de la peine, je porte en mon corps les stigmates de Jésus."

Qu'il en soit ainsi pour nous tous !