dimanche 1 janvier 2012

LA VIE DE JOB par Jessie Pen-Lewis (première partie)

ce livre est paru en publication gratuite

PRÉFACE de l'auteur

    Le livre de Job a été particulièrement pour moi un trésor, depuis que je l'ai étudié avec ma classe biblique en 1895. Cependant les profondes expériences des sept années qui suivirent furent nécessaire pour que le Seigneur put me confier le privilège d'exposer le message très spécial que renferme ce livre, pour les enfants de Dieu, en ces derniers jours.
    Où que nous regardions en ce monde, partout, nous voyons l'or que constituent les élus de Dieu dans la fournaise de l'affliction. S'il ne s'agit pour eux des moqueries et des fouets, des chaînes et de la prison (Hébreux 11.36-40) , ils se trouvent tous, cependant, en quelque fournaise extraordinairement chauffée, et quelques-uns d'une manière qui rappelle celle de Job.
    Tous ceux qui peuvent supporter le feu passent par la fournaise. Oui, nous avons même assisté au départ à l'enlèvement de quelques saints parmi les plus avancés spirituellement, parlant, que Dieu appelait à Lui comme par un char de feu.
    Le Corps de Christ est un. La même vie passe dans le Chef et dans ses membres. Il est écrit: ''Si un membre souffre, tous souffrent.'' Les souffrances de nos frères et sœurs en Chine et dans bien d'autres endroits, entraînent donc, spirituellement parlant la souffrance pour tous les membres vivants du Corps de Christ, en tous lieux... ''Afin qu'ils ne parviennent pas sans nous à la perfection.'' (Afin que nous parvenions avec eux à la perfection)
    J'adresse au Nom de Seigneur, ce message tiré du livre de Job, à tous les enfants de Dieu qui marchent devant lui en intégrité de cœur, qui obéissent à sa vérité révélée, et qui cependant sont placés par Dieu dans une fournaise ardente, où ils sont souvent en proie à l'angoisse et au découragement.
    Que l'Esprit éternel daigne se servir de ces lignes pour répandre quelque lumière sur les voies de Dieu, et pour communiquer quelque réconfort à ceux qui sont dans la fournaise...
    Je n'ai point essayé de donner une minutieuse exégèse du texte de l’Écriture. D’autres que moi, avec bien plus de science,d'érudition, bien plus de temps aussi que je n'en ai, ont reçu cette charge. J'ai seulement tracé une rapide esquisse de la vie de Job, du point de vue expérimental, pour fortifier ceux qui sont dans l'épreuve. En appendice, j'ai donné de courts extraits de plusieurs auteurs, lesquels extraits m'ont semblé appropriés.
    J'ai soigneusement évité toute allusion aux sujets controversés, afin que la Parole, elle-même donne son message et l'applique par le Saint-Esprit, aux enfants de Dieu.
    Pour conclure, je demande instamment aux lecteurs que chacun d'eux s'applique ce dont il a besoin selon que les y guide l'Esprit de Dieu; laissant les autres pages du livre, à ceux pour qui Dieu les a inspirées.
    Je me suis servi de la version révisée (anglaise)  pour mes citations. Exceptionnellement, j'ai cité la version autorisé, ou les textes ajoutés en marge, qui donnent les diverses traductions.   

(juin 1902)   Jessie Penn-Lewis


CHAPITRE PREMIER

Introduction (Chapitre 1.1-5)

Il y avait dans le pays d'Uts, un homme qui s'appelait Job

   
     L'esprit de ce siècle influence même ceux qui reconnaissent que ''Toute l’Écriture est inspirée de Dieu, et utile pour enseigner, convaincre, pour corriger, pour instruire dans la justice..." (2TImothée 3.16)
    "Job a-t-il vraiment existé?" demandent de nombreux chrétiens. A ceci, le Seigneur a répondu dans sa Parole, par la bouche du prophète Ézéchiel : "Fils de l'homme, si un pays pèche contre moi....quand ces trois hommes, Noé, Daniel et Job, s'y trouveraient.. ils sauveraient leur âme par leur justice, dit le Seigneur, l’Éternel 'Chapitre 14.20) Soyons assurés que le Dieu de vérité ne mettrait pas Job au rang des justes, avec Daniel et Noé, s'il n'était qu'un personnage légendaire, et si le livre de Job n'était qu'un chef-d’œuvre littéraire. Il est aussi fait mention de Job dans l'épître de Jacques : "Voici, nous disons bien heureux ceux qui souffert patiemment. Vous avez entendu parlé de la patience de Job et vous avez vu la fin que le seigneur lui accorda; car le Seigneur est plein de miséricorde et de compassion." (Chapitre 5.11) 
    Il est évident que les premiers chrétiens savaient que Job avait vraiment existé; qu'ils le considéraient comme un exemple de patience, et que sa vie était pour eux un encouragement à se confier dans la miséricorde et dans la compassion de Dieu.
    Les Juifs ont conservé jalousement ce livre dans le canon des Écritures. On assure qu'il est le plus ancien, et qu'il a été écrit quelque deux mille ans avant l'ère chrétienne. Ce qui ne peut être tenu pour absolument certain. L'apôtre Paul cite le livre de Job et il fait précéder sa citation par ces mots : "Il est écrit" (1Corinthiens 3.19)
    Les Septante nous disent dans leur traduction que Job vécut d 240 ans, dont 140 après les grandes épreuves qu'il eut à traverser. Il est donc possible que Job ait souvent rencontré Sem, fils de Noé, comme plusieurs érudits le pensent. Il est possible qu'il fasse partie de la lignée de ces prophètes dont Zacharie évoque la mémoire.
    Le récit sacré nous dit que Job était le plus grand des enfants d’Orient. Quelques savants assurent qu'il était prince, d'autres disent roi. Il avait de grandes richesses et un grand train de maison...
    Il est évident, d'après ses discours, qu'il avait une certaine culture et une science étendue. Il connaît l'écriture, la gravure sur pierre, le travail des mines, la métallurgie, la construction, la navigation, l'histoire naturelle, l'astronomie. Il est initié à la science de son temps (Fausset)
    Enfin, quelques phrases brèves nous renseignent sur le caractère de Job : intègre, droit, craignant Dieu, se détournant du mal (Chapitre 1.1) tandis que de nombreux détails de sa vie sont laissés de côté.
  Ainsi, et la chose est à remarquer, les écrits sacrés ne sont pas rédigés dans le but de satisfaire la curiosité, mais uniquement pour gagner les hommes et les ramener à Dieu. En voici un exemple dans l'histoire de Job. Quelques mots suffisent pour nous initier à sa situation, pour nous introduire dans son cercle familial et nous dire ses richesses. Puis, aussitôt, nous le voyons transporté dans une époque tragique de sa vie, ce qui doit servir à l'enseignement des enfants de Dieu pour tous les âges, longtemps après la disparition du patriarche de la scène de ce monde.
   Au moment qu'il est comme jeté dans la fournaise de l'épreuve, il est écrit de Job "qu'il était intègre et droit". (la version anglaise donne parfait et droit) Et Dieu, citant son serviteur Job dans l'assemblée des saints, emploie ces mêmes qualificatifs.
    Le récit montre que sa perfection (son intégrité) consistait en un cœur complètement donné à Dieu, un cœur sincère et loyal. Il ne servait pas deux maîtres : Dieu et lui-même. "Il craignait Dieu est détournait du mal."
    La crainte du Seigneur (ou intelligence : 1Jean 5.20) c'est un sentiment divin de sa volonté. Une connaissance intuitive de sa volonté qui jaillit d'une marche persévérante avec Dieu, et qui conduit à se détourner du mal. 
    Connaître Dieu, comprendre sa pensée, sa volonté, fait connaître, aussi combien est grande l'iniquité du péché. Mieux nous connaissons Dieu, plus nous redoutons de l'attrister. Cette crainte de Dieu, chez Job, est pratique. Non seulement elle le détourne du mal, mais elle lui fait comprendre la nécessité du sacrifice pour le péché. Il en a comme une connaissance intuitive, bien que la loi sur les péchés ignorés ne fut promulguée que bien plus tard. "Si un homme pèche sans le savoir contre l'un des commandements de l’Éternel...il est coupable" (Lévitique 5.17) Enseigné par Dieu, il salue même, à l'avance, ce meilleur sacrifice dont il est question dans la lettre aux Hébreux, cette aspersion du sang à l'intérieur du voile, pour la purification constante de ceux qui marchent en communion avec Dieu. (Hébreux 9.26 ; 1Jean1.7) 
    Dans la crainte qu'il avait d'aucun péché entre lui et le Dieu saint, Job se levait de bonne heure, pour offrir des sacrifices en faveur de ses enfants. Il avait peur que dans les jours de festin, ils eussent oublié la présence de Dieu et que quelque pensée mauvaise, quelque blasphème, eussent effleuré leurs cœurs. Le patriarche comprenait donc qu'un sacrifice était nécessaire pou la rémission des péchés, même pour l'oubli momentané de la présence de Dieu
     Le fait qu'il offrait continuellement des holocaustes montre que sa crainte de Dieu n'était pas spasmodiques et seulement aux jours d’épreuve. Elle était un principe profondément enraciné dans sa vie, principe qui réglait ses actions....
    Au cours de notre étude, nous verrons d'autres du caractère de Job. Le Saint-Esprit qui inspira ce récit, met l'accent, dès le début, sur le secret de sa piété : la crainte de Dieu.
    Il faut que cette crainte de Dieu, cette intégrité de cœur et de vie, soient reconnues par les enfants de Dieu, s'ils veulent comprendre la signification de l'épreuve qui atteignit Job.

  
 CHAPITRE DEUX

A la cour du Roi des rois (Chapitre 1.6-22)

Or les fils de Dieu vinrent, un jour, se présenter devant l’Éternel, et Satan vint aussi au milieu d'eux
   Après les quelques mots d'introduction concernant Job, voici les cieux qui s'ouvrent devant nous, et nous assistons à une sorte de conseil dans l'Au-delà. Le voile est momentanément levé sur l'invisible et nous voyons Dieu sur son trône, siégeant au milieu de l'assemblée des saints. C'est jour d'audience à la cour du Roi des rois et les fils de Dieu (les anges) se présentent pour rendre compte de leurs mandats. Satan se présente aussi parmi eux. N'est-il pas prince de la puissance de l'air ? Lui, le diable et Satan qui séduit toute la terre habitée; lui, l'accusateur des frères !
    De nombreux passages des Écritures confirment (presque jusque dans les détails) cette description de l’Éternel siégeant dans l'assemblée de Ses saints. "Les cieux célèbrent tes merveilles, ô Éternel, et ta fidélité, dans l'assemblée des saints ; car, qui dans le ciel peut se comparer à l’Éternel ? Qui est semblable à toi parmi les fils de Dieu ? Dieu est terrible dans la grande assemblée des saints. (Psaumes 89.6-8)
    Daniel voit et entend les saints se parler l'un à l'autre des desseins de Dieu pour la terre. La sentence prononcée par Nébukadnetzar semble l'avoir été par toute l'assemblée des saints . à l'un d'eux est confié le soin de faire connaître à l'intéressé, le décret et d’exécuter celui-ci.
    Zacharie voit Josué, le souverain sacrificateur, qui se tient devant l'ange de l’Éternel, et, nous dit-il, ceux qui étaient près de Josué, reçurent l'ordre d'ôter ses vêtements sales, et de le revêtir de vêtements blancs.
    Il apparaît, d'après les textes, qu'il y a des degrés d'autorité dans cette assemblée céleste Nous avons les noms de deux archanges : Michel et Gabriel. Il est question de sept "anges de la présence" en plus des "veillant" dont il est fait mention dans le livre de Daniel.
    Godet dit que le nom de "Gabriel" signifie "héraut de Dieu", et que cet archange est chargé des missions divines concernant le salut des hommes. C'est lui qui fut envoyé à Marie pour lui annoncer la naissance du Sauveur, du Fils.
    Le nom de l'archange Michel signifie : "qui est semblable à Dieu ?" Il lui appartient de détruire tout ce qui ose s'égaler à Dieu, tandis que Gabriel travaille à l'accomplissement du plan divin.
    Gabriel est envoyé pour rendre Daniel intelligent dans les choses de Dieu. Nous voyons Michel, l'un des principaux princes venir au secours du Messager divin envoyé à Daniel, "le serviteur bien-aimé".
    C'est aussi l'archange Michel, prince puissant auquel sont confiés les intérêts du peuple de Dieu, qui dispute à Satan le corps de Moïse. (Jude 24)
     Dans l'Apocalypse le voile est à nouveau levé, et nous voyons l'archange Michel conduisant les armées célestes contre Satan, à la tête des légions des ténèbres. Le Prince de la puissance de l'air est alors définitivement rejeté hors des lieux célestes. Il est précipité sur la terre et tous ses anges avec lui.
    Nous ne pouvons citer que ces quelques passages, lesquels donnent un aperçu des lieux célestes. D'autres textes nous disent la haute vocation en Jésus-Christ de ceux qui autrefois étaient éloignés de Dieu, morts dans leurs fautes et leurs péchés. Les anges sont des esprits serviteurs envoyés pour assister ceux qui doivent hériter du salut. Car les rachetés d'entre les hommes sont appelés, non seulement à se tenir devant le trône de Dieu mais à être cohéritiers de Christ, lequel est assis sur le trône du Père.
    Le caractère de Satan : Adversaire et Accusateur, peint de façon précise, si claire dans le livre de Job, nous est montré sous les mêmes couleurs en d'autres passages des Écritures. Nous ne pouvons douter que nous ayons ici un bref aperçu des choses du monde spirituel.

 "L’Éternel dit à Satan : d'où viens-tu ? Et Satan répondit à l’Éternel : de parcourir la terre et de m'y promener.

    Ce texte prouve que Satan a le droit d'entrer en la présence de l’Éternel aux jours d'audience. Il est le prince rebelle de ce monde, l'esprit qui agit maintenant dans les enfants de rébellion, le dieu de ce siècle qui aveugle les pensées incrédules. Il est le chef des dominations, des autorités, "des princes de ce monde des ténèbres", des esprits mauvais dans les lieux célestes. (Ephésiens 6.2) 
    Dès les jours du jardin d’Éden, l’Éternel avertit Satan (après qu'il eut entraîné à la désobéissance nos premiers parents)  que la postérité de la femme lui écraserait la tête... A ce jour, cependant, il n'est pas encore dépossédé de son royaume. Et le voici en la présence même du Tout-Puissant, avec les autres serviteurs. A la question posée, il répond : "je viens de parcourir la terre et de m'y promener."
    "Aller de ci de là, de long en large, avec une hâte fébrile." Il y aurait cette signification dans le texte original. Satan parcourt la terre "comme un lion rugissant cherchant qui dévorer". Ou, comme un esprit impur qui cherche du repos et qui n'en trouve pas. Cet esprit fiévreux, il le communique à ses serviteurs :

''Les méchants sont comme la mer agitée qui ne peut se calmer et dont les eaux soulèvent la vase et le limon. Il n'y a point de paix pour les méchants, dit mon Dieu." (Esaïe 57.20-21)

    Que les enfants de Dieu fassent attention à cette description que Satan donne de lui-même et de son caractère. Quel contraste avec le calme du Fils de Dieu, au cours de son pèlerinage terrestre ! Dans ce monde qu'il est venu pour sauver, le Seigneur non seulement a la paix, mais il la donne, il communique la bénédiction et la vie. Une hâte fébrile ne vient jamais de Dieu, et dans la mesure que le racheté devient participant de la nature divine, il a cette puissance calme, reposante, qu'a manifestée de façon si frappante le Seigneur Jésus.
    Comparez aussi Satan avec l'archange Gabriel. Celui-ci n'agit que sur l'ordre de Dieu, tandis que le diable, qui n'a point conservé son premier état, est comme désaxé, décentré. Il est comme une étoile errante et il est jamais satisfait. Son seul bonheur au ciel ou sur la terre consiste à tenter d'autres créatures, à les entraîner au mal et à la perdition.

 "L’Éternel dit à Satan : As-tu remarqué mon serviteur Job ? Il n'y a personne comme lui sur la terre." (chapitre 1.8)
 ''Aurais-tu des visées sur mon serviteur Job ? (en marge de la Bible révisée anglaise)


    "Personne comme lui sur la terre !"  Ceci veut-il dire que Job avait atteint le plus haut développement spirituel et qu'il surpassait touts ses contemporains qui servaient le Seigneur, par l'intégrité de son cœur et de sa vie ? A lui, mieux qu'à tout autre, pouvait donc être confié le ministère de la souffrance, afin que fussent manifestées dans sa vie les "voies de Dieu", pour l'enseignement de tous ceux qui, aux cours des siècles, seraient appelés à passer par la fournaise de l'épreuve.
    Ainsi, Dieu choisit Job, voulant donner par lui, un exemple de ses compassions et de ses miséricordes à ses bien-aimés, lorsqu'il permet que ceux-ci passent par la fournaise, afin que leur affliction, qui n'est que pour un temps, produise un poids éternel de gloire. (2 Corinthiens 4.17)
    Pour le diable aussi, "il n'y avait personne comme Job sur la terre". Job était une cible de choix. Plus que d'autres hommes, il pouvait être dit de lui qu'il ne pouvait vivre ou mourir pour lui-même. Sa chute en eût entraîner bien d'autres ! Quoi d'étonnant que le diable eût de visées sur lui, qu'il eût résolu de le perdre. A la demande de l’Éternel, Satan a répondu : "Est-ce pour rien que Job craint Dieu ?" Ironiquement, il jette le trouble sur l'intégrité du patriarche.
    (Au jardin d’Éden, c'est sur Dieu que le diable avait jeté le doute dans la pensée d’Ève. "Dieu a-t-il réellement dit : Vous ne mangerez pas de tous les arbres du jardin ? " Se servant de la même arme, aujourd'hui encore, il jette le doute sur le services des fidèles témoins du Seigneur, suggérant que leur travail est intéressé. Un amour et un service désintéressés, ce sont-là choses que ne peuvent admettre ni le diable ni ceux qui sont dominés par lui.)
    Satan travaille maintenant à justifier ce qu'il vient d'avancer. Il continue en disant à l’Éternel :"ne l'as-tu pas protégé ? Lui, sa maison et tout ce qui lui appartient ? " (Ou : "n'as-tu pas fait une haie autour de lui, de sa maison, de tout ce qu'il a...")
    Le diable connaissait bien "cette haie qu'avait dressée la protection divine autour du patriarche. C'est en vain qu'il a essayé de la percer. (Quel réconfort pour le fidèle ! La haie n'entoure pas seulement celui qui prie, mais aussi sa maison et tout ce qu'il a.)
    "Tu as béni l’œuvre de ses mains et ses troupeaux couvrent le pays." Il était facile, en somme, de vérifier si l'intégrité et l'amour de Job pour Dieu étaient désintéressés, véritables. L’Éternel connaissait le cœur de son serviteur et savait s'il était absolument pur. Mais qui d'autre pouvait croire à l'intégrité de Job, comblé de biens et de bénédictions ?

"Mais étend ta main, touche à tout ce qui lui appartient, et il te reniera en face... (1.11)

   Ce défi de l'adversaire était-il dans en son cœur lorsqu'il se présenta devant l'assemblée des fils de Dieu ? Satan était certain que si Dieu enlevait la protection dont Job était entourée, ce prétendu ''saint homme" se rebellerait contre Dieu, comme il l'avait fait lui-même lorsqu'il avait voulu élever son trône au-dessus "des étoiles de Dieu". Lorsqu’il avait osé dire : "Je serai comme le Très-Haut." C'est alors qu'il avait été rejeté.
   Si, lui qui avait été parfait en beauté, lui Lucifer, fils de l'Aurore, s'il avait perdu son premier état, s'il était devenu l'ennemi déclaré du Tout-Puissant, pourquoi considérerait-il comme impossible de faire tomber ce fils d'Adam, ce membre d'une race déchue ? L'intégrité de Job était insupportable pour le diable...
    L'assemblée des "fils de Dieu" a entendu le défi lancé contre l'homme dont l' Éternel a loué la piété et l'intégrité. Le diable a jeté le doute sur la parole de Dieu. La loyauté de Job sera mise à l'épreuve, et les cieux sauront que l' Éternel peut être aimé et adoré pour Lui seul, même par un fils d’Adam.
        "Voici, tout ce qui lui appartient je te le livre," dit Dieu "seulement ne porte pas la main sur lui". Avec joie, Satan vit levée la barrière dont il se plaignait, et il se retira.
    Un récit bref, vivant, nous montre les attaques de Satan sur les biens de Job. L’adversaire a décidé qu'il faut que l'épreuve soit soudaine, répétée, inattendue, pour que Job soit amené à renier Dieu, ce qu'il ne fera jamais de façon délibérée, froidement. Ce sont souvent ces coups imprévus de l'épreuve qui révèlent le caractère d'un homme. Ce qui est au fond du cœur surgit à la surface. L'épreuve qui frappe dans les jours de fête, de joie, où l'homme n'est pas sur ses gardes, l'épreuve qui surprend en plein bonheur, est plus dure à supporter.
    Satan choisit son heure. Les enfants de Job s'étaient réunis chez le fils aîné pour un festin lorsqu'un messager survient pour avertir que les Sabéens ont pris les troupeaux de bœufs et d’ânesses et ont tué ceux qui les gardaient. Les messagers se succèdent : le feu du ciel a consumé les troupeaux de brebis et les bergers. Les Chaldéens ont pris les chameaux et tué les gardiens.
    C'était la ruine complète pour Job. Ces coups répétés de l'adversité, cet unique serviteur échappant chaque fois au désastre, cela aurait pu lui faire comprendre qu'il y avait là, plus que des faits naturels. Quiconque marche avec Dieu apprend à discerner les puissances surnaturelles, derrière les choses de la vie journalière.
    Mais les biens naturels ne sont pas tout quand le trésor est dans le ciel.Et la vie d'un homme ne réside pas dans l'abondance de ses richesses. A peine Job a-t-il pu saisir l'étendu de ses malheurs successifs, qu'un autre messager survient et lui annonce que la maison où étaient ses enfants s'est écroulée sous les rafales d'un vent violent, ensevelissant tous ceux qui y étaient. "Tes enfants sont morts."
    Jetés dans l'éternité au milieu d'un festin ! Point d'adieux, de dernier message, point de prière ! "Alors Job se leva, déchira son manteau, puis se jetant sur terre, il adora et dit :'' je suis sorti nu du sein de ma mère et je retournerai nu dans le sein de la terre. L’Éternel a donné, l’Éternel a ôté, que le nom de l'Éternel soit béni" (1.20-21)

    Job ignore probablement la nuée de témoins. Il ignore la joie de ceux qui, au ciel, suivent la tragédie dont il est l'objet, le centre. Il est sorti victorieux de l'épreuve. Satan est défait. Les coups successifs de l’épreuve n'ont pas ébranlé ni sa confiance en Dieu, ni son amour pour Dieu. "En tout cela, Job ne pécha point, et n'attribua rien d'injuste à Dieu."


 CHAPITRE TROIS ( 2.13-3 )

Une nouvelle rencontre dans le ciel. L'intégrité de Job. Ses amis


"Simon, Simon, Satan vous a réclamés pour vous cribler comme le froment; mais j'ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille point"  (Luc 22.31-32)

    Or, les fils de Dieu vinrent un jour se présenter devant l’Éternel, et Satan vint aussi (2.1) C'est à nouveau jour d'audience au ciel, et parmi les princes, les fils de Dieu, Satan se présente. Le dialogue s'engage comme au chapitre premier. Dieu ajoute ceci à la description du caractère de Job : "Il demeure ferme dans son intégrité bien que tu m'excite à le perdre sans motif." (v. 3)
   Devant le conseil, l’Éternel déclare que toutes les épreuves qui ont frappé Job l'ont frappé sans motif. Job a justifié la confiance que Dieu mettait en son intégrité et sa fidélité. Les insinuations du diable ne reposent donc sur rien. Mais, Satan proteste :"Tout ce qu'un homme  possède, il le cède volontiers pour sa vie;...mais étend ta main, touche à ses os et à sa chair et je suis sûr qu'il te maudira en face." (v. 5) 
    Remarquons ici, pour notre consolation, le contrôle que Dieu exerce sur Satan. Celui-ci ne pouvait toucher ni à Job, ni à ses propriétés, ni à sa famille, sans y être autorisé par Dieu. Ceci nous est confirmé par les paroles du Fils de Dieu à Pierre : "Satan a demandé à vous cribler... mais j'ai prié pour toi afin que ta foi ne défaille pas." Et Paul écrit aux Corinthiens : "Dieu est fidèle, il ne permettra pas que vous soyez tentés au-delà de ce que vous pouvez supporter; mais avec la tentation, il donnera aussi l'issue."
    Il est donc clair que Satan ne peut toucher à un serviteur de Dieu sans y avoir été autorisé. Son attaque est limité par celui qui est la Sagesse suprême, à ce qui débarrassera le froment de la paille, l'or des scories.
    Satan frappa Job d'un ulcère malin de la plante des pieds jusqu'au sommet de la tête: sorte d’inflammation de tout le corps qu'on a surnommé lèpre noire. Job prit un tesson pour se gratter, et s'assit sur la cendre.  Hors du village, sur la cendre Job est assis (Hors du village sur la cendre, Job est assis. (A l'entrée de tous les villages du Hauran, il y a un endroit où on dépose les immondices enlevées de l'étable. On les brûle de temps en temps. Les cendres restent là, et s'y accumulent pendant des siècles. Le malheureux, frappé d'une maladie repoussante n'est plus supporté à l'intérieur du village. Il s'y retire. Bible Crampon) Lui qui avait siégé, comme prince, aux portes de la cité ! Lui, l'un des plus nobles fils d'Orient ! Sa femme lui dit alors : "Tu demeures ferme dans ton intégrité ? Maudis Dieu et meurs !" (ch. 2.9) ou : renie! laisse là!
    Il semble que la femme de Job soit restée seule à ses côtés. Dans son angoisse, à la vue des horribles souffrances de son mari, elle dit ce que Satan voudrait que Job fit. Le diable peut emprunter les lèvres des plus fidèles amis pour nous conseiller, à l'heure de l'épreuve, la chose qu'il voudrait que nous fissions. Ainsi, Pierre essaya de détourner le Seigneur du Calvaire : "Aie pitié de toi Seigneur", dit-il. A quoi jésus répond "Retires-toi de moi, Satan!" Il a aussitôt discerné l'inspirateur des paroles prononcées par le disciple.
    "Renie Dieu et meurs !" a dit la femme de Job. Il ne nous est pas dit qu'elle se soit lamentée lorsque le malheur a ravi tous les biens terrestres, ni qu'elle se rebella lorsqu'elle a appris la mort de ses enfants. Mais voir son mari dans ce état misérable dépasse tout ce qu'elle peut supporter. Est-ce ici le lot de celui qui a servi Dieu avec tant d'intégrité ? 
    Dieu ne peut pas être un Dieu d'amour ! Autrement il ne permettrait pas que souffrent ainsi ceux qui le servent ! Phrase souvent prononcée par des chers amis, au chevet de serviteurs de Dieu dans le creuset de l’épreuve et de la douleur physique. Mais Job répondit: "Tu parles comme une femme sans piété. Quoi ! nous recevons de Dieu le bien, et nous ne recevrions pas le mal." (version Septante)
    En vérité la consécration de Job est profonde, réelle, complète. "En tout cela Job ne pécha point par ses lèvres; (2.10) Que d'enfants de Dieu, hélas ! servent Dieu pour le bien qu'ils espèrent en retirer en ce monde et dans le monde à venir, plutôt que par un amour véritable et désintéressé. Les mondains aussi le font. Les uns et les autres trébuchent sur l'écueil de la souffrance. "Ils ne comprennent pas que la souffrance a une fonction plus haute que la punition, et que l'homme extérieur doit être sacrifié aux intérêts de l'homme intérieur, à ceux du monde alentours, et à ceux de l'invisible au-delà.
    La souffrance du saint, saintement supportée, est pour le plus grand bien de celui qui est éprouvé. Elle est aussi un témoignage pour son entourage terrestre, et pour les êtres des sphères invisibles."  (W. W. Peyton)
    Job est un véritable serviteur de Dieu. Épreuves sur épreuves tombent sur lui sans que sa foi chancelle, sans que soit ébranlée son intégrité. Par là, il montre que sa consécration est véritable, et qu'il ne sert pas Dieu pour ce qu'il reçoit. Sa foi en la fidélité de Dieu n'est pas ébranlée. Que Dieu donne ou que Dieu reprenne, Job bénit encore le nom du Seigneur.
    Les mauvaises nouvelles vont vite. Apprenant la grande épreuve qui frappait Job, trois de ses intimes amis décidèrent d'aller le voir pour le consoler, et de faire le voyage ensemble. Tout en cheminant, ils devisent sur les malheurs qui ont frappé le patriarche : ils en supposent les raisons possibles...et arrivent à la même conclusion. En conséquence, ils décident de parler de telle et telle manière à celui que Dieu a mis à l'épreuve.
    Aujourd'hui encore, les choses vont de même, le cœur humain n'a pas changé. Combien sont-ils ceux qui savent remettre les affligés entre les mains de Dieu ? Ceux qui savent les aider à croire et à demeurer ferme jusqu'au bout ? Moins nombreux encore sont ceux qui peuvent dévoiler aux cœurs affligés les desseins à la réalisation desquels Dieu travaille en eux, par l'épreuve. 
    Ignorant les raisons profondes des tribulations qui atteignent l'enfant de Dieu, nous sommes enclins à juger d'après ce que nous voyons, ou d'après ce que nous entendons; selon la mesure de notre développement personnel !...
    Voici les amis de Job, presque au terme de leur long voyage, De loin encore, ils aperçoivent un homme sur le tas de fumier, hors de la ville. Quoi ! est-ce possible ? Serait-ce Job ? Job, le plus grand des fils de l'Orient ? Ce pauvre hère sur la cendre pourrait-il être le Job qu'ils ont connu ? "Ayant porté les regards sur lui, ils ne le reconnurent point. Ils élevèrent la voix et pleurèrent. Comment les puissants sont-ils tombés !" Alors ils déchirèrent leurs manteaux et ils jetèrent de la poussière au-dessus de leurs têtes, car leur douleur était sincère et profonde. Puis, venus jusqu'à leur ami ils restèrent muets, assis à terre sept jours et sept nuits, sans parler, car ils voyaient combien la douleur de Job était grande ! (v. 13)
    "Après cela, Job ouvrit la bouche et maudit le jour de sa naissance." (3.1) Le premier, il rompit le silence, pour répandre l'amertume de son âme, pour dire son horreur du jour qui l'a vu naître. Ces paroles nous révèlent quelques-unes des pensées qui ont bouillonné en son cœur pendant les jours de silence. Mais il ne renie pas Dieu. Il ne se révolte pas contre Lui...
    Pour ses amis, il n'a pas de paroles de bienvenue. En de semblables douleurs les formalités habituelles ne sont pas de saison.
    Périsse le jour où je suis né.... ! Ce jour anniversaire de ma naissance, ordinairement temps de fête et de joie, qu'il soit jour de ténèbres et de deuil. Pourquoi ne suis-je pas mort ! "Maintenant je serai en paix, je dormirai,  je me reposerai avec les rois et les grands de la terre. (v. 11 13) Dans le sépulcre, ceux qui sont las se reposent : Les méchants n'exercent plus de violence, les captifs sont en paix, ils n'entendent plus la voix de l'exacteur..."
    Étrange à dire, à l'heure des grandes afflictions, l'âme se tourne vers la mort comme pour y chercher un refuge. "C'est assez...prends ma vie", dit Elie à l’Éternel, alors qu'il tombait de fatigue, il s'est étendu sous le genêt. "Ce peuple est trop pesant pour moi... tue-moi, je te prie", demande Moïse à l’Éternel, alors qu'il est, comme terrassé par l'amertume et la douleur.
    "La mort vaut mieux pour moi que la vie" dit Jonas à Dieu, parce que ses jugements ne frappent pas une Ninive repentante. Et depuis, combien de serviteurs du Très-Haut se sont écriés dans l'angoisse de leur âme : "Je voudrais être mort."
    Jusque là, Job ne s'était pas rebellé contre Dieu, mais son langage s'apparente presque à celui de la révolte. Soupirer après la mort, pour échapper à la souffrance, ce n'est point se soumettre à la volonté de Dieu. Satan inspire ces paroles comme il inspiré celles de sa femme  "renie Dieu et meurs !"
    Poussé à l'extrême par une maladie et sous une influence satanique, de pauvres âmes ont même recouru au suicide pour atteindre cette place de repos. Que les enfants de Dieu prennent garde, qu'ils se fortifient en Dieu et le bénissent pour le privilège de la vie. Qu'ils se détournent de la tentation du repos de la tombe et choisissent la vie, même si la leur est comme jetée dans la fournaise de l'affliction, car le but n'est pas la tombe mais le ciel.
    "Pourquoi la vie est-elle donnée..., à ceux dont l'âme est remplie d'amertume ; à ceux qui espèrent la mort, et la mort ne vient pas... à ceux qui sont heureux , qui tressaillent d'aise et se réjouissent, quand ils ont trouvé le tombeau." (3.20-22) 
    Job ne pèse plus ses paroles, il n'en discerne pas la lâcheté, et il compte parmi ses douleurs ce que le diable a nommé une bénédiction (l'homme que Dieu enferme de toutes parts) Il termine en disant : "ce que je crains, c'est ce qui m'arrive." (24-26)
    Enseigné par Dieu, Job savait donc que l'heure de l'épreuve allait arriver tôt ou tard. Le trouble, l’appréhension avaient donc parfois projeté leurs ombres sur la paix des jours de bonheur. Il avait eu le pressentiment de l'épreuve dans laquelle il était à présent.



CHAPITRE QUATRE (4 à 7)

Exhortation d'Eliphaz. Réponse de Job

"Ce n'est pas un ennemi qui m'outrage... c'est toi, mon confident, mon ami..." 
(Psaume 55.13-14)
     En lisant ce que dit alors Eliphaz de Théman à son ami dans l'affliction, nous pensons à ces âmes candides qui s'imaginent qu'elles doivent dire toute leur pensée. "Si nous essayons de t'adresser un mot peut-être aura-tu peine à l'entendre, dit Eliphaz, mais qui pourrait retenir ses paroles !" Et il continue en disant les choses les plus douloureuses, celles qui, probablement, ont déjà abordé la pensée de Job, exhalant sa peine :
"Tu as enseigné la sagesse à plusieurs.
"Tu a fortifié les mains débiles.
"Tes paroles ont relevé ceux qui chancelaient. 
"Tu as raffermi les genoux vacillants.
"Et maintenant qu'il s'agit de toi, tu faiblis !
"Maintenant que tu es atteint tu perd courage !   'version Crampon)
    Tout cela, Job le savait par cœur, et Satan le lui a murmuré, sans doute, quand il a vu le patriarche sombrer sous la douleur. Mais c'était une souffrance ajoutée à tant d'autres, que d'entendre Eliphaz le dire. 
     "Ta crainte de Dieu n'est-elle pas ton espoir ?" continue Eliphaz. "Si les autres hommes l'ignorent, toi Job, tu devrais savoir te confier en Dieu au jour de l'épreuve. Ce que tu sais de lui n'est-il pas suffisant pour te donner confiance maintenant ?"
    Ami qui es dans la fournaise, ne sont-ce pas ici les paroles mêmes de ceux qui essaient de te consoler ? Ils parlent de la douleur de celui que Dieu a blessé, ils le consolent en lui rappelant qu'il a exhorté les autres à être forts et que lui-même maintenant, faiblit.
    "Cherche dans ton souvenir : quel est l'innocent qui a péri ? Mais ceux qui labourent l'iniquité et sèment l'injustice en rapportent les fruits." (4.7-11)
    Ainsi, d'après Eliphaz, l'homme récolte seulement ce qu'il a semé. Il y a, ici, une suggestion de péché dans la vie de Job. Eliphaz cherche à donner plus de poids à ce qu'il dit et évoque une vision nocturne. Mais les paroles de l'esprit qui l'a visité la nuit font songer au diable plutôt qu'à un ange de lumière, plutôt qu'au Saint-Esprit.
    Satan qui a accusé Job devant Dieu et dans l'assemblée des saints affirmant que dans l'épreuve Job renierait l’Éternel, Satan qui l'a frappé et dépouillé de tous ses biens, lui qui a attaqué le patriarche indirectement par les conseils de sa femme, et directement en le faisant soupirer après la mort, attaque Job à nouveau en se servant de ses amis, de ses consolateurs. Il n'abandonne jamais la partie. Il est toujours à l'arrière-plan de ce que vit Job. Par ses amis, il attaque directement l'intégrité de l'homme de Dieu, sa foi et son assurance de communion avec l’Éternel.
    Eliphaz dit qu'il a appris dans une vision qu'aucun mortel n'est juste et pur devant Celui qui l'a créé. Ce qui équivaut de dire à Job qu'il peut abandonner la confiance mise en son intégrité. L'épreuve qu'il traverse, montre assez que son lot est identique à celui des autres hommes. Il croyait que Dieu le protégeait et le bénissait, en définitive, il moissonne les fruits du péché comme les autres. "Tu hais le mal et u as recherché la droiture ; mais personne n'est juste devant  Dieu, aucune créature n'est pure devant le Créateur."
    "Voici Dieu n'as pas confiance en ses serviteurs, il trouve de la folie chez ses anges, combien plus chez ceux qui habitent des maisons d'argile."  Tels sont les propos que l'esprit a murmuré aux oreilles d'Eliphaz, sur l'homme en qui Dieu a placé sa confiance, sur Job dont Dieu a reconnu l'intégrité, devant l'assemblée des saints.
    L'Adversaire accuse sans cesse l'homme devant Dieu, et il accuse constamment Dieu auprès des hommes. Il le leur montre insensible, et il travestit ses pensée auprès de ses créatures.
    "L'homme est comme la teigne" (un vermisseau) ; du matin au soir il est brisé", dit encore l'esprit qui a visité Eliphaz.
    Ils sont à plaindre ceux qui se confient dans des visions nocturnes pour la connaissance de Dieu. Ils se laisseront certainement égarer. Un esprit de mensonge fait errer Eliphaz. Il le conduit à l'erreur avec une demi-vérité. Assurément, l'homme mortel n'est pas pur devant le Dieu saint ; mais l'esprit nocturne a oublié de mentionner le sacrifice du Christ au Calvaire. A cause du sacrifice, l'homme a été rendu agréable à Dieu.
    Enfin, s'il peut être dit que la vie de l'homme sur la terre est comparable à celle de la teigne, il est faux d'avancer que Dieu le laisse périr sans y prendre garde. Les cheveux mêmes de votre tête sont tous comptés, dit le Seigneur à ses disciples. Et vous valez mieux que beaucoup de passereaux. (Mathieu 10.30-31)
    "Appelle maintenant" ,dit Eliphaz à son ami affligé. "Auquel des saints t'adresseras-tu ?" (5.1) (Paroles qui font supposer qu'Eliphaz croit avoir été visité par l'un des saints, au cours de la nuit.
"Quant à moi, j'aurai recours à Dieu, et c'est à Dieu que j'exposerai ma cause," dit-il (v. 8)
    Il y a bien des Eliphaz, aujourd'hui, lesquels s'expriment comme lui, pour décrire les choses qu'ils ont apprises secrètement, dans le silence de la nuit, communications du monde des esprits qu'ils croient être des messages. Pour rien au monde, ils ne voudrait se détourner de Dieu. Mais par ces messages directs de l'au-delà, ils s'imaginent qu'ils le connaîtront mieux. Que Dieu daigne ouvrir leurs yeux sur les desseins du diable, et qu'il les délivre de ce piège !
    "J'ai vu l’insensé étendre ses racines, mais soudain, j'ai maudit sa demeure. Ses fils sont loin de tout secours ; Ils sont écrasés à la porte et personne ne les délivre. (ch. 5.3-4)
    Que veut dire Eliphaz ? L'esprit qui lui a parlé au cours de la nuit, semble ignorer l'amour et la compassion, lesquels résultent de la communion avec le Dieu d'amour. "La souffrance ne sort pas de la poussière, dit-il et la peine ne germe pas du sol" (v. 6) Voilà le pauvre raisonnement d'Eliphaz. Il vient de prononcer une malédiction contre l'insensé. Puis, il continue en disant qu'il doit y avoir quelque raison à l'épreuve de Job.
    "Si j'étais à la place de Job, je remettrais ma cause à Dieu ; il fait de grandes choses et des merveilles sans nombre." (v. 9) "Il élève ceux qui sont abaissés et ceux qui sont dans le deuil, il les met au faîte du bonheur." (v. 11) "Il déjoue les desseins de l'homme pervers, et il prend les sages dans leurs propres ruse." (v.12,13) "Il sauve le pauvre de la main des puissants et il y a en Lui une espérance pour les malheureux." (v. 15,16)
    CONCLUSION D'ELIPHAZ : "Voici : Heureux l'homme que Dieu châtie. Ne méprise pas la correction d'El-Shaddaï. Car il fait la plaie et il la bande ; il blesse et ses mains guérissent." 
(Chapitre 5.17-18)
    Eliphaz nous fait l'impression d'un personnage étrangement compliqué. Assurément, il a quelque connaissance de Dieu. Connaissance purement théorique, peut-être ? Nous ne savons. Après les premiers mots de sa réponse aux plaintes de Job, il lui a montré une certaine charité, suggérant seulement que l'homme moissonne ce qu'il a semé, et conseillant à Job de s'en remettre à Dieu. Que son ami s'estime d'être heureux de la correction divine et se garde de la mépriser. Si El-Shaddaï (celui qui donne la bénédiction) fait la plaie, il la guérit immanquablement aussi.
    Puis voici Eliphaz qui se lance dans une description merveilleuse de ce qui se passerait si Job recherchait Dieu de tout son cœur et ne méprisait pas la correction. Alors, le Tout-Puissant serait comme désarmé et ses mains comme liées.  
"El-Shaddaï le délivrerait de toutes ses détresses, et aucun mal n'approcherait de lui." (v. 19) "en temps de famine, il serait gardé de l'épée." (v. 20) "Le fléau de la langue ne le toucherait pas, la destruction ne l'effraierait pas". (v. 21) "Il se rirait du danger et ne craindrait point les bêtes des champs" (v. 22,23) "Sa maison, protégée par Dieu, jouirait de la paix." (v. 24) "Sa postérité serait comme l'herbe,il descendrait dans la tombe, comme tombent les épis mûrs, en leur saison." (v. 25,26)

"Voilà, nous avons examiné la chose, elle est ainsi, écoute cela et fais-en ton profit'' (v. 27)


    C'est là un beau discours, Eliphaz, mais il sonne faux, et ce n'était pas le moment de parler des bénédictions de la délivrance. Les prémisses sont fausses. Tous les biens énumérés seraient pour Job s'il retournait vers Dieu, dis-tu. Or, Job ne s'est jamais détourné de lui ! Eliphaz n'a rien compris à l'épreuve qui a frappé le patriarche.
     Job a écouté, mais les paroles d'Eliphaz ne l'ont pas convaincu. D'ailleurs, elles n'ont pas pénétré en lui à cause de l'angoisse de son âme
  Oh ! s’il était possible de peser ma douleur, et si toutes mes calamités étaient sur la balance, elles seraient plus pesantes que le sable de la mer...Car les flèches du Tout–Puissant m'ont percé, et mon âme en suce le venin ; les terreurs de Dieu se rangent en bataille contre moi."
    Les bêtes des champs crient leur détresse quand elles ne trouvent point de nourriture. Ainsi j'ai besoin de  crier ma douleur. C'est un soulagement dont mon âme a besoin. "Ce que je voudrais ne pas toucher, 'est là ma nourriture, si dégoûtante soit–elle !" Eliphaz, tu dis que l’homme n'est qu'un vermisseau. "Oh ! Si Dieu voulait accorder ma demande, et m'écraser . Qu'il laisse aller sa main pour m'achever. Et j'aurai une consolation, et j'aurai des transports de joie au milieu des tourments qu'il ne m'épargne pas : c'est que je n'ai pas renié les paroles du Saint" (6. 3,9,10)
    Les forces me manquent pour atteindre la délivrance. Qu'attendrais-je encore qui m'incite à la patience. Ma chair n'est point d'airain. Ne suis-je pas sans secours ? Et le salut n'est-il pas loin de moi ?
    "Celui qui souffre a droit à la compassion de son ami, même s'il abandonnait la crainte de l’Éternel." dit Job (6.14) Or, ceux qui sont venus pour le consoler l'accablent et il les compare à des torrents sans eau. "Mes frères sont perfides...comme le lit des torrents qui disparaissent...Viennent les chaleurs et ils tarissent...Les voyageurs sont honteux d'avoir eu confiance. Ainsi vous êtes comme si vous n'existiez pas. Vous voyez mon angoisse et vous en avez horreur." (6.15-22) "Vous ai-je demandé quelque chose ? ou des présents avec vos biens ? ou de me délivrer de la main des méchants ? Instruisez-moi et je me tairai. Faites- moi comprendre en quoi j'ai péché." (6.24) Les paroles droites ont de la force. Les arguments d'Eliphaz en manquent totalement. "Que les paroles vraies sont dissuasives, dit Job Mais que prouvent vos remontrances ? Vous seriez capable d'écraser des orphelins, vous qui montrez tant de dureté de cœur avec votre ami !" Regardez-moi, je vous prie, vous mentirais-je en face ? Y a-t-il de l'iniquité sur ma langue ? (6.28-30)
    J'ai pour partage des nuits de souffrance... Je suis rassasié d'agitations jusqu'au point du jour...Ma peau se crevasse et se dissout ...Mes jours s'évanouissent, plus d'espérance! ...C'est pourquoi, je parlerai dans l'angoisse de mon cœur." (7.9-11)
    Puis, se détournant de ses amis, Job s'adresse à Dieu : "Suis-je une mer ou un monstre marin que tu établisses des gardes autour de moi... Laisse-moi, car ma vie n'est qu'un souffle...Qu'est-ce que l'homme...pour que tu l'éprouves à touts les instants...Si j'ai péché, qu'ai-je pu te faire Gardien des hommes ?... Que ne pardonnes-tu mon péché ?...Car je vais ma coucher dans la poussière, tu me chercheras et je ne serai plus" (7.20-21)

CHAPITRE CINQ (8,9,10)

Bildad et ses raisonnements  -  Job en appelle à Dieu

"Je t'ai choisi dans la fournaise de l'affliction."  (Esaïe 48.10)

    Les différentes réponses des amis de Job révèlent leurs caractères respectifs. Eliphaz était peut-être considéré comme ayant le plus de maturité spirituelle, à cause de son assurance d'avoir été enseigné de Dieu dans les visions de la nuit. C'est pourquoi, probablement, il a été désigné pour parler le premier à Job. C'est aussi lui qui l’accuse le plus ouvertement d'avoir transgressé de quelque manière la loi de Dieu.
    On peut décrire Bildad comme l'humble ami. Il parle moins que les deux autres, et il le fait avec une certaine douceur. Il n'est guère que leur écho amoindri. Il a entendu Eliphaz et le cri de job vers Dieu: "si j'ai péché...que ne pardonnes-tu ma transgression ?"  Il essaie, lui, d'une douce persuasion "Jusqu’à quand parlera-tu ainsi, Job ?  El-Shaddaï (le Tout-Puissant) fera-t-il fléchir la justice ? S'il n'y a pas d'iniquité dans ta vie, tes enfants ont probablement péché, eux, et il les a livrés aux conséquence du péché." (v. 2-4)
    "Mais si toi tu cherches Dieu, si tu demandes grâce au Tout-Puissant, si tu es pur et droit, il veillera certainement sur toi (il se réveillera pour toi) et rendra le bonheur à la maison du juste" (v. 5,6)
    Encore l'aiguillon ! Encore ce terrible si, tellement douloureux et torturant, pour celui qui est dans le creuset. Le diable susurre : "Si tu étais droit devant Dieu, il te délivrerait." L'ami venu pour le consoler suggère à peu près la même chose : "Si tout était en règle avec Dieu, il interviendrait et te délivrerait. Même toi, Job, tu as crié à Dieu, disant : si j'ai péché contre toi."
    La perte de toutes les possessions terrestres, être mal jugé par ses amis, la souffrance physique, tout cela n'éveille pas dans le cœur  de Job une douleur aussi vive aussi aiguë que ce si, car il marché avec Dieu dans l'intégrité.
    Bildad avoue son ignorance (v. 9) et il s'en réfère aux expériences et à l'autorité des ancêtres. Il a un grand respect pour la tradition. Or, il est évident d'après les ancêtres, que Dieu bénit ceux qui sont intègres et il punit les incrédules, les impies. Que Job accepte donc leur enseignement. S'imaginerait-il connaître Dieu mieux que les anciens ne l'on connu ? (v. 10)
    Bildad n'est qu'un écho. D'autres, plus grands, plus sages que lui ont parlé de ;la sorte. Il est heureux d'accepter leurs conclusions. Cette connaissance de seconde main lui suffit. Cela parait être de l'humilité. Ensuite, il se met à décrire la vie de quiconque oublie Dieu. Ses comparaisons indiquent la sphère assez limitée de ses pensées, de son horizon : le roseau qui se flétrit, la toile d'araignée, la maison, le jardin, la poussière. v. 12 à 19)
    Puis, il ajoute :"Voici, Dieu ne rejettera pas l'homme intègre. Il rendra le rire à ta bouche et les chants d'allégresse à tes lèvres" (v. 20-21)
    Bildad est un brave homme. Il plaint Job. Il désire lui donner un petit encouragement. Tout ce qu'il a dit sur le sort des méchants est vrai. Mais, si, après tout, Job était bien intègre devant Dieu ? Eh bien Dieu le réjouira, il remplira sa bouche de rire et d'allégresse.
    Bildad est comme ces braves gens qui vous disent, quand vous êtes dans la douleur : "Allons, bon courage ! Le jour de la joie luira de nouveau pour vous"
    Même dites avec la meilleure des intentions, ce ne sont pas ces paroles qui peuvent alléger la douleur où Job est plongé. A peine s'y trouve-t-il un mot juste pour celui qui a été le chef digne et respecté de son peuple. Ce n'est pas cela qui peut soulager l'angoisse de son âme. Les courtes pensées de Bildad ne peuvent sonder les profondeurs d'un homme comme Job.
    "Ceux qui te haïssent seront couverts de honte" , ajoute cet étrange consolateur (v. 22) Comme s'il pouvait y avoir quelque réconfort pour l'intégrité de Job, à voir les autres humiliés. Pour ceux qui sont de la trempe de Bildad, il pourrait y en avoir peut-être ? Mais pour celui qui marche dans la communion avec Dieu, jamais !
    Job a probablement senti chez Bildad ce désir de ne point faire de peine. Il lui en est reconnaissant. Et il est tout prêt à reconnaître que Dieu punit les méchants. Cependant les mots d'Eliphaz sont toujours en son cœur :"comment l'homme mortel serait-il juste devant Dieu ?" Et il les répète maintenant. Peut-être n'avait-il jamais pensé à cela auparavant ? Il savait seulement qu'il avait marché avec Dieu dans l'intégrité, et que Dieu l'avait honoré de son amitié. Dans une espèce d'obéissance, il avait offert des sacrifices pour le péché. Mais était-il justifié de ce chef ? Il n'en savait plus rien. Maintenant, les questions d'Eliphaz, avec leurs dards empoisonnés, ont pénétré dans le cœur de Job, ce qui tend à briser sa communion avec Dieu. Dès que la pensée se laisse absorber par les "comment ?" , l'expérience faite de la communion avec Dieu s'évanouit, se dissipe.  
    Pourquoi certaines gens veulent-il voir défini, expliqué, ce qui est indéfinissable ? Ne leur suffit-il pas d'accepter la parole de Dieu ? Et n'est-il pas douloureux de rencontrer cet élément de doute chez ceux qui sont chrétiens de profession ? Ne peuvent-ils pas laisser en paix ceux qui marchent avec Dieu, sans venir les troubler avec leurs questions ?
   C'est ici l'un des éléments de l'épreuve, de la souffrance permise pour purifier. Dans la douleur, l'âme va apprendre à donner raison de son espérance, avec humilité et douceur.
    "Si l'homme voulait discuter avec Dieu, il ne lui répondrait pas une fois sur mille. Dieu est souverainement sage. Qui a osé lui résister et s'en être bien trouvé,'' dit Job en réponse à Bildad. "Il peut transporter les montagnes, faire trembler la terre sur sa base, donner des ordres au soleil, étendre les cieux, marcher sur la mer, créer les étoiles. Il accomplit des merveilles qu'on ne peut ni sonder, ni compter. (v. 5-10) Qui pourrait s’opposer à lui ? Ou lui dire : que fais-tu ?" (v. 11-12) 
    Alors comment comment pourrais-je, moi Job, lui parler ou raisonner avec lui ? Quand même j'aurais raison, je n'oserais pas lui répondre. Car il est Dieu, et je ne suis qu'un homme...Quand même il se rendrait à mon appel, je ne croirais pas qu'il ait daigné entendre ma voix, lui qui fond sur moi comme une tempête, et multiplie mes blessures sans motif. Il ne me permet point de reprendre haleine, et me rassasie d'amertume." 'v. 14-18)
    D'après les paroles de Job, il semblerait qu'il ne connaissait pas encore Dieu comme celui qui parlait avec lui. Mais, il avait le sentiment intime de la présence de Celui devant lequel il marchait dans l'intégrité  de son cœur, fuyant le mal, craignant Dieu. Job ne pressentait pas que le chemin de la douleur allait aboutir à une révélation de Dieu, à une communion qui dépasseraient en intimité, en profondeur, tout ce qu'il avait jamais pu concevoir au temps de son bonheur.
     Pour l'instant, il est comme écrasé par le parallèle qu'il essaie d'établir entre Dieu et lui. "S'il s'agit de force, point d'espérance pour moi, s'il s'agit de droit, qui oserai- l’assigner ? Quand même je serai innocent, il prouverait ma culpabilité. Non ! point d'espérance pour moi, inutile d'essayer de me justifier, mon cas est désespéré. Aussi, je ne tiens pas à l’existence, je fais aucun cas de ma vie." (v. 19-22)
    "Tu as dit, Bildad, que Dieu ne renverse pas l'homme intègre. Or, quand je songe à sa toute puissance, et quand je vois comment il me réduit en pièces, je dis que c'est tout un. Puisqu'il n'y a point de justes devant Dieu, innocents et impies sont dans la même situation. En fait, il semble bien que Dieu se rie des épreuves qui atteignent l'innocent, et qu'il abandonne celui-ci au méchant. Si ce n'est pas lui, qui est-ce donc ?" (v. 23-24)
   Tu me dis : "Bon courage !" Mais si je veux oublier ma plainte...et reprendre ma sérénité, je suis effrayé de toutes mes douleurs, et la pensée que Dieu ne me tiendra pas pour innocent. (v. 28) Tu me dis que si je suis pur et droit, il agira en ma faveur. Mais que faire ? J'ai crié à lui pour qu'il me pardonne. Pourquoi me fatiguer en vain ? Quand je purifierais mes mains avec de la potasse, il me plongerait à nouveau dans la fange (v. 30-31)
    Il n'est pas un homme comme moi... pour que nous allions ensemble en justice. Il n'y a pas d'arbitre entre  nous. (Job sent de plus en plus sa misère devant Dieu, la distance entre le créateur et lui.) "Oh ! s'il y avait un arbitre entre nous, qui pose la main sur nous deux" s'écrit-il.
    Le besoin du cœur humain reste le même. Job, qui avait offert des holocaustes à Dieu et compris qu'ainsi, il lui était agréable, souhaite à l'heure de l'épreuve, un arbitre, un médiateur à qui il parlerait de Dieu et qui lui parlerait de Dieu.
    Quand la vie et l'immortalité furent manifestées par l’Évangile, l'homme comprit que Dieu avait déjà répondu à ce cri par le don de son Fils unique, venant en une chair semblable à la nôtre, lui, le médiateur entre Dieu et l'homme, le Christ Jésus. Il convenait qu'il fut semblable à ses frères en toutes choses, afin qu'il fut un souverain sacrificateur miséricordieux et fidèle dans le service de Dieu, pour faire l'expiation des péchés du peuple (Hébreux 11.17)
    A nouveau, Job proteste : "Qu'il retire sa verge de dessus moi...alors je parlerai et ne le craindrai pas ; autrement, je ne suis point à moi-même" (v. 34-35) Mon cœur ne redoute pas Dieu, dit Job, mais ses plaies m'accablent au point que j'en suis écrasé. "Mon âme est dégoûtée de la vie, il faut que je donne libre cours à ma plainte, je parlerai dans l'amertume de mon âme."
    "Je dis à Dieu, ne me condamne pas  ! Fais-moi savoir pourquoi tu me prends à partie. Te paraît-il bien de maltraiter, de repousser l'ouvrage de tes mains ?" (10.2-3)
    On pourrait donner à ce chapitre dix du livre de Job, ce titre:"Prière d'un malheureux lorsqu'il est abattu et qu'il répand sa plainte devant Dieu." (voir psaume 102 v. 1)
    Combien touchante est la plainte de Job : "Montre-moi pourquoi tu me prends à partie." Se pourrait-il faire que tu prisses plaisir à opprimer et à dédaigner l'ouvrage de tes mains. Vois-tu comme voient les hommes ? (v. 4) Essaierais-tu comme le font ces hommes, mes amis, de trouver en moi le péché, sachant que je ne suis pas coupable ?" (v. 5-7)
    Je suis entre tes mains, Seigneur ! Elles m'ont formé et tu me détruis...! Vas-tu, de nouveau me réduire en poussière ? (8-9) Tu m'as conservé par tes soins et sous ta garde. Cependant toutes ces souffrances les avais-tu  en ton cœur pour moi ?  (v. 11-13)
    "Je te connais Seigneur, et je sais que tu prends garde à l'iniquité. Si je pèche, malheur à moi! tu me traiterais avec rigueur. Suis-je innocent ? Je n'ose lever la tête, tant je suis rassasié de honte et absorbé dans ma misère. Si j'ose lever la tête, tu bondis sur moi comme le lion sur sa proie, et tu montre en moi ta merveilleuse puissance." (v. 14-16)
    O Dieu, ton indignation augmente...légion après légion se dressent contre moi. Pourquoi suis-je né ? Aucun œil ne m'aurait vu dans l’état où je suis. (v. 17-19)
    Mes jours ne sont-ils pas en petit nombre ? Ne me laisseras-tu pas respirer un peu, avant que je m'en aille dans le pays des ténèbres et de l'ombre de la mort, pays d'une obscurité profonde. (v. 20-22)

CHAPITRE SIX (11 à 14)

Tsophar prend la parole

"L'épreuve de votre foi, bien plus précieuse que l'or périssable, qui cependant est éprouvé par le feu." (1Pierre 1.7)

   "Suffit-il d'être un discoureur pour avoir raison ?" a demandé Tsophar.
  On suppose que cet homme était fort avancé en âge, le plus âgé des trois amis. Ce qui expliquerait la rudesse de ses paroles. Que Job ait osé plaider avec Dieu, provoque chez lui une vive irritation. "Oh ! Si Dieu voulait parler, dit-il, tu constaterais qu'il ne te traite pas selon ton iniquité." (11.1-12)
    Tsophar ne peut admettre que l'on parle à Dieu avec une telle hardiesse ! Job pourrait-il sonder les profondeurs de Dieu ? Concevoir la perfection de connaissance du Tout-Puissant ?
    Elle est plus haute que les cieux, plus profonde que le sépulcre, plus longue que la terre, plus large que la mer. Il connaît les hommes vicieux et discerne l'iniquité, même quand il ne la châtie pas immédiatement.
    Quelles dures paroles ! Et pourquoi les dire à son ami ? Puisqu'il prétend que l'homme sera intelligent quand le petit de l'âne naîtra homme.
    "Pour toi, dirige ton cœur vers Dieu. Étends vers lui tes mains, éloigne de toi l'iniquité, et ne laisse pas l'injustice habiter sous ta tente. Alors tu lèveras ton front sans taches, tu seras ferme et sans crainte."
    Comme Bildad, Tsophar suppose qu'il y a de l'iniquité dans le cœur de Job : "Examines-toi, fais le compte de tes voies, rejette le mal, alors tu oublieras tes souffrances. Elles seront comme l'eau qui s'écoule. Tes jours auront plus d'éclat que le soleil à son midi. Tes ténèbres seront comme la lumière du matin. Rien ne troublera ton repos." "Tu n'auras plus ces effroyables visions dont tu nous a parlé. Comme autrefois, tu seras encore le premier parmi ton peuple."
    Cette rude admonestation paraît mettre Job sur ses pieds et il y répond avec vigueur : "Vraiment ! On pourrait croire que le genre humain, c'est vous, et qu'avec vous périra la sagesse !" dit-il.
    Il arrive souvent que l'ami qui parle sans ménagements soit en bénédiction.
    Job a été blessé par les paroles sans bonté, sans mansuétude, d'Eliphaz. Il a laissé voir l'amertume de son cœur à l'écoute de ce discours. C'est l'amertume d'un homme qu'a déjà frôlé l'ange de la mort.
    Les aimables raisonnements de Bildad et son désir manifeste d'encourager Job, ont presque plongé celui-ci dans le désespoir, en le plaçant devant la toute puissance de Dieu, pour lequel aucun homme n'est juste. Alors Job, avait encore répandu son cœur devant Dieu et dit sa plainte, lui rappelant que ses jours étaient comptés et qu'il allait mourir.
    Mais le rude langage de Tsophar agit comme un tonique. Il provoque une vigoureuse réplique et réveille la foi qui semblait endormie. Il ranime en Job, la confiance que Dieu le portera, pendant tout le temps que durera l’épreuve.
    L'homme qui se croyait mourant, a plus de vigueur dans son âme qu'il ne le pensait lui-même. Le voici répondant à Tsophar avec la même rudesse que celui-ci a employée. "Vraiment, vous êtes le monde. A vous entendre, on pourrait le croire. Mais j'ai moi aussi de l’intelligence. Je ne vous suis pas inférieur. Et qui ne sait ces choses que vous dites ? Tsophar, tu fais de moi un objet de raillerie, moi qui, autrefois, en appelais à Dieu et à qui Dieu répondait. Le juste, l'innocent, un objet de raillerie ! Au malheur, le mépris ! C'est la devise des heureux." (12.1-5)
    "Interroge les bêtes, Tsophar, elles t'instruiront. Qui parmi elles ne sait.. que l’Éternel tient en sa main l'âme de tout ce qui a vie ?" (7-10)
    Tsophar a évoqué la grandeur de Dieu, mais la nature entière rend témoignage à cette grandeur. Comme l’oreille goûte les paroles et le palais les mets, ainsi Job, après avoir écouté son ami, n'a rien discerné qui s’appliquât à son épreuve dans le discours de celui-ci.
    "Vous dites que la sagesse est avec les vieillards, mais moi je vous dis que sagesse et puissance résident en Dieu." Le Dieu avec qui il a plaidé est celui qui fait toutes ces choses, selon sa propre volonté. Lui seul a de l’intelligence. Ce qu'il brise ne sera pas relevé. Ce qu'il enferme ne sera pas délivré. "Il retient les eaux et tout se dessèche, il les lâche et la terre est dévastée." En lui la force, en lui l'action. L’Éternel domine. Il maîtrise celui qui s'égare, ou fait s'égarer les autres. Il délie la ceinture des rois, il reverse les puissants, il prive de jugement les vieillards, il verse le mépris sur les grands. Il met à découvert les richesses cachées dans les ténèbres. Il donne de l'accroissement aux nations et il les anéantit. (10-25)
     Certainement, je veux parler au Tout-Puissant, je veux plaider ma cause devant Dieu. (13.3)
    Tsophar aurait voulu que Dieu parlât pour le confondre. Mais loin d'être effrayé par cette perspective, il désire de tout son cœur parler à Dieu. A nouveau, il dit à Tsophar qu'il ne lui est pas inférieur en connaissance de l’Éternel (v. 2) Ses amis sont venus pour le consoler, mais ils sont, en définitive, des médecins du néant. Que n'ont-il gardé le silence! "Vous ne forgez que des mensonges," leur reproche-t-il. Car ses amis l'accusent injustement, et de quelle utilité peut être le médecin qui n'est pas capable d'établir un diagnostic ? Que n'ont-ils avoué leur ignorance et gardé le silence. Je vous ai écoutés, leur dit Job, écoutez-moi, maintenant : "Direz-vous ce qui est injuste en faveur de Dieu, et pour le soutenir, allégueriez-vous des faussetés ?" S'il vous sonde, vous approuvera-t-il ?" Ses amis ne lui auraient pas parlé aux jours de sa prospérité comme ils le font maintenant alors qu'il est assis sur un tas de fumier et rejeté des hommes. Ne craignent-t-ils pas de tenir une telle conduite vis-à-vis d'un serviteur de Dieu ? "Vos sentences sont des sentences de cendre, vos retranchements, des retranchements de boue." Qu'ils se taisent donc, et lui, il parlera, quoi qu'il en puisse advenir. (13.1-13)
    Job, soutenu par sa foi, prend une résolution désespérée. Il prendra sa chair entre ses dents (expression encore employée aujourd'hui dans les pays où l'on parle arabe et qui signifie : se jeter au sein du danger) et il s'en remettra à Dieu. "J'exposerai ma vie, même s'il me tue, je ne cesserai pas d'espérer en lui. Je défendrai ma conduite devant lui, il sera mon salut." (13.14-16)
   Un impie n'oserait paraître en sa présence. Devant ses visiteurs, il va plaider sa cause. Bien qu'il ne puisse expliquer comment un homme peut paraître juste devant Dieu, cependant, il assure qu'il sera justifié.
    Et regardant ceux qui sont venus pour le consoler, il demande : "Quelqu'un oserait-il protester ? En ce cas, dans l'état où je suis, plutôt que de garder le silence, je préfère mourir." (17-19)
    Et il dit à Dieu : "Seulement accorde-moi deux choses et je ne me cacherai pas loin de ta face : Retire ta main de dessus moi, et que la terreur ne me trouble plus. Puis, appelle et je répondrai, ou si je parle, répond-moi." (20-23)
    Déjà, Job a parlé de cette terreur de Dieu. "Connaissant la crainte que l'on doit avoir de Dieu (la terreur de Dieu) dit l'apôtre dans sa lettre aux Corinthiens, nous essayons de persuader les hommes." Sans nul doute, il y a une révélation de Dieu, comme celui qui est terrible, dans sa Sainteté même pour les rachetés, afin que ceux-ci connaissent combien est haïssable le péché, et quelle pieuse crainte il faut avoir de Lui.
   "Quand tes terreurs sont sur moi, je suis troublé," s'écrit David dans la fournaise de l'affliction.
    "Quel est le nombre de mes iniquités et de mes péchés ? Fais moi connaître mes transgressions et mon péché." (ch. 13.23)
    Ses amis ont accusé Job d'avoir récolté ce qu'il a semé. Ils lui ont dit que son péché méritait bien plus que le châtiment qui l'atteignait. Et Job répand son âme devant Dieu, lui demandant qu'il lui fasse connaître quelles sont ses iniquités. Lui-même ne les découvre pas. Pourquoi cache-t-il sa Face ? Pourquoi le traite-t-il en ennemi ? Pourquoi le frapper comme une feuille agitée ? Ou le poursuivre comme la paille desséchée qui tourbillonne et que le moindre souffle jette de ci delà.
    Dans cette recherche de son péché, Job retourne au temps de sa jeunesse. Dieu le punirait-il pour ses fautes d'autrefois ? "Pourquoi mettre mes pieds dans les ceps et surveiller tous mes mouvements, prendre l'empreinte de mes pas ?  alors que mon corps tombe en pourriture, comme un vêtement que dévore la teigne !" Cependant, Job ne trouva point dans sa vie de transgressions, de péchés, qui aient provoqué les terribles châtiments dont il est l'objet.
   "L'homme, une fois mort, revivra-t-il ?" (ch; 14.14)
   La pensée de Job s'absorbe maintenant dans la fragilité de la vie humaine. Les mots qu'il emploie montre qu'il n'a pas ''de ferme assurance" concernant la vie à venir.
    Pour lui, il est au bord de la tombe : "Tes yeux seront sur moi, mais je ne serai plus." Le pays de l'ombre de la mort est pour lui un lieu d'épaisses ténèbres, les ténèbres même. "L'homme se couche et ne se relèvera plus...tant que les cieux subsisteront."
    Job avait marché avec Dieu et Dieu l'avait abondamment béni de biens temporels, mais c'est dans l'affliction qu'il apprendra ce que la prospérité ne lui avait pas enseigné. Car il semble bien que les vérités éternelles ne nous sont révélées qu'au moment où les choses de la terre nous échappent.
    "L'homme, sa vie est courte, comme la fleur, il est coupé, et c'est sur lui que tu as l’œil ouvert.  Et tu m'appellerais en jugement avec toi ! Comment d'un être souillé sortirait-il un être pur ?"
    Ainsi, Job reconnaît que l'homme, par sa nature même est impur. Ce que fait aussi David : "Tous sont égarés, tous sont pervertis, il n'est aucun qui fasse le bien, non pas même un seul!" (Psaume 14.3, lire aussi Romains 3.9-12) "Ce qui est né de la chair est chair." Point d'espérance pour l'homme naturel. Il lui faut naître de nouveau.
    "Oh ! Si tu voulais me cacher dans le séjour des morts, m'y tenir à couvert jusqu'à ce que ta colère fût passée, et me fixer un terme auquel tu te souviendrais de moi ! Mais si l'homme meurt, revivra-t-il ?" S'il avait l'absolue certitude d'une autre vie, c'est bien volontiers que Job supporterait les jours d'épreuves, jusqu'au moment de la délivrance. "Tu appellerais et alors je te répondrais, je saurais que tu languis après l'ouvrage de tes mains...Mais tu comptes mes pas, mes transgressions sont scellées en un faisceau..." (v. 14-17)
    "Les eaux courantes usent même la pierre", et lui, Job, est exténué par une épreuve accablante qui ne lui laisse aucun répit, aucune espérance. En une telle extrémité, un homme ne peut rien voir au-delà de sa peine : "Que ses fils soient honorés, il n'en sait rien ! Qu'ils soient dans l'abaissement, il l'ignore !" Il ne voit rien au-delà de sa douleur, et du deuil de son âme. (v.17-20) 


CHAPITRE SEPT (15,16,17)
Humiliation de Job

"Humiliez-vous sous la puissante main de Dieu afin qu'il vous élève quand il en sera le temps." (1Pierre 5.6)

    Eliphaz prend à nouveau la parole, et c'est pour accuser Job de ne pas avoir de crainte de Dieu et d'anéantir la piété : "Ses paroles même le condamnent, ses lèvres déposent contre lui." (1-6) Eliphaz emploie même le sarcasme, avec le malheureux que l'épreuve accable.
"Es-tu le premier des hommes ?"
"As-tu enfanté avant les collines ?"
"As-tu reçu les confidences de Dieu ?"
"As-tu dérobé la sagesse à ton profit ?"
"Que sais-tu que nous ne sachions pas ?"
"Quelle connaissance as-tu que nous n'ayons pas ?"
" Il y a parmi nous des cheveux blancs, des vieillards." (7-10)
  Eliphaz paraît croire que la vieillesse implique nécessairement la sagesse. Job s'imaginerait-il qu'il en sait plus que ses amis ; plus que nous ? Ce "nous" se trouve dans toutes les histoires humaines. "Il ne nous suis pas" disent les disciples à Jésus, bien des années plus tard.  
    La tradition, l'âge, la majorité ! Cela a bien quelque valeur, quelque poids. "T'imaginerais-tu prévaloir contre "nous tous ?" Où ton cœur t'entraîne-t-il ?...Quoi ! c'est contre Dieu que tu tournes ta colère ? Car Dieu est avec nous. Les consolations de Dieu que nous t'offrons te paraissent-elles peu de chose, ainsi que les paroles qui, doucement se font entendre ?"
    Puis Eliphaz répète ce qu'il a déjà dit : c'est que l'homme ne saurait être juste devant Dieu, pour qui, même les cieux ne sont pas purs. A combien plus forte raison l'être abominable et pervers, l'homme, qui boit l'iniquité comme l'eau.
    C'est ici l'écho des parles déjà dites, suggérées à Eliphaz par un esprit au cours d'une vision nocturne. Nous avons ici la preuve que les visions d'origine satanique n'entraînent pas l'affranchissement de la puissance du péché. Mais lorsque le Saint-Esprit révèle la vérité, c'est dans le but de délivrer le pécheur de cette servitude.
    De plus, remarquons que Satan emploiera volontiers une demi-vérité pour aveugler ceux qu'il retient captifs. Il est tout-à-fait satisfait qu'Eliphaz croie à l'entière corruption de l'homme tombé, si cela peut l'en gagner à y demeurer, et à continuer de "boire l'iniquité comme de l'eau". 
    Le message de l'évangile, ce qu'il offre pour l'homme déchu, c'est de faire de lui une nouvelle créature. L'homme est invité à prendre sa place en Christ sur la croix, à dépouiller le vieil homme qui est corrompu, et à revêtir l’homme nouveau... créé dans la justice et la sainteté
    En obéissance à l'enseignement qu'il avait reçu de Dieu, Job avait offert des holocaustes, des sacrifices. Il savait de quelle manière il pouvait s'approcher de Dieu, bien qu'il aurait été incapable de le dire dans le langage du Nouveau Testament. Ce que Job dit prouve qu'il sait bien ce qu'il de part sa nature. Mais il sait aussi qu'il avait accès auprès de Dieu. Il a en son cœur le témoignage d'avoir marché devant Dieu dans l'intégrité et la vérité. Il sait enfin que l’Éternel l'a gardé de tomber dans le mal.
    C'est cette confiance de Job que ses amis ne peuvent comprendre ni accepter, car son expérience et sa connaissance dépassent les leurs. Eliphaz va donc répéter à nouveau -d'après la tradition- quel est le partage du méchant, celui qui lève sa main contre Dieu :
    "Le méchant passe dans l'angoisse tous les jours de sa vie. La voix de la terreur retentit à ses oreilles. Il ne connaît pas le bonheur : il manque de pain. Il n'habite point une demeure paisible, il n'a point de richesses, il est comme ces arbustes dépouillés avant l'heure de la récolte. Bref, il n'y a pour lui que détresse, angoisse et ténèbres, parce qu'il a bravé le Tout-Puissant."
    Alors Job répondit: "J'ai souvent entendu pareilles choses, vous êtes tous des consolateurs fâcheux.'' (16.2)
    Pauvres consolateurs en vérité, que ces hommes pour leur ami dans la fournaise de l'affliction! "Si vous étiez à ma place et si j'avais votre âme à la place de la mienne, moi aussi je pourrai parler comme vous, et secouer la tête contre vous," dit Job.
    Il est facile, lorsqu'on n'est pas soi-même dans la fournaise, de discourir sur les souffrances des malheureux ! (Psaume 69.27)
    Ne peut donner les consolations de Dieu que celui qui les a expérimentées. C'est là le secret de la délicatesse pleine de tact de l'apôtre Paul, auprès des âmes dans l'affliction. Parce qu'il souffrait, il était capable de comprendre les souffrances des autres. "Si nous sommes affligés, c'est pour votre consolation et votre salut" écrit-il aux Corinthiens. Si nous sommes consolés, c'est pour votre consolation qui se réalise par la patience à endurer les mêmes souffrances que nous endurons. (2Corinthiens 1.6)
    "Cependant, si vous étiez à ma place, ajoute Job, j'essaierais de vous fortifier par mes paroles, je remuerais les lèvres pour vous consoler, non pas pour vous accabler et vous condamner. Je ne vous servirais point de lieux communs sur la grandeur de Dieu et la corruption de l'homme. Je ne vous dirais point que votre calamité est méritée."
    Et nous, en ce siècle ! Ne sommes-nous pas nous aussi des consolateurs fâcheux ? Bien que nous vivions à la lumière de l’Évangile, et que nous connaissions Celui qui a été rendu parfait par les choses qu'il a souffertes. Ils sont nombreux, ceux qui nourrissent au fond de leur cœur les mêmes pensées que les amis de Job. Le fait d'être indemne de la souffrance donne, pour eux, la preuve d'être en règle avec Dieu, puisque eux-mêmes sont gardés de l'épreuve. On entend dire : "Christ a porté nos douleurs...il a porté la croix pour que nous n'ayons pas à la porter..." Combien peu ont compris les desseins de Dieu, ses pensées profondes concernant l'extraordinaire sacrifice de son Fils bien-aimé sur le bois de la Croix.
    Le Christ a porté nos douleurs, il est vrai, mais c'est afin que nous puissions rentrer dans sa douleur concernant le monde et son peuple. Il a porté la Croix, c'est pour nous amener avec Lui dans la communion de ses souffrances, jusqu'à la Croix. Il nous a délivrés de nos propres fardeaux, pour que nous puissions partager avec Lui, selon notre mesure, le fardeau des âmes et achever les souffrances de Christ pour l'amour de l’Église qui est son Corps.
    Or pour ce service, il faut que nous soyons comme broyés, comme brisés, pour être débarrassés de notre dureté naturelle. Autrement, comment pourrions-nous travailler à relever et à fortifier ceux avec nous sommes en contact ?
    "Hélas ! Il m'a épuisé..." dit Job.
    "Tu a ravagé toute ma maison."
    "TU m'as saisi (chapitre 16.7-8) pour témoigner contre moi..."
    Job affirme à nouveau sa certitude d'être entre les mains de Dieu. "Que je parle ou non, mes souffrances ne seront point calmées,"dit-il. Oui, c'est, en dernière analyse, Dieu lui-même qui permet que mes amis me traitent ainsi, que je reste désolé, sans sympathie à l'heure de l'affliction. "Mon adversaire me transperce de son regard." Ici, Job désigne le grand adversaire, lequel se sert de ses amis pour l'accabler, car il ajoute : "Ils s'acharnent tous après moi."  (v. 10)
    Il est certain que l'adversaire fixe tout particulièrement ses regards sur l'âme qui est dans le creuset de la douleur. Il rend les yeux des autres plus perçants pour que ceux-ci constatent la moindre défaillance. C'est ce que dit le prophète Jérémie : "J'apprends les mauvais propos de plusieurs, l'épouvante est tout à l'entour. Accusez-le et nous l'accuserons ! tous ceux qui étaient en paix avec moi, observent si je chancelle." (Jérémie 20.10)
    Aucun serviteur de Dieu, s'il est fidèle, n'a encore échappé à cet aspect spécial de la fournaise ardente. "Tout le long du jour, ils tordent mes paroles," dit David, le chantre merveilleux du peuple d'Israël. C'est ainsi que nous apprenons ce qu'est la communion avec Christ, l'Homme de douleur. C'est de la sorte que nous sommes conduits en la ressemblance de l'Agneau.
    "Dieu me livre à la merci des impies."
    "Il me précipite entre les mains des méchants."
    "J'étais tranquille et il m'a secoué."
    "Il m'a saisi par la nuque et il m'a brisé."
    "Il a tiré sur moi comme sur une cible.
    "Ses traits m'environnent de toutes parts."
    "Il me perce les reins sans pitié...."
    "J'avais dit : -Qu'il n'épargne pas !- Il m'a pris au mot. Il me fait brèche sur brèche, et fond sur moi comme un guerrier." (v. 1-14)
    "J'ai cousu un sac sur ma peau."
    "J'ai roulé pas tête dans la poussière." (16.15) Littéralement : "J'ai roulé ma corne." La corne, symbole d'autorité, de puissance, de dignité, je l'ai roulée dans la poussière. Les pleurs ont altéré mon visage, l'ombre de la mort est sur mes paupières. Je n'ai cependant commis aucune violence, et ma prière est pure... Dès maintenant mon témoin est dans le ciel, mon témoin est dans les lieux élevés."
    Job garde cette constante assurance que Dieu connaît l'intégrité de sa vie, et qu'il le justifiera... Cette assurance provoque l'indignation des amis de Job. Oui mais que pouvait-il dire d'autre, sinon la vérité ?
    Job se détourne à présent de ses amis. Après tout, qu'importe ce qu'ils pensent ! Son esprit est épuisé, ses jours s'éteignent, le sépulcre l'attend. Quelle folie que de continuer à discuter avec eux. Il doit regarder à Dieu comme la cause première. C'est lui qui a fermé le cœur à l’intelligence. D'ailleurs, il a la certitude que Dieu ne les laissera pas triompher, triompher dans leur injuste condamnation !
    Mieux vaut encore qu'ils aient dit ce qu'ils pensaient, que d'avoir usé de flatteries. (v. 5 version autorisée anglaise) C'est Dieu qui a permis, qu'un homme marchant avec lui, soit devenu l'objet du mépris... Les hommes droits en sont stupéfaits... Cependant, le juste reste, demeure ferme dans sa voie. Même si le corps s'affaiblit, celui qui a les mains pures, se fortifie de plus en plus.
    "Quant à vous, mes amis, je ne trouve pas un sage parmi vous. Mes jours s'éteignent, mes projets sont anéantis, tout ce que mon cœur aimait ! Plus rien devant moi que la tombe, c'est dans les ténèbres que je dresserai ma couche. Je crie à la fosse : -tu es mon père ! Et aux vers, vous êtes ma mère et mes sœurs ! Mon espérance descendra vers les portes du séjour des morts, quand nous irons ensemble reposer dans la poussière."
    Peu à peu, Job cesse de se débattre pour désirer le repos. Aussi longtemps que nous nous débattons dans l'affliction, nous la prolongeons. Dieu désire que nous dressions notre couche dans les ténèbres. C'est-à-dire que nous reposions dans les ténèbres en comptant sur sa fidélité.
    Oh ! Âme qui te débats dans la douleur sous la puissante main de Dieu, prends ta place dans la poussière, et reconnais, que par ta nature, tu es corrompu.
    Dieu veille sur toi dans ces épaisses ténèbres où il t'a conduite. Là, demeure dans le repos et le calme. Toi qui craint Dieu, et marche dans l'obscurité, assure-toi en Lui, n'essaie pas d'allumer un feu par tes propres efforts, attends ! Et tu seras bénie des bénédictions "des meilleures eaux qui sont en bas...bénédictions qui prévaudront jusqu'aux extrêmes limites des collines éternelles." (Deutéronome 33.14-15-16)

CHAPITRE HUIT (18-19)

Second discours de Bildad - Accents prophétiques de Job

"Je le vis... et il me dit : ne craint point."  (Apocalypse 1.17-18)

    Bildad ne peut dissimuler sa mauvaise humeur à l'ouïe du langage énergique de Job ! Vraiment, celui-ci ne garde plus aucune mesure : il compare ses amis à des bêtes, à des brutes, alors que lui-même se laisse aller à la colère  ! "Mais la lumière du méchant s'éteindra" assure-t-il sans bien réaliser en son cœur, peut-être, les paroles prononcées.
    A nouveau, il décrit le sort du méchant. Les images de son discours montre la pauvreté de ses expériences : "La lumière du méchant s'éteint ; il est pris au piège par le talon, le filet le saisit, cordeau et trappe sont sur son sentier, les terreurs l'assiègent, la faim le consume. Nul des siens n'habitera sa tente, et le soufre sera répandu sur sa demeure. Il sera oublié, son nom ne passera pas à la postérité. Il n'aura point d'influence sur ses contemporains, on le chassera, il ne laissera pas de postérité. Point d'autre sort pour qui ne connaît pas Dieu (v. 1-19) Bref, les générations à venir seront épouvantées de sa ruine, comme le sont aussi ses contemporains, devant les malheurs qui le frappent."
    Il est évident que, pour Bildad, c'est la prospérité qui donne la preuve de la bénédiction de Dieu et de lui être agréable. Le bonheur dans la famille, un nom dans le village ou la ville que l'on habite, une vie heureuse. Il est donc inévitable qu'il se méprît sur les causes du malheur qui avait atteint Job. Il lui était impossible de comprendre comment Dieu pouvait permettre de si terribles épreuves pour un serviteur fidèle.
    Job dit alors : "Jusques à quand, Bildad, affligeras-tu mon âme ?" Il a discerné que tous les discours sur le méchant s'adressent à lui, en définitive. Il s'étonne que ses amis n'aient point de honte à le traiter comme ils le font. "Si j'avais péché, j'en serai seul responsable. Pensez-vous faire la preuve de ma culpabilité en me traitant ainsi ?"
    Toutefois, comme il a manifestement blessé Bildad, il va essayer à nouveau d'exposer son cas, afin que ses amis jugent eux-mêmes s'ils le traitent avec droiture et bonté. (Chapitre 19)
    Bildad dit que le méchant est pris par le filet de sa méchanceté. Eh  bien, ce n'est pas mon cas ! "Sachez que c'est Dieu qui me poursuit et m'enveloppe de son filet. Vous m'exhortez à chercher Dieu. Je le fait sans résultat. J'implore justice et point de justice ! C'est Dieu qui m'a fermé toute issue, et a répandu les ténèbres sur mes pas. C'est Dieu qui m'a dépouillé de ma gloire et qui a ôté la couronne de ma tête... Il m'a brisé de toutes parts. Il m'a arraché comme un arbre. C'est lui qui éloigne de moi mes frères, mes amis, de sorte que je suis laissé seul avec ma douleur." (6-13)
    "Je suis abandonné de mes proches ; je suis oublié de mes intimes..." eux qui étaient si heureux de venir ma voir aux jours de ma prospérité, de manger mon pain, de séjourner chez moi ! Même mes serviteurs me traitent en étranger ! Si je les appelle, ils ne répondent pas. Mon humeur est odieuse à ma femme, et ma plainte aux fils de mes entrailles. Même des jeunes enfants me méprisent. Si je me lève, ils parlent contre moi.
    Bien plus douloureux encore ! Les gens de mon conseil, mes confidents, m'ont en horreur ! Ceux qui, je le pensais, me seraient fidèles et ne m'abandonneraient jamais quoi qu'il arrive, ceux-là même se sont tournés contre moi ! Y a-t-il un homme dont l'état soit aussi pitoyable que le mien ?
    Qu'ai-je encore ? Mes amis, regardez-moi ! Il ne me reste que la peau des dents !
    "Ayez pitié, ayez pitié de moi, vous mes amis ! Car la main de Dieu m'a frappé." 
    La main de Dieu ! Job était loin de soupçonner ce qui c'était passé dans le ciel. Il ne savait rien du défi de Satan, disant à l'Éternel : "Étends ta main, touche à ses os et à sa chair et je suis sûr qu'il te maudira en face." 
    Dieu avait accepté le défi. Il avait comme livré entre les mains de l'adversaire, son fidèle serviteur. Malgré cela, Job n'a pas renié son Dieu. Il a pleuré, il a gémi, il s'est débattu dans la douleur et sous les coups de l'affliction. Mais sa loyauté vis-à-vis de Dieu n'a pas été atteinte , elle est restée intacte, bien qu'il croit que c'est Dieu qui le frappe. Il ne comprend pas les dispensations de l'Éternel à son endroit, et pourquoi Dieu semble le juger. Ce qu'il sait bien, c'est que sa conscience est claire, nette. Il devrait donc trouver pitié et sympathie auprès de ses amis 

Vision prophétique de Job

"Mais je sais que mon Rédempteur est vivant,
"Et qu'il se lèvera au dernier jour sur la terre,
"Après, je me réveillerai, bien que ce corps soit détruit,
"Quand je n'aurai plus de chair, je verrai Dieu,
"Je le verrai et il me sera favorable."   (19.25-26)

    Job est sur le tas d'immondices en dehors de la ville, en apparence oublié de Dieu. Les hommes méprisent cette pauvre épave, ce misérable squelette que dévore la maladie, cet homme, qui était il y a encore peu de temps, prince et chef parmi son peuple.
    Persécuté, il le supporte, calomnié, il supplie. "Devenu comme les balayures du monde et le rebut de tous, voici ce misérable qui éclate en un cantique de foi triomphante : il a maintenant la glorieuse assurance que, même si son corps est détruit, il verra Dieu.
    L'esprit de Job brise enfin ses chaînes, et il émerge en pleine lumière. Son Rédempteur (son Vengeur) est vivant. Au dernier jour il se lèvera sur la terre.
    "Qu'importe  si les vers détruisent ce corps, je verrai Dieu," s'écrie Job. Je verrai qu'il est pour moi et qu'il me sera favorable. "Oh ! Combien mon âme se consume au dedans de moi, dans l'ardente espérance de ce jour !" (27)
    Peu auparavant Job avait dit : "L'homme revivra-t-il ?" Et voici que ses lèvres viennent de formuler la réponse. Non seulement, il a discerné les choses à venir pour sa propre consolation, mais poussé par le Saint-Esprit, il a prophétisé la résurrection, et annoncé le retour glorieux du Rédempteur crucifié.
    L'apôtre Paul a souvent parlé de l'Évangile, comme manifestant les desseins éternels (Ephésiens 3.11) ou révélant le mystère caché pendant les siècles (Romains 16.25) Il a annoncé la sagesse mystérieuse et cachée, destinée pour notre gloire avant les siècles (1Corinthiens 2.7) et enfin manifestée par l'apparition de notre Sauveur Jésus-Christ... qui a mis en évidence la vie et l'immortalité par l'Évangile. (2Timothée 1.10)
    Toutefois, déjà sous l'Ancienne Alliance, il était arrivé que le voile fût momentanément levé, et le silence rompu sur les desseins de Dieu, en faveur de quelques saints vivant tout près de Lui. Car il y a eu des saints prophètes depuis le commencement du monde.
    Il est écrit que l'Évangile fût prêché à l'avance à Abraham. L' Esprit l'a aussi révélé à Job. Pas aussi clairement qu'il fût révélé à Paul, mais assez clairement, cependant, dans la mesure de sa communion avec Dieu.
   Il semble que ces anciens prophètes furent enseignés de Dieu, surtout par les expériences et les circonstances de leurs vies.
    Très probablement, Job n'aurait pu expliquer toute la signification du sacrifice par lequel l'homme pouvait s'approcher de Dieu. Il en avait vu les effets dans sa vie. A présent, dans la fournaise de l'épreuve, réduit à l'extrémité, il saisit de façon expérimentale la foi en la résurrection.
    C'est aussi à l'heure tragique de l'épreuve suprême que la foi d'Abraham gravit ce nouveau degré vers Dieu : "Il offrit Isaac... il offrit son fils unique, lui qui avait reçu les promesses... pensant que Dieu est puissant, même pour ressusciter les morts."  (Hébreux 11.8-17)
   C'est encore cette foi communiquée par Dieu qui rendit capables des faibles femmes de supporter les moqueries, le fouet, les chaînes, la prison et de ne point accepter la délivrance, afin d'obtenir une meilleure résurrection (Hébreux 11.35-36)
     C'est cette foi en la résurrection que le Seigneur veut éveille dans le cœur de Marthe, auprès du tombeau de son frère Lazare. C'est cette foi qui se grave plus profondément dans le cœur de Paul, quand, lapidé, il désespère même de la vie, lors de la persécution en Asie.
    Ainsi, au cours des âges, nous trouvons la foi en la résurrection, aux heures de soumission entière et de sacrifice total à la volonté de Dieu. L'heure de l'angoisse et de la souffrance suprême paraît être celle où l'esprit humain peut briser ses chaînes et pénétrer dans le royaume de la lumière et de la connaissance de Dieu, d'une manière impossible jusque là.
    Il en fut ainsi pour Job. Dans le creuset d'une épreuve sans parallèle, au sein d'une épouvantable souffrance, n'ayant plus que la peau des dents, comme il le dit lui-même, c'est en cette extrémité qu'il s'écrit : "Je sais que mon Rédempteur est vivant."  Et voici, son âme est remplie de l'ardent désir de rencontrer son Sauveur, de le voir face à face. Il sera son Ami, il lui sera favorable. 
    Puis, ses yeux se reportant sur ceux qui l'entourent, il dit qu'il y aura un jugement. La justice de sa cause sera reconnue. "Vous direz alors, pourquoi le poursuivions-nous ? Craignez pour vous le glaive. Les châtiments par le glaive sont terribles !" (28-29)

(fin de la première partie)


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